jeudi 18 décembre 2014

Ballade des âmes. Le Paradis. Version corrigée.

CHANT  TROIS    

           

                                                                                   LE       PARADIS                                                                                                                                                          NOTRE DIEU EST AU CIEL,                                                                   IL FAIT TOUT CE QU’IL VEUT.                                                                                            Ps. 115, 3.        

                                                                                                                                                    A TOUS LES SAINTS DU CIEL DESDIE,                                                                     QUE PAR LEUR SAINTE PRIERE ILS NOUS PORTENT,                                                                                    QUI FAIT TOUT CE QU’ELLE VEUT.          

            Avez-vous vu, amants, avez-vous vu leurs Ames? Ils ont quitté rivage, aux grèves d’oriflammes, Folle de vie; en nef de mort, leur jour dérobent;   Poupe au Levant tournée, la rame en voile monte, Voile en manteau de prière, jusqu’où la mer Sur tous se referme; y ondulent ses escarpes;   Au palanquin des eaux, le sang n’est plus si rouge; Résédas, lyserons, shintz à son coeur, l’en ornent; A Noces d’or, Dieu ! grand' favorite l’on mène;   Qui L’aime, avec lui marche Dieu. Qui, au secret, Juste se fait, Christ de Ses eaux le lave, épure; Au Déluge, Esprit met l’arc-en-ciel en Nuée;   Las, en terre ont laissé ceux qui leur bonheur pur Partager n’eussent su, ni leur souffle en baiser, En haute mer mener, à l’horizon jointive;   Se pourraient-ils déjoindre, s’ils ne se discernent? De poussière d’étoiles une même nuit Désennuie mer et ciel; à leur reflet s’ajointent ;   Ton Ange les accompagne; ses voies sont sûres; Larmes, au rayon vert guidés, des anses saintes! En comète sacrée, marine a ciels limpides.   Alizés propices en tous sens y agite, Sous Tes Zéphyrs ils ondoient, ses bons Vents sont saufs; Si se profilent brisants, les changes d’amure;   En la mâture, as exhalé faveur d’Amour; Au rinceau de nos coeurs, coque en fusion ne plie; Au pays de l’Aimé  porte amants le vaisseau;   Sous Ta Lumière, ils font route; cinglent au large; La mer son tulle irise. Dieu! Quelle Beauté! L’ai-je donc rêvé? Non, ces Noces bien advinrent;   Toi! qui d’algues bleues nouas l’Ame aux  noeuds du voile! Dont franges aulx quatre coins de terre en mis, angles Où Ton fil, d’Azur Tu brodas, Gaze en turquoise,   Qu’en dais nuptial, sur la mariée, posas, Qu’au Palais de saphir, voile couvre d’Amour, Dont Tu nous borderas, quand serons en linceuls!   Lors, les vêt l’anneau d’épithalame, manteau Fleurdelisé de l’ancolie, près l’île heureuse D’Amour parfait; en nef d’Amour, les mène en Gloire;   Comme d’Occident en Orient vont les Astres, Amour, aux pourpris du Palais, mène les âmes; Et c’est à l’Orient qu’éclate Sa splendeur!   “Enamourée, joyeuseté, m’en vais périe; D’Amour ne suis laissée, ses débords m’emportèrent, Fors Sien baiser, à Ses lèvres retient mon âme”;   Au gré vont du rebond, des lames de haut-fonds; Or, si tôt départis, par voie des airs, relâchent; Aux avant-ports de Désirade est leur mouillage;   A leur chaîne s’amarre Liberté d’En-Haut; Y ondoie la lune; elle, oh! à leurs doigts s’effile, Qui leur semblait si loin, tout près, d’avoisinance;   Qui, de chaîne d’ancre jetée, au navie d’Ame Intérieure arrimé demeure, un jour parvient, Au plus profonds du coeur, au point d’inconnaissance;   A mi-cercle, de