mercredi 23 janvier 2019
Saint Nicolas Velimirovich, Lettres Missionnaires
SAINT NICOLAS VELIMIROVICH
LETTRES MISSIONNAIRES
LETTRE 95
A UNE FEMME ESSEULEE :
LE NOEL DE JOVANKA
(p.181).
Tu te plains de la solitude au milieu d’une grande ville. Il y a tant de gens autour de toi, comme dans une fourmilière, et, malgré tout, tu as l’impression d’être au désert. Le plus dur pour toi est ta solitude lors des grandes fêtes. Il y a de la joie partout, mais la tristesse t’opprime. Noël et Pâque semblent faire survenir des vases vides que tu emplis de tes larmes. Lorsque ces grandes fêtes sont loin derrière toi ou loin à venir, tu te sens en paix. Mais lorsqu’elles approchent et arrivent, la tristesse et l’impression de vide règnent sur ton âme.
Que faire ? T e raconterai-je l’histoire du Noël de cette autre femme qui s’appelait Jovanka ? Peut-être cela te fera-t-il du bien. Je vais lui faire dire son histoire comme elle me l’a racontée. « Durant quarante ans, j’ai regardé ce monde comme une grande enfant. Je n’ai jamais eu aucune joie, sauf durant le court laps de temps où j’étais petite fille dans la maison de mes parents ; Mais je n’ai jamais paru malheureuse devant les gens du monde ; Devant eux, je feignais d’être heureuse, et, dans ma solitude, je pleurais. Tout le monde me considérait comme une créature heureuse, parce que je paraissais telle. J’entendais tout le monde autour de moi se plaindre, les gens mariés et les célibataires, les riches et les pauvres, oui vraiment tout le monde. Aussi pensais-je : pourquoi me plaindrais-je aux malheureux de mes propres malheurs, ne faisant ainsi qu’accroître la peine autour de moi. Il vaut mieux faire semblant d’être heureuse. De cette façon, je serai plus utile à ce monde de tristesse, et, dans le secret, je me retirais en moi-même et me lamentais dans la solitude. Mais je priai Dieu de se manifester quelque peu à moi. Je voulais sentir comme au moins l’un des doigts de la main de Dieu. Je priais ainsi, de sorte que je ne croulais pas sous ma peine cachée. Je donnais des aumônes sur mes revenus à chaque fois que je le pouvais. Je visitais les malades et les orphelins et je leur apportais de la joie grâce à mon apparence joyeuse. « Je crois en toi, ô Dieu plein de pitié et de compassion » disais-je souvent, mais, je t’en prie, révèle-toi quelque peu à moi, pour que je puisse croire encore plus en toi. Je crois, Seigneur, aide-moi dans mon manque de foi. » Je répétais ces mots tirés de l’Evangile. Et, en effet, j’expérimentai une révélation du Seigneur. Les grandes fêtes étaient pour moi l’occasion des pires tourments. Après les divins offices, je m’enfermais dans ma chambre et pleurais tout le reste de Noël ou de Pâque. Mais, lors du dernier Noël, Dieu se révéla lui-même à moi. Voici comment cela arriva :
Le grande jour approchait. Je décidai d’apprêter toute chose comme ma mère avait coutume de le préparer : le rôti, le pain spécial, les gâteaux et tout le reste. Je mis de la paille tout autour de la maison, je mis trois noix dans chacun des coins de la maison, ce qui signifie : Puisse la Sainte Trinité être compatissante aux quatre coins du monde . Et pendant que je faisais tout cela, je priai incessamment : Seigneur, envoie-moi des hôtes ; mais qui soient pauvres et complètement affamés ! Je te prie, pour que tu te révèles de cette façon. Et par moments, la pensée me traversait : « Espèce de folle de Jovanka, quelle espèce d’hôtes attends-tu pour Noël ? En ce saint jour, chacun est chez soi. Qui donc pourrait-être ton hôte ? » Et je me mettais à pleurer, et pleurer. Mais je répétais cette prière, et préparais tout, jusqu’à tenir tout prêt pour la fête. Quand je revins à la maison après l’église le soir de Noël, j’allumai un cierge, mis la table, y servis tout le repas, et commençai de marcher de long en large dans la pièce. « O Dieu, ne me laisse pas ! »priais-je encore. Très peu de gens passaient dans la rue. « C’est Noël et notre rue est isolée, » pensais-je. Mais dès que la neige crissait sous les pas de quelqu’un, je me précipitais à la porte. Etait-ce mon hôte ? Non. Il passait son chemin. Minuit arriva et j’étais seule. Je pleurai et me dis : « Je vois maintenant, Seigneur, que tu m’as complètement abandonné ! » Et je me mis à pleurer et à sangloter jusqu’à ce que soudain quelqu’un frappe à la porte. Et j’entendis une voix qui gémissait : « Donne-nous quelque chose, mon frère, donne-nous quelque chose, ma sœur ! » Je courus ouvrir la porte. Devant moi se tenait un aveugle et son guide ; tous deux étaient voûtés, en haillons et gelés. « Christ est né ! messieurs » dis-je avec joie. « En vérité, il est né ! » dirent-ils, grelottants. « Ayez pitié de nous, ma sœur ! Nous ne demandons pas d’argent. Depuis ce matin, personne ne nous a offert de pain ; nous avons reçu quelques pièces ou bien l’on nous a proposé un verre de brandy, mais nous n’avons eu de pain de personne. Nous avons très faim. » Je me suis sentie comme si j’étais au Ciel. Je les ai fait entrer dans la maison, je les ai installés à table, et je les ai servis, en pleurant de joie. « Pourquoi pleurez-vous, Madame ? » me demandèrent-ils. « C’est de joie, mes bons messieurs, de pure, pure joie ! Ce que j’ai demandé à Dieu, Dieu me l’a donné. Je L’ai prié durant quelques jours de m’envoyer des hôtes exactement comme vous, et Il l’a fait. Vous n’êtes pas venu juste comme cela, mais c’est le Seigneur de bonté qui vous a envoyés. Il m’est apparu aujourd’hui à travers vous ; C’est le plus joyeux Noël de ma vie. Maintenant, je sais que notre Dieu est vivant. Gloire à Lui ! Qu’Il soit remercié ! » « Amen » répondirent mes chers hôtes. Je les gardai jusqu’au soir, remplis leurs sacs, et leur souhaitai bonne route. »
Tel fut ce dernier Noël de Jovanka. Puisse Dieu lui accorder qu’il soit même plus joyeux cette année. Vous, ma fille, vous devriez aussi prier que le Père des Cieux se révèle à vous de quelque façon que ce soit – et Dieu connaît bien des façons et des modes de se révéler – et vous verrez que vous expérimenterez un miracle. Ne vous préparez pas à la tristesse ce grand jour, mais apprêtez- vous à recevoir de la joie. Et Celui qui voit tout et qui est tout empli de compassion t’enverra de la joie.
……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
Lettre 90. (p.171).
A un noble anglais Charles B. qui demande « quelle est la signification de la personne de Gandhi l’Indien. »
En tant qu’homme de foi, tu es troublé par la pensée suivante : « Que fera la Providence de Gandhi ? Et quelle est la signification de l’apparition de cette étrange personne parmi les hommes d’Etat et les politiciens de notre époque ?
Un avertissement de Dieu – telle est sûrement la signification du leader de cette grande nation indienne. A travers cette personne, la Providence montre aux politiciens et aux hommes d’Etat du monde, et même à ceux qui sont Chrétiens qu’il y a d’autres méthodes en politique que la compétence technique, la volonté et la violence.
En plus d’être très simple, la méthode de Gandhi est évidente – il ne demande rien d’autre que l’homme qui pleure et Dieu qui entend. Contre les armes, les munitions et l’armée, Gandhi place le jeûne, contre la compétence technique, la volonté, contre la violence, la prière, et, contre les querelles politiques, il use du silence. Comme cela peut sembler pathétique aux yeux des hommes modernes, certes ! Dans les livres de méthode politique, ces trois méthodes ne sont pas même mentionnées dans les notes de bas de page : jeûne, prière et silence ! C’est à peine si un seul homme d’Etat en Europe ou en Amérique ne regarderait pas ironiquement ces trois secrets de l’homme d’Etat indien comme trois branchages secs pointés sur le champ de bataille envers et contre une masse énorme d’acier, de plomb, de feu et de poison.
Cependant, Gandhi réussit avec ces trois moyens « magiques » bien à lui, et il réussit à l’étonnement du monde entier. Et qu’ils le veuillent ou non, les législateurs politiques en Angleterre et dans les autres pays auront à ajouter un chapitre dans leur corpus de textes : « Le jeûne, la prière, et le silence, en tant qu’armes merveilleuses en politique ». Imaginez un peu : « Ne serait-ce pas le bonheur de toute l’humanité si ces méthodes de Gandhi, qui ne fut pas baptisé, remplaçaient en science politique les méthodes de Machiavel , qui fut pourtant baptisé ?
Mais ce n’est pas tant la méthode de cet Indien en lui-même qui constitue une telle surprise pour le monde, que la personne usant de cette méthode. La méthode est Chrétienne, aussi vieille que la foi Chrétienne, et paraît cependant nouvelle en ces jours et à cette époque. L’exemple du jeûne, de la prière, et du silence, fut montré par le Christ à Ses disciples. Ils le transmirent à l’Eglise, avec leur exemple plénier, et l’Eglise le transmet aux fidèles de génération en génération jusqu’à ce jour. Le jeûne est un sacrifice, le silence est un examen intérieur de soi, et la prière est un cri que l’on lance à Dieu. Telles sont les trois sources d’un grand pouvoir spirituel, qui rend l’homme victorieux dans la lutte et excellent dans la vie. Y a-t-il un homme qui ne peut pas se revêtir lui-même de telles armes ? Bien sûr, ces trois éléments n’incluent pas tous ceux de la foi Chrétienne, mais ne sont qu’une partie de ses règles, et de ses Mystères surnaturels. Hélas, à notre époque, parmi les Chrétiens, beaucoup de ces principes sont méprisés, et beaucoup de mystères miraculeux sont oubliés. Les gens ont commencé à croire que l’on ne peut vaincre qu’en recourant à de l’acier, que les nuages d’orage ne sont dispersés que par les canons, que les maladies ne se soignent qu’avec des médicaments, et que tout dans le monde s’explique par la fée électricité. Les énergies morales et spirituelles ne sont presque regardées que comme étant l’œuvre de la magie. Je pense que c’est la raison pour laquelle la Providence, qui est toujours active, a choisi Gandhi, un homme non baptisé, pour servir d’avertissement aux baptisés, et spécialement à ces gens baptisés qui accumulent les malheurs les uns au-dessus des autres sur eux-mêmes et sur leurs peuples en employant des moyens impitoyables et sans merci. L’Evangile nous dit aussi que la Providence use de tels avertissements pour le bien des gens. Son éminence comprendra immédiatement que je fais allusion au capitaine romain de Capharnaüm. ( Matt. ch 8). D’un côté vous voyez les anciens d’Israël qui, comme des monothéistes d’élection de leur temps, ont renié leur foi, en rejetant le Christ, et de l’autre côté vous voyez le païen Romain méprisé venir au Christ avec grande foi et humilité, et lui demander de guérir son serviteur. Et lorsque Jésus l’entendit, Il fut étonné et dit à ceux qui le suivaient : « En vérité, je vous le dis, même en Israël je n’ai pas trouvé une foi semblable à celle-ci ». Le monde Chrétien est le nouvel Israël, qui est baptisé. Ecoutez bien ! Est-ce que Christ ne dit pas les mêmes paroles aujourd’hui aux consciences des Anciens d’entre les Chrétiens, en leur désignant aujourd’hui ce nouveau capitaine de l’Inde ?
Recevez la paix et la santé du Seigneur.
Lettre 89. ( p. 169).
A une femme infortunée qui demande :
« Pourquoi l’Evangile ne parle-t-il pas du bonheur ? »
Ô âme honorable, assurément l’Evangile en parle. De quoi parle-t-il, du reste, davantage que du bonheur des gens, Il me semble même que l’Evangile pourrait être appelé « Le Livre du Bonheur », et l’enseignement du Christ, l’enseignement du bonheur. Assurément, tu es induite en erreur par le fait que le mot « bonheur » n’est pas explicitement mentionné dans l’Evangile. Mais à la place de ce mot précis, d’autres mots sont utilisés comme bénédiction, joie, réjouissance, paradis, salut, vie éternelle. En particulier, le mot bénédiction exprime le concept de bonheur en son meilleur sens. Sachant cela, relisez du Seigneur le Sermon sur la Montagne ( Matt. Ch.5) ; Le premier enseignement que Christ proclama au monde fut l’enseignement sur le bonheur ; Cet enseignement est répété aux fidèles par l’Eglise Orthodoxe au commencement de chaque liturgie dans la litanie chantée : « Bienheureux…Bienheureux. » Selon l’enseignement du Christ, les bienheureux sont :
Ceux qui sont humbles en esprit devant Dieu, car le royaume des Cieux est à eux,
Ceux qui arrosent leurs prières de larmes, car ils seront consolés d’une consolation incessante,
Ceux qui sont bienveillants et doux comme des moutons, car ils hériteront la terre des vivants,
Ceux qui ont faim et soif de la droiture de Dieu, car ils seront emplis de la droiture céleste,
Ceux qui sont compatissants de cœur et qui ont les mains miséricordieuses, car la main de Dieu sera généreuse, et le Seigneur sera compatissant avec eux,
Ceux qui sont purs en esprit, car ils verront le Roi, leur Père Céleste,
Ceux qui, pour l’amour de la droiture, sont persécutés par les démons et les hommes, car le royaume de la droiture éternelle sera le leur,
Ceux à qui il est fait honte et qui sont calomniés pour l’amour du Seigneur, car ils se réjouiront et seront heureux au pays des Anges.
Avec tous ces êtres sont également heureux :
Ceux qui ont foi en leur Sauveur, car ils seront sauvés,
Ceux qui brûlent d’amour envers le Créateur et ses créatures, car ils seront couronnés d’une gloire inaltérable,
Ceux qui sacrifient leur vie sur terre, car ils obtiendront la vie dans les Cieux.
Tel est le véritable et l’incessant bonheur que notre Seigneur a révélé et déclaré à l’humanité. Pour cette sorte de bonheur là, des rois ont sacrifié leurs couronnes, des riches leurs richesses, les martyrs leurs vies – aussi aisément que les arbres jettent leurs feuilles au vent. Mais celui qui n’a même pas goûté fût-ce le moindre goût de ce bonheur peut à peine sacrifier ne serait-ce qu’un petit cierge pour lui.
Et toi, orpheline de Dieu, ne désespère pas de ton bonheur. Tu as été laissée seule à toi-même, sans parents ni amis. Les portes du bonheur terrestre te sont fermées ; C’est ainsi que tu écris avec plus de larmes que d’encre. Mais n’as-tu pas pensé que cela a été permis par la Providence de ton Père céleste, pour que tu puisses franchir les portes du bonheur éternel ? Dieu ferme souvent devant les êtres les portes de l’éphémère bonheur de ce monde qui passe, mais Il garde toujours ouvertes à tous les portes du vrai bonheur, en sorte que tous ceux qui le souhaitent puissent y entrer. Entre, fille du Christ. Si tu ne fais même qu’y jeter un œil, tu verras le royaume des gens heureux, la patrie paternelle des bienheureux. Tu verras les cieux pleins d’êtres vertueux et de ceux qui ont su plaire à Dieu, qui ont goûté le bonheur du Christ sur la terre, et qui continuent à le goûter dans le Ciel, comme ils boiraient d’une corne d’abondance qui s’écoulerait au-dessus d’eux. Lorsque tu sentiras tout cela et le verras de ton esprit, tu ne seras plus seule ni abandonnée à toi-même fût-ce pour un moment. Tu appelleras tes frères, tes sœurs, tes parents, tes amis ton innombrable famille, celle de Dieu qui est dans les Cieux.
Réjouis-toi et sois heureuse dans le Seigneur.
Lettre 88. (p.167).
A un prêtre Bulgare Ivan J. qui désespère à cause des gens sans Dieu.
Prends courage, révérend Père. Les orages n’éclatent pas à chaque nuage. Tu écris pour décrire comment les athées ont mis sur pied une société en Bulgarie et comment ils attaquent ouvertement la foi de Dieu et se moquent de la sainteté Chrétienne. Et cela te mène au désespoir. Regarde profondément dans ton cœur et vois si ta foi est solide. Le désespoir est le fruit de la faiblesse dans la foi, non pas celui de la vraie piété. Un homme pieux combat avec succès le désespoir avec l’aide de la foi, celle-ci étant comme une arme invincible. La solitude est un bon terrain d’expérience – Dans la solitude examine-toi ainsi que ta foi. De quelque façon qu’un homme sans foi s’exalte lui-même et se vante devant les gens, quand il est seul il se sent désespéré. Mais un homme plein de foi sent en lui, lorsqu’il est seul, un influx de force et de joie. Ne crains jamais ceux qui s’en prennent à la forteresse du Christ et l’attaquent de l’extérieur. Chacun de leurs coups ne fait que fortifier les murs de la foi, et les affaiblit eux-mêmes. Souviens-toi de Paul dans les Balkans, seul dans la ténèbre du paganisme et en prise à la colère des Juifs. Battu et persécuté, il ne désespéra jamais. Autant que sa parole contribua à étendre plus au loin la Chrétienté, autant ou presque pleuvaient davantage sur lui les coups de l’ennemi. Mais ceux qui pensaient qu’ils le détruisaient le fortifiaient en fait, inconsciemment. Et ceux qui voulaient éradiquer la flamme de Dieu en lui la rendaient encore plus intense. Les sans-Dieu ne connaissent pas ce mystère, et ne le connaîtront jamais. Leur illusion repose dans le fait de croire que l’œuvre de Dieu peut-être détruite par le même moyen que le travail humain peut l’être. La divine flamme de l’amour, apportée par Christ du Ciel sur la terre, ne pouvait être recouverte que par une flamme d’amour encore plus intense qu’elle. Et où est cette flamme plus intense ? Où est l’amour parmi les sans Dieu ? Tous leurs besoins sont circonscrits au royaume zoologique, loin de provenir du royaume céleste. Et le Christ ne peut pas être défait par la zoologie. Rappelle-toi Julien l’Apostat, et comment il entreprit une guerre contre l’Eglise du Christ depuis son trône royal, armé des armes du monde. Basile et Athanase étaient –ils effrayés ? Non, mais ils prédirent à l’empereur apostat une prompte condamnation honteuse. « Ce n’est qu’un petit nuage. Il passera », dit Athanase à son troupeau. Et il passa aussi vite que passent tous les nuages des sans Dieu. Il y a « des nuages et des brouillards, chassés par les vents », comme dit l’Apôtre Paul.
Rappelle-toi aussi les Martyrs de Zagora. La vieille Zagora, la fierté de l’Orthodoxie dans les Balkans ! Ses Martyrs furent tués, mais non défaits. En tant que vainqueurs, ils inspirent le peuple Bulgare jusqu’à aujourd’hui par leur héroïsme plein de foi et leur sacrifice, tout comme Saint Jean de Rila dans ses montagnes de Bulgarie les ceignait de force, et tout comme les Saints Pères de Trnovo les bénissaient du haut du royaume du Christ avec la bénédiction de Dieu. Tu es un jeune prêtre, et tu ne te rappelles pas les horreurs Bulgares qui, à leur époque, choquèrent les esprits et les cœurs non pas seulement de toute la Russie Orthodoxe mais encore de toute l’Europe. Mais je pense qu’il y a encore plein de vivants témoins de ces horreurs à cause desquelles toute la belle contrée Bulgare fut ornée de la couleur du sang Chrétien. Et si l’insatiable sabre Turc ne put pas ébranler la foi du peuple Bulgare, des mots vides pourront-ils la faire vaciller ? Sera-t-elle secouée par les promesses vides du Paradis zoologique sur la terre, celui de ces gens misérables qui, s’étant coupés de la grande âme de leur peuple, s’en sont allés acheter fût-ce une âme des hommes sans âme de l’Ouest ensoleillé ? Ils en ont acheté une, mais elle est morte. Ainsi, est-ce que les vivants craindront les morts ? Non, certes. Le peuple Bulgare peut entendre à droite et à gauche ces nouveaux prédicateurs du bonheur sans Dieu, mais ces prédications bientôt cesseront de les influencer ; ils s’accrocheront au Christ et, comme Pierre, s’exclameront avec repentance : » Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. »
La paix et la joie du Seigneur soient sur toi.
Lettre 87. ( p.165)
A un étudiant qui interroge sur le livre de l’Ecclésiaste.
Tu ne comprends pas pourquoi le livre de l’Ecclésiaste se trouve dans la Bible. Selon ton opinion, ce livre est le reflet d’un pur pessimisme Indien, parce qu’il renonce à toutes les valeurs, et que, comme tel, il va contre le reste de la science de Dieu. Mais des hommes Saints qui l’ont inclus dans le canon de la Sainte Ecriture ne pensent pas de la sorte. Ils l’ont inclus dans un corpus de livres instructifs et l’Eglise le considère et le recommande comme tel jusqu’à ce jour .
« Vanité des vanités, dit le prédicateur, tout est vanité. » Qui est ce prédicateur ? Il fut le plus sage, le plus riche et le plus heureux des rois du monde pré-Chrétien – Salomon, le fils de David. L’homme qui possédait dans la plus grande mesure possible tout ce qu’un cœur humain pouvait posséder sur la terre, déclare que tous ses biens et que toute sa connaissance ne sont que vanité, comme tout ce qui brille et étincelle, tout son pouvoir royal et sa grandeur, tous les honneurs et tous les plaisirs. N’est-ce pas une précieuse leçon pour le monde ? N’est-ce pas une douche froide pour dégriser ceux qui, à travers l’injustice et le crime, à travers leur inimitié envers Dieu et envers l’âme, à travers l’étouffement de leur conscience et la mise à mort de leur âme, courent ardemment vers tout ce que le grand roi, y ayant goûté comme coulant sur lui d’une corne d’abondance, déclare être vanité, illusion et faux plaisirs émoussés ? Mais si ces mots avaient été proférés par un philosophe Indien nu-pieds, ils auraient été loin d’avoir l’effet irrésistible qu’ils ont lorsqu’ils sortent de la bouche d’un homme comblé de tous les plaisirs de la terre. « Car qui a mangé davantage et pris plus de plaisir que je n’en ai eu ? Et cela aussi fut de la vanité et de la vexation de l’esprit. » Ainsi parla l’homme le plus riche et le mieux nourri de la terre.
Quant à ce que tu dis que le prédicateur renonce à toutes les valeurs, ce n’est pas vrai. Il ne renonce pas à deux valeurs essentielles : Dieu et la vertu. Et telles sont en effet les deux principales valeurs dans ce monde de vanité. « Dieu est dans les Cieux et vous êtes sur la terre. Craignez Dieu », dit le Prêcheur. « Dieu jugera les vertueux et les sans Dieu », dit-il. « Bien qu’un prêcheur fasse le mal une centaine de fois et que sa punition soit différée, je sais qu’il lui adviendra du bien avec ceux qui craignent Dieu, qui craignent Sa Face. » Il voit comment un homme vertueux souffre sur la terre autant qu’un prêcheur, et que cela est une vexation de l’esprit, mais il a un sens prophétique en son cœur, qui lui permet de croire que les vertueux seront sauvés à la fin ; Quelle sorte de bien cela est, il ne peut même pas le dire. Vous devriez garder présent à l’esprit que ce prédicateur a vécu mille ans avant le Christ et qu’il n’a pas pu entendre les merveilleux mots du Sauveur relatifs à un monde nouveau, le royaume de Dieu que le Seigneur a révélé à son peuple. Aujourd’hui, le plus simple Chrétien en sait plus que tout ce qu’a su le plus sage des rois pré-Chrétiens. Un Chrétien sait, parce qu’il le tient du Christ, que les vertueux vont hériter de la vie éternelle et brilleront comme le soleil dans le royaume de leur Père Céleste. Mais même sans savoir cela, le plus sage des rois sentait, de par l’inspiration d’En Haut que lui donnait le Saint Esprit, que du bien adviendrait aux vertueux, et que du mal arriverait aux pécheurs. « Réjouis-toi, jeune homme, pour tes joies, et laisse ton cœur s’emplir de contentement pendant que tu es jeune » te dit le sage roi. « Marche là où ton cœur te mène et là où tes yeux regardent, mais sache que le Seigneur te demandera compte au Jugement de tout cela…parce que Dieu révélera toute action et tout secret au grand jour en vue du jugement, qu’ils soient bons ou mauvais. »
Ainsi, pardonnant au pessimisme Indien, dis avec le Prêcheur : « En vérité, toute chose est vanité, excepté Dieu et Sa vertu. Et dirige tes pas en sorte que tu ne piétines la vertu, ni la vertu ne te piétine.
