jeudi 22 décembre 2011
Lettre de protestation des Moines de l'Athos.
COMMUNIQUE DE LA COMMUNAUTE SACREE DE LA SAINTE MONTAGNE DE L'ATHOSKaryes, le 30 décembre 2006La récente visite du Pape Benoît XVI au Patriarcat Œcuménique à l’occasion de la fête de Saint André (30 novembre 2006) et ensuite la visite de sa Béatitude l’Archevêque d’Athènes Christodoulos (14 décembre 2006) ont soulevé une multitude d’impressions, d’analyses et de réactions. Nous ne nous attarderons pas sur ces choses que la presse du monde a jugé positives ou négatives, pour nous centrer sur ces choses qui ont trait à notre salut, salut pour lequel nous avons abandonné le monde pour vivre dans la solitude aride de la Sainte Montagne.En tant que moines de la Sainte Montagne, nous respectons le Patriarcat Œcuménique, juridiction à laquelle nous appartenons. Nous honorons et vénérons le Très Saint Patriarche Bartholomé et nous nous réjouissons de tout ce qu’il a accompli et fait diligemment pour l’Eglise, et ce par amour pour Dieu. Nous sommes particulièrement concernés par l’imperturbable et infatigable défense du Patriarcat œcuménique, au milieu des nombreuses conditions défavorables qui règnent, ainsi par la situation des églises orthodoxes locales appauvries, tout comme du soin qui est mis pour annoncer au monde entier le message de l’Eglise orthodoxe. De surcroît, nous, Moines de la Sainte Montagne, honorons la Très Sainte Eglise de Grèce, dont nous sommes pour la plupart issus, et nous respectons Sa Béatitude [Christodoulos].Toutefois, les événements qui prirent place durant les récentes visites, du Pape au Phanar et de Sa Béatitude l’Archevêque au Vatican, nous ont profondément peinés.Nous désirons tout au long de notre vie lutter pour conserver la confiance des Saints Pères qui nous fut léguée par les Saints Fondateurs de nos sacrés Monastères et par les bienheureux pères endormis avant nous. Nous nous efforçons de vivre au mieux le mystère de l’Eglise et la Foi Orthodoxe immaculée, conformément à ce que nous enseignent quotidiennement les divins Offices, les écritures sacrées et les enseignements des Saints Pères qui sont présentés à travers leurs écrits et dans les décisions des Conciles œcuméniques. Nous préservons notre conscience dogmatique comme « la prunelle de nos yeux », et nous l’affermissons en nous attelant aux travaux qui plaisent à Dieu et en étudiant méticuleusement ce que firent les saints Confesseurs de la foi quand ils affrontèrent les diverses hérésies ; parmi ces saints Pères, nous pensons particulièrement à Grégoire Palamas, aux Saints Martyrs de la Sainte Montagne et au Saint Martyr Côme le Premier, dont nous vénérons pieusement les reliques et dont nous célébrons incessamment la mémoire sacrée. Nous craignons de demeurer silencieux chaque fois que survient un problème qui a trait à la confiance que les Pères ont mis en nous. Notre responsabilité à l’égard des très vénérables pères et frères de la Sainte Montagne entière et à l’égard des pieux fidèles de l’Eglise qui considèrent le monachisme athonite comme le gardien inflexible de la sainte Tradition, pèse lourdement sur notre conscience.Les visites du Pape au Phanar et la visite de l’Archevêque [d’Athènes] au Vatican ont peut-être garanti certains bénéfices « selon le monde » ; cependant, durant ces visites, survinrent plusieurs événements qui n’étaient pas conformes aux usages de l’ecclésiologie orthodoxe; des engagements, qui ne bénéficieront ni à l’Eglise orthodoxe ni aux autres Chrétiens hétérodoxes, furent pris.Premièrement, le Pape fut reçu comme s’il était l’évêque canonique (véritable) de Rome. Pendant l’office, le Pape porta une omophore; le Patriarche œcuménique s’adressa à lui avec