lune d’eau, en cycloïde Réflection, tourne Ta roue sans loi, parfaite, En lune du coeur, sans éclipse, dans son cercle;   Au visage nous regardes, d’un seul regard Tien, verses en l’Ame ennoblie, si vile n’est, Fleur de Sceau de Lumière, en cire d’estampille;   Amant du Christ, l’être à cire est fait le semblable, De Sceau Tien de Justice, en perle au monde, digne Receleur, de souffrance issu, qu’au front, Dieu Pose;   Ta Fiancée! ce Sceau, au coeur pris du Seigneur, Qui son coeur fit, et son Amour, plus fort que mort. Car, éteindre l’Amour, les grandes eaux ne peuvent;   Aux cerisiers où s’embrassaient les amants, Ce même temps pleurions, où vînmes complaignants; D’en l’amoureuse vie, pleurs en Toi nous transirent;   En fleurs son Ame, à la passion grandit cypres; Y a pleuré sa chair; y a pleuré sa mort. Aux cerisiers de Pâque, pleure joie de l’Ame;   Si tant sublime est l’amour qu’à la fiancée Porte le fiancé, que de plus haute Amour L’aime encore Dieu de belle Amour précieuse!   Tant qu’à Abraham, l’arrachement de l’épouse, A bu l’aimé ce qu’il lui en coûta de larmes; Enserrée sirène, en chambre gondolière!   Or nous, qui sous cette onde étions enterrée, Aux vanités de la terre y dormîmes-nous? De vains madrigaux aux notes renés qui s’aiment;   D’où cascades en mers, ouragans sur la grève, En rocailles s’ouvrent, aux grottes du connaître; Que s’y rie le jour, lui appartient la veille;   Comme en Ta nudité se cherche vérité, Par Tes berges en noyés nous laissons rouler, A fonds de barque étendus de la vie sous Toi;   En nous vit Christ; où nous ne voudrions nous mène; Nous fait paix jaillir; a joie, des vertus, l'arôme; Mais, au nard de myrrhe, en vertu, tous parfums entrent;   A la Face de l'Oint, par larmes s’en  épanchent; Ô joie nuptiale ! Myrmidons, n'en savez rien. L'Epoux mon coeur a pris. Du Sien promit l’aurore.   D'aimer à grand deuil, Lui, fait aimer à grand' joie. Sur Ses mains Il porte : c'est flèche d'ascension. En cet envol Il Presse; elle, à Son Sein, repose.   Ce qu’ell’ possède, fuit; plus haut, tous jours, désire. L’archer arme à gauche; de Sa droite l’étreint; A son côté, blessure elle porte d’Amour;   Pleure sa vie; jusqu’à mourir, en pleurera; A ce signe, Seigneur, les Tiens reconnaîtras; Et Ta paix leur donneras: ô blanche colombe!   Coucou de mon Amour! Ma Lumière, mon Air! Colombe, ô Justice! Ma Liberté d’Envol! Liberté : Grande Dame, qui, à l'aumônière,   Suspendit coeur du monde, esclaves d’attelage, Qu'au char de mort elle arrache - oeuvre de merci-. Obscènes empires, sans Gloire, elle piétine,   De ses pieds nus, que nul roi n'embrasse du monde Vaincu! Dieu de splendeur d’Amour te fait diadème, De cristal de larmes, de cristallin de Ciel!   Sa couronne est sagesse, qui donne allégresse; Colombe, son nom de Toi, Dieu de Tout, Esprit! De son Seigneur, Fiancée, la Dame d’Amour;   Ceignons de vie les couronnes! Demain, vois-tu, Nous Mourons, déjà! N’attendons d’en partager Roses rouges, d’en effeuiller partage au vent!   A vie noue ta vie, qui plus n’erre au songe-creux; Mort d’Amour plus ne s’offense. Amour l’a vaincue; D’Amour la mort est Vie; Sa senteur vit en myrrhe;   Qui? Douceur saura du vivre en rémission ? A nous qui sommes en sursis, ajournés ivres, Elle n’est qu’avant-part d’entre frères du Ciel;   L’on s’y fait joie des insoumises. Passion D’Amants ceint le thyrse, dont couronne est vertu; Amour s’en honore, comme maître d’ancille;   Dieu vêt l’Ame, Sa fiancée, en plénitude De Gloire, de Sa beauté sublime. Plus belle Qu’Aaron la fit, d’habits d’Amour d’or, de pourpre   Violine, d’un damasseur tissée d’écarlate. Loin que la fit périr à l’hyménée