Puisse Dieu t’aider.
Lettre 86. ( p.163).
Au commerçant Pajo C. au sujet de la confession.
Tu voulais savoir si la confession était réellement nécessaire. Tu avais l’habitude d’aller souvent te confesser, après quoi quelqu’un s’est moqué de toi, ce qui fait que tu as arrêté d’y aller. Tu n’aurais pas dû arrêter. De qui les gens ne se moquent-ils pas ? Tu sais que le Sauveur a dit : « Malheur à vous qui riez maintenant, car vous gémirez et vous pleurerez. » En plus de ton commerce, tu dis que tu as un vignoble qui produit beaucoup parce que tu en prends soin. Si quelqu’un abandonnait sa vigne et se moquait de ce que tu cultives la tienne, est-ce que tu abandonnerais les soins que tu lui prodigues ? Certainement pas. Pourquoi donc hésiterais-tu à cultiver ton âme qui est plus importante que n’importe quelle vigne au monde ? Parce que, lorsque tu mourras, tu conserveras ton âme, mais tu laisseras ta vigne derrière toi. De tout ce que l’on cultive, la culture de l’âme est ce qu’il y a de plus important. Et de tous les travaux que l’homme engage sur la terre, le travail de l’âme est le plus important. Retourne donc à ton précédent travail sur ton âme et retourne à la confession. C’est pourquoi l’Apôtre Jacques dit : « Confessez vos péchés l’un à l’autre. Les péchés croissent et se multiplient dans l’obscurité, mais dès qu’ils sont de hors à la lumière, ils se fanent et se dessèchent. Ne dis pas : « Je ne suis pas un pécheur. » Lis ce que dit le vertueux Psalmiste : « J’ai été conçu dans l’iniquité et dans le péché ma mère m’a enfanté. » Et ne dis pas que tu confesses tes péchés directement à Dieu et que tu n’as pas besoin de confession devant les hommes. Qui fut plus vertueux que l’Apôtre Paul ? Et ce Paul avait commis un grave péché avant d’être Apôtre, lorsqu’il n’était encore que Saul, et il confessa ce péché publiquement, non pas une seule fois, mais de multiples fois, et pas seulement devant les croyants, mais aussi devant les sans-Dieu. Il dit aux Galates qui étaient baptisés : « Vous avez entendu comme j’ai gravement persécuté l’Eglise de Dieu et comme j’ai eu un effet désastreux sur elle. » Il dit la même chose devant le roi Agrippa qui n’était pas baptisé. ( Actes 26). Et si Saint Paul a agi de cette façon, pourquoi garderais-tu cachées les blessures de ton âme ? Pourquoi laisserais-tu les serpents se multiplier dans ton sein ? Juste parce que quelqu’un s’est moqué de toi ? Et s’il s’est moqué une fois, se moquera-t-il à toujours ? Prie pour cette personne en secret. Il pourrait même se repentir et laver son péché avec larmes. Qu’y a-t-il de plus changeant que les pensées de l’homme ? Combien de gens se repentent le soir des paroles qu’ils ont prononcées durant le jour ! Ainsi, quand ce fait advient à ton âme, n’écoute pas tous les commentaires qui passent, mais écoute ce que dit l’Eglise de Dieu. Parle aux Anciens qui confessent les gens, et ils te parleront de la grande délivrance qu’ont ressentie les nombreuses personnes qui se sont sincèrement confessées. Ce n’est pas un conte imaginaire, mais c’est une pure et dure vérité que beaucoup de gens mourants à l’épreuve d’une longue agonie n’ont pu connaître le repos qu’après avoir confessé leurs péchés devant un prêtre. Je pourrais vous citer de tels exemples, en ayant été témoin. Notre Dieu est le Dieu de miséricorde et de bonté, et Il souhaite que tous soient sauvés. Mais comment peut-on être sauvé si l’on ne comprend pas clairement la distinction entre le péché et la vertu de Dieu, si l’on ne renonce pas au péché et que l’on n’embrasse pas la vertu de Dieu ? L’on va au Jugement avec ce que l’on porte sur son âme au moment de la mort. Si l’on porte des péchés, alors l’on va au Jugement avec ses péchés. Si l’on porte la vertu, l’on va au Jugement avec sa vertu. Dieu attend la pénitence de tout mortel, et la repentance implique la confession de ses péchés. Et puisque l’Ange de la mort peut apparaître à n’importe quel moment pour prendre notre âme, pour cette raison même l’Eglise recommande à ses fidèles de se confesser souvent et de se repentir plus souvent encore.
Puisse Dieu t’illuminer et te bénir.
Lettre 85. (p.161).
A un homme qui reçoit le mal pour le bien.
Tu te plains de ce que les gens sont devenus mauvais. Tu ne peux même pas rencontrer où que ce soit un homme bon. Et tu te demandes pourquoi Dieu souffre un tel monde et n’y met pas une fin. Tu seras surpris d’entendre que j’ai entendu cette même plainte d’un de tes voisins dans ta ville même. Il dit aussi que tous les gens bons sont partis, et qu’il se sent complètement seul sur le chemin de la vérité et de la vertu. Cela signifie qu’il ne te connaît pas, et que tu ne le connais pas. Et si tous deux, vous hommes bons, vous vous étiez rencontrés, vous auriez changé d’opinion, et votre tristesse se serait tournée en joie. Christ a dit à Ses disciples : Vous serez dans la peine, mais votre peine se tournera en joie. »
Je vais te dire le nom de cet autre homme bon qui habite ta ville, en sorte que tu puisses le rencontrer et le voir. Et lorsque tous deux vous tiendrez ensemble debout dans la prière, priez que le Seigneur vous révèle davantage d’hommes bons dans votre ville. Je prie qu’un grand nombre de gens bons te soient révélés, dont tu ignores à présent l’existence. Les gens sont comme des puits de mine mobiles. L’on a généralement besoin de descendre profond dans un puits de mine pour y trouver ce qui a le plus de valeur. Telle est la façon dont fonctionne cet univers : plus une chose est précieuse, plus elle est cachée. Si Lot s’était plaint de Sodome comme tu te plains maintenant de ta ville, l’on aurait pu le croire. Mais il est difficile de croire que dans une ville Chrétienne, où les enseignements du Christ sont prêchés et où les liturgies sont servies, il n’y ait pas plus d’un homme bon.
Tu dis que tes voisins ne t’aiment pas. Ils se moquent de chacune de tes bonnes actions, déformant tout ce que tu fais. Ils te critiquent en ton absence. Et tu te demandes avec tristesse pourquoi. Et combien de temps cela durera. Pourquoi ne connaissent-ils pas la vérité, ou ne la cherchent-ils pas, ou ne la désirent-ils pas, et pourquoi sont-ils les esclaves de mensonges, de fausses pensées, de faux sentiments, d’habitudes diaboliques ? Le Seigneur a dit : « Tu connaîtras la vérité, et la vérité te rendra libre. » S’ils connaissaient la vérité, ils se réjouiraient de ce qui t’arrive de bien comme si c’était leur bien. S’ils n’étaient pas esclaves de celui que le Seigneur a appelé le père des mensonges, ils possèderaient en eux la divine liberté, leur vue serait exacte, ils jugeraient droitement, et ils se réjouiraient à la vue de tout homme bon qu’ils croisent. Mais la même chose vaut pour toi – ces paroles du Christ sur la connaissance de la vérité en tant que condition de la liberté. Si tu en viens à connaître la vérité plus profondément que tu ne la connais maintenant, tu ne te plaindras pas de ceux qui te détestent, te repoussent, se moquent de toi, ou même t’insultent. Un homme sage d’entre les Anciens avait parmi ses disciples un jeune homme fier et orgueilleux qui était prêt à combattre à mort pour une seule parole désagréable. Pour le guérir de son orgueil, ce sage Ancien lui donna l’épitimie- la punition- suivante : Il devrait aller dans le monde durant trois ans, et payer quiconque voudrait bien l’accabler d’injures. Le jeune homme obéit à cette instruction et s’en fut. Il alla çà et là, payant quiconque voulait bien l’injurier. Lorsque les trois ans furent écoulés, il s’en revint auprès de son maître. Mais à la porte, le gardien l’arrêta, fâché contre quelqu’un d’autre, et il tomba sur cet autre, l’injuriant terriblement. Mais au lieu de devenir amer, le jeune homme se mit à rire. S’en étonnant, le gardien lui demanda pourquoi il riait. Le jeune homme expérimenté lui dit : « Durant trois ans, j’ai payé des gens pour m’injurier, ne fût-ce qu’un minimum, et voici que tu m’as injurié mieux qu’aucun d’eux, et ce, gratuitement. » Et quand le sage Ancien vit que son disciple était corrigé, et qu’il eut appris le tout, il se réjouit grandement et le loua devant les autres.
Lis le Sermon sur la Montagne, au verset onze, puis réjouis-toi, et sois excessivement content, car grande est ta récompense dans les Cieux.
La paix et la bénédiction du Seigneur soient sur toi.
Lettre 84. ( p. 159)
A un jeune homme qui s’inquiète
au sujet de son ami vaniteux.
La vanité est une maladie spirituelle. Elle s’empare de ceux qui ont perdu ou n’ont jamais acquis la crainte de Dieu. Or il est écrit dans le livre de la vie : « la crainte de Dieu est le commencement de la sagesse ; » Un homme sage se languit d’avoir une conversation sur le Créateur du monde, et un homme vain veut avoir une conversation roulant sur lui-même. Ton ami s’accroche à ceux qui le louent et le célèbrent ; Il ne parle que de lui, et il veut que les autres ne parlent que de lui ; Il collectionne les photos de lui qu’il trouve dans les journaux, bien qu’il sache que les journaux comprennent aussi des photos d’hommes mauvais, et il lit à tout le monde des lettres dans lesquelles est fait son éloge. Il est devenu ennuyeux pour tout un chacun et tout le monde l’évite. Il établit sa gloire sur la fondation la moins sûre possible – c’est à savoir sur les lanues des hommes. Pauvre homme que voici : il a besoin d’être sérieusement soigné pour guérir. S’il continue ainsi, la maladie de la vanité l’amènera sûrement à commettre un crime contre les autres ou contre lui-même. Essaie de lire à son intention le livre de l’Ecclésiaste dans la Bible. Mets l’accent sur ces paroles du Roi Salomon : « Vanité des vanités, tout est vanité. » Promène-toi dans un cimetière avec lui et dis-lui que là, sous nos pieds, gisent maintenant les bouches qui nous ont loués !
Raconte-lui cette histoire qui vient de l’Est ; Sur le bord d’une route poussait un grand palmier, et, au-dessous de lui, un buisson épineux. Des voyageurs passaient çà et là, et les buissons les accrochaient au passage et griffaient tout le monde : les voyageurs furieux disaient les pires choses du buisson, demandant pourquoi on ne le coupait pas en sorte qu’il ne puisse plus accrocher les gens. Mais le buisson épineux était empli de vaine gloire et disait au palmier : « A quoi te sert ta hauteur lorsque personne ne dit un mot de toi ? Entends-tu comme les gens parlent de moi chaque jour, Je suis célèbre de par le monde et tu n’es rien. » Et le palmier disait : « Ta gloire est bien sombre, tout autant que tu es sombre. Ce qui se dit de toi est pire que si l’on faisait silence. Les gens parlent de moi quand ils cueillent des fruits sur mes branches. Certes, ces mots de louanges sont rares, mais ils sont pleins de gratitude et de bénédictions. » Les gens sincères se préoccupent de savoir comment ils peuvent fournir de bons fruits de vie, non de savoir s’ils seront loués par leurs voisins. Mais la gloire a toujours suivi les gens bons, tout comme l’écho suit une voix. Et même si l’écho n’est pas toujours entendu sur la terre, il est indubitablement entendu dans le Ciel. Parce que la vie d’une personne bonne est liée au Ciel et à l’éternité. Quand le Christ fit du bien aux gens, il leur ordonna explicitement de ne pas en parler – « Veille à n’en parler à personne ! » Les Saints du Christ ont merveilleusement cru à cela et ils ont toujours fui la louange humaine comme le feu. Une femme du monde vint de Rome jusqu’en Egypte pour voir Saint Arsène. Arsène accepta de la rencontrer, mais lorsqu’elle commença à louer le saint homme, il s’enfuit aussitôt à sa cellule et en ferma la porte ; Un autre disciple de l’Evangile dit : « Toute parole de louange prononcée à mon sujet ravive les blessures anciennement cicatrisées de mon âme. »
Mais si quelqu’un désire de tout son cœur aider celui qui s’est égaré, Dieu l’aide. Je crois que le Créateur qui est Dieu de bonté t’aidera à guérir ton ami de la vaine gloire. Ce n’est pas toi qui le guérira, mais le Médecin à la volonté toute puissante, conformément à ton vif désir et à ta prière.
La paix et la santé du Seigneur soient sur vous deux.
Lettre 83. ( p. 157).
A un homme courageux de Bosnie Herzégovine, qui dit qu’il n’y a pas de courage sans foi.
Tes observations sont belles, ô âme chevaleresque ! Sans une foi sincère et ferme envers le Dieu vivant, il n’y a pas de bravoure ni de courage. Et là où il n’y a pas de courage, les gens ne possèdent que de la volonté et recourent à la ruse. La seule ville de Gocko, dis-tu, a donné plus de héros qu’aucune ville entière d’Europe. De même, les villes de Nevesinje et de Drobnjaci ! Tous ces héros que tu mentionnes dans ta lettre, comme le prêtre Bogdan Zimonvic, comme Novica Cerovic, Jakov Dakovic, Stojan Kovacevic et d’autres n’étaient que de grands enfants. Leur foi en Dieu et l’ultime victoire de la justice fut celle d’un enfant, simple et pure, non sujette au doute et exempte de calculs impurs. Ceux qui craignent Dieu et aiment les êtres ne peuvent être que des héros. Pour celui qui craint Dieu et aime les êtres, la mort est une plaisanterie. Et lorsqu’on ne craint pas la mort, que peut-on craindre d’autre ? Je pense que ce que des témoins disent du prêtre Bogdan peut se trouver ailleurs, par exemple dans les légendes de l’Inde. Il avait une foi si solide en la Protection de la Providence et en son invincibilité qu’il dit à ses camarades effrayés : « Restez en arrière et couvrez mon dos ! » Et combien son dos était large, tu le sais bien, puisque tu l’as vu personnellement.
Telle était l’époque alors, et tel était l’espèce d’héroïsme qui régnait. J’aime ta sincérité lorsque tu fais crédit aussi aux héros musulmans ; Mais, parmi eux, nul n’est mentionné comme héros si ce n’est ceux qui crurent en Dieu et le craignirent. A mon avis, ce ne fut pas le sabre turc qui conquit l’Europe, mais leur foi solide. D’une foi solide s’ensuivit une discipline également solide et un grand sens de l’honneur. Armé de cette arme invisible et toujours décisive, les Turcs furent capables de créer un Etat allant de l’Inde à Budim, l’un des plus grands Etats de l’histoire, de l’établir et de le tenir plus longtemps que les Anglais n’ont tenu l’Inde ; Lorsque le Sultan Souleiman partit pour la Hongrie avec cent mille soldats, il donna ordre que tout soldat qui pillerait ou déraderait les lieux par où ils passeraient, soit décapité. Comme dans l’Ancien Testament ! Mais parmi les peuples de Herzégovine et de Monténégro, ces courageuses gens du peuple Asiatique trouvèrent leurs semblables en foi et en honneur. Et parmi eux, les plus glorieux sont les noms de tes compatriotes, dont tu dresses la liste – les amoureux du peuple sans peur ni reproches.
Et maintenant tu te plains qu’après la guerre l’héroïsme ait disparu. Cette génération des temps de paix te paraît être comme un groupe de lâches combattant pour les plaisirs de la terre procurés par le sang versé par les martyrs et les héros des Balkans. Mais la guerre est-elle terminée ? Il est dit dans le livre de Job : « L’homme est en guerre dans ce monde. » L’Apôtre Paul dit à la fin de sa vie : « J’ai combattu le bon combat ». Si une guerre n’est plus menée avec des fusils et des épées, alors c’est d’une autre façon que l’on combat – pour la vie et pour l’âme. Telle est la guerre qui est menée maintenant. L’un combat des maladies, un autre combat pour son honneur et pour son image, un autre pour les faibles et les infirmes, et ainsi de suite ; Et où il y a une bataille, on trouve des héros. Si ces héros ne sont pas vus de tous, cela ne signifie pas qu’ils n’existent pas. Ils sont là, et en grand nombre. Ils sont dans les maisons, dans la rue, dans les hôpitaux et aux champs. L’héroïsme n’est pas tout le propre des généraux dans la vie. C’est aussi l’héroïsme des troupes.
Réjouis-toi dans le Seigneur.
Lettre 82. (p.155).
A un serveur, Grigor I. qui interroge sur la signification du joug et du fardeau.
Dans l’Evangile, tu as lu les saintes paroles du Sauveur au sujet du joug et du fardeau, et tu demandes ce qu’elles signifient. C’est pourquoi le Seigneur a dit : « Mon joug est aisé et mon fardeau est léger. » Le joug signifie le service des autres et le fardeau est la souffrance. Tu as lu comment le Seigneur a dit et montré qu’Il n’est pas venu pour être servi mais pour servir. Tu as aussi lu comment Il a souvent dit que le Fils de l’homme devait souffrir. Et en vérité, Il a servi et a souffert : Qui notre très glorieux Seigneur n’a-t-Il pas servi ? Il a servi les vertueux et les pécheurs, les aveugles et les lépreux, les insensés et les paralytiques, et son lourd joug, Il le disait aisé. Il le disait aisé parce que son service était accompli avec amour. En outre, le Seigneur qui était sans péché a souffert. Qui ne l’a-t-il pas fait souffrir ? Les rois et les nobles, les lettrés et les illettrés, tous l’ont fait souffrir. On lui cracha au visage et on le fouetta, on se moqua de lui et on le calomnia, et pour finir, on le cloua sur la croix – c’est cette souffrance qu’il dénomma Lumière. Et Jésus appela son fardeau Lumière parce que Sa souffrance s’accompagna d’un clairvoyant espoir.
Jusqu’à ce que Christ révélât au monde les vérités salutaires sur le Dieu vivant, sur le Père et sur la providence, sur l’éternelle justice de Dieu, sur la faiblesse de la mort et sur la Résurrection des morts- chaque type de service était lié à la haine et chaque souffrance au désespoir. Parce que servir était considéré comme humiliant et que souffrir était regardé comme une calamité. C’est pourquoi le joug même le plus facile était dur pour des païens et la plus légère souffrance insupportable. Nul ne peut dire son joug facile sans l’amour de Dieu, ni son fardeau léger sans espoir en Dieu. Comme la différence est grande entre les sans Dieu et les Chrétiens ! Les Apôtres se disaient avec joie les serviteurs du Christ. Pourquoi se disaient-ils les serviteurs du Christ, alors qu’ils servaient des gens ? Ils servaient les gens, mais par amour pour le Christ. C’est pourquoi le joug de leur service était facile. Les Martyrs du Christ chantaient dans les cachots et sur le lieu de leur exécution. Et ils chantaient parce qu’ils souffraient pour le Christ en ayant espoir en Lui. De là que le fardeau de leur souffrance était léger.
Il y a beaucoup d’âmes Chrétiennes aujourd’hui dans le monde qui s’acquittent de leur service avec amour, et il y en a beaucoup d’autres qui endurent de terribles maladies, des moqueries et des injures avec espoir en le Dieu vivant, dans le Père et en la Providence. Telles sont les grandes âmes qui ont compris le Sauveur, compris qu’Il est la Vie – la Vie des serviteurs et des souffrants, que cette vie n’est pas une partie de plaisir et un amusement, que cette vie est le narthex du Paradis, non pas le Paradis lui-même, le voyage, non le port. Pour ces grandes âmes, le joug est réellement aisé, et le fardeau est réellement léger, parce que Christ est leur amour et leur espoir. Et avec le Christ, cela est aisé même sur la croix ; il y a de la lumière même dans la tombe, et les choses sont plaisantes même dans l’Hadès.
Mon cher frère, je te compte parmi ces grandes âmes. La paix et la bénédiction du Seigneur soient sur toi.
Lettre 21. ( p.36).
A une veuve qui s’afflige et qui s’angoisse.
Tu t’affliges de la perte de ton mari. Tu t’angoisses pour les enfants. Tu pleures jour et nuit ; Les ténèbres enveloppent le chaos qui règne dans ton âme. Devant tes yeux, il n’y a que brouillard et incertitude.
Prends courage. N’aie crainte. Dis-toi : « Mon mari appartenait d’abord au Seigneur, avant de m’appartenir. Mes enfants sont aussi à Dieu d’abord, avant que d’être miens. » Si un jardinier expérimenté retire un bouquet de fleurs, sois assuré que c’est ce que nous avons à faire dans le domaine spirituel ; Il connaît les raisons pour lesquelles il le fait. L’une des raisons est que les autres fleurs qui sont à cet endroit vont mieux prospérer. Tu iras aussi mieux spirituellement à partir de maintenant, ainsi que tes enfants. Tes pensées s’élèveront de la terre au Ciel. Ton âme s’accrochera plus solidement à Dieu. Ton esprit triomphera de ton corps. La mort ne sera plus terrifiante pour toi. Ta précédente vanité te semblera ridicule. Tes considérations sur le monde que tu regardais comme un lieu de vérité changera, et tu éprouveras un bonheur mystique. Ainsi t’adviendra beaucoup de bienfait spirituel. Sache que Dieu te construit, même quand Il retranche de toi.
Ne t’inquiète pas pour les enfants. Fais juste ce qui est en ton pouvoir. Confie-les à leur Créateur, à ton Créateur. Il est écrit : « Laisse les fardeaux reposer sur le Seigneur », et tu sentiras que ta croix est légère. Il y a eu des croix beaucoup plus lourdes sur les mères veuves. Je vais t’en décrire une qui fut particulièrement lourde. Au début de la Guerre mondiale, les Allemands tuèrent un de mes amis devant sa maison, près de la rivière Drina. Ils mirent le feu à cette maison et conduisirent sa femme et ses six petits enfants hors de la ville. Douze ans ont passé depuis lors. Un jour, à Skopje, un jeune commis cheminot vint à moi, se présentant comme le fils de cet ami défunt. Je me réjouis grandement, et lui demandai avec crainte si un autre d’entre eux sept avait survécu. A quoi, il répondit joyeusement :
« Nous sommes tous vivants, et nous allons tous bien, gloire à Dieu ! Deux d’entre nous travaillent pour l’Etat, deux sont marchands, ma sœur aînée est mariée, et le plus jeune vit avec ma mère à B. »
Puis il commença une vivante description des tourments et des horreurs qu’ils avaient souffertes. Ils avaient voyagé à pied, traversé tout le pays en une véritable expédition de Drina à Bitolj. Ils avaient souffert de la faim, de la maladie, du froid, d’arrestations ; ils avaient passé des nuits dans des gares, dormi dans des halls, et sur la route. Et, durant tout ce temps, ils avaient connu la peur, l’incertitude, traversé des régions inconnues. Mais à la fin, ils avaient remporté une victoire et éprouvé la gloire de celle-ci. Ils avaient préservé leur dignité, leur raison, leur vie et leur foi. Mais pourquoi en dire davantage ? Je crois que les batailles menées par cette mère et que ses victoires remportées avec ses six enfants sont plus glorieuses et plus belles que celles de Napoléon.
Dieu t’aidera aussi. Ne l’oublie pas et Il ne t’abandonnera pas. Tu seras victorieuse et ta victoire te sera douce aux siècles des siècles.
La paix et la bénédiction de Dieu soient sur toi.