la salutation : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur » comme s’il s’agissait du Christ Notre Seigneur; il bénit les fidèles rassemblés et fut commémoré en tant que « très saint » et « Sa Béatitude l’Evêque de Rome ». En outre, tout le clergé du pape qui officiait [le terme officier n’est peut-être pas exact car à priori le clergé papal assistait] portait une omophore pendant la liturgie orthodoxe ; par ailleurs, la récitation de la Prière du Seigneur, son baiser de paix avec le Patriarche, furent des manifestations de quelque chose qui allait au-delà de la prière commune. Et tout cela, alors que l’institution papale n’a pas changé un iota à ces enseignements hérétiques et à sa politique ; au contraire, le Pape, en fait, promeut visiblement et tente de renforcer l’Unia, en même temps que les dogmes papistes sur la primauté et l’infaillibilité, et va encore plus loin, avec des prières communes entre personnes de fois différentes; c'est l’hégémonie pan-religieuse de Rome qu’on peut discerner dans tout cela.En ce qui concerne la réception du Pape au Phanar, nous sommes particulièrement peiné par le fait que tous les média n’ont cessé de répéter la même information incorrecte : que les psaumes qui furent (illégitimement) chantés à ce moment avaient été composés par des moines de la Sainte Montagne. Nous profitons de l’occasion pour informer les pieux chrétiens orthodoxes que le compositeur n’était pas, et ne pourrait jamais être, un moine de la Sainte Montagne.Ensuite, il y a la tentative de sa Béatitude l’Archevêque d’Athènes d’initier des relations avec le Vatican sur des questions sociales, culturelles et bioéthiques, ainsi que l’objectif de défendre ensemble les racines chrétiennes de l’Europe (de telles positions se trouvent aussi dans la déclaration commune du Pape et du Patriarche au Phanar); ces deux propositions peuvent sembler inoffensives voire même positives, vu que leur objectif est d’entretenir des relations humaines positives. Néanmoins, il est important que tout cela ne donne pas l’impression que l’Ouest et l’Orthodoxie continuent d’avoir les mêmes bases, ou ne conduise à oublier la distance qui sépare la Tradition Orthodoxe de ce qu’on présente habituellement comme « l’Esprit européen ». L’Europe « occidentale » porte le fardeau d’une série d’institutions et d’actes anti-chrétiens, tel que les Croisades, la « Sainte » Inquisition, la traite des esclave et la colonisation. Elle porte le fardeau de sa division tragique qui prit la forme du schisme protestant, des guerres mondiales dévastatrices et aussi de l’humanisme anthropocentré et de l'athéisme. Toutes ces choses sont les conséquences des déviations théologiques de Rome par rapport à l’orthodoxie. L’une après l’autre les hérésies papiste et protestante ont progressivement ôté l’humble Christ de l’Orthodoxie et à sa place, ont mis sur le trône l’Homme Hautain. Le saint évêque Nicolas d’Ohrid et de Jicha écrivit suite à Dachau : « Alors, qu’est-ce que l’Europe? Le Pape et Luther… Voilà ce qu’est l’Europe, intimement, ontologiquement et historiquement ». Le Bienheureux Père Justin Popovitch renchérit : « Le Concile de Vatican II inclut la renaissance de toutes les formes de l’humanisme européen… car le Synode a persisté dans son adhésion au dogme de l’Infaillibilité papale » et il ajoute : « Sans aucun doute, les autorités et les pouvoirs de la culture et de la civilisation (ouest) européennes sont des expulseurs-du-Christ ». C’est pour cela qu’il est si important d’annoncer l’humble morale de l’Orthodoxie et de soutenir les vraies racines chrétiennes de l’Europe unie ; les racines que l’Europe eut au premier siècle du Christianisme durant les temps des