sa robe, Ains’, de jalouse Médée mise à sa rivale,   Pour qu’elle en chût morte, trépassées ses amours, Icelle, en Amour, dès là que portée, la hausse. Rosée du Fiancé ! Beau, plus que lune céleste,   Larmes d’Amour en tête; en sont pleines Ses boucles, Des gouttes de la nuit. Car c’est la nuit qu’Il vient, Par l’huis du coeur d’Ame qui son Amour Lui donne;   Suis allée voir en la nuit si m’Ami m’aimait; Par seule Amour, reçus en Toi celle fiance : Ton sang fut signe à la porte; Tu la rouvris;   Nous qui de mer n’avions vue que fente aux volets, En Prince changé, par l’huis du coeur, regardais; L’oculus heurtas. Qu’éblouit les yeux Ta vue!   Ah! Dieu! Te voici, ô mon Epoux, qui arrives! Bel Amant de mon âme indigne! Ô mon Sauveur, Je n’ai pas la robe, ni tunique des Noces!   Ô mon Dieu! Désonge-moi, du baiser d’Amour! Si longtemps! j’ai dormi...et c’est la onzième heure! A dos de Dieu m’emmène en palefroi montée!   S’était souillée mon âme, maculée, vêtant De fautes costumée tunique. A Vents rebrousse, De mer la déferlaient ceux qui Tes eaux ne craignent;   Mais Ta Divinité vêtis de moi, mantel De mon humanité vraie, que fût retirée De sa prison mon âme aux portes de la mort;   Ô mon Maître! moi qui dormais en nonchaloir, Quand ravit mes dépouilles, du mal le stratège. D’exil rappelle-moi, et de la servitude!   D’où répons me fis qu’à l’Ame éprise Te fiances, Pour, au clos d’elle, y établir Ta demeurance; Mis robe pour Lui plaire. Lui se vit Lumière;   Ô mon Aimé, donne-les moi, et m’en revêts! Rossignols, doux cytharèdes, à mon Seigneur Chantez! Qu’en Palais nuptial d’Âme, enfin, Il entre!   L'homme libre, s’il se veut saint, par Grâce, incline; Lors, le Christ-Roi, de tous les amants le plus doux, L'unique à toute épreuve fidèle, l’amante   Sienne, portant ses pas, partout, mène, accompagne, En enchanteur, de tous ses voeux puissant Servant. D'esclave amère, de souillarde, en fée de joie   Après sale Peau d’Ane, et, du Temps couleur lente, Pour qu'à robe de l'Ame, Il mette le Soleil, Qu'au bal des Astres, Cendrillon, son Prince mène;   La Change. Et, sur sa nuque, Son Souffle très Saint, Pour qu'en son sein béni, se pût porter le monde, Jour après jour, à tout instant d'heure, Il inspire;   Si pudiques étaient nos Pères! Abraham Vit la terre promise, Israël, puis l’Egypte, Avant qu’il n’eût bien Sarah regardée, sa femme,   De si longtemps son accordée. Aux eaux d’Egypte, Son voile ôté mit son reflet. “Aimée”, dit-il, “Je te sais à présent de Chaldée la plus belle.”   En voit plus une servante, aux hautes époques, Qu’un Prophète. A Abraham dit l’Eternel : “Fais Ce que dit Sarah.” - Génération de Désert. -   Pour ce jourd'Hui que si peu savent, Dieu Sa Grâce Moins malaisément donne, aux pécheurs aises même, Rien, qu’au coeur d’Amour vrai probe, ne regarde autre;   Ô Dieu! qu’à Ta vérité s’ouvrent les mémoires, De Tes dûs oublieuses! Sursois à la peine, Et Tout cayolar excepte! où piété règne,   Comme dans l’Egypte aux Hébreux Tu fis, lorsque Au long leurs portes Tu passas, du sang marquées Des Justes, qui de souffrir leur scellent l’alliance!   Mais, du Cantique, la fiancée, est du Christ La soeur, du péché de Pharaon  non plus serve; De s’offrir elle néglige aux regards des hommes;   La séparée, tant soudainement, s’ébahit : Delà l’être, c’est à savoir, Christ, vient, lui verse, Epanche à ses soupirs consolation suave;   Sous les flots  fougueux, vois! ci, roulée d’Amour, l’Ame, Qu’en trombe, en mer, en terre, sous la Nue balaie, Tout, autour de Toi, Christ, irradiant Ta bonté;   Intelligiblement, vient l’Amant divin d’Ame; Elle marche aux flots d’un océan de délices; Deuil de vie