Lettre 39. (p.71)
Au juge S.V. qui demande comment il peut rendre ce que lui a donné son bienfaiteur.
J’ai reçu ton autre lettre, dans laquelle tu décris ta vie. Tu étais un orphelin sans personne au monde. L’un de tes voisins, qui était noble, te prit dans sa maison. Et tu as grandi avec ses enfants. Il te mit à l’école, te fit faire des études, et te maria. Et soudain, son magasin fit faillite. Il fut en banqueroute. Il mourut de honte et d’amertume. Tu l’enterras à tes propres frais et tu lui érigeas un monument. Peu après, sa femme, ta belle-mère, mourut à son tour. Tu l’enterras et tu lui érigeas également un monument. Quand leur maison fut mise en vente, tu l’achetas et la donnas à leurs enfants, pour qu’ils puissent en être les propriétaires. Tu aidas l’un des fils à monter sa propre affaire, pour qu’il puisse nourrir les autres. Tu offres des études à un autre de leurs fils avec ton propre argent. Tu prends soin d’une de leurs filles en lui constituant une dot pour qu’elle puisse se marier. Tu as trouvé un travail correct pour le plus jeune. Tu commémores leurs noms à côté des tiens ; Tous les ans, tu fais le voyage jusqu’à leurs villes, et tu les commémores lors d’un office. J’ai trouvé toutes ces données dans ta dernière lettre.
Pour finir, tu me demandes ce que tu peux faire d’autre pour rendre ce qu’a donné ton bienfaiteur. Peut-être construire une église à leur mémoire. Leur ville est sans église.
Ô homme reconnaissant ! Tu as déjà rendu plusieurs fois ce qui t’a été donné. Et tu as d’ores et déjà construit une église devant le Seigneur des cieux et de la terre, non en pierre et en bois, mais en bonnes actions. Mais si tu le souhaites, tu peux aussi en bâtir une en dur. Et de fait, je te conseillerais de continuer tes bonnes œuvres et d’aller de l’avant en en construisant une en dur. Que les bonnes actions de ta gratitude soient couronnées par un signe si visible. Que les gens te voient et s’émerveillent. Que la multitude des fils ingrats le voient et soient couverts de honte. Lorsqu’un fils adoptif rend par gratitude d’une façon telle que tu le fais, combien plus devraient rendre les vrais fils !
Ainsi, construis une église. Et appelle-la : « le temple de la gratitude. » Une telle chose est nécessaire en nos temps et en notre génération entachée par l’ingratitude ; et cela pour tous les temps et pour toutes les générations jusqu’au jugement de Dieu.
La santé et la bénédiction de Dieu soient avec toi.
Lettre 47. (P.84).
A un frère de Sarajevo qui interroge au sujet du lundi de printemps.
Tu demandes pourquoi les femmes vont dans les cimetières tous les premiers lundis après la semaine de lumière.
Elles s’acquittent d’une coutume pleine de sens et de beauté. Après le huitième jour de la célébration de la Résurrection du Christ d’entre les morts, ce qui est dire après la semaine de Lumière, les femmes Chrétiennes vont sur les tombes de leurs parents le neuvième jour pour les commémorer dans leurs prières, pour proclamer la résurrection du Christ ressuscité, et pour replanter leurs tombes. Elles disent d’abord des prières pour les défunts. Par là, nous exprimons notre amour à nos chers morts, qui sont physiquement, mais seulement temporairement, séparés de nous. Sache cela : Celui qui prie secrètement Dieu pour toi est celui qui t’aime véritablement. Après qu’elles aient prié pour les défunts, les femmes cassent les œufs rouges de Pâque sur la croix devant la tombe, et s’exclament : « Christ est ressuscité ! » Ainsi, nous saluons nos défunts par l’exclamation la plus joyeuse qui soit, nous les assurons qu’en ce jour de la Résurrection, ils ressusciteront aussi. Pour finir, nous nettoyons les tombes, nous en ôtons la vieille herbe sèche et nous replantons les tombes d’un nouveau gazon qui apportera une herbe nouvelle. De cette façon, nous exprimons notre espoir que, lors de la Résurrection générale, les corps décomposés des défunts seront transformés en de nouveaux corps célestes. Selon le témoignage des témoins de la Résurrection du Christ, il existe des corps terrestres et des corps célestes. Et encore : les corps corruptibles entreront dans l’incorruption, et les mortels entreront dans l’immortalité ; les femmes Chrétiennes prient à nouveau Dieu, s’inclinent vers l’Orient, et s’en retournent.
Et par leur prière, elles expriment leur amour ; avec les œufs rouges de Pâque et leur salutation pascale, elles proclament leur foi, et en replantant une herbe nouvelle, elles témoignent de leur espérance Foi, espérance, et amour – et une fois de plus, oui, l’amour. Telle est la signification du lundi de Printemps.
Tu demandes ensuite pourquoi ce jour-là seules les femmes vont au cimetière, et non les hommes, comme les autres jours où les morts sont commémorés. C’est que ce lundi est le commencement de la Semaine de femmes myrrhophores. Les Myrrhophores furent les premières sur la tombe du Christ au Golgotha, et les premières à annoncer à tout un chacun que le Christ était ressuscité. Bénies soient les mères, les sœurs et les veuves qui ressemblent aux femmes myrrhophores dans leur amour envers leurs défunts ! Les défunts sentent nos présences près de leurs tombes, et ils sentent beaucoup aussi nos prières et nos sacrifices pour eux, ainsi que notre amour d’eux. Toi et moi sentirons bientôt tout cela d’outre-tombe, et nous serons reconnaissants envers ceux qui nous commémorent et prient Dieu pour nous.
Ô mon frère, comme les mots humains sont faibles pour exprimer le mystère de la vie et de la mort, le merveilleux et terrible mystère au sujet duquel les anges murmurent dans un chuchotement les secrets aux défunts. Il est bon que nous ayons les traditions Chrétiennes pour nous aider en paroles – des traditions qui sont pleines de sens et qui sont si belles, nous secourant au-delà des faibles mots de notre langage.
Les bénédictions et la santé du Seigneur soient sur toi.
Lettre 48. (p.86).
A un Orthodoxe cultivé qui demande pourquoi l’Orthodoxie n’a pas de pape.
L’Orthodoxie a son propre pape, plus ancien que les papes et les patriarches du monde. Elle l’a eu depuis le commencement et elle l’aura jusqu’à la fin des temps. C’est le même pape que celui que tous les Apôtres du Christ ont invoqué : Le Saint Esprit. L’Esprit de Sagesse et d’Intelligence, l’Esprit de Consolation et de Puissance de Dieu – C’est le véritable pape de l’Eglise du Christ à toujours et à jamais, sans substitut ni remplaçant, sans dispute ni choix, sans prédécesseur ni successeur. Et que les Apôtres aient reconnu le Saint Esprit comme leur chef le plus haut placé et comme leur pape est attesté par un document écrit de leurs propres mains au Premier Concile Apostolique à Jérusalem, qui proclame ces mots d’importance : « Car il a paru bon au Saint Esprit et à nous » ( Actes 15 :28). Il est manifeste que les Apôtres ont placé le Saint Esprit avant eux et au-dessus d’eux. Avant ce premier concile et avant tout synode – réunion apostolique- ils le prièrent, l’invoquèrent, et se soumirent totalement à Lui. Est-ce que tous les Anciens de l’Eglise Orthodoxe ne font pas de même jusqu’à ce jour ?
A chaque fois que les conciles s’assemblent, ils commémorent tout d’abord leur pape véritablement infaillible : le Saint Esprit. Ils l’invoquent avec crainte et tremblement avant de commencer quelque travail que ce soit, et ils s’en remettent totalement à lui. Ceci n’est pas seulement observé par les Anciens de l’Eglise, mais aussi par les gouvernements officiels dans les pays Orthodoxes les ministres et les sénateurs, qui ont toujours d’abord invoqué le Saint Esprit avant de commencer leur travail dans les conseils ou au sénat. Les Anciens des écoles ont aussi toujours procédé de cette même façon. Savez-vous qu’au commencement de la journée d’école, ils invoquent le Saint Esprit avec leurs étudiants ? Et le Saint Esprit, qui est Toute-Bonté, Toute-Puissance et Toute-Sagesse guide en toute chose, fortifie en toute chose, inspire en toute chose : Il inspire l’Eglise, l’Etat, et le système d’éducation ; Et il régit chacun en chaque chose, non par la force comme les dictateurs qui gouvernent sur terre, mais comme un père aimant et sage, avec amour et sagesse ; C’est lui notre Père par le baptême, car c’est en Lui que nous avons été baptisés. Et vous savez que le mot grec « pape » signifie « père ». Ainsi, en vérité le sens historique et éthique du Saint Esprit est « père », notre pape signifiant notre père. Le Seigneur Christ ne nous a –t-il pas averti de nous garder des papes et des pères de la terre, Il commanda il y a dix-neuf siècles : « Et n’appelez nul homme votre père ( votre pape) sur la terre : car un seul est votre Père, qui est dans les Cieux. » ( Matt. 23 :9).
Paix et santé de Dieu sur toi.
Lettre 53
A une jeune fille, Maria Z, qui cherche la signification de la parabole des dix vierges de l’Evangile.
Il y avait cinq vierges sages et cinq vierges folles. Lis bien : cinq âmes humaines sages et cinq vierges folles. Les sages avaient des lampes à huile propres et de l’huile, et les folles n’avaient que des lampes propres ; Les lampes, tout d’abord, représentent les corps, et l’huile représente la miséricorde. La miséricorde, en grec, se dit « pitié », « éléos ». D’où le mot « poliéléos » qui signifie « grande pitié ». Le « polyéléos » se lit avec les cierges allumés, durant les mâtines, quand sont chantés les psaumes sur la grande miséricorde de Dieu pour son peuple élu, avec le refrain « car sa miséricorde est éternelle, Alléluia ! » Les vierges sages, donc, avaient des corps vierges avec des âmes vierges, et avec cela elles avaient cette grande pitié – pitié envers ceux qui, plus faibles qu’elles, n’étaient pas encore libérées du péché. Les folles gardaient à toute force la virginité de leur corps, mais elles traitaient sans pitié et avec mépris ceux qui étaient plus faibles qu’elles, les jugeant avec hauteur et se détournant d’eux en les méprisant. « C’est avec justesse qu’elles étaient appelées folles », dit Saint Nil du Sinaï, « parce qu’ensuite d’une tâche très difficile à réaliser, celle presque impossible de garder sa virginité, elles ont négligé la petite tâche facile à réaliser. Elles ont négligé la pitié, la miséricorde, le pardon. Les lampes étaient propres, mais vides et ternes. Lorsque vient la mort , que les corps sont enfouis sous la terre, et que l’âme part pour le voyage qui lui permettra de regagner son pays, l’huile de la pitié a besoin de briller pour la guider. Qui se trouve sans cette huile sera enveloppé d’obscurité. Ce sera la porte ouverte à toute obscurité. Comment passera-t-on cette porte terrible ? L’âme est dans la crainte et dans le tremblement. Autour d’elle se montrent des apparitions venues des ombres et de l’air épais. Comme des cauchemars qui tourmentent le dormeur. Qui aura pitié ? Qui offrira fût-ce un trait de lumière ? Dieu aura pitié, mais de ceux qui auront en pitié. Parce qu’il est dit : Bienheureux sont les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. Ceux qui auront été miséricordieux envers les créatures recevront la miséricorde du Créateur. Cela n’est-il pas juste et réconfortant ? Oui, et cela est terrible pour ceux qui auront été sans pitié.
Une vieille femme vivait dans notre voisinage. L’on savait d’elle qu’elle était restée vierge toute sa vie. Et en cela, tout d’elle semblait recommandable. Mais, jour après jour, elle débitait avec sa langue fourchue des traits empoisonnés sur les gens mariés et sur les pécheurs. Du matin au soir, elle se vantait de sa virginité et elle critiquait ceux qui lui semblaient plus pécheurs qu’elle. Un prêtre nous dit à son propos dans une conversation : « Si vous ne savez pas qui est la vierge folle de la parabole – c’est elle ! » Et en effet, la folie semble être amplifiée quand on a seulement une vertu sans les autres vertus. Tout comme il semble à un voyageur dans l’obscurité que l’obscurité est plus forte lorsqu’il ne regarde que la lampe qu’il tient. La sagesse n’est pas dans une vertu seulement mais dans la somme de toutes les vertus. Tout comme le Dieu plein de sagesse a dit : « La sagesse s’est construit une maison de sept piliers. » ( Paraboles 9 :1). Une âme sage est celle qui possède au moins sept vertus essentielles.
Cette parabole que le Christ a dite a aussi un sens plus profond. Pour les cinq vierges folles, vous pouvez comprendre les cinq sens. Celui qui vit seulement de ce qu’il voit et entend sans aucun contrôle intérieur de sa raison, possède une âme folle. Quand la mort tire le rideau sur ce monde sensuel, une telle âme demeure dans une profonde obscurité. Pour les cinq vierges sages, l’on peut comprendre les cinq sens intérieurs qui contrôlent raisonnablement les sens externes et les régissent. Ces sens internes rassemblent de la lumière durant toute une vie, lumière qui demeure dans l’âme et brille même lorsque la mort tire le rideau sur les sens externes. Mais sera-t-on capable de comprendre cela parvenus dans ce grand âge ?
Avec le temps, certainement.
Que Dieu t’accorde sa paix et la santé.
Lettre 54. ( p.97).
Aux frères Radosav et Milosav qui interrogent sur les pierres qui crient.
Lorsque le Seigneur entra à Jérusalem pour la dernière fois, la foule vint à sa rencontre. Des yeux sans nombre le regardaient avec une crainte respectueuse, et des bouches sans nombre proclamaient : « Hosannah ! Hosannah au fils de David ! Béni soit le roi d’Israël ! » Les Pharisiens entendant cela étaient verts d’envie et lui enjoignirent d’ordonner aux gens d’arrêter ce vacarme ; Le doux Seigneur leur répondit : « S’ils se taisent, les pierres crieront. » A présent, dix-neuf siècles après cet évènement, vous demandez de quelle espèce de pierres il s’agissait, et comment elles pouvaient crier ?
N’avez-vous pas lu comment les Juifs se sont effectivement tus cinq jours plus tard et comment les pierres crièrent que le Christ est le Fils de Dieu ? Lorsqu’il mourut sur la Croix le Grand Saint Vendredi, « la terre trembla et les rochers se fendirent. » Les rochers se brisaient et se fendaient à grand bruit. Tel était le langage des pierres, leurs cris. Peut-il y avoir un langage plus fort et des cris plus terrifiants ? Et un témoignage plus éclatant que le bienheureux Roi vint parmi les hommes, lui qui fut rejeté et tué par les insensés ?
Il est une seconde espèce de pierres : Pendant que les Juifs observaient un silence hostile, les peuples sans Dieu crièrent : « Hosanna ! » Les Juifs regardaient les gens sans Dieu comme des pierres mortes. Spirituellement, ces adorateurs d’idoles de pierre étaient en effet comme des pierres, et ils étaient sans la connaissance du seul Dieu vivant qui fût. Ainsi, quand les Juifs firent silence autour du Fils de Dieu, les Apôtres allèrent dans le monde baptiser les peuples sans Dieu. Et ces êtres devinrent comme des pierres vivantes, comme le dit l’Apôtre Pierre : « Et vous, comme des pierres vivantes, devrez vous construire vous-mêmes comme une maison spirituelle ( 1 Pierre 2 :5). Comme des pierres vivantes, les peuples sans Dieu commencèrent à glorifier le Seigneur tandis que les Juifs devenaient comme des pierres et gardaient le silence.
Il est une troisième sorte de pierres : Quand les bouches des Juifs firent silence, les pierres du Temple de Salomon crièrent. Et ces pierres crient jusqu’à aujourd’hui parce que la prophétie au sujet du Temple a été accomplie : « Il ne restera plus pierre sur pierre. » La fierté et la gloire d’Israël, le Temple d » Salomon n’existe pas aujourd’hui. Quelques pierres de ce Temple existent encore, constituant le « mur de lamentations », juste assez de surface pour que les fils et les filles d’Israël frappent leurs têtes contre ce mur tous les samedis, avec des cris et des lamentations. Ces pierres qui restent, dans leur silence déclarent la bataille perdue, comme des messagers d’un champ de bataille.
Il est une quatrième espèce de pierres : Les Juifs ont depuis longtemps gardé un silence hostile sur le Christ. Ni ils ne se réjouissent de sa venue, ni ils ne le glorifient, ni ils ne crient : « Hosanna ! ». C’est pourquoi Dieu, offensé, a couvert de mépris leur Temple unique et tous leurs sacrifices. Il l’a voué à la destruction. Mais des centaines de milliers d’églises de pierre ont été construites dans le monde à la gloire du Christ. Et ces pierres témoignent, et crient ce que les Juifs taisent.
Il est une cinquième espèce de pierres : Celles qui n’ont pas encore crié, mais crieront avant la fin du monde, avant la seconde venue du Christ. Celui qui sait tout a dit de la fin du monde : « Et la terre, dans le monde entier, tremblera, le soleil s’obscurcira, la lune perdra sa lumière, et les étoiles tomberont des cieux. » Que sont la terre, le soleil, la lune et les étoiles, sinon des pierres ? Avec leur langage, à leur façon, ces pierres de feu crieront à l’heure due. Cela advient au temps où beaucoup de faux-prophètes apparaissent, où les sans-loi se multiplient, et où l’amour pour Dieu se refroidit en de nombreuses âmes. Alors, les corps célestes, les pierres de feu de Dieu, crieront dans leur langage et à leur façon. Et ils proclameront la venue du Juge tout comme l’étoile d’Orient proclama un jour la naissance du Sauveur.
La paix et la santé de Dieu soient sur toi.
Lettre 51. (p.91).
A un marchand qui avait le pressentiment que cette vie est le Jugement de Dieu.
Tu as entendu quelqu’un dire que cette vie en soi est déjà le déroulement du Jugement de Dieu et qu’il n’y aura pas d’autre jugement. Cette pensée t’oppresse come un fardeau dont tu es incapable de te débarrasser.
Imagine un homme méchant dont la méchanceté est connue à travers la ville entière. Les voisins l’évitent ; ils évoquent entre eux ses actions mauvaises. Personne ne lui rend visite ni ne le reçoit chez lui. C’est ainsi que les gens le jugent et le punissent. Mais, finalement, cet homme est convoqué au tribunal, condamné, et enfermé dans une prison. C’est l’épreuve finale, le jugement légal. Et ainsi, tu vois deux jugements – l’un hypothétique et quotidien, l’autre, légal et final. Mieux encore : prends l’exemple d’un étudiant paresseux qui est puni de façon répétée, tout au long de l’année, par son professeur, de façon qu’il se corrige, mais qui pour finir est expulsé au terme de l’année comme quelqu’un d’incorrigible.
C’est ainsi qu’il en est avec les deux jugements de Dieu. L’un est conditionnel et temporaire. Nous pouvons nous y référer comme au jugement pédagogique de Dieu sur les hommes en cette école de vie. Et l’autre jugement, le second, sera juste et ce sera un jugement final. Cela est évident à observer les nombreux exemples que nous donnent les Saintes Ecritures. Dieu a puni le vertueux Moïse pour un seul péché, en ne lui permettant pas d’entrer dans la terre promise, vers laquelle il passa quarante années à conduire son peuple. Tel fut le jugement temporaire et pédagogique de Dieu. Cela advint pour que les pécheurs le voient et disent avec effroi : « Si Dieu n’a pas pardonné fût-ce un seul péché à un homme si vertueux, que nous fera-t-il à nous qui sommes accablés de tant de péchés ? Mais la punition de Moïse ne fut pas le jugement final, conclusif, que Dieu porta sur lui. Et cela ne signifiait pas non plus que Moïse n’entrerait pas dans le Royaume des Cieux. Tu sais que ce grand serviteur de Dieu est apparu avec le prophète Elie lors de la Transfiguration du Seigneur. Cela témoigne du fait que, bien qu’il ait été puni une fois pour un péché, il ne fut pas écarté par Dieu ni exclu de la vie éternelle. Des punitions pédagogiques ou des jugements pédagogiques de Dieu servent ce dessein précis – de corriger des êtres et de les rendre aptes au Royaume des Cieux. Le fait que sa maladie ait été due à ses péchés fut clairement établi par le Seigneur lorsqu’il dit : « Va, tu es guéri ; ne pèche plus, de crainte qu’il ne t’arrive quelque chose de pire. » Et que pouvait-il lui arriver de pire que d’être jeté dehors et, à cause de ses nouveaux péchés, d’être laissé hors du Royaume de Vie lors du terrible Jugement de Dieu ?
Notre Sauveur a clairement parlé du Terrible Jugement de Dieu, du jour qui brûle comme une fournaise. Lorsque le soleil et la lune s’assombriront, lorsque les étoiles seront dans la confusion et commenceront à tomber, lorsque le signe étincelant du Fils de l’Homme apparaîtra dans cette profonde ténèbre, alors le Seigneur Jésus apparaîtra en Puissance et en Gloire pour juger justement les vivants et les morts.
Tiens-t’en à cette connaissance solide, qui n’est pas une connaissance humaine, et chasse de toi ce fardeau qu’une fausse science hérétique mit pour l’oppresser sur ton âme.
Puisse Dieu te bénir de Sa paix et te donner la santé.
Lettre 55 (p.99).
A un homme instruit qui a abouti à la conclusion qu’ « il y a là quelque chose comme un mystère. »
Tu m’écris que, pour finir, il doit y avoir là quelque chose comme un mystère. » Tu dis que tu es en train de lire un livre sur les étoiles écrit par un grand astronome et que ce qu’il proclame t’a sauté aux yeux : « Sans Dieu, rien dans le monde ne peut être compris ni expliqué. » Dès là, tu as aussi abouti à la conclusion « qu’il y a là quelque chose comme un mystère. »
Dis, ô fils de Lazare « Dieu existe ! » et sois joyeux. « Il y a quelque chose »- ainsi parlent beaucoup de gens instruits. Mais si tu t’en tiens à ces seuls mots pour le restant de ta vie, alors ta vie n’aboutira à rien.
Le pressentiment momentané qu’il existe une grande force mystérieuse du monde invisible est loin de cette foi donatrice de vie et porteuse de fruit qui illumine notre sentier et nous désigne notre but.
Se contenter de dire qu’il y a là quelque chose comme un mystère ne signifie pas parvenir à la lumière du jour. Cela signifie que le voyageur n’a qu’à peine dépassé l’obscurité de minuit et qu’il distingue maintenant à l’Orient un rayon de lumière au travers de ses pupilles dilatées ; Et le chemin qui mène de là jusqu’au moment de se tenir debout dans le soleil est encore très long. Si tu disais seulement « Il y a quelqu’un », la lumière s’épancherait sur ta vie.
Il te sied de connaître ton Créateur, mon cher frère. C’est plus important que de connaître Ses créatures ; Ne reste pas en compagnie de ceux dont l’Apôtre dit : « Ils ont honoré et servi la création plus que le Créateur. » ( Rom 1 :25). C’est le plus grand des artistes qui crée l’art ; Tu regardes trop ses créations artistiques qui ouvrent les yeux temporairement puis les rendent aveugles. Pourquoi n’approches-tu pas l’Artiste et ne vas-tu pas à sa rencontre ? Que ne te présentes-tu à Lui ? Voici pourquoi le Christ est venu sur la terre : pour te tendre la main et t’emmener. Qui n’approche pas l’Artiste dans ce monde, en son merveilleux atelier, et qui ne le rencontre pas, qui ne se présente pas à Lui et ne l’adore pas, ne sera pas admis à sa cour dans les Cieux non plus.
Je t’écris cela, juste en rentrant d’un Office de funérailles. Un gentil jeune homme est mort à Okhrid. Sur son lit de mort, son visage était radieux, plus radieux que durant sa vie. Il vécut dans la foi et mourut dans la plénitude de cette foi. Il était très jeune, mais plein de raison. Et tu es déjà un homme plus âgé qu’il n’était.
Paix et miséricorde de Dieu sur toi.
Lettre 63. (p.116).