catacombes et des sept saints Conciles œcuméniques. Il est souhaitable pour l’orthodoxie de ne pas se charger des péchés des autres; de plus, à tous ceux qui se sont déchristianisés en réaction au fourvoiement du christianisme occidental, il ne faudrait pas donner l’impression que l’Orthodoxie lui est lié [au christianisme occidental] cessant par là de témoigner qu’il s’agit de l’authentique Foi en Christ et de l’unique espérance des peuples d’Europe.Les Catholiques romains se sont révélés incapables de s’extraire tous seuls des décisions de leurs conciles successifs (et selon eux Œcuméniques), qui ont légitimé le Filioque, la Primauté du Pape, l’Infaillibilité du Pape, l’autorité « politique » du Pontife romain, la « Grâce créée », l’Immaculée conception de la Sainte Mère de Dieu, l’uniatisme. En dépit de tout cela, nous, Orthodoxes poursuivons les soi-disant traditionnels échanges de visite, accordant les honneurs dû à un évêque orthodoxe au Pape et ignorant totalement une série de canons qui interdisent les prières communes; pendant ce temps, le dialogue théologique bredouille de façon répétée, et, après avoir été ramené des profondeurs, coule à nouveau.Toutes les indications conduisent à la conclusion que le Vatican ne s’oriente pas vers un rejet de ses doctrines hérétiques, mais uniquement vers leur réinterprétation – en d’autres mots, vers leur dissimulation.L’ecclésiologie catholique romaine varie d’une encyclique à une autre; depuis la soi disant ecclésiologie « ouverte » de l’Encyclique «Ut Unum Sint» jusqu’à l’exclusivisme ecclésiologique de l’Encyclique «Dominus Jesus». Il convient de remarquer que ces deux vues [ecclésiologiques] sont contraires à l’ecclésiologie orthodoxe. La conscience que la Sainte Eglise Orthodoxe a d’elle-même en tant que l’unique église Une, Sainte, Catholique (selon le tout) et Apostolique n’autorise pas la reconnaissance d’autres églises hétérodoxes et d’autres confessions chrétiennes en tant qu’ « églises sœurs ». Seules les Eglises locales orthodoxes de la même foi sont des « Eglises Sœurs ». Aucun autre usage du terme « églises sœurs » n’est théologiquement admissible.Le « Filioque » est promu par le camp catholique romain comme une expression légitime de l’enseignement sur la procession de l’Esprit Saint, et présenté comme théologiquement équivalent à la doctrine orthodoxe selon laquelle cette procession « est du Père seul » - une opinion [celle du Filioque équivalent à l’enseignement orthodoxe] hélas défendue par certains de nos propres théologiens.De plus, le Pontife continue à présenter sa Primauté tel un privilège inaliénable tel qu’on peut le voir à travers le récent abandon du titre de « Patriarche d’Occident » par l’actuel Pape Benoît XVI; cela apparaît aussi à travers sa mention de la mission universelle de l’Apôtre Pierre lors de son homélie dans l’église du Patriarche ainsi qu’à travers un récent discours qui incluait la phrase suivante : « …au sein de la société, avec les Successeurs des Apôtres, dont l’unité visible est garantie par le Successeur de l’Apôtre Pierre, la communauté ukrainienne catholique est parvenue à préserver vivante la Tradition Sacrée, dans toute son intégrité » Catholic Newspaper, No.3046/18-4-2006). L’Unia est à nouveau affermie et assurée par des voies diverses et variées, en dépit des dénégations du Pape. Témoignent de cette position malhonnête, parmi d’autres exemples, l’intervention provocatrice du précédent Pape, Jean-Paul II, qui conduisit le dialogue catholico-orthodoxe de Baltimore au désastre, ainsi que la lettre envoyée par le Pape actuel au Cardinal Ljubomir Husar, l’Archevêque uniate d’Ukraine. Dans cette lettre datée du 22-02-2006, il est mis l’accent sur