reflète Son visage en Lumière;   A qui s’efforce plus, Il dispense Son feu; Qui, d’Amour de Lui, se meurt, Il mène à Sa Gloire. L’Ame, à sa trame, les variations emperle,   D’Amour; l’avancée en Lumière aux Lais poursuit;        Comme le musicien à ses mêmes vieux thèmes Se retrouve, en chute a point de rebroussement,   D’en abîme - en Dieu - de sagesse, elle ressaute; Sa robe de tristesse elle n’a dévêtue Que pour leur corps de Christ vêtir, Ame d’Amour;   De Sanctimonie vêts Tienne! aulx damasquinures, Dieu, qui, devant l’Arche, à Ton peuple, toute entrave Dissipes, au désert du bon - Bonté, Ton nom-;   Le lys des champs qu’a Dieu de Sa splendeur Vêtu Que leur radieux visage point plus ne scintille, Epure de lune en marche, sous quelle ils vaguent;   Que de plus grand beauté l’Ame est de Dieu Vêtue, Lui, de l’Ame! Qui toute forfaiture oublie, Et le Nud Amour, plus que d’amour, lui décèle;   Leurs Ames tissulaires, les a Dieu frangées, Aux plages d’amour, du bleu prison coquillage, Qu’au monde ils redéploient de Prière ses voiles;   De leur sein sourd l’aurore, soleil n’en décline : Dieu, Lumière incréée leur est de création, Sa traîne de Gloire à leurs pas. En proue, Justice;   En cette Lumière contemplait tout Adam. A l’aube de création, il y voyait D’un bord l’autre, espace, temps, bords, rives du monde;   Du Seigneur la fiancée est comme l’aurore, La lune, et le soleil. Elle est l’Ame divine. D’apparat  robe est en Dieu, de joie sa parure;   Ci, comme une fiancée, l’Eglise, la belle, De sa blanche robe des noces a ornée, De Sa chlamyde d'Or la revêt  Son Seigneur;   Pour tunique, a pris sinople, au bliaud du Ciel; Des belles vertus, Il veut faire la parure, Qui, de Ses beautés, voudrait la semblance prendre;   Outre Lune et Soleil, Christ s’y fait Jupiter; Ainsi Sa fiancée rend-t-Il, si sa comète, Trop près de Lui passée, n’en fût désintégrée;   Noueuse, aux voûtes d' En-Haut, pose soie d'Iris, De leurs couleurs tissée, de son sang s'entre-tisse; A sa voilure, a mis blancs anneaux d’astres perles;   Sa toque de soleil, safrané pourpre y dore : Du sang d’aimés, ses chers morts, vivants y abreuve, Fontaine au carrefour des Vents, ruissel d’Amour;   Des fouleurs de pressoir s’assortit sa vêture; A la saignée s’allie du manteau de l'Epoux; L'Epouse, à Son Ombre, désirée, s'est assise,   D'Amour soumise; en elle, Luy, l'Amour ordonne : Justice lui est, par seule Grâce, infusée; Lors, plus n’est  nôtre notre vie; Christ vient, nous presse;   Vêtement de Gloire est sa robe, vêture, oh! De Thaborique Lumière, qui transfigure, Lors qu’âme, par l’Union, est faite Ame en Gloire!   De Son fort cyprès, a pris Sa robe de Gloire, Plus qu’olivier, Ta Paix, Justice  emblématise, Qu’à l’Abîme, en sa profondeur, Toi seul mesures;   "Pour don nuptial, de feu t’envoie l’escarboucle : Mon Esprit," souffle-t-Il, "sens, sur ce cou t'effuse. Fille de Roi te fais, pour entrer en ton Ame,   Qu'à ton paraître, n'aie de mon nom déshonneur." En sa coiffure, Il a mis l’or de cheveux d'Anges, A la Tête a posé voile d'argent de Grâce,   Lui qui, gracieuse, et glorieuse, désire, Aux lais des harpeurs de divine épithalame, Sa fiancée, d’Abyssinie, qu'en reine Il voile,   Qu’aux confins  de l'Occident et de l’Orient, Qu'au Kamtchatka même se reconnût  Sa Gloire, Surnaturelle, suressentielle puissance,   Au Monomotapa, plus que reine de pluie, Qui sur les hommes règne de sa sombre Afrique, Exauçant qui L’aime en véridicité simple,   Là-bas, sous la berce des Vents, loin dessus Iles Aléoutiennes, en la ceinture de feu, Aux lieux où  glaciers choient dedans le Pacifique,

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