A une femme Serbe qui demande « pourquoi les Russes honorent autant la Mère de Dieu. »
Eh bien, est-ce que les Serbes ne l’honorent pas ? Et les Grecs, et les Bulgares, et les Roumains ? La plupart de nos donations royales sont dédiées au nom de la Sainte Mère de Dieu. Chilandar, le modèle de tant d’églises et de tant d’autres monastères construits par les rois et les reines, et qui est aussi parmi eux comme la perle précieuse, a pour fête patronale l’Entrée de la Mère de Dieu au Temple ; Ce qui est dire que Saint Sava a dédié Chilandar au nom de la Très Sainte Mère de Dieu. Es-tu allée à Savina par mer, et as-tu vu l’icône de la Très Sainte Vierge, toute couverte de colliers, d’or, de bijoux et de médailles. Le dessus tout entier de l’icône est décoré comme ne pourrait même l’être la poitrine d’un général. Il existe une reconnaissance du peuple des fidèles du fait que la Mère de Dieu remporte la bataille contre le démon et qu’elle loe vainc dans le monde entier. Les marins l’ont décorée en tant qu’ilsen ont fait leur protectrice sur la mer incertaine. Es-tu allée, ô fille de Serbie, à Chainich, qui n’est connue pour rien d’autre que pour la Mère de Dieu ? Son icône miraculeuse, à Chainich, est connue à travers toute la Bosnie Herzégovine et dans d’autres pays. Ah ! Si tu pouvais seulement voir l’honneur rendu, l’admiration exprimée, les soupirs de repentance exhalées et les louanges et actions de grâce effusées par des milliers de pèlerins devant l’icône de la Mère de Dieu de Chainich ! Et si tu pouvais entendre les merveilleuses histoires de ses miséricordes et des dons qu’elle épanche sur tant de fidèles ! Mais, tu peux entendre des histoires semblables à Pech, à Okhrid, à Prilep et dans tous les Balkans, de l’Adriatique à la Mer Noire. De toutes les prières qui se lisent sur les lèvres des Serbes, la plus répandue n’est-elle pas : » Aide-nous Seigneur ! Aide-nous Mère de Dieu ! » Qu’il faille rendre des honneurs à la Mère de Dieu, cela est enraciné dans l’âme même de la plus haute intelligentsia d’entre le peuple. Lorsque notre plus grand poète populaire, Vladika Rade, fut sur le point de mourir, il fit venir l’icône de la Sainte Mère de Dieu du Monastère de Cetinje. Il pleura devant elle, la vénéra et dit : « Très Sainte Mère de Dieu, sauve-moi ! »
Et ce pour quoi nos frères Russes honorent si éminemment la Mère de Dieu, je pense que cela est dû à une raison spéciale, autre que celles que nous avons déjà : Les Russes ont déjà expérimenté son aide bien des fois lors d’évènements décisifs pour l’Eglise et pour l’Etat ; Ainsi, quand les princes Russes athées Askold et Dir allèrent piller Constantinople, en lieu et place de mettre leur rais à exécution, ils reçurent le baptême. Lorsqu’ils arrivèrent soudain à Constantinople sur leurs navires, les Chrétiens furent très effrayés et ils coururent à l’église pour invoquer l’aide de Dieu. Puis, le Patriarche Photios prit l’icône de la Mère de Dieu, l’apporta en procession jusqu’à la mer et la trempa dans les flots. Soudain, la mer devint si furieuse que tous les bateaux coulèrent. Askold et Dir eurent le plus grand mal à atteindre le rivage. Et ayant compris pourquoi une telle colère agitait la mer, par où le Ciel était venu à la rescousse de la cité royale, ils se firent tous deux baptiser et s’en revinrent Chrétiens en Russie. Lorsque fut construite la grande Lavra des grottes de Kiev, berceau de la Chrétienté russe, la Mère de Dieu montra manifestement son aide miraculeuse, tant pour la construction que pour ce qui fut de peindre les icônes du Monastère. L’icône de Dieu de Vladimir est célébrée trois fois par an en Russie. Ces trois fêtes marquent les trois grandes victoires que les Russes remportèrent sur les Tatares cependant qu’ils portaient cette icône sur leur bannière. Lors de l’ultime libération de la Russie victorieuse des Tatars, l’empereur Jean III chevaucha avec l’icône dans la bataille contre les oppresseurs. Sur la rivière Ugra, les deux armées se tinrent face à face des mois durant. Elles se tenaient là, sans combattre. Finalement, lorsque les Russes brandirent l’icône et chantèrent l’Hymne à la Mère de Dieu, les tatars tournèrent casaque et s’enfuirent. La bataille fut gagnée et la liberté fut acquise pour les Russes, sans qu’eût été répandue une goutte de sang, le tout grâce à l’aide de la Mère de Dieu. Ces évènements et d’autres auxquels la Mère de Dieu participa de façon décisive, sont profondément gravés dans l’âme du peuple Russe. Et le sentiment de gratitude s’est transmis de génération en génération.
La paix et la miséricorde de Dieu soient sur toi.
Lettre 25. (p.43).
A un vétéran russe qui pleure sa mère-patrie crucifiée.
Conforte-toi, cher frère. Christ est ressuscité ! Nous pleurons aussi avec toi. Reçois du réconfort. Nous tous, gens Orthodoxes, pleurons sur la Sainte Russie du Christ. Et tout d’abord les Orthodoxes Slaves ; mais pas seulement les Slaves. Tous les Orthodoxes pleurent. Il y a deux ans, des pèlerins Serbes se trouvaient à Nazareth pour la liturgie pascale. Un prêtre Arabe servait, après quoi il dit son homélie. Il parlait de la Résurrection du Christ et des souffrances du peuple ruse. Les Arabes pleuraient, les Serbes pleuraient. Essuyant ses larmes, le pêtre se redressa et dit : « Mais nous, Arabes, nous croyons fermement que nous serons témoins de la nouvelle Résurrection du Christ à travers la Russie ! » Uns scène étrange s’ensuivit. Tout le monde, au travers de ses larmes, criait : « Amen ! Amen ! Amen ! » en battant des mains et des pieds.
Réconforte-toi, cher frère. Christ est ressuscité ! Ne demande pas : « Pourquoi Dieu torture-t-il la Russie ? » Il est écrit :: « Celui que Dieu aime, Il le corrige ; Et il l’éprouve. » Voici ce qui est écrit. Le Dieu plein de pitié bat celui qu’Il aime. Il le bat dans son royaume terrestre pour pouvoir le glorifier dans Son Royaume Céleste. Il le bat en sorte qu’il ne l’attache pas à la corruption de ce monde, aux vaines idoles du pouvoir humain, aux talents ni à la santé, aux ombres qui passent et aux mauvais scandales. Sans avoir été manifestement battue, l’Orthodoxie n’aurait pas porté la Vérité de Dieu au travers des générations et de l’obscurité des siècles et des siècles, et elle n’aurait pas franchi un aussi long parcours d’obstacles, préservant dans la pureté la vérité et la sainteté. Sans souffrance, l’Orthodoxie n’aurait pas même préservé sa pureté durant une centaine d’années. Durant les dix-neuf siècles de son existence, elle n’a jamais goûté un seul siècle de paix et de liberté, sans persécutions, sans fouets, sans servitude, incendies, terreur ni horreur, Toute autre foi que la sienne ne peut comprendre cela. Il n’y a pas de nation dans le monde ayant choisi le royaume de ce monde comme idéal de bonheur qui puisse maintenant comprendre ce qui arrive à la Russie Orthodoxe. Seuls les clairvoyants comprennent cela, avec ceux qui ont à toujours regardé le Royaume éternel et immortel du Christ comme la réalité. Mais la clairvoyance est aussi une fille de la souffrance.
Réconforte-toi, cher frère. Prends du réconfort dans la Résurrection du Christ. Ne murmure pas contre les sans Dieu qui oppriment le peuple Russe. Peu importe qui ils sont, ces oppresseurs-ci ou bien les Mongols. Ce sont tous des adorateurs des idoles. Les Mongols adoraient des idoles faites de matière. Ces oppresseurs de la Russie adorent l’idole de la matière. Ils adorent la matière comme une divinité, l’industrie comme une divinité, l’Etat comme une divinité. Ils se disent eux-mêmes athées et ils ont raison de se dénommer ainsi. Et s’ils s’appelaient adorateurs d’idoles, ils auraient encore raison de le faire. Mais toi, lorsque tu parles de la tragédie russe, n’oublie pas que ce sont les oppresseurs et non pas les opprimés qui sont les créatures les plus infortunées de Russie. Sens-toi désolé pour eux ; ne les juge pas. Ils flétriront comme l’herbe – un à un chutant du pouvoir et perdant leurs esprits. Ce sont des ouvriers de Dieu, même s’ils n’en ont pas conscience. Ils dirigent encore toute l’eau sur le moulin à eau du Christ. Bien qu’ils crient contre le Christ, ils travaillent pour le Christ. Ilne leur est pas donné de le voir maintenant. Mais lorsqu’ils passeront, comme des ombres, ils le verront bien. Et ils se lamenteront amèrement, car seule la damnation leur sera échue. Leurs gages ont été pleinement payés ici sur la terre sous cette forme de domination et de pouvoir éphémère. Et toi, ne pleure pas, mais réjouis-toi. Une grande moisson d’âmes est avenue en Russie. En ces jours, les gens souffrants du peuple Russe remplissent les Cieux plus que n’importe quelle autre nation du monde. Réjouis-toi : Christ est ressuscité !
Lettre 37. (p.67).
A une sœur qui souffre de la mauvaiseté de son frère.
Je comprends ta douleur. Après la mort de ta mère, c’est toi, en tant que sœur aînée, qui a toujours été comme une mère aussi pour lui. Tu as souffert le temps que tu l’as mis en classe. A cause de lui, tu as retardé le moment de te marier jusqu’à ce que tu décides finalement de ne pas te marier. Tu as appauvri ta vie en vue d’enrichir la sienne. Naguère, il t’écoutait et t’aimait. Mais, ces deux dernières années, il a complètement changé. Premièrement, il a décrété qu’il était incroyant et il s’est mis à se moquer de ta piété, de ta prière, de l’Eglise, des icônes. De là je déduis, même si tu ne le dis pas, qu’il s’est adonné à une vie de débauche. C’est une conséquence inévitable de l’absence de foi. Il est irritable, sombre, négligé, paresseux, insolent. Il te demande ce que tu ne peux lui donner. Il fait des dettes partout. Il est furieux lorsque tu lui donnes des conseils. Il en viendrait même à te tuer. Il ne ressemble plus en rien au jeune homme qu’il était précédemment. Comme si un esprit malin le possédait.
Pauvre sœur ! De fait, il est possédé par un esprit malin. C’est une sorte de folie qui tombe inévitablement sur les apostats. On ne peut pas se détourner de Dieu et ne pas faire faux pas dans une épaisse ténèbre. L’on ne peut pas dénier Dieu et ne pas devenir fou. Des exemples tirés du passé et du présent foisonnent qui en attestent.
Mais laisse-moi te parler d’une mère qui a sauvé son fils, lequel était semblable à ton frère. Lorsqu’elle vit que tous ses conseils de mère tombaient à l’eau comme au travers d’un vae percé, elle s’arrêta soudain de lui parler. Elle n’eut pas un mot de plus pour son fils. Et elle se mit à prier Dieu qu’il lui envoie quelque maladie. Tu pourrais dire : « C’est une mère cruelle. » Mis écoute jusqu’à la fin. C’est cette mère elle-même qui me raconta cela. « J’ai réalisé », dit-elle, « que nul sous le soleil ne pouvait le sauver que Dieu lui-même, au travers d’une épreuve quelconque. Alors j’ai prié pour que Dieu le frappe d’une épreuve terrible. J’ai prié longtemps. Et il est véritablement tombé malade. Il fut cloué au lit trois mois durant. Je me suis dévouée à son service. Et j’ai prié Dieu devant lui. Il pensait que je priais pour sa guérison physique. Mais en fait, je priais pour la guérison de son âme. Il vaut mieux mourir corporellement que spirituellement. Il remarqua que je le servais, que je l’aimais et que je priais. Et, peu à peu, son cœur s’adoucit. Tandis que les médecins l’avaient abandonné, jugeant son état désespéré, et qu’il devenait comme une ombre, un jour, il pleura, et murmura : « Ma douce Maman, prie Dieu que je ne meure pas. » Et je lui dis : « Promets, mon fils, que tu te souviendras toujours de Dieu, que tu lui seras reconnaissant, et que tu corrigeras ta conduite. » « Je le ferai, Maman, c’est promis, » murmura-t-il come à l’agonie. J’avais le sentiment qu’il ne mourrait pas. Et, grâce à Dieu, il guérit. Il est maintenant en bonne santé corporelle et spirituelle, malléable comme la cire, pieux comme un ange, obéissant et brillant comme le soleil. »
Toi aussi, grande sœur, tu dois cesser de vouloir conseiller ton frère. Sois calme, et ne t’irrite pas. Il est en proie à une sorte de fièvre. Mais commence à prier pour lui, disant : « O Seigneur de bonté, Tes voies et Tes modes d’agir sont nombreux. De quelque façon, de quelque manière que tu le puisses, guéris l’âme de mon frère. Même si ce doit être, ô Dieu, par le biais d’une maladie éprouvante et de tourments, je Te prie. »
Choisis aussi un autre jour de jeûne que ceux déjà prescrits dans la semaine, et jeûne pour lui. Donne des aumônes pour son âme, et Dieu, en temps voulu et à Sa manière propre, lui accordera que son esprit devienne bon. Et il tombera dans tes bras guéri et dans son bon sens, épanchant mystiquement en ton cœur ces paroles de l’Evangile : « Mon frère était mort, et maintenant il est vivant. »
La paix de Dieu et son secours soient avec toi.
Lettre 40. (p.72)
Au moine Avvakoum sur les péchés de l’esprit.
Tu demandes si les péchés en esprit sont dangereux. En tant que moine, tu connais très bien la réponse. Tu sais que l’un des Saints Pères a dit que l’essence du monachisme est de purifier l’esprit des pensées mauvaises. Tu sais aussi que l’Eglise établit trois sortes de péchés : en action, en parole et en pensée. C’est pourquoi nous prions le Père des Lumières pour les morts, qu’Il leur pardonne tous leurs péchés : en action, en paroles, en pensée. Et le fait que Dieu connaisse les pensées pécheresses se lit dans l’Evangile, comme tu peux le voir. « Et Jésus, voyant leurs pensées, dit : Pourquoi pensez-vous à mal en vos cœurs ? » Satan n’a pas péché d’autre manière qu’au travers de ses pensées démoniaques. C’est pourquoi il a été jeté de devant la face du Seigneur et jeté dans l’Hadès.
Les pensées mauvaises sont la source de tout mal. De cette graine germinent des paroles mauvaises, des désirs mauvais, et des actions mauvaises. Souviens-toi de la seconde parabole du Christ sur le semeur. « Un homme semait du bon grain dans son champ. Et quand tous dormaient, leur ennemi venait et semait de l’ivraie parmi le grain. » Dieu sème de bonnes pensées dans l’âme de tout homme. Mais si quelqu’un devient paresseux et ne veille pas sur son âme comme il le ferait sur un champ ensemencé, il est comme le dormeur. Et tandis qu’il dort, l’esprit malin vient, l’ennemi de Dieu et de l’homme, et il sème de l’ivraie, ce qui est dire des pensées mauvaises, dans l’âme. Et, de pensées mauvaises à des paroles mauvaises , la distance n’est pas plus grande que d’une graine à la racine d’une plante. Ce qui veut dire qu’il n’y a pas de distance d’un fait à l’autre et que les deux sont organiquement connectés.
Ainsi donc, veille bien sur toi. Ferme plus souvent tes yeux et comme le dit Saint Nikita Stifat. « Examine les pensées voguant sur la mer de l’esprit. »
Dans les règles du monachisme, le principal exercice défini est le déracinement des pensées mauvaises, avant qu’elles ne se développent, ne grandissent, ne règnent sur l’âme, et ne se traduisent finalement en actes. Ecrase-les contre le roc. Comme dit le Psalmiste : « O fille de Babylone, qui va être détruite, heureux sera celui qui va prendre tes petits et les écraser contre les pierres ! » Comprends-tu la signification spirituelle de ces mots ? Babylone est le royaume du démon et ses enfants sont les pensées. Christ est le roc. Béni soit donc celui qui écrase le démon en lui-même depuis le commencement, le détruisant contre le roc éternel qu’est le Christ.
Ainsi, puisque toi et moi savons cela, nous n’avons pas d’autre choix que d’agir en fonction de cette connaissance.
Réjouis-toi dans le Seigneur.
Lettre 42. (p.75)
A un zélé lecteur de la Sainte Ecriture qui demande « pourquoi le Saint Esprit apparaît sous forme de feu. »
Quand le Seigneur fut baptisé dans le Jourdain, le Saint Esprit apparut sous forme de colombe. Il apparut non pour ajouter quelque chose au Christ, mais pour signifier symboliquement ce qui était en Christ, c’est-à-dire la bonté, la pureté et la douceur ; C’est ce que symbolise la colombe. Et tandis que les Apôtres étaient rassemblés le cinquantième jour après Pâque, c’est-à-dire à la Pentecôte, l’Esprit apparut sous forme de langues de feu. Il apparut sous forme de feu afin d’ajouter quelque chose et d’ôter autre chose. Il leur ôtait tout péché, toute faiblesse, toute peur et toute impureté spirituelle, et il leur octroyait puissance, lumière et chaleur. Tu sais combien le feu est puissant, avec quelle brillance il brûle, et combien il réchauffe. Cependant, lorsque tu parles du Saint Esprit, fais attention de ne pas penser physiquement mais spirituellement. Ainsi donc, nous parlons ici de puissance spirituelle, de lumière spirituelle et de chaleur spirituelle. Et ce sont la force de la volonté, la lumière de la raison et la chaleur de l’amour. De ces trois armes, le Saint Esprit a armé contre le monde les soldats du Christ, ces soldats auxquels le maître a interdit de porter fût-ce un bâton pour en user comme d’une arme blessante.
Pourquoi la flamme de feu est-elle apparue sous forme de langues sur les têtes des Apôtres, Parce que les Apôtres ont eu besoin de langues pour proclamer la Bonne Nouvelle, l’Evangile de Vérité et de Vie, l’art de la repentance et le pardon aux nations. Ils devaient enseigner avec la parole, guérir avec la parole, réconforter avec la parole, conseiller et gouverner avec la parole, gérer l’Eglise avec la parole. Finalement, ils eurent à se défendre eux-mêmes avec la parole. Le Maître leur dit, en le leur prophétisant, qu’ils n’auraient pas à craindre les persécuteurs ni à s’inquiéter de ce qu’ils diraient dans les tribunaux – eux, qui étaient des hommes simples. « Ce n’est pas vous qui parlerez, leur dit-Il, mais c’est l’Esprit de votre Père qui parlera à travers vous. Etait-il seulement possible de recourir aux langues des hommes pour parler de la plus grande et de la plus joyeuse nouvelle qui ait jamais atteint les oreilles humaines – que Dieu était apparu sur la terre et avait ouvert les portes de l’immortalité à l’humanité ? Des gens, par leur nature mortelle, auraient-ils pu développer cette Vie donatrice d’un tel baume, lequel s’étendait sur la carcasse de l’Empire Romain et jusqu’aux confins même du monde ? D’aucune façon, jamais cela n’aurait été possible. Ce ne fut rendu possible que par l’Esprit de feu de Dieu qui se répandit du Ciel pour étinceler parmi la ténèbre de la terre.
Mais, ô fils de l’homme, as-tu jamais senti l’Esprit de Dieu en toi ? Donc, tu es aussi baptisé avec l’Esprit, avec l’eau et l’Esprit. Se peut-il qu’une grande pensée éclairante, un mot silencieux de l’Esprit Saint n’ait jamais brillé en toi ? Se peut-il que l’amour pour le Créateur n’ait jamais fait irruption en toi, soudain comme le vent, t’amenant les larmes aux yeux ?
Tourne-toi vers la volonté de Dieu, regarde ce qui transpire en ton âme, et tu en viendras à comprendre le miracle de la Pentecôte qui est arrivé aux Apôtres.
La paix et le réconfort du Saint Esprit soient sur toi.
Lettre 36. (p.66).
Au théologien B. qui demande : « Comment comprenez-vous les mots : « Je suis dans le Père et le Père est en moi. »
Pourquoi questionnes-tu les hauts mystères célestes qui demeurent incompréhensibles même aux Chérubins ? Crois juste qu’il en est ainsi – le Seigneur l’a dit – et ta foi t’apportera ta récompense. Parce que le trésor éternel, la vie immortelle et le règne ne sont pas permis à la connaissance mais à la foi. Dieu a donné à l’homme en suffisance la capacité de croire, mais pas suffisamment celle de connaître. Cela n’a-t-il pas été admis même par le philosophe Kant, le critique de l’esprit humain ?
Prononçant les mots pré-cités, Christ les adressait à la foi, non à la connaissance. Il dit à l’Apôtre Philippe : » Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ? » Tu vois qu’Il révèle le mystère à la foi, non à la connaissance. Il ne dit pas : « Ne sais-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi », mais : « Ne crois-tu pas ? »
Tu peux en outre t’aider de comparaisons. Est-ce que tout fils n’est pas dans son père avant de naître et est-ce que tout père n’est pas dans son fils après qu’il soit né ? Est-ce que le feu n’est pas dans la flamme et que la flamme n’est pas dans le feu ? Est-ce qu’un désir noble n’est pas dans une haute pensée et une haute pensée dans un noble désir ?
Nous butons constamment sur le corps lorsque nous pensons à des sujets spirituels ; Celui qui surmonte ce défaut approche la compréhension des réalités spirituelles. N’importe qui sur terre peut-il aimer quelqu’un plus qu’une mère n’aime son fils unique, et quel autre peut-il davantage aimer sa mère que son fils unique ? Imagine ces âmes, mais rien que ces âmes. L’âme d’une mère est toute remplie de son fils, et l’âme du fils est toute remplie de sa mère. Surtout lorsqu’ils sont séparés l’un de l’autre. La mère est véritablement dans le fils avec son âme entière et le fils est dans sa mère, en esprit autant que dans son cœur. Et toute personne qui nous aime nous porte dans son esprit et dans son cœur, et celui que nous aimons vit en nous. Brûlant de l’amour divin pour le Christ, Paul dit : « Ce n’est plus moi qui vis, mais c’est le Christ qui vit en moi »
Dans le Christianisme, la méthode de compréhension est l’amour. Ainsi, si tu cherches à connaître les mystères célestes, aime Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta pensée. Et Dieu demeureras en toi, et ainsi tu seras en Dieu et Dieu en toi. Et tu sentiras comme vraies certaines choses qui sont au-delà de tous les horizons de la connaissance et de la compréhension humaines.
Puisse l’amour divin t’illuminer.
Lettre 41. (p.74).
A l’écrivain Veselin G. qui se demande pourquoi Saint Sava n’a pas écrit de livres.
C’est, dis-tu, parce qu’il n’y avait pas de papier à cette époque ? Mais si, il y avait alors du papier, et de meilleure qualité même qu’aujourd’hui, du papier fait de peau. Il y avait de l’encre aussi, d’une qualité qui ne s’efface pas aussi vite que l’encre d’aujourd’hui. Lorsque tu iras à Chilandar, tu verras des manuscrits de cette époque, royaux et saints, qui sont moins effacés que les dernières volontés de ton grand’père.