la chose suivante : « Il est impératif d’assurer la présence des deux grands porteurs de l’unique Tradition (le latin et l’oriental)… La mission que l’Eglise Gréco-catholique a entreprise, en étant en pleine communion avec le Successeur de l’Apôtre Pierre est double : d’une part, elle doit préserver de façon visible la tradition orientale dans l’Eglise catholique ; d’autre part, elle doit favoriser la fusion des deux traditions, témoignant qu’elles peuvent non seulement se coordonner entre elles, mais qu’elles constituent aussi une union profonde dans leur variété ». Vu sous cet angle, les échanges polis telles les visites du Pape au Phanar et celle de l’Archevêque d’Athènes au Vatican, sans le pré-requis de l’unité dans la Foi peuvent créer d’une part l’impression d’une fausse unité et ainsi éloigner les hétérodoxes qui auraient pu se tourner vers l’Eglise orthodoxe voyant en elle la vraie Eglise; d’autre part ils peuvent émousser la conscience dogmatique de nombre d’orthodoxes. Plus encore, elles peuvent pousser certains pieux fidèles orthodoxes, particulièrement inquiets de ce qui se passe de façon inopportune et en contradiction avec les Sacrés canons, à quitter l’Eglise et à créer de nouveaux schismes.Ainsi, avec des sentiments d’amour pour notre Orthodoxie, mais avec un sentiment de douleur en voyant ce qui a trait à l’unité de l’Eglise et dans le but de préserver la Foi Orthodoxe pure de toutes les innovations, nous proclamons au monde entier ce qui fut proclamé par l’Extraordinaire, Double, Sainte Assemblée de notre Sacrée Communauté de la Sainte Montagne le 9/22 avril 1980 :« Nous croyons que notre Sainte Eglise Orthodoxe est l’Eglise du Christ Une, Sainte, Catholique et Apostolique, possédant la plénitude de la Grâce et de la Vérité, et pour cette raison, une succession apostolique ininterrompue. A l’inverse, les « églises » et « confessions » de l’Ouest, ayant distordu la foi de l’Evangile, des Apôtres et des Pères en bien des points, sont privées de grâce sanctifiante, de véritables mystères et de succession apostolique…Les dialogues avec les hétérodoxes –s’ils ont pour but de les informer sur la Foi orthodoxe afin qu’ils puissent revenir à elle quand ils ont reçu l’illumination divine et que leurs yeux ont été ouverts- ne sont pas condamnés. En aucune façon un dialogue théologique ne devrait être accompagné de prières communes, de participation à des assemblées liturgiques et au culte par les deux bords ainsi que de toute autre activité qui donnerait l’impression que notre Eglise Orthodoxe reconnaît l’Eglise romaine comme étant pleinement une Eglise et le Pape comme étant l’évêque canonique (véritable) de Rome. De telles actions égarent les orthodoxes aussi bien que les fidèles catholiques romains auxquels est donnée une fausse impression de ce que l’orthodoxie pense d’eux…Avec la Grâce de Dieu, la Sainte Montagne demeure fidèle – tout comme le peuple orthodoxe du Seigneur- à la Foi des Saints Apôtres et des Saints Pères, et aussi à l’amour dû aux hétérodoxes qui sont surtout aidés quand les orthodoxes, fermes dans leur position, mettent en exergue l’étendue de leur maladie spirituelle [la maladie des hétérodoxes] et la façon dont ils peuvent être guéris.Les tentatives d’union avortées du passé nous enseignent que pour une union permanente conforme à la volonté de Dieu, dans la Vérité de l’Eglise, il est requis au préalable un type de préparation et de cheminement différent de ceux qui furent suivis dans le passé et sont suivis jusqu’à nos jours » Par tous les Représentants et Supérieurs de l’Assemblée commune des vingt Sacrés Monastères de la Sainte Montagne de l’Athos.
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