Saint Sava a écrit, mais peu. De fait, il écrivit quelque peu à l’encre sur le papier, mais il a plus écrit et bien davantage encore, d’une autre manière – à la manière des Apôtres du Christ. Lis ce que Paul dit aux Corinthiens : « Vous êtes une lettre du Christ, écrite par notre ministère, non avec de l’encre, mais avec l’Esprit du Dieu vivant. ( 2 Cor.3 : 2-3). De cette manière, Saint Sava a écrit de nombreux livres, des millions même. Autant il y a d’honorables Serbes, autant Saint Sava a écrit de livres. Il n’a pas écrit avec de l’encre, mais il écrit avec l’Esprit du Dieu vivant. Et il n’écrit pas sur du papier, mais sur le cœur des gens. Il n’écrit pas non plus des paroles temporelles, mais éternelles ; ni il n’écrit des mots de mort, mais des paroles de vie ; et ses lettres ne sont pas de ce monde, mais de l’autre monde. Il est le plus grand et le plus merveilleux des écrivains Serbes, inimitable lorsqu’on le compare aux autres. Sa bibliothèque vivante est pour partie transférée dans les Cieux. Ses œuvres complètes ne peuvent pas être montrées maintenant au public, mais ne seront manifestées qu’à la fin du monde et du temps, au jugement dernier de Dieu. Alors, tous les travaux de Nemanjic Sava, écrits par l’Esprit du Christ, seront visibles – Ses lettres vivantes sont les âmes vivantes des hommes, citoyens du Royaume des Cieux. Ce grand Saint de Serbie est juste une plume choisie, et l’écrivain est l’Esprit de Dieu lui-même, conformément aux paroles du Roi David : « Je suis la plume du scribe à l’écriture rapide. » (Ps 45 :1). Ce scribe à l’écriture rapide n’est nul autre que le Saint Esprit qui a écrit au travers des Prophètes, des Apôtres, et des Saints.
Saint Sava a écrit aussi sur le mortier et la brique, au travers des lois de l’Etat, des églises et des écoles. Chilandar et Zhicha sont ses écrits. Le premier royaume Serbe, en tant qu’il fut irréprochable et saint, est l’un de ses écrits. Mais tout cela n’était que des aides à ses actes immortels que sont les âmes des hommes, au nombre desquels il veut ajouter aussi bien ton âme.
Si certains des Serbes sont des livres souillés, ce n’est pas la fête de Saint Sava, mais celle de l’homme. Chacun peut faire de lui-même un porc, mais nul ne peut se purifier ni se corriger sans le Saint Esprit. Et savez-vous ce qu’est un porc ? C’est la bête à laquelle, selon le commandement du Très haut ne doivent pas être jetées les perles.
La paix et la joie du Saint Esprit soient sur toi.
Lettre 26. (p45).
A T., modeste clerc qui se plaint du dédain de son ami.
Tu dis que ta Pâque a été gâchée cette année. Qu’est-il arrivé ? Ton meilleur ami a été gratifié d’une haute position sociale ; Tu t’en es d’abord réjoui. Mais quelques semaines plus tard, il s’est mis à prendre des distances avec toi. Il ne répond pas à tes lettres, ses conversations avec toi sont brèves. Il te laisse attendre longtemps devant son bureau, et il parle méchamment de toi derrière ton dos. Tu ne le reconnais plus. Qu’est-il arrivé à ce cher homme. Les Arabes diraient : « Son poste l’a avalé. »
Si tu veux, lis-lui ce que je t’écris maintenant : Il y avait un jour deux amis en Arabie. Chaque soir ils s’asseyaient sur leur trépied devant le feu et parlaient. Mais il advint que l’un d’eux devint cheik. Il s’en alla donc habiter un palais en dur et s’assit sur un trône élevé incrusté de perles. Beaucoup de gens venaient honorer le nouvel Ancien. Son vieil ami vint aussi, plein de joie, le féliciter. Mais le cheik, devenu hautain, ne le laissa pas entrer et le fit attendre à sa porte des jours durant. A la fin, il le fit entrer. Son modeste ami entra, et l’homme hautain s’appuya plus profondément encore dans sa chaise emperlée. Son ami, immédiatement, comprit tout, et se mit à regarder partout autour de lui, comme s’il ne voyait pas le cheik. Le cheik, criant avec colère, lui demanda ce qu’il regardait.
« Je te cherche : où es-tu ? » lui dit son ami. Puis, il ajouta tristement : « Lorsque tu étais assis sur un petit tabouret, ce tabouret ne pouvait pas être vu de l’homme, mais maintenant l’homme ne peut pas être distingué de son trône. »
La même chose s’est produite avec ton ami. L’homme s’est perdu au fond de son trône. Mais c’est une configuration de choses si commune dans le monde que ta colère semble follement déplacée. Les gens ont plus de difficultés à se maintenir sur les hauteurs qu’ils n’en ont à stagner dans les bas-fonds.
O homme, ô poussière ! De quoi te glorifies-tu ? De quel néant – celui de la vie ou celui de la mort ?
L’on dit d’un homme d’Etat grec qu’il avait pour habitude de s’incliner dans deux directions différentes chaque matin, d’abord dans l’une, et puis dans l’autre. Quand on lui demandait qui il saluait des deux côtés, il disait : » Dieu et les hommes. Parce que tout ce que j’ai reçu provient soit de Dieu soit des hommes. »
O homme, ô seconde de temps, ô millimètre d’espace. Pourquoi es-tu hautain. Et à cause de quoi donc ? Il a été écrit de toi dans les Saintes Ecritures : « Tout être qui est fier de cœur est une abomination devant le Seigneur. » Et aussi : » Dieu résiste à l’homme hautain. » Et si tu en veux plus – « L’orgueil vient avant la chute. » Avec ton orgueil, tu as déclaré la guerre au Tout Puissant et à l’Eternel. Un atome s’est élevé contre l’Infinité. Un second se rebelle contre l’Immortel. Est-ce que ta défaite n’est pas évidente même aux yeux des fourmis. Ta chute et ta honte viendront tout soudain. Aussi, reprends-toi, repens-toi, ressaisis-toi, recouvre tes sens, sois un homme. Cela signifie plus que d’être un empereur. Sois un homme. C’est chose plus excellente que toutes les couronnes et plus importante que tous les trônes.
Telle est la leçon à retenir pour ton ami. Et à toi, paix et santé de Dieu, et heureuse Pâque.
Lettre 35. (p.64).
A l’ouvrier Stanoje I. qui se plaint d’être attaqué par un esprit de crainte.
C’est un esprit mauvais qui t’attaque. L’un des nombreux esprits mauvais dont les menées ont pour but la perdition des gens. Tu écris que quand l’esprit de peur t’attaque, il te semble que le monde entier est contre toi, que tous les gens sont tes ennemis et que Dieu même te hait. Tu as demandé à des gens avisés ce qu’ils en pensaient et ils t’ont dit que c’est de la folie que de croire cela. Et c’est de la folie en effet. Ils ont eu raison de te parler ainsi. L’Eglise te dira aussi la même chose. Mais l’Eglise t’en dira même plus que cela, selon son expérience et sa connaissance des choses divines. Elle te dira aussi de qui provient cette folie et pour quelle raison cette folie survient. Elle provient d’un esprit malin, à cause d’un péché d’entre ceux que tu as commis. L’Eglise recommandera aussi la guérison de ce mal – confesse-toi et repens-toi de ton péché et l’esprit malin te quittera. Il ne partirait jamais de lui-même, mais Dieu l’ôtera de toi. Tu sais combien le Christ tout-puissant exorcisait les esprits mauvais, comment il avait pleine autorité sur eux , et comment les esprits mauvais lui obéissaient inconditionnellement.
Mais l’autorité de Dieu sur les esprits mauvais ne consiste pas seulement à exorciser les gens de leurs esprits mauvais, mais aussi à autoriser ces chiens invisibles à attaquer les hommes. C’est pourquoi dans les Saintes Ecritures même l’esprit malin est appelé esprit de Dieu. Ne lisons-nous pas dans l’Ancien Testament : « Et un esprit malin de Dieu a attaqué Saul ? » ( 1 Sam. 18 :10). Il n’est pas appelé esprit de Dieu parce qu’il lui est apparenté ou parce qu’il procède de Dieu –loin de là- mais parce qu’il est soumis à l’autorité de Dieu. Lis le premier chapitre du livre de Job, et tu verras qu’un esprit malin ne peut pas attaquer quelqu’un à moins que Dieu ne le lui permette.
Sachant cela, chasse le désespoir loin de toi. Dieu est tout puissant et plein de compassion. Parce qu’Il le peut , Il éloignera de toi l’esprit mauvais de crainte qui t’a tourmenté si longtemps douloureusement. Il est seulement nécessaire que tu confesses ta pitié et la puissance de Dieu. Et dès lors, confesse ton péché, repens-toi, et prie honnêtement Dieu le Très Haut. Dis dans ta prière. « O Dieu des esprits et des corps, tout puissant et tout miséricordieux, pardonne-moi pécheur, aie pitié de moi et sauve-moi au nom de la passion sur la croix de Ton fils, notre Sauveur Jésus Christ. » Et ne sois pas pris de doute au moindre coup que tu reçois. Dieu aura pitié de toi, et Il fera fuir loin de toi ce vain épouvantail.
Puisse Dieu te venir en aide.
Lettre 13. (p.25)
A un officiel qui pense que les fidèles observent trop de fêtes.
Les fidèles pensent que les Saints les aident, et , tu penses, toi, que les Saints les gênent. Qui peut trouver un lien entre ta manière de raisonner et le raisonnement des fidèles, si ce n’est toi. Essaie d’étudier cette configuration des choses en profondeur et de tous côtés et tu te rendras au raisonnement des fidèles.
D’abord, regardons-y du point de vue du travail. Tu penses que nos fidèles travaillent trop peu. Et tu voudrais qu’ils travaillent plus. Pourquoi devraient-ils travailler davantage ? Voudrais-tu générer une classe sociale d’un million de chômeurs ? Tu es trop grand patriote pour souhaiter une telle chose. Ne vaut-il pas mieux que les gens travaillent modérément comme ils le font pour éviter le mal du chômage qui est le premier fléau pour tous les grands empires de l’Ouest ? Dès que tu atteins un extrême, un autre extrême indésirable pointe sa tête. Les Serbes ont peut-être d’autres défauts, mais pas la paresse. La paresse n’est pas un vice des Serbes. Si les gens sont surchargés de travail, cela génèrera de la paresse.
Examine cela du point de vue de la joie dans le travail. Notre peuple ressent de la joie dans son travail. D’où les chansons et même les musiques qui retentissent durant le travail . Où y a- t-il la même chose ailleurs ? As-tu déjà entendu des chansons et de la musique durant le travail dans l’un des pays des extrêmités de la terre ? Dans les pays industriels, le travail est considéré comme un fardeau, une malédiction et un malheur. De là le désir de ne faire qu’aussi peu de travail que possible. C’est pourquoi il y a toujours de l’agitation sociale dans ces pays, et des manifestations demandant à ce que les pays travaillent moins. Premièrement, ils ont demandé la journée de travail de dix heures. Puis ils ont demandé la journée de huit heures. Maintenant, ils demandent la journée de cinq heures. Et combien de jours chômés par an ajouteraient-ils dans ce cas ? Mais toi, contrairement à ce courant moderne, tu voudrais forcer notre peuple à travailler plus qu’il ne l’a jamais fait. Et tu te dis moderniste ! Mais, depuis que tu as commencé ta sinistre agitation pour que les gens se reposent moins et travaillent davantage, il y a eu moins de chansons dans les champs et les villages de Serbie.
Considère les choses du point de vue du reste. Tu penses à tort que le peuple célèbre de nombreux Saints afin de se reposer davantage. Mais, même si les gens pensaient ainsi, ils n’auraient pas tort. Vous, qui êtes des officiels, vous reposez bien davantage que les paysans ne le font. Calcule, s’il te plaît, mon cher chef comptable, combien de jours par an le peuple observe les fêtes des Saints, et combien de jours par an, toi, en tant qu’officiel, tu passes dans l’oisiveté. Ajoute ton congé d’été de trente jours, ta demi-journée du samedi toute l’année, les heures aussi de tes journées que tu passes sans travailler pendant que les gens travaillent. Ta journée de travail fait à peine la moitié de la journée de travail du peuple. Ainsi, quand tu ajoutes tous tes jours de fête comparés aux jours de fête observés par le peuple, tu seras réduit au silence et couvert de honte. Tu réaliseras alors que tu as beaucoup plus de temps libre dans l’année que n’en a le peuple.
Il y a ici quelque chose d’important à dire. Tu as du temps libre pour passer ce temps en loisirs et à te reposer. Le peuple, lui, n’observe pas les fêtes pour l’amour du repos. Le repos n’est qu’une conséquence de la fête. En observant les fêtes des Saints, le peuple demande les intercessions des Saints. Les fidèles unissent le Ciel et la terre et demandent à Dieu de bénir le travail qu’ils ont accompli. Parce que les gens savent, d’après une expérience qui l’a prouvé des milliers de fois, que leur travail est vain, quelque immense qu’il ait été, si le Dieu de Grâce ne mouille pas la terre, n’y fait pas briller le soleil, et ne la protège pas de la grêle, de la peste, et du restant des malheurs.
C’est pourquoi, je te le demande, cesse de corrompre l’âme du peuple. Reste en paix et apprends du peuple, tout comme le peuple apprend de Dieu et de l’expérience des siècles. Paix et salutations à toi.
Lettre 14. ( p.27).
A Haji-Jovan qui demande « ce qui est le plus important pour le salut de l’âme. »
Je vais aussi te demander quelque chose, cher co-voyageur, et quelle que soit la réponse que tu me donneras, tu te la seras donnée aussi . Qu’est-ce qui est le plus important pour un enfant nouveau-né ? Est-ce la nourriture, ou la chaleur, le bain ou le regard ? Tu peux dire qu’entre ces choses certaines sont plus importantes que d’autres, mais tu dois admettre que ces quatre choses sont importantes pour le développement harmonieux d’un enfant.
L’âme d’un homme conscient et repentant est comme celle d’un enfant nouveau-né. Rappelle-toi comment le Christ a parlé à Nicodème du fait de renaître. Il est important pour une âme nouvellement née de se nourrir de la science du Christ, d’être purifiée par le jeûne et la prière, d’être réchauffée par l’amour pour son Créateur, et de se voir soi-même grâce à la vigilance des pensées et des désirs contre tous les traits ennemis et les blessures spirituelles.
Est-ce que le Sauveur ne nous a pas dit à travers Ses Apôtres : « Si vous m’aimez, gardez mes commandements ». Il n’a pas dit : « Gardez un commandement », mais « gardez mes commandements, c’est-à-dire tous Ses commandements. Et les commandements du Christ concernent nos luttes pour le salut de nos âmes. Il n’y a pas juste une lutte, mais de nombreuses luttes.
Tu es comme un arbre fruitier bien connu. Combien de luttes y a -t-il autour d’un arbre fruitier ? Et tu n’omets aucune d’elles ; Et puis, comment pourrions-nous omettre une seule lutte pour notre propre âme, qui est notre seul bien, la seule chose qui nous appartienne, qui ne peut pas être engloutie même par la tombe insatiable ?
Vois, tu as même considéré comme nécessaire pour ton âme de faire un pèlerinage à Jérusalem ; Ce n’est pas un commandement du Seigneur, mais cependant par amour pour le Seigneur et par amour de ton âme, tu as entrepris de mener à bien ce périlleux voyage, de soutenir cette lutte. Comment pourrions-nous dès lors, regarder un quelconque commandement du Seigneur comme étant de moindre importance ?
La paix et la joie du Seigneur soient avec toi.
Lettre 17. P.31.
A une femme oppressée par une lourde dépression.
Tu dis que tu es accablée d’une tristesse inexplicable qui t’envahit toute. Tu es en bonne santé physique, ta maison est pleine, mais ton cœur est vide. Ton cœur est plein d’une sombre tristesse. Tu es obligée d’aller à des fêtes et à des célébrations, mais cela ne fait qu’augmenter ta tristesse.
Fais attention, cette dépression est une sérieuse maladie de l’âme. Elle peut complètement tuer l’âme. L’Eglise considère que ce type de tristesse est un péché mortel. Parce que, selon l’Apôtre Paul, il y a deux types de tristesse . Il y a « la tristesse selon Dieu qui apporte la repentance et le salut, cependant que la tristesse selon le monde apporte la mort. » Tu es bien évidemment atteinte par la seconde sorte de tristesse.
La tristesse selon Dieu survient chez un homme qui se rappelle ses péchés, en sorte qu’il se repent et pleure devant Dieu. Ou bien elle advient si on est troublé par les péchés des autres. Ou si quelqu’un est zélé pour la foi de Dieu, mais voit les gens chuter loin de la foi. Ce type de tristesse, Dieu l’inverse en joie. Saint Paul décrit les Apôtres et le reste des vrais serviteurs du Christ « comme ceux qui s’affligent, mais en même temps se réjouissent. » Ils se réjouissent parce qu’ils sentent la puissance et la proximité de Dieu. Et le Psalmiste dit aussi : « Rappelle-toi Dieu et réjouis-toi. »
La tristesse des Saints est comme des nuages au travers desquels brille le soleil du réconfort. Mais ta tristesse à toi est comme une éclipse solaire. Tu as dû commettre nombre de grandes offenses et de péchés envers Dieu, que tu as considérés comme négligeables ou hors de propos, et tu ne les as pas confessée ou tu ne t’en es pas repentie. Comme de vieilles toiles d’araignées, elles ont maintenant encombré ton cœur, et ont créé une tanière pour cette grande dépression qui est maintenue en toi par une force démoniaque. Aussi, considère ta vie entière. Survole-la sans rien omettre et confesse tout péché. Par la confession, tu purifieras et aéreras la maison de ton âme. Et l’air frais du Saint Esprit, un air qui dispense la bonne santé viendra au-dedans de toi. Après quoi, commence à faire hardiment ce qui est bon. Par exemple, mets-toi à donner des aumônes au nom du Christ. Rappelle-toi le nom du Christ en l’invoquant sans cesse. Christ verra et sentira cela, et bientôt Il t’accordera la joie. Il t’accordera une joie ineffable , qui ne peut-être donnée que par Lui, et qui ne peut être enténébrée par aucune force démoniaque.
Lis le Psautier. C’est le livre indiqué pour les âmes souffrantes – un livre de réconfort. Puisse le Seigneur te rendre bientôt heureuse et contente.
Lettre 15. (p.28)
A un patriote qui dit : « Etre un bon Serbe suffit, la foi est secondaire. »
Je dis aussi qu’il suffit d’être un bon Serbe, mais seulement si l’on suit l’exemple des plus grands d’entre les Serbes qui sont apparus à la face du monde durant le dernier millénaire. Mais je n’ose pas dire ce que tu as dit – que la foi est secondaire ! Tous les Serbes me feraient mentir.
Tu es un bon Serbe si tu as la douce âme du roi Vladimir, l’endurance de Nemanja, l’humilité d’Uros, le sens su sacrifice de Lazare, l’esprit de chevalerie de Strahinja, l’amour de Marko pour la vertu, le cœur de la mère de Jugovici, l’espérance de Milica, la douceur de Jevrosima, la grâce des jeunes filles du Kosovo, la patience du peuple réduit en esclavage, la clairvoyance des joueurs d’instruments aveugles, la sagesse des prêtres et des moines Serbes, la modestie des artisans, le goût des tisserands populaires, la clarté des diseurs de proverbes, la modération et le sens de la Providence des paysans Serbes, et l’éclat radieux de gloire de tous les Serbes baptisés.
Mais est-ce que tout cela ne vient pas de la foi ? Si, de fait. Le fondement de l’être et la force qui menait tous ceux sus-nommés viennent de la foi en Christ. Si tu n’as aucune des vertus de cette liste et que tu continues à te dire Serbe, tu n’es que le nom d’une marque de fabrique dans un magasin vide. Et je ne pense pas que tu souhaiterais ni que je souhaiterais pour toi que tu sois un tel objet.
Dire à quelqu’un : « Sois un bon Serbe, la foi est secondaire » serait la même chose que de dire à un mouton : « Engraisse-toi, mais ne sors pas brouter – la pâture est sans importance.
Nul ne peut-être un bon Serbe sans être d’abord un homme bon. Mais il n’est aucune force dans le monde, ni il n’y en a jamais eu, qui pourrait rendre un homme bon, autre que la force de la foi Chrétienne.
Ainsi ne souhaite pas que les Serbes soient privés de substance vive.
N’aie jamais pour guide un homme sans esprit, et qu’un Serbe sans foi ne soit jamais ton camarade
Voici ce que je te souhaite. Je te salue.
Lettre 16. (p.30).
A un jeune homme qui souffre toujours d’une manière ou d’une autre.
Ta lettre m’a réellement ému. Je ne cacherai pas que je l’ai lue plusieurs fois et que j’ai versé des larmes. Elle contient tout le drame de la vie humaine.
Tu écris que tu as grandi dans la délinquance. Tu avais surtout l’habitude de voler. Mais tu t’es protégé intelligemment et, jeune homme, tu t’es attiré les louanges de tout le monde. Mais un jour, tu as été surpris en flagrant délit de vol, et tu as été poursuivi. Tu as couru et tu t’es cassé la jambe. Personne n’a su ton secret de voleur. Un médecin a été appelé. Ce médecin a dit que ta jambe était perdue. Un prêtre fut invité à lire sur toi la prière des malades. Tu dis que la prière n’eut pas d’effet sur ta jambe cassée, mais qu’elle remua ton âme. Tu t’es souvenu de Dieu et tu as pris en horreur la mauvaiseté de ta vie. Aussi t’es- tu repenti de toute ton âme et as-tu promis de vivre selon la loi de Dieu. Dès là, comment sais-tu si cette prière ne t’a pas aidé ? Elle t’a réveillé. Elle a ressuscité ton âme. Et c’est là la chose la plus importante. Tu as payé pour ton âme en perdant une jambe. Tu as fait une bonne affaire. Sois en paix.
Mais ce n’est pas la fin de tes déboires. Quand tu as guéri, tu t’es mis à prier Dieu de tout ton cœur. Alors des gens t’ont accusé d’être un déserteur et un diseur de bonne aventure. Et cela t’a beaucoup troublé. C’est pourquoi tu m’écris à présent et me demande ce que tout cela veut dire.
Cela signifie que le chemin qui mène au Royaume des Cieux est étroit. Le Sauveur l’a dit pour tous ceux qui voudraient le suivre. Il ne devrait pas y avoir de surprises à ce sujet. Si tu fais le mal, Dieu te punira. Si tu fais le bien, les gens peuvent malgré tout te punir. Si tu fais le mal, les gens peuvent te louer, mais Dieu te punira. Si tu fais le bien, les gens peuvent te punir, mais Dieu te récompensera. Le Christ n’a fait que le bien, et les gens l’ont crucifié.
Ne prête pas attention aux gens. Focalise-toi sur Dieu. Tu as donné une jambe pour ton âme. Si cela est nécessaire, donne ton corps entier pour ton âme. Ce serait encore peu cher payé, parce que tu donnerais du corruptible en échange de la perle précieuse.
N’aie pas peur. Continue d’avancer sur le sentier où tu marches. Puisse Dieu t’aider.
Lettre 12. P.23.
A une femme ayant avorté pour lui exposer que les morts se vengent.
Tu m’écris que quelque chose te dérange dans ton sommeil. Trois enfants t’apparaissent dès que tu fermes les yeux, et ils se rient de toi, se moquent de toi, te menacent et t’effraient. Tu dis que tu es allé voir des gens avisés pour essayer de trouver un moyen de guérison. Ils t’ont dit : « Ce n’est rien ! » Tu leur a répondu : » Si ce n’est rien, alors éloignez de moi ce phénomène monstrueux. Comment ce qui m’a tourmentée six mois durant ne serait-il rien ? » Mais eux rétorquèrent : « Change d’environnement, entoure-toi d’une compagnie de gens gais, nourris-toi mieux. Ce n’est que de l’hypocondrie. »
Ma sœur, je connais ces prétendus sages. Ils se sont focalisés sur des mots comme hypocondrie, télépathie, auto-suggestion, et avec ces termes ils omettent une indéniable réalité spirituelle, à la place de laquelle ils proposent un emploi du temps consistant à prendre l’air, à s’entourer de gaieté, à consommer viandes et vins.
Mais je te le dis – les trois enfants qui t’apparaissent sont ces mêmes trois petits enfants que – tu l’as admis toi-même – tu as tués avant que le radieux soleil ne brille sur eux. Et maintenant, ils prennent leur revanche et ils exécutent leur vengeance. Et la vengeance des morts est terrible, et même au-delà du terrible. Et puisque tu te considères comme une femme de lettres, je te donnerai quelques exemples tirés de ces livres que tu connais. D’entre eux, tu te rappelleras certainement Macbeth contant comment un roi d’Angleterre fut tué par l’esprit d’un mort. Tu as à n’en pas douter lu comment le roi Vladislav, le meurtrier du roi Vladimir, a été tué par l’esprit de Vladimir.
Mais peut-être n’as-tu pas lu cette autre histoire. L’empereur byzantin Constance avait un frère, Théodose, qu’il n’aimait pas parce qu’il avait peur qu’il lui prenne son trône. Et à cause de cela, Constance força Théodose à devenir diacre. Mais la crainte continuait de posséder l’empereur. Finalement, il décida de passer au crime. Il s’arrangea pour faire tuer brutalement Théodose. Alors, il soupira de soulagement, pensant qu’il était à jamais à l’abri de toute rivalité. Mais cet homme ignorant ne pensait pas que les morts sont plus puissants que les vivants, et que celui qui assassine un innocent ne triomphe pas, mais place l’arme aux pieds du tué. Une nuit après le meurtre, Théodose, le diacre assassiné, apparut à son frère l’empereur avec une coupe de sang fumant, et s’écria d’une voix terrifiante : « Bois, frère ! » L’empereur bondit et alarma la cour entière ; mais nul ne put rien lui dire de cette affaire. Une autre nuit, la même scène se répéta – le diacre apparut avec une coupe de sang et poussa un cri terrible : « Bois, frère ! » L’empereur alarma tout Constantinople, mais tous le fixèrent avec étonnement , tout comme des gens avisés vous fixent , ceux qui vous renvoient respirer de l’air pur et vous disent de manger une meilleure cuisine. Une autre nuit encore, la même chose se reproduisit. Finalement, l’empereur Constance, qui était vif et en bonne santé le soir, fut trouvé le lendemain mort dans son lit.
Lis-tu la Sainte Ecriture ? Tout y est dit. Tout y est expliqué, et comment et pourquoi les morts tirent vengeance des vivants. Lis ce qui concerne Caïn qui jamais nulle part ne connut aucune paix à cause du meurtre de son frère. Et s’y trouve aussi expliqué comment l’esprit offensé de Samuel se vengea de Saul. Et comment le pauvre David eut douloureusement à souffrir, des années durant, du meurtre de son général Urie ( qu’il avait fait tuer pour lui prendre sa femme Bethsabée). Lis aussi, si tu sais comment t’y retrouver, ce qui concerne les milliers et les milliers de cas semblables, qui se sont produits depuis Caïn jusqu’à toi. Puis tu comprendras ce qui te tourmente et pourquoi. Tu comprendras que le monde des victimes tuées est plus fort que le monde des meurtriers et que la vengeance des tués est terrible.
Réalise et comprends cela d’abord. Puis fais tout ce que tu peux, en faisant pénitence, pour tes enfants assassinés. Et alors, le Dieu de pitié, pour lequel il n’y a pas de morts, te pardonnera et t’accordera la paix. Ce qu’il faudrait que tu fasses, demande-le à l’Eglise. Les prêtres connaissent la réponse.
Puisse Dieu avoir pitié de toi.
Lettre 94. (p.179).
A un futur pèlerin au sujet de la grotte de Béthléem.
Tu prépares un voyage en la Terre Sainte du Seigneur. Tu dis que tu as entendu parler de la conférence de l’Evêque Nectaire à propos d’un précédent pèlerinage, et cela t’a inspiré pour mettre davantage encore à exécution ton intention bénie. Mais tu voulais apprendre avant Noël quelques détails supplémentaires au sujet de la grotte de Béthléem, ce palais terrestre du Roi Céleste.
La grotte la plus glorieuse au monde est située à l’extrêmité de la ville de Bethléem. Une route en bon état, aussi blanche qu’une toile, conduit les pélerins de Jérusalem à Béthléem. Mais nous ne faisons pas grand cas de la route ; de nos yeux nous regardons la route, mais nos pensées sont focalisées sur cette sainte grotte. Tout autour de nous se dresse un rude paysage de rochers. Le long de la route, l’on distingue un peu de verdure, une vigne ici et là, quelques oliveraies, un petit champ de blé, puis, essentiellement, des rochers. Mais avons-nous à nous soucier de cela ? Nos yeux regardent tout cela superficiellement, tandis que notre âme attend de voir cette chère grotte. Nous passons le monastère de Saint Elie, où les rois Mages d’Orient passèrent la nuit à leur retour de Béthléem, et où ils reçurent d’En Haut le message de ne pas se rendre auprès d’Hérode mais de retourner dans leur pays par un autre chemin. Nous entrons dans Béthléem. Béthléem veut dire la Maison du Pain. Un nom très mystique et recélant maintes significations, pour une ville dans laquelle naquit celui qui a dit : « Je suis le pain de vie. » C’est une ville arabe. Tous les gens sont Arabes. On n’y rencontre qu’occasionnellement un Grec ou un Juif. Beaucoup parlent russe aussi. Ils l’ont appris à cause des milliers de pèlerins russes qui ont coutume de venir ici. Notre groupe de pèlerins parle serbe avec eux et ils comprennent quelque peu. Ils nous entourent, nous présentent des chapelets, des icônes, des croix emperlées et divers objets faits de bois d’olivier. Ils vendent tout cela et en vivent. La ville entière vit ainsi du Christ, et ce non pas depuis peu, mais depuis des siècles. Mais tout cela n’est que de peu d’intérêt pour nous à ce moment -là. Nos yeux cherchent la grotte glorieuse. Nous demandons où est la sainte grotte. L’on nous conduit le long d’une rue, jusqu’à une église spacieuse, emplie de colonnes de marbre. C’est donc bien ici qu’est la grotte, dans cette église même.
L’empereur Justinien a construit cette grande église au-dessus de la grotte, cinq siècles après la naissance du Christ. Nous descendons quelques marches d’escalier sous l’église, pour entrer dans la grotte. Nos cœurs palpitent et brûlent. Dans cette grotte froide commença de battre le cœur le plus chaleureux qui ait jamais battu sur la terre. Chaque battement de ce cœur était signe d’amour pour l’humanité. Du côté droit de la grotte s’élève un autel avec maintes veilleuses argentées et dorées. Il indique le lieu où le Christ naquit de la très pure Vierge Marie. Du côté gauche, se dresse un autre autel avec beaucoup de veilleuses également. C’est là où se trouvait la mangeoire. C’est là où le Christ enfant gisait emmailloté sur de la paille, dans une mangeoire. Beaucoup de pèlerins de notre groupe se mirent à pleurer d’émotion. Dieu a dit à travers un prophète : « Et j’enlèverai le cœur de pierre de votre corps et je vous donnerai un cœur tendre. » ( Ezech. 36 :26). C’est bien dans cette grotte que le cœur de pierre devient aussi tendre que de la cire chaude ; La grotte en elle-même est petite et sombre. Il y a beaucoup de grottes sur la terre Sainte qui sont beaucoup plus spacieuses et beaucoup plus belles. Il y en a qui sont confortables pour y mettre du bétail, d’autres où des gens vivent, et d’autres qui servent de tombes. Mais le Fils de Dieu, celui qui aime l’humanité étant descendu du trône de la Lumière éternelle sur la terre, n’a pas même choisi la meilleure des grottes, la plus lumineuse, ni la plus confortable. Quelle humilité ! Quelle condescendance pour l’amour de nous. De là, nous tombons tous à genoux pour nous prosterner devant lui, qui est raison éternelle et éternel Amour. Et toutes nos âmes s’élèvent de cette grotte vers lui, Roi du Ciel et de la terre, vainqueur du péché et de la mort. En outre, qu’est cette grotte pour nous sinon une claque sur le visage de notre vanité et un témoin permanent de Sa grandeur ? Lui, le Seigneur ressuscité et vivant voyage invisiblement avec nous, comme Il le fit une fois avec ses deux disciples sur le chemin d’Emmaüs. Et nous sentons Sa présence, et nous nous réjouissons à chaque pas. Lorsque nous chantâmes le tropaire de la Nativité, un pèlerin s’exclama : « Christ est né ! » Et nous tous répondîmes en chœur : « en vérité, Il est né ! » Et la grotte entière nous faisait écho comme une grosse cloche. Puis nous partîmes, et nous rendîmes en visite chez le Métropolite Grec, et plus loin encore. Mais notre âme demeurait dans la sainte Grotte, et la sainte grotte demeure dans notre âme, jusqu’à aujourd’hui même.
Lettre 92. (p.175).
A un petit garçon qui voulait entendre un conte de Noël.
Je vais te raconter une histoire qui m’a été racontée par les Arabes Orthodoxes du village de Bethjalla près de Béthléem. Dans les temps anciens, longtemps avant la naissance du Christ, il y avait un homme à Béthléem du nom de Jessé, le fils d’Obadiah, le petit-fils de Ruth et Booz. Et ce Jessé avait huit fils. Le plus jeune fils de Jessé s’appelait David. David était un berger et gardait ses moutons aux alentours de Bethléem. La Sainte Bible décrit David comme un grand jeune homme aux cheveux bruns avec un beau visage. Outre cela, ce joli berger était incroyablement fort et courageux. Si un lion ou un ours venait voler l’un de ses moutons, il attrapait aisément l’animal, arrachait le mouton à ses griffes et tuait la bête. Ainsi donc David, pour son blanc troupeau, était véritablement un bon berger fiable. Et il honorait grandement son père. Enfin, il honorait Dieu. David dormait souvent dans les champs, sur le lit luxueux de la terre, et il avait pour couverture dorée le ciel étoilé. Pourtant, ce que je vais te raconter ne se produisit pas à ciel ouvert sous les étoiles, mais dans une grotte, tout près de Béthléem.
C’était un jour de grosse chaleur, comme cela arrive souvent dans les pays d’Orient. Les moutons de David se tenaient à l’ombre des oliviers. Le soleil brillait de tout son éclat et le bétail était accablé de chaleur. David aussi était fatigué par cette même chaleur. Alors il entra dans une grotte pour s’abriter du chaud et se reposer à l’ombre. Dans cette grotte, il fait frais durant les jours d’été et chaud l’hiver. Etant entré dans la grotte, le jeune berger se sentit immédiatement bien et s’assit. Bientôt, il s’allongea à terre et s’endormit. Mais il ne se passa guère de temps que David ne sentît quelque chose de froid sur les mains, ce qui le fit s’éveiller de son rêve. Quand il ouvrit les yeux, il vit un terrible serpent enroulé autour de lui, et il s’éveilla tout-à-fait de son rêve. Le reptile posa sa tête plate sur le visage du jeune homme en sifflant. Il le regarda d’un air mauvais avec des yeux qui luisaient comme des charbons ardents ; Il faisait sombre dans la grotte, et dans l’obscurité, les yeux de la bête étaient comme deux flammes. David se secoua avec terreur. Sa situation était désespérée, sans issue possible. S’il bougeait tant soit peu la main ou la tête, le serpent ne manquerait pas de le mordre et de répandre son venin dans son sang. Combien il était plus facile de se battre contre un lion rugissant ou contre un ours grognant qu’avec ce redoutable reptile rampant ! Que pouvait-il faire ? Soudain David se souvint de Celui qui l’avait déjà aidé dans les tribulations, son Seigneur, et il poussa du fond du cœur, en pleurant, un cri de douleur : « Ne me laissa pas Seigneur mon Dieu, ne m’abandonne pas, ne te détourne pas de moi ! Viens vite à mon aide, ô Délivrance de mes peines ! » Aussitôt qu’il eut dit ces mots, une lumière étrange brilla dans un coin de la grotte. La lumière était en forme de mandorle et le faisceau lumineux était à taille humaine. Au milieu de ce cercle, David vit une belle jeune femme, douce et sérieuse tout ensemble. La jeune femme était assise avec la tête penchée et tenait un enfant dans ses bras, si beau que le fils de Jessé n’en avait jamais vu de pareil. Soudain, l’enfant s’assit sur le giron de sa mère et fixa sévèrement le serpent ; ses yeux semblaient deux lampes brillantes. L’enfant pointa du doigt l’entrée de la grotte, ordonnant de la sorte au serpent de sortir. Immédiatement le serpent se déroula des mains de David, tomba sur le sol et se glissa dehors. David sauta sur ses pieds et se prosterna sur le sol, devant l’enfant et sa mère qui étaient enveloppés de lumière. Mais juste au moment où il allait leur dire un mot de gratitude pour lui avoir sauvé la vie, et cependant que les mots étaient déjà dans sa gorge, il ouvrit les yeux et ne vit plus rien. L’apparition avait disparu. Mais alors la grotte entière fut remplie d’un doux parfum embaumant la myrrhe et un encens précieux.
Jusqu’à sa mort, David ne put oublier ce merveilleux évènement. De berger, il devint roi, mais la scène était toujours bien présente en sa mémoire. En sa qualité de roi, il écrivit deux beaux psaumes, l’un intitulé : « Au plus beau d’entre les fils des hommes », et l’autre : « A la reine en ornements dorés. » Et il chantait ses psaumes sur sa harpe, lui, le roi, du haut de sa tour de Jérusalem.
Et toi, maintenant, petit garçon, devine : Quelle était cette grotte ? Quel était ce terrible serpent ? Qui était cette jeune femme, et qui était cet enfant ? Pour te rendre la chose plus aisée à deviner, je t’adresse un souhait joyeux : » Christ est né ! »
Lettre 23. (p.39).
A Jovica N., un vétéran qui parle de sa promesse et de la foi en Dieu.
Tu écris à propos d’un évènement miraculeux qui t’est arrivé durant la guerre. Quelqu’un distribuait le Nouveau Testament sur le champ de bataille. C’étaient de petits livres avec de jolies couvertures. Tu en as pris un aussi. Et tu te dis en rechignant : « Ce dont nous avons besoin ici, c’est d’armes et de munitions, pas de livres ; Si les munitions ne nous sauvent pas ici, rien ne nous sauvera ! » Ce fut ton commentaire. Jusqu’à ce jour, tu ne pensais rien de la foi Chrétienne en Dieu. Tu pensais qu’elle était semblable à un vieil imperméable sur quoi tout coule, et que la caravane de l’humanité l’avait sans utilité aucune traînée derrière elle à travers les âges. Mais cependant, tu acceptas le livre et le mit dans la poche gauche de ta chemise. Et qu’advint-il ? Tu le dis toi-même : un miracle de Dieu. Et je le souligne. Ce même jour, une bataille féroce s’engagea. Les blessés tombaient autour de toi. Soudain tu fus toi aussi atteint, et tu tombas à terre. Une balle t’avait frappé. Tu portas la main à ton côté gauche. Tu t’attendais à ce que le sang commence de couler. Quand tu ôtas ta chemise, tu trouvas la balle dans le livre, juste devant ton cœur. Tu tremblas comme en proie à la fièvre. C’était la main de Dieu ! Le Livre Saint t’avait sauvé la vie en te protégeant des balles. Tu considères ce jour comme celui de ta naissance spirituelle. Depuis ce temps, tu as commencé d’éprouver la crainte de Dieu et tu as soigneusement étudié la catéchèse qui expliquait ta foi. Cette foi n’était plus un vieil imperméable sur lequel tout s’écoule en vain ; Et la caravane de l’humanité ne l’avait pas tout au long de son chemin traînée pour rien ; Dieu, par Sa Grâce, t’avait ouvert les yeux. Il est écrit : « Dieu aime les vertueux et prend pitié des pécheurs. » A la guerre, certains ont perdu leur corps, et d’autres ont perdu leur âme. Celui qui n’a perdu que son corps a moins perdu. Et certains ont gagné leur âme. Ceux-là sont les véritables vainqueurs ; Certains sont partis à la guerre comme des loups et sont revenus comme des moutons. J’en connais beaucoup. Ce sont ceux qui, comme toi, ont senti à travers quelque évènement miraculeux que le Dieu invisible marche devant eux. Comme le glorieux psalmiste l’a dit : « Je vois Dieu devant moi ; Il est à ma droite et je ne chancelle pas. » Lis-tu le Psautier ?
Si donc toi, qui étais sans foi, a senti comment le Tout-Puissant œuvre dans la vie humaine, combien davantage les croyants et les pieux le verront-ils ?
La paix et la joie de Dieu soient avec toi.
Lettre 93. (p.177).
Au professeur Nicolas S. sur la question de savoir pourquoi Christ devait naître et non pas se contenter d’apparaître.
Tu as demandé pourquoi le Seigneur devait naître, grandir, et être supplicié ? Pourquoi n’est-il pas soudainement apparu, surgi des cieux avec la forme d’un homme fait, comme Apollon dans la mythologie grecque ? C’est là une comparaison tout-à-fait inappropriée ! Comment peut-on comparer un homme véritable à des monstres de fiction ?
Autant le Ciel est élevé au-dessus de la terre, autant la sagesse de Dieu dépasse la raison humaine. Selon la sagesse du Très-Haut, Christ devait venir dans le monde en tant qu’enfant, que jeune homme et qu’homme mûr, en sorte qu’il soit accessible à tout le monde et puisse gagner chacun à sa cause pour le Salut de son âme. S’il n’avait jamais été enfant, ses paroles auraient été froides et sans relief. « Laissez les enfants venir à moi, et ne les en empêchez pas, car le royaume des Cieux est à eux. » Et aussi : « En vérité, je vous le dis, si vous ne redevenez pas comme des enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. » Tu es un précepteur d’enfants. Pense, en tant que professeur, comme ta relation avec des enfants aurait été différente, si tu n’avais pas été un enfant.
Christ aurait pu, sans aucun doute, apparaître au monde comme tu l’imagines. Mais s’Il avait fait cela, Il n’aurait pu être pour la race humaine ce qu’Il voulait être, c’est-à-dire le Maître enseignant et le Sauveur de tous, non plus qu’un exemple pour toutes les générations.
Une pensée te tourmente. Tu penses que le Seigneur a magnifié aux yeux de notre raison le mystère de Son existence par Sa naissance inhabituelle. Mais est-ce que Son mystère ne serait pas beaucoup plus grand et moins compréhensible encore s’Il était soudainement apparu parmi les hommes, sans avoir aucune relation avec eux ? Est-ce que le monde ne parlerait pas alors de lui comme d’une apparition ? En ce cas, Sa personne, et avec elle Son enseignement et Son Sacrifice perdraient leur véritable fondement et leur vraie signification. Car s’Il n’avait été qu’une apparition, qui écouterait et imiterait une apparition ?
Le Seigneur devait aussi naître, exactement de la façon dont Il le fit, afin de nous montrer la possibilité et de désigner l’importance de notre renaissance spirituelle, ce qui est le centre de Son enseignement sur l’homme. Selon Sa parole, « si quelqu’un ne renaît pas, il ne peut pas voir le royaume de Dieu. » Comme Il naquit du Saint Esprit et de la chair de la Vierge Marie, ainsi nous pouvons spirituellement renaître du Saint Esprit dans la pureté de notre âme. Les grands Anciens Orthodoxes ont toujours enseigné que la renaissance d’un homme est conditionnée par une pureté virginale de l’âme. En d’autres termes, les âmes qui se purifient complètement elles-mêmes, même des pensées impures, se mettent à ressembler à la pure Vierge, et sont rendus dignes par la volonté de Dieu de devenir l’habitation du Christ. Si la naissance du Christ de la Vierge Marie n’est pas aisément comprise par l’esprit humain, elle est extraordinairement bénéfique et inspirante pour tous ceux qui désirent une renaissance spirituelle et morale de leur être.
Sois donc en paix et remercie la Sagesse éternelle de ce que le Sauveur de l’humanité soit apparu comme Il a lui-même pensé que c’était le mieux ; Et exclame-toi avec l’Apôtre Paul : « O profondeur des richesses, de la sagesse et de l’intelligence de Dieu ! » Et accueille à l’école tes élèves avec un cri de joie enfantin : « Christ est né, mes enfants!"
Lettre 91. p173.
A la communauté de la Nativité du Christ sur la question de savoir pourquoi nous nous saluons mutuellement en disant : " Christ est né!"
Quand nous disons :" Christ est né!", il en est de même que si nous disions :" Le Messie est né!", ou " le Roi est né!", ou "le Sauveur est né!" En nous saluant mutuellement de cette façon, nous témoignons l'un à l'autre que Celui qui devait venir dans le monde pour le salut de l'humanité est en vérité venu, et que nous n'avons pas besoin d'en attendre un autre. Celui que Dieu avait promis à nos ancêtres quand ils furent exilés du Paradis; Celui que les nations et les tribus païennes attendaient dans les ténèbres; Celui dont les prophètes juifs avaient clairement parlé; Celui que l'humanité privée de secours avait attendu des millions d'années. Il brilla sur la terre comme le soleil après une longue nuit. Et ainsi, quand nous disons: " Christ est né!", nous témoignons que le Très Haut a tenu Sa promesse, que les prémonitions du témoignage sont devenues vérité, que les prophéties des prophètes ont été réalisées, et que les soupirs de l'humanité ont été apaisées par la joie.
Le Messie est né - le Tout Merveilleux, Dieu et Homme, en sorte que les yeux humains las et fatigués puissent se reposer sur Lui et n'aient pas à regarder un autre Messie qu'ils attendraient vainement.
Le Roi est né - le Tout Puissant, portant à la fois le sceptre de la puissance et l'encensoir de la compassion - pour que le plus infortuné même puisse s'exclamer : " Nous sommes aussi des enfants royaux!"
Le héros est né - l'Invisible - pour défendre les vertueux, pour défaire les pécheurs, pour faire chuter du ciel les esprits de malice.
Le Guide est né - le Très Clairvoyant, Celui qui voit tout, pour conduire et guider ceux qui s'étaient perdus.
L'Illuminateur est né - Celui qui soigne tous et tout- pour sauver des loups le troupeau d'agneaux et pour le rassembler sous son aile.
Le Gardien est né - le plus riche - pour nourrir les affamés non avec des biens de la terre mais avec ceux du Ciel, avec Son corps céleste et Son sang ardent.
Celui qui aime l'humanité est né - le très rare- pour embrasser sur Son sein et vivifier de par Son amour Ses orphelins sans nombre qui sont passés depuis longtemps du tombeau de la vie dans le tombeau de la mort.
Le Révélateur des mystères est né - le plus grand que tout- pour tirer le rideau et révéler le royaume céleste et immortel aux mortels.
C'est tout cela qui est signifié par ces merveilleuses paroles par lesquelles les Chrétiens se saluent les uns les autres à Noël et par laquelle je vous salue aussi, mes frères.
"Christ est né!"
Lettre 81. (p.153).
A un rentier qui écrit qu’il a assuré son avenir et celui de sa famille.
J’ai peur pour toi. Tu m’écris que tu as assuré ton avenir et celui de tes enfants si solidement que tu peux maintenant vivre sans soucis. Ton absence de soucis a, semble-t-il, emporté loin de ton âme la crainte de Dieu. Avec quoi as-tu assuré ton avenir ? Avec de l’argent ? N’as-tu pas entendu dire que de récentes faillites de banques ont transformé des millionnaires en clochards, ou pire, les ont conduit au suicide ? Es-tu à l’abri avec des maisons et des boutiques ? N’as-tu pas entendu parler de constants tremblements de terre qui transforment momentanément les villes en décombres ? Tu as acquis des champs et des vergers ? As-tu oublié les récentes sécheresses, inondations et invasions de sauterelles ? As-tu lu l’Evangile qui t’aurait rappelé la parole du Christ – la fourberie des riches (Matt 13-22). Cela me surprend qu’en ces jours où la colère de Dieu a brisé tout bouclier terrestre dont les gens veulent se protéger en dehors de la foi en Lui, tu puisses te considérer à l’abri grâce à une aussi piètre protection que les richesses – ce qui ne constitue qu’un monceau de poussières. Tu me rappelles les Chinois qui, durant une guerre contre les Japonais, ouvraient leurs ombrelles sur leurs têtes pour se protéger des armes lourdes.
En plus de l’absence de soucis – passible d’épreuves-, qui est le propre des riches, tout en étant en abomination devant le Seigneur, je sens aussi autre chose dans ton cas, à savoir que tes richesses sont mêlées à l’injustice. Cela équivaut à manger du pain infesté de vermine. Tu vas t’empoisonner et tes enfants avec toi ; Ecoute ce que dit Saint Jean Chrysostome : « Ceux qui se sont rendus riches au moyen de l’injustice sont pires que des pauvres ; il vaut mieux mendier que voler. » L’histoire biblique de Job atteste du fait qu’un homme vertueux peut perdre toutes ses richesses en un jour, et pire s’il s’agit d’un homme sans vertu. En un jour, le vertueux Job perdit tous ses biens, et, outre ce, ses fils et ses filles. Puis il perdit la santé, et, dès lors, comme un miséreux, il gisait sur le fumier et se lamentait de ses malheurs. N’as-tu pas peur que la même chose t’arrive ? Dans sa misère et ses maladies, le pieux Job défendait son âme contre le désespoir grâce à sa foi inébranlable en Dieu. Avec quoi défendrais-tu ton âme ? Et qu’est-ce qui t’empêchera de te suicider, ce qui est dire d’ajouter un désastre spirituel à un désastre matériel ? Il est écrit dans la Sainte Ecriture : « Celui qui aime l’injustice hait sa propre âme. » Lorsque tu es dans la solitude, et durant les heures calmes de la nuit, parle à ta conscience et demande-toi si vraiment tu préfères l’injustice à ta propre âme.
Hâte-toi de rassembler des richesses en Dieu, selon la parole du Sauveur. Et devenir riche en Dieu veut dire accumuler des richesses que Dieu apprécie et dont l’homme ne sera jamais spolié. Telles sont les richesses de la foi et de la confiance en Dieu, de la pitié et de la compassion, de la vérité et de l’amour fraternel. De par ce bouclier, tu protègeras ta vie et la vie de tes enfants plus sûrement que tu ne le pourrais avec aucun empire de la terre, même s’il s’étendait de l’est à l’ouest de la terre.
Puisse Dieu t’illuminer et te bénir.
Lettre 96. (p.96).
Au missionnaire Danilo M. au sujet des lettres écrites sur l’auréole du Christ.
Tu voulais savoir ce que signifient ces trois lettres – écrites sur les icônes du Christ à l’intérieur de l’auréole ceignant le tour de sa tête. Ce sont en grec les lettres signifiant : « Celui qui est. »
Ces lettres sont grecques. La première lettre est l’article « le » et les deux autres lettres forment le participe grec « étant ». Ainsi, il y a en fait un seul mot, traduit en Slavon également en un seul mot. Dans la langue anglaise, ce mot peut-être traduit comme « Celui qui Est », ou « L’Etant ». C’est ce que nous lisons également dans l’Ancien Testament. « Et Dieu dit à Moïse : « Je suis Celui qui Est » Aussi vous direz aux fils d’Israël « Celui qui Est m’a envoyé vers vous. » ( Ex. 3,14). Dans l’Apocalypse de Jean, nous lisons ce qui suit sur ce nom : « De Jean aux sept Eglises qui sont en Asie : La Grâce soit sur vous et la paix de Celui qui Est. » ( Apocalypse 1, 4). Par ce mot « l’Etant », la divine nature de notre Seigneur Jésus Christ est exprimée. De son Père éternel vient Son Fils co-éternel. Le Père est Lumière, le Fils aussi. Le Père est Dieu, le Fils est Dieu. Comment pourrait-il en être autrement ? Nous en voyons une image sur la terre, dans les créatures terrestres : Telle est la nature d’un parent, telle est la nature de sa progéniture. Si le parent est charnel, sa descendance l’est également. Si le parent est mortel, la descendance est également mortelle. Si le parent est lié au temps et à l’espace, la descendance l’est aussi. Mais dans l’éternité, il n’y a pas de liens spatio-temporels. Et dès lors, Celui qui est né de l’Eternel est éternel lui-même. Le Fils de Dieu est de la même essence que son père éternel. Puisque le Père existe à jamais, éternellement le même, tel est aussi le Fils du Père éternel. C’est pourquoi le Fils de Dieu a pu dire de lui-même : « Mon Père et moi sommes un. » Mais puisque Dieu est un esprit éternel, l’éternel engendrement du Fils dit aussi être compris spirituellement. Il est ordinairement difficile pour les gens de se libérer des symboles du temps, et des conceptions de la naissance charnelle, quand ils pensent à Dieu et au Fils de Dieu. Pense que la sagesse est née de l’amour afin de tâcher de comprendre les grands Mystères du Ciel. Un homme qui possède un amour pur, possède aussi une vraie sagesse. Un homme sans amour est toujours sans sagesse.
Mais pour ce qui est de l’accomplissement des éternels mystères célestes, la mesure et la discrétion sont conseillées. Est-ce que ce qui nous a été révélé par la Grâce de Dieu ne suffit pas ? Et il nous a été révélé que le Fils éternel de Dieu est apparu au monde dans un corps, né de la Très Sainte Vierge Marie. Il a habillé son être spirituel et divin d’une âme et d’un corps humains, et il est apparu comme un homme parmi les hommes. Mais en faisant cela, Il ne s’est pas séparé de l’éternité ni de Son Père éternel, pas même pour un temps. Ni Il n’a cessé d’être Celui qui est, l’Immuable et l’Eternel. En tant qu’homme, Il a été sujet aux changements, IL a grandi, Il a eu faim, Il a souffert, Il est mort – Mais en tant que Dieu, Il n’a jamais été sujet à aucun changement. Dieu parfait et homme-parfait, voilà ce qu’Il est.
L’on raconte dans une vieille légende populaire que dans les temps anciens les hirondelles ne savaient pas qu’ils devaient migrer vers des régions plus chaudes avant l’hiver. Et quand la neige tombait et que le gel arrivait, elles souffraient terriblement et mouraient. Ce que voyant, un homme plein de compassion commença d’user de tous les moyens possibles pour engager les hirondelles à voler vers le Sud avant l’hiver. Il se mit à faire des signes que les oiseaux ne comprenaient pas, il les attira vers le Sud avec de la nourriture, mais en vain. Il les effraya, il les chassa, mais il ne réussit toujours pas à les faire migrer. Alors, il pria Dieu de le changer en oiseau. Et Dieu accéda à sa requête et le changea en hirondelle capable de sentir et de penser aussi bien qu’un homme. Et alors, cet homme-oiseau expliqua aisément toute chose aux autres hirondelles, et il les conduisit avant l’hiver dans des régions plus chaudes. Et depuis ce temps, toutes les hirondelles ont su comment et où émigrer. Bien sûr, ce n’est rien là qu’une histoire poétique. Mais elle peut t’aider à comprendre fût-ce un peu comment la sagesse éternelle née de l’amour éternel devint comme un homme parmi les hommes en sorte qu’Il puisse conduire le peuple le long d’un nouveau chemin dans une nouvelle contrée, dans le royaume des cieux « où il n’y a ni peine, ni tristesse, ni soupir ». Et tandis qu’il vivait dans un petit corps humain, notre grand Seigneur était et restait l’Existant, l’Immuable, l’Eternel. Il demeurait à toujours ce qu’il avait toujours été dans l’infinitude de Son royaume spirituel et de Sa Gloire ineffable.
Lettre 97. (p.186).
A un soldat d’une brigade d’étudiants, Svetislav K. qui demande comment Dieu peut être en l’homme.
Tu as demandé à quelqu’un : « Où est Dieu ? » Et tu as reçu pour réponse que Dieu est au-dedans de toi. Et tu t’émerveilles à cette réponse. Comment cela peut-il se faire ? C’est comme une sorte de lumière dans une chambre, ou comme un feu dans un four. Quand tu seras capable de sentir Dieu en toi, tu sentiras aussi et tu sauras qu’Il est en toi, mais tu ne seras pas en mesure de l’expliquer à quelqu’un d’autre. Mais tu chercheras des images dans la nature, après quoi tu parleras à autrui comme je te parle : Dieu est en moi comme une lumière dans une pièce, ou comme un feu dans un four, ou comme de la force, de l’amour et de la pensée en l’homme. Bien sûr, ce sont juste des images et des approximations, et elles ne peuvent pas exprimer ce qu’un homme ressent lorsque Dieu habite en lui dans Sa plénitude. L’Apôtre de Dieu, notre Père spirituel Saint Paul, souhaite aux croyants d’être emplis de la plénitude de Dieu ( Ephes.3,19). Dieu œuvre en un homme de deux façons – en l’aidant et en le dirigeant. Lorsqu’Il aide, Dieu œuvre en un homme de foi faible ou médiocre, qui ne se souvient de Dieu qu’occasionnellement et qui ne garde Ses commandements que partiellement. Dieu ne l’abandonne pas parce que cet être n’abandonne pas non plus complètement Dieu. Cependant, Dieu agit en dirigeant un homme de grande foi, qui a ouvert en grand les portes de son âme à son Créateur. Il est écrit : « Celui qui ouvre la porte, j’entrerai en lui » ( Apoc.3,20). Un tel homme ne compte aucunement sur lui-même, mais ne s’appuie que sur le Tout Puissant. Il sent la présence et le travail de l’Esprit de Dieu en lui, et il éprouve un grand amour envers son Seigneur. Et Christ a promis à celui qui aime Dieu que Dieu viendra et habitera en lui. » Tu ne seras pas en mesure de comprendre ceci si tu oublies que Dieu est un Esprit, qui peut entrer partout et être partout. Il est élevé au-dessus de toute matière, comme le soleil est haut sur la terre, cependant que sa lumière peut entrer en tout ce qui est ouvert. Comme le dit l’Apôtre : « Un seul Dieu et Père de toute chose qui est au-dessus de tout, et à travers tout, et en nous tous » ( Ephes 4,6). Il écrit ceci au sujet des saints et des croyants.
Mais quand quelqu’un rejette Dieu, se met à avoir d’horribles pensées et à parler contre Dieu, Dieu le conduit aussi. Il en va de même que si quelqu’un fermait les fenêtres d’une chambre et empêchait la lumière de venir et de tout illuminer. Car Samuel le prophète dit au roi Saul qui n’écoutait et ne faisait que sa volonté propre : « Tu as rejeté la parole du Seigneur, et c’est pourquoi le Seigneur t’a rejeté…et l’Esprit du Seigneur abandonna Paul. » Mais même lorsque Dieu abandonne l’âme d’un homme borné, Il ne cesse pas d’œuvrer en lui, tout comme il travaille l’eau, la pierre et le bois. Mais si un homme reste borné, résiste à Dieu jusqu’à la fin, et refuse de se repentir, alors Dieu permet qu’un esprit malin entre en lui. Comme il est écrit de Saul quand l’Esprit du Seigneur l’abandonna : » un esprit impur l’éloigna du Seigneur. » Ou comme il est écrit, encore pire, au sujet de Judas le traître, « Satan entra en lui ».
De tels gens qui s’insurgent contre le Christ ne peuvent bien sûr jamais sentir Dieu en eux ou dire : « Dieu est au-dedans de nous ». Et ceux qui aiment Dieu, et le désirent, et le voient, et le supplient de venir, ceux-là sentent Dieu en eux, et ils peuvent dire : « Dieu est en nous par Son Saint Esprit ». Bénies sont d’aussi brillantes âmes, car elles règnent à toujours dans le royaume du Christ. Tout comme le Seigneur l’a promis à ceux qui L’aiment, par ces mots : « Je vous emmènerai avec moi afin que vous puissiez être où je suis. »
Christ est né !
Lettre 99. (p191).
A un théologien allemand à propos de l’Eglise Orthodoxe et de la paix dans le monde.
Il te semble que l’Eglise Orthodoxe ne s’intéresse pas beaucoup à la paix dans le monde, et cela te trouble. Qu’elle ne s’y intéresse pas ? Qui pourrait désirer la paix plus que ceux qui souffrent et plus que les martyrs ? Et les peuples Orthodoxes sont des peuples souffrants et des martyrs. Je ne dis pas cela pour me vanter ni pour me plaindre, mais simplement pour établir des faits historiques vérifiés. Tu pourras même dans ta propre langue trouver des livres et des chroniques qui décrivent les souffrances longues de plusieurs siècles des nations orthodoxes. Mais ils n’évoquent qu’une infime partie de l’indescriptible mer de souffrance que les nations Orthodoxes ont traversée durant des siècles ; Si les nations riches et libres désirent la paix, je crains qu’elles ne la désirent que pour des jouissances superflues. Mais lorsque les nations souffrantes et pauvres désirent la paix, elles la désirent comme un repos très nécessaire. Ainsi, il est naturel, complètement naturel, que l’Eglise Orthodoxe, en tant que gardienne et protectrice de l’âme des nations Orthodoxes, désire de tout son cœur la paix dans le monde et non la guerre. C’est pourquoi, le matin et le soir, l’on peut entendre dans nos églises la prière « pour la paix du monde entier ». Pourquoi des prières ? Parce que nous les Orthodoxes, nous croyons que la paix sur la terre est un don de Dieu, tout juste comme le beau temps, les fruits de la terre, la pluie, la santé et la vie sont aussi des dons de Dieu. C’est pourquoi nous prions Celui qui accorde tous les biens d’accorder la paix au monde.
Tu sais toi-même que la paix est la conséquence de la vertu, et non pas l’œuvre de la ruse. Tu sais que les anges de Dieu, au-dessus de la grotte de Bethléem prièrent Dieu tout d’abord à ce sujet dans leurs chants et qu’ils chantèrent la paix sur la terre – Gloire à Dieu dans les hauteurs et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. Comment ceux qui ne glorifient pas le Créateur tout puissant par la foi et la prière peuvent-ils avoir la paix dans leur âme, et comment peuvent-ils donner au monde quelque chose qu’ils ne possèdent pas en eux-mêmes ? Tu sais aussi ce que Saint Paul a dit du Christ – Il est notre paix. Que puis-je dire d’autre ? Tu connais tout l’Evangile du Christ, qui est essentiellement le seul enseignement existant sur la paix. Aussi, sachant tout cela, comment pourrais-tu penser d’autre sorte qu’en te disant que la paix est la conséquence de la vertu et non l’œuvre de la ruse, et que la paix ne peut être atteinte que par la vertu et jamais par la ruse ? Prends pour exemple une famille en laquelle un mari et sa femme, tous deux dépourvus de vertu, gardent la paix entre eux uniquement en vertu d’une habileté qu’ils ont pur ce faire. Dans une telle famille, la paix peut-elle durer ? Mais dans une famille où l’on loue Dieu et où l’honnêteté est la règle, on ne parle même pas de paix, car la paix est bien là, comme une conséquence de la vertu. – Tout comme la chaleur est la conséquence de la lumière, ou la lumière celle du feu. Ainsi en est-il dans une nation et dans toute l’humanité. Si la vertu n’était pas si rare dans le monde, l’on ne parlerait même pas de paix. La paix viendrait de la vertu. Mais, aujourd’hui, l’on parle plus de paix qu’auparavant, et les gens se battent plus que jamais, non pour réintroduire la vertu comme la condition de la paix, mais pour imaginer une paix instaurée par la ruse. Mais tout comme on ne peut pas installer un toit avant d’avoir posé les fondations, ainsi la paix ne peut pas être établie avant la vertu. Et la fondation et l’inspiration de toute vertu pour nous Chrétiens est notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ. Qui d’autre pourrait être le fondement de la paix sur terre, si ce n’est le seul qui ait été appelé le Prince de la Paix ?
Quand les anciens des nations et des tribus voudront instaurer la paix dans le monde non comme leurs anciens ancêtres, qui, en opposition à Dieu, bâtirent la tour de Babel, ne s’appuyant que sur leurs forces propres, mais en glorifiant Dieu-
quand les nations et les tribus se prosterneront en prière devant le Tout-Puissant-
quand un jeûne sera proclamé, et que la continence de tous sera ordonnée au moins pour un temps-
quand toute offense contre le Créateur du monde sera strictement interdite-
quand toute vertu sera consciencieusement accentuée et clairement désignée comme la condition de la paix-
alors l’Eglise Orthodoxe, avec grande joie et empressement, fera tous les sacrifices dont Dieu et l’humanité ont besoin pour l’amour de la paix parmi les hommes.
Jusque- là, l’Eglise Orthodoxe fera tout ce qui est en son pouvoir. Elle enseignera la vertu fondée sur la foi, établira les êtres dans la foi et l’amour et les rendra capables de maintenir entre eux une paix mutuelle. Et avec cela, elle priera jour après jour le Prince de la paix d’accorder à tous les peuples le don divin qu’est la paix sur la terre.
La paix et la santé du Seigneur soient avec toi.
Lettre 100. (p.195).
A un garde-forestier du nom de Mandjo à propos des ailes de Saint Jean.
Tu dis que tu es né à Banat, et que ton Saint protecteur est Saint Jean le Baptiste. Tu considères que la foi en Christbest l’essence de ta vie. Lorsque ton père est mort, tu as fait en sorte de bien célébrer ton Saint, et même de façon plus festive que cela n’avait été fait dans ta maison. Mais ton travail t’a emmené en Macédoine. Et depuis tu as dû laisser ton icône ancienne chez toi avec ta vieille mère et tes sœurs. Et tu as fait faire une nouvelle icône de Saint Jean par nos iconographes de Debar. Mais à ta grande surprise, ces iconographes ont peint Saint Jean avec des ailes. Quand tu leur en as fait la remarque, ils t’ont expliqué que c’est de cette façon qu’est portraituré le Baptiste du Seigneur sur les icônes des églises locales. Tu fis alors le tour des églises alentour, tu pus le constater par toi-même, et tu fus étonné. Et tu demandes pourquoi Saint Jean est portraituré avec des ailes ?
Tu sais, n’est-ce pas, que seuls les Anges de Dieu sont portraiturés avec des ailes ? Ils le sont ainsi parce que ce sont des esprits incorporels qui se meuvent avec célérité pour exécuter les ordres que donne le Créateur. Et maintenant, écoute le témoignage du Christ sur Saint Jean : « Il est celui dont il est écrit : Et voici que j’ai envoyé mon ange devant votre face, qui préparera le chemin devant vous. » Qui a écrit cela ? Le prophète de Dieu, inspiré par l’Esprit de Dieu ( Malachie 3,1). Ainsi Saint Jean a été appelé Ange par les prophètes du Messie et par le Messie Lui-même. Et en effet, le service de Jean était semblable au service des Anges célestes. Lorsque le Sauveur du monde naquit à Béthléem, les Anges annoncèrent sa naissance aux bergers, et les invita à se réjouir et à glorifier Dieu. Trente ans passèrent ensuite de cela. Et le Sauveur fut révélé sur le fleuve du Jourdain, comme y commençant Son œuvre salvifique. Alors Saint Jean L’annonça et Le montra au peuple, appelant les gens à la repentance et à purifier leurs âmes pour se rendre dignes de le recevoir en tant que Messie et Sauveur.
C’est pourquoi les artistes Chrétiens des temps anciens ont souvent portraituré le précurseur du Christ comme un Ange avec des ailes. Parce qu’il a souvent été appelé Ange dans les Saintes Ecritures et parce qu’il s’est acquitté d’un service angélique dans l’histoire messianique du salut de l’humanité.
Que ton Saint Jean ailé te protège de tout mal. Amen.
Lettre 80. (p.151).
A une femme malade du nom de Stanija Dj. qui demande « ce qu’est un vœu ».
Un vœu est une promesse que quelqu’un fait à Dieu en guise d’action de grâce ou à cause d’un péché que l’on a commis. Dans nos villages, autour de Bitola, bien des gens vont travailler au loin. Les voyant partir, leurs mères ou leurs sœurs font secrètement un vœu à Dieu pour leur bonne santé et leur retour sains et saufs. Un samedi, nous tombâmes sur l’église d’un petit village, et nous y trouvâmes une vieille femme qui nettoyait le sol. En conversant avec elle, nous découvrîmes qu’elle faisait cela depuis dix-huit ans, tous les samedis, conformément à un vœu qu’elle avait fait à l’intention de son fils qui vivait en Amérique. Et nous entendîmes dire que lorsque son fils revint, elle continua de nettoyer l’église durant six autres mois encore, par gratitude envers Dieu.
« J’ai fait un vœu » est une expression commune dans notre région parmi ceux qui viennent dans les monastères pour y servir quelque temps. Un jour que le village de L. brûlait, un jeune homme du nom de Théodore sortit en courant de sa maison et vit la maison voisine en flamme. Terrifié, il se mit à crier à Saint Naum de l’aider, faisant le vœu qu’il le servirait pendant un an. A ce moment même, le vent se mit à souffler dans l’autre direction, éloignant le feu de sa maison. Quelque temps après, Théodore vint à notre monastère, nous raconta ce qui était arrivé et demanda à l’Abba de le recevoir un temps pour qu’il pût s’acquitter de son vœu.
Il est aussi très commun pour une mère de faire le vœu de jeûne les jours qui ne sont ordinairement pas jeûnés, et ce pour son enfant malade. Cela est tout-à-fait biblique. Le roi David jeûna durant la maladie de son enfant.
« J’ai fait un vœu », disait une vieille femme nommée Moïséica, originaire de Dabar. Elle avait servi l’ Eglise durant dix-neuf ans et avait également jeûné dix-neuf ans sans huile. Pourquoi ? Dix neuf ans auparavant, son mari s’était associé en affaires avec un Albanais. Un vendredi, il allait à Débar pour affaires avec son collègue. Avant de partir, il avait mangé du fromage et des œufs pour son petit déjeuner. Lorsqu’elle vit qu’il avait rompu le jeûne, elle dit avec colère : « Puisses-tu ne jamais revenir, puisque tu t’es associé même à la foi de ton collègue. Ce jour-là son mari fut tué et dévalisé tandis qu’il était sur le chemin du retour. Ce malheur choqua terriblement sa femme. Elle fit le vœu de servir l’Eglise et de jeûner jusqu’à la fin de sa vie.
Les vœux existent aussi chez les Anglais. Après la guerre, un prêtre Anglais célébra un mariage, qui était contre la loi. L’Evêque le réprimanda pour cela. Sa conscience l’aiguillonnant, il fit le vœu de jeûner tous les lundis de sa vie – puisqu’il avait commis cette transgression un lundi-.
Mais lorsque l’on fait un vœu à Dieu, que ce soit pour soi-même ou pour quelqu’un d’autre, soit pour un péché que l’on a commis ou par action de grâce, l’on doit bien veiller à ne pas outrepasser ses limites et à ne pas faire un vœu déraisonnable ni qui soit au-delà de ses capacités. La Bible nous relate un vœu déraisonnable de Japheth. Dans la guerre contre les Ammonites, un chef Israélien, du nom de Japheth, qui était juge, fit à Dieu le vœu que s’il gagnait, il lui offrirait en sacrifice, lors de son retour, la première chose qui sortirait de sa maison. Et il gagna. Mais tandis qu’il s’en retournait chez lui, sa fille sortit pour le féliciter. « Malheur, mon enfant », s’écria le père comme un lion blessé, « j’ai fait un vœu et je ne puis le rompre. »
Puisse Dieu t’aider.
Lettre 73. (p.138).
A une femme seule et malade, au sujet du suicide.
Je sais que cela est dur pour toi. Ton mari est mort il y a quelques années. Tu as pris le deuil, avant que d’y mettre fin. Tu as marié ton fils unique – ta joie est revenue. Puis ton petit fils te donna une joie immense. Mais cet être que tu aimais, Dieu l’a aimé aussi et Il l’a repris. A peine ton petit-fils était-il parti pour le monde invisible que ta belle-fille se sentit à son tour malade. Minée par le chagrin et par le deuil, elle partit peu après son fils. Et, finalement, ton fils unique les suivit tous deux. Tu demeuras seule et tu devais te porter toi-même. Tu as d’abord essayé de t’empoisonner. Tu as survécu. Puis tu as songé à te pendre. Mais, contre toute attente, une jeune fille du voisinage survint sur ces entrefaites. Te voyant sous la corde que tu avais préparée pour te tuer, elle te rapporta qu’elle avait entendu dire par les Anciens que le suicide est le seul péché qui ne peut pas être pardonné dans l’autre monde. Et elle te le dit justement. Cette jeune fille a sauvé ton âme. Elle est ta plus grande bienfaitrice au monde. C’est uniquement grâce à elle que tu peux maintenant espérer que tu reverras ton fils, ta belle-fille, ton petit-fils et ton mari dans l’autre monde, lorsque vous vous y rencontrerez à nouveau.
L’Eglise du Christ s’est depuis le commencement érigée contre le suicide comme devant un péché trop lourd. « Celui qui se tue lui-même a tué un homme, » dit Augustin d’Hippone. Ainsi donc, une personne commettant son suicide équivaut à un meurtrier. Mais dans notre Eglise d’Orient, le suicide est condamné plus gravement encore. Selon le 14°canon de Timothée, le Patriarche d’Alexandrie, une personne qui se suicide est privée de service funèbre et d’enterrement à l’église. L’Eglise Orthodoxe a prescrit une dure sanction fût-ce pour une tentative de suicide. Celui qui attente à sa vie reçoit l’épitimie suivante : Il est privé de communion durant douze ans. Je sais que tu trouveras cela trop dur. Mais cet aspect strict des choses s’explique par la compassion. Je te dis la vérité – l’Eglise est aussi stricte quand elle s’exprime sur le suicide, mais c’est par pure compassion envers les gens. L’Eglise possède expérimentalement et garde comme un trésor le don de prévoir à l’avance, sachant que les suicidés n’entrent pas dans le royaume de la vie immortelle et de la compassion éternelle. Et par sa stricte attitude, elle veut garder les gens de la perdition éternelle. Dans la Sainte Ecriture ne sont mentionnés que deux suicidés. L’un était Ahitofel, qui trahit le roi David, et l’autre était Judas, le traître qui livra le Seigneur Jésus-Christ. Loin de toi la pensée que tu pourrais te trouver en la compagnie de ces êtres de l’autre côté du tombeau.
« Celui qui patiente jusqu’à la fin, celui-ci sera sauvé », dit le Seigneur. Nombreuses et variées sont les épreuves dont le Seigneur permet qu’elles adviennent aux fidèles, mais leur finalité est toujours la même, c’est-à-dire guérir du péché les âmes des fidèles par cette amertume de l’épreuve, et ainsi les préparer au salut éternel. Aussi dure que la situation puisse être pour toi par moments, rappelle-toi deux choses, premièrement que c’est ton père des Cieux qui décide de ta mesure de souffrance, et secondement qu’il connaît ta force. Si jamais te vient une pensée de suicide, chasse-là comme une suggestion du démon.
Puisse la compassion de Dieu te réconforter.
Lettre 75. (p.142).
A un homme pieux dont toute la maisonnée se moque.
Avant de commencer à prier Dieu, tu étais cher à tout le monde. Et maintenant, tout-à-coup, se trouver dans ta maison est comme être dans un camp ennemi. Auparavant, tu avais coutume de boire, de fumer, de voler quelque peu, de jurer, de passer tes jours dans la paresse au lieu de travailler, et tu faisais mille autres choses abominables devant Dieu et devant les honnêtes gens. Et cependant, tu étais cher à toute ta maisonnée. Mais maintenant que tu as commencé d’emprunter le sentier de la vertu, de l’honnêteté de de la prière, ils ont commencé d’essaimer autour de toi comme des guêpes.
Réjouis-toi, frère, réjouis-toi cent fois. Ne vois-tu pas que c’est l’Evangile même qui se joue dans ta maison ? Là où les sujets abordés n’étaient récemment qu’impôts, travail forcé, voleurs, et tout ce qui a trait aux voleurs et aux esclaves, dans cette même maison des prophéties évangéliques sont accomplies. Ta maison a été élevée aux Cieux et se trouve maintenant être la scène d’un drame Chrétien. Cela a formé un lien qui te relie aux temps apostoliques et martyriques. L’histoire de l’Eglise Chrétienne se joue à présent dans ta maison comme dans un microcosme. Ici s’accomplissent les prophéties du Christ qui se sont déjà accomplies d’innombrables fois dans ce monde et qui s’accomplissent maintenant chez toi :
« Vous serez haïs de tous à cause de mon nom ; mais celui qui persévèrera jusqu’à la fin sera sauvé. » « Et l’homme aura pour ennemis les gens de sa maison. » (10 :36). » Bienheureux vous qui pleurez maintenant, car vous serez dans la joie ! » « Bienheureux serez-vous lorsqu’on vous persécutera, que l’on vous blâmera et que l’on dira faussement de vous toute sorte de mal à cause de moi. » ( Luc 6 :21). « En vérité, en vérité, je vous le dis : vous pleurerez, vous serez dans le deuil et dans la tristesse, mais votre peine se changera en joie. » ( Job 16 :20).
Y a-t-il rien de plus clair que ces prophéties. Vois, elles s’accomplissent même aujourd’hui dans ton cœur au-dedans de toi. Ainsi donc, accepte toutes les injures, non en tant que telles, mais comme si tu recevais des décorations. Sache que tes persécuteurs se repentiront. Ceux qui se moquent de toi seront réduits au silence, et tu te réjouiras. Aujourd’hui, tu es le dernier dans la maison de ton père, mais bientôt tu seras le premier. Et ceux qui te persécutent seront à ton service. Cela est prophétisé et s’est accompli mille fois en mille lieux divers.
La paix et la bénédiction du Seigneur soient sur toi.
Lettre 50. (p.89).
Au cafetier S.B. qui devait choisir entre la mendicité et le suicide.
Tu dis que tout ton établissement a été vendu pour payer tes dettes. Quand tu t’es retrouvé à la rue, tu es allé au cimetière pour te suicider. Là tu as été pris de doute, et d’irrésolution. Brisé par la torture que tu t’infligeais à toi-même, tu t’es couché sur la tombe de tes parents et tu es tombé endormi. En rêve, tu as vu ta mère te mettre en garde, te disant que dans le Royaume de Dieu il y a beaucoup d’anciens mendiants, mais pas une seule personne qui se soit sciemment suicidé. Ce rêve t’a sauvé du suicide. C’est ta chère mère elle-même qui t’a sauvé par la Providence de Dieu. Tu as donc commencé à mendier et tu es parvenu à survivre de cette façon. Et maintenant, tu me demandes si tu brises la loi de Dieu en faisant cela. Prends courage, fils de l’homme ! Dieu a donné pour commandement : « Ne vole pas », mais Il n’a pas recommandé : « Ne mendiez pas. » Mendier sans nécessité est voler, mais mendier dans ton cas ne l’est pas. Le général de l’Empereur Justinien, le fameux Velizar, à la fin de sa vie perdit son Etat, ses amis et ses yeux. Il s’assit aveugle aux portes du Capitole et mendia son pain. Comme il était Chrétien, il ne pensa même pas au suicide. De même que la vie est meilleure que la mort, ainsi un mendiant vaut mieux qu’un suicidé.
Une grande honte te dévore, et la tristesse, dis-tu, t’a séché les os. La nuit, tu te tiens parfois devant ton vieux bar, et tu demandes des aumônes à ceux qui en sortent. Tu te remémores que tu étais jusque récemment le patron de ce bar, cependant qu’à présent tu ne peux même plus y entrer en tant que client. Tes yeux sont rouges à force de sangloter et de pleurer. Réconforte-toi, homme bon. Les Anges de Dieu ne sont pas loin de toi. Pourquoi pleures-tu pour un bar ? N’as-tu pas entendu parler d’un bar à Beograd appelé : « A qui n’a-t-il pas appartenu, à qui n’appartiendra-t-il pas ? » En vérité, ce sera un grand philosophe qui lui aura donné ce nom, parce que cette phrase est vraie de tous les bars, de toutes les maisons, de toutes les tours et de tous les palais du monde. A qui n’ont-ils pas appartenu, à qui n’appartiendront-ils pas ?
Qu’as-tu perdu ? Ce qui ne t’appartenait pas quand tu es né ne t’appartient plus maintenant. Tu étais un patron, tu es maintenant un pauvre. Ce n’est pas une perte ; Ce qui aurait été une perte, cela aurait été d’être un homme et d’être devenu une bête. Mais tu étais un homme et tu es resté un homme. Tu as signé des dépôts de garantie à des hôtes prétendument distingués de ta clientèle, et c’est pourquoi ton bar est devenu celui de quelqu’un d’autre. Maintenant, tu vois au travers de la fenêtre que ces mêmes gens sont encore en train de rire dans le bar comme auparavant, pendant que tu verses des larmes dans la rue et que tu es couvert de honte. N’aie pas peur. Telle est la justice de Dieu. Ils auront à répondre pour leurs actes. Lorsqu’ils s’apprêteront à se suicider, qui sait si le Dieu de justice permettra que leurs mères leur apparaissent de l’autre monde pour les empêcher de faire une telle chose. N’envie aucunement leur chance. Tu ne connais pas leur fin. Un ancien sage Grec dit : « Ne dis pas un homme heureux avant d’avoir vu sa fin ».
Est-ce dur pour toi d’être un mendiant ? Mais ne sommes-nous pas tous des mendiants ? Ne dépendons-nous pas pour vivre jour après jour, heure après heure de la compassion de Celui qui nous donne la vie ? Tu as une importante mission à remplir dans le monde maintenant même : par ton mode d’être, tu avertis les gens de se rappeler Dieu et leur âme, et d’être compatissant. Forcé de vivre en silence, examine ton âme et parle à Dieu en prière. La vie d’un mendiant requiert plus de courage que la vie d’un maître. « L’or et l’argent sont éprouvés par le feu, et l’homme l’est par l’humiliation. » ( Sirach 2 :5). Mais tu t’es déjà montré un héros en triomphant des noires pensées du suicide. C’est là une victoire sur l’esprit de désespoir. Après cette victoire, toute autre victoire sera plus aisée pour toi. Le Seigneur est auprès de toi.
La paix du Seigneur et son réconfort soient sur toi.
Lettre 77. (p.145).
A un homme qui a atteint une haute position sociale, mais non point le bonheur.
C’est comme si ta lettre faisait couler des larmes. Tu t’es battu pour atteindre une haute position sociale. Tu as pensé que tu trouverais en même temps le bonheur. Bien d’autres dans ton entourage ont agi de même. Ainsi tu as eu à te battre pour cela, à pousser des gens autour de toi, à endurer des anxiétés. Tu t’es figuré que le bonheur, et non pas seulement le bonheur, mais la vie elle-même commenceraient quand tu obtiendrais cette position. Jusque-là, tu t’es considéré comme malheureux, comme presque inexistant. Finalement, tu as atteint le but désiré. Quelques jours durant, tu t’es senti renaître. Puis la déception a suivi. Bien entendu, tu étais aussi loin du bonheur que tu l’étais auparavant. Sauf que précédemment tu croyais que le bonheur existait véritablement – quelque part parmi les hauts rangs sociaux -, mais, à présent, tu as perdu jusqu’à cet espoir. Tu as atteint les nuages, mais non les étoiles. Maintenant, tu regrettes d’avoir couru après le bonheur en ayant pris un sentier erroné, et tu regrettes d’avoir encouragé les autres à faire la même chose. Tu souhaites donc retourner à ta précédente position, modeste, où le fardeau des responsabilités était moindre et où l’aiguillon de la jalousie se faisait moins sentir. Peut-être trouveras-tu utile l’histoire qui suit :
L’histoire de la pièce d’argent.
Dans un grand parc se donnait une célébration, mais nul ne pouvait y entrer sans tickets. Beaucoup voulaient entrer, mais ils ne pouvaient pas en payer l’accès. Alors, un homme riche, voulant éprouver la faiblesse humaine lança dans la foule des enfants une pleine poignée de prétendues pièces d’or. C’étaient de fausses pièces, des jetons, et parmi le tout ne se trouvait qu’une seule vraie pièce d’argent. Mais nul ne prit la peine de ramasser la pièce d’argent, parce qu’ils se figuraient que les pièces soi-disant en or avaient plus de valeur que la pièce d’argent. Ceux qui ramassèrent les pièces les tenaient dans leurs mains et se sentirent heureux un moment. Mais bientôt, quelque chose d’inattendu et d’épouvantable pour eux advint. Lorsqu’ils approchèrent des grilles du par cet demandèrent des tickets d’entrée, il s’avéra qu’ils n’avaient que de la fausse monnaie et les gardiens de la ville les mirent en prison. Seul l’un d’eux, qui était empli de sagesse, voyant ce qui arrivait à ses amis, jeta la pièce qu’il avait et s’en fut ramasser la pièce d’argent. Avec cette pièce, il paya le ticket et entra dans le parc pour la fête.
Exégèse :
La fête est le royaume des Cieux, ou le royaume du bonheur immortel. Les pièces sont les désirs de la chair, les vanités du monde et les illusions qui écartèrent les gens loin du royaume du vrai bonheur et les entraînèrent au royaume des tourments et de la ténèbre. La pièce d’argent est la bonté intérieure et la véridicité d’un homme vertueux. Les enfants qui sz sont aisément laissés duper par le brillant du monde sont les pécheurs. Le dernier enfant qui méprisa le faux or et prit la pièce d’argent véritable est le pécheur repentant.
Lettre 78. (p.147).
A l »économiste Spaso S. qui demande pourquoi « les méchants prospèrent. »
Jusqu’où prospèrent-ils ? Et que leur arrive-t-il à la fin, à eux et à leur progéniture ? T’es-tu demandé cela ? Ne laisse pas tes pensées se troubler quand quelqu’un se vante inconsidérément et oublie Celui qui donne force et puissance. Rappelle-toi comment Goliath, vantard et altier, fut tué d’un coup de fronde asséné par David, un jeune garçon. Ne laisse pas ton cœur se troubler quand tu vois quelqu’un s’enrichir par des moyens malhonnêtes. Ils mangeront et ne seront pas rassasiés ; ils se livreront au pillage et ils n’auront jamais assez. Rappelle-toi les riches Sodomites qui furent à l’instant recouverts de cendre et de feu avec toutes leurs richesses. Tu es Chrétien, et un Chrétien considère les évènements sur le long terme, comme un tout, non de façon partiale.
La prospérité d’un méchant n’est pas considéré par un Chrétien comme un évènement final, mais il attend bien plutôt de voir ce qui arrivera à la fin. Il sait que le méchant prospère non de par sa force ou sa sagesse, mais seulement parce que Dieu permet qu’il prospère en sorte qu’il puisse se souvenir de Dieu durant tout son processus de réussite. Parce que notre Dieu est incroyablement compatissant, Il donne aux méchants ce qu’ils désirent pour qu’ils puissent réaliser ce qui vient de Dieu, qu’ils en deviennent honteux de leur méchanceté et qu’ils se corrigent eux-mêmes. Dieu aime ceux qui se repentent. Oui, Il aime beaucoup ceux qui se repentent de leurs actes mauvais. Le Créateur n’est pas comme la création. Il ne punit pas immédiatement dès que quelqu’un fait un faux-pas sur le sentier de perdition. Il regarde faire et garde le silence. Il attend mais Il ne tarde pas. Il est merveilleux dans sa sagesse, plus merveilleux encore dans Sa compassion. C’est pourquoi le psalmiste dit au Seigneur : « Tes jugements sont un grand abîme. » Qui sondera l’abîme de la Divine Providence ? Les gens privés de raison sont furieux de ce que Dieu ne gouverne pas le monde selon leur raison, et ceux qui sont raisonnables luttent constamment pour entrer dans les raisons de Dieu.
Il est parfois dur, même pour une personne très raisonnable de comprendre pourquoi le lot de quelqu’un est tel et pourquoi celui de quelqu’un d’autre est différent. Pourquoi une jeune personne, désireuse de vivre, meurt, tandis qu’une vieille personne, désireuse de mourir, continue à vivre ; pourquoi une personne pieuse doit lutter tandis que des impies profitent impunément de richesses ? Même les plus saintes des âmes ont parfois été déroutées par le cours des évènements. Dans la Sainte Tradition, il y a l’évènement suivant : « Un homme riche mourut, dont les péchés étaient notoirement connus de son vivant, et ses funérailles furent célébrées en grande pompe par un évêque et une foule de prêtre. Peu après, une hyène attaqua un ascète dans le désert et le mit en pièces. Un moine, qui avait vu tout ensemble les grandes funérailles du pécheur et la mort malheureuse de l’ascète, fut confondu, et il s’écria : « Pourquoi Seigneur ? Comment et pourquoi cela est-il arrivé ? Comment ce pécheur put-il avoir une vie heureuse et une mort aisée jusqu’au grandiose, tandis que cet être vertueux eut-il une vie amère aggravée d’une mort plus amère encore ? « Sur ce, un Ange de Dieu apparut pour le lui expliquer. Cet homme riche n’avait eu qu’une bonne action dans sa vie, et cet ascète n’a commis qu’un lourd péché. Par les funérailles en grande pompe le Seigneur a voulu rétribuer, l’homme riche de son unique bonne action, en sorte qu’il n’ait plus rien à escompter de ce monde ; et par la terrible mort de l’ascète, Il voulut effacer son seul péché grave, en sorte qu’Il puisse lui donner une pleine rétribution dans le Ciel.
Ainsi donc, toi aussi tu devrais considérer les jugements de Dieu et placer tout ton espoir en ton Créateur. Ne sois pas courroucé en voyant les méchants, n’envie pas ceux qui transgressent la loi. Ce fut ainsi écrit par le vertueux Roi David qui fut tourmenté longtemps par ces choses qui te tourmentent, jusqu’à ce que le Seigneur le lui donne à comprendre au travers de raisons bien précises : le même te dit cela aussi : « j’étais jeune, et j’ai vieilli, et je n’ai pas vu un homme vertueux abandonné ni ses enfants mendiant du pain. » Lis souvent le Psautier, tu comprendras, et tu y trouveras du réconfort.
Paix et bénédiction du Seigneur sur toi.
Lettre 57. (p.103).
Au contremaître Branislav N. qui demande s’il est bon de mourir subitement.
Tu écris que tu as entendu des gens dire qu’ils souhaitaient une mort subite. Si la mort doit venir, qu’elle vienne soudainement et qu’elle mette un terme à cette vie. Cela vaut mieux, disent-ils, que d’être tourmenté soi-même et de tourmenter son entourage avec des maladies. La mort que l’on attend est terrible, mais la mort subite ne serait rien. Dans notre village, une femme a été renversée par une voiture qui l’a tuée. Cela a fait l’objet de maints commentaires. Certains ont prétendu que pareille mort est la meilleure. Quelqu’un s’est exclamé : « Laissez-la venir, tant qu’elle ne vous ronge pas. » Et tu m’écris pour me demander une explication à ce sujet.
L’on ne devrait pas désirer une mort soudaine, mais l’on se doit d’être prêt à mourir n’importe quand. C’est ce que l’Eglise nous enseigne. Il est des prières à Dieu prescrites pour nous garder de bien des choses, y compris de la mort soudaine. Mais Celui qui tient en son pouvoir la vie et la mort, agit selon Sa sainte Providence pour le bénéfice des âmes, qu’Il les retire de ce monde ou qu’Il les y laisse. Il frappe parfois les pécheurs d’une mort soudaine, et parfois aussi, bien que ce soit rare, il frappe des êtres vertueux. Ne lisons-nous pas dans l’Ancien Testament que Dieu a puni de mort soudaine les fils d’Aaron pour avoir encensé leur volonté propre, tout comme ceux qui se sont rebellés contre Moïse ( Lév. ch.16). Ananias et Saphira tombèrent soudainement morts quand ils mentirent aux Apôtres. Nombre de bourreaux de Chrétiens moururent d’une mort soudaine, comme nous le lisons dans les vies des Martyrs du Christ. Mais il y advient parfois aussi qu’un homme vertueux meure d’une mort subite, bien que ce soit très rare. Cela arriva à Saint Athanase du Mont Athos – tandis qu’il construisait un édifice, un mur tomba sur lui et le tua, et quelques autres moines avec lui.
En envoyant une mort soudaine à des pécheurs, Dieu poursuit deux buts simultanés – les pécheurs tués sont ainsi punis et les autres sont effrayés au point qu’ils se retiennent de pécher. C’est ce qui advint avec la mort soudaine d’Ananias et de Saphira : « une grande frayeur pénétra dans l’église, et en tous ceux qui entendirent cela. Et quand les gens ont trop de foi en un homme vertueux, Dieu prend soudainement son âme pour leur montrer que lui seul est Dieu et qu’il n’y a pas de Dieu en dehors de Lui. Mais dans tous les cas de mort subite, le message laissé aux vivants est clair, signifiant que tous doivent penser à leur mort et incessamment préparer leurs âmes par la pénitence, la prière, la compassion, l’aumône, en prévision du départ à venir de ce monde.
Il est dit d’un Ancien de Valaam, Nikita (+1907) qu’il était terrifié à l’idée de mourir subitement et priait constamment Dieu de lui envoyer une maladie avant la mort, aussi difficile à supporter et aussi longue que possible, afin qu’il puisse, disait-il, « par ce fait de souffrir d’une maladie émouvoir le Juge Vertueux et l’inciter tant soit peu à la compassion, en sorte qu’Il tienne compte de cela au lieu de bonnes actions qu’il ne possédait pas, ne les ayant pas commises. » Un autre, reposant sur son lit de mort, soupira : « J’ai souffert neuf mois avant de venir au monde, est-ce trop si je souffre neuf mois avant de le quitter ? »
Vraiment, la maladie qui précède la mort est d’importance cruciale. Elle a apporté le salut éternel à beaucoup de pécheurs. Des milliers d’entre eux n’ont appris des vérités sur Dieu et sur leur âme qu’au travers de la maladie qui précéda leur mort. Et apprenant ces vérités sur ces deux grandes entités réelles que sont Dieu et l’âme, ils se repentirent amèrement, pleurèrent sur leurs vies privées de sens, prirent la communion, et ainsi se rendirent dignes d’entrer dans les brillantes cours célestes, purifiés par leurs larmes et par le Sang du Christ. Ainsi, il est clair que la maladie qui précède la mort survient de par la compassion de Dieu. Ne vous inquiétez pas si vos parents et vos amis souffrent au-delà des soins que nous pouvons leur prodiguer à leur lit de mort. Cela est encore pour leur bien. Par cette faveur, ils apprennent quelles faveurs leur fait au centuple le Créateur de l’humanité.
La paix et la bénédiction de Dieu soient sur toi.
Lettre 98. (p.189).
Au travailleur Mitar F. sur la question de savoir pourquoi le Sauveur est né dans une grotte.
Tu m’as posé cette question il y a longtemps, mais, pardonne-moi, j’ai attendu pour te répondre ce jour saint où nos pensées sont dirigées vers cette grotte depuis laquelle le Soleil de Justice a brillé sur le monde.
L’humilité est la première vertu que le Christ a recommandé aux fidèles dans Son Sermon sur la Montagne. Et, par Son exemple, ce fut la première vertu qu’Il montra, en naissant non pas dans un palais royal mais dans une grotte destinée à abriter des moutons.
L’autre leçon pratique de très grande importance que le Seigneur manifesta au monde par sa naissance dans une grotte est celle-ci : il sied de se sacrifier soi-même en se retirant pour faire place aux autres ; se contenter seulement du strict nécessaire pour que les autres puissent, eux aussi, posséder le nécessaire. Comme l’Apôtre de Dieu l’enseigne : « Lorsque nous avons la nourriture et le vêtement, sachons nous en contenter. » Cela n’est-il pas une bonne leçon pour le monde d’aujourd’hui en crise ?
Une autre leçon importante de cette naissance dans une grotte est que ce n’est pas le lieu qui donne de l’importance à un homme, mais que c’est un homme qui donne de l’importance à un lieu. Un homme a plus de valeur que quoi que ce soit sur terre. Ce ne sont pas les richesses ni le brillant extérieur qui augmentent la valeur d’un homme, ni ce n’est la pauvreté qui la diminue. Tu sais ce qu’Il a dit au sujet de Saint Jean le Baptiste, un homme sans-abri : « Qu’es-tu venu voir ? Un homme vêtu d’un bel habit ? Vois, ceux qui portent des habits de prix vivent dans les plaisirs et habitent des palais royaux. » Le roi Hérode vivait dans un palais royal et portait de beaux vêtements ; cependant, ce n’était pas un homme, mais un renard. Il en était de même de Pilate ; néanmoins celui-ci n’était pas un homme mais un loup Romain. De même pour les Pharisiens ; toutefois, ce n’étaient pas non plus des hommes, mais ils étaient bien plutôt une engeance de vipères. Et Saint Jean qui n’avait pas de toit était plus grand que tous ceux-là. Aucun fils né d’une femme n’était plus grand que Saint Jean le Baptiste.
Il est encore une leçon de plus. Le Royaume des Cieux est de plus d’importance pour un homme que quoi que ce soit d’autre dans le monde. L’on peut obtenir ce Royaume sans considération du lieu où l’on est né et de l’endroit où l’on vit ; - que ce soit dans une ville,dans un village, dans le désert ou dans une grotte. Le Seigneur a voulu donner une leçon au monde qui ne cherchait la lumière que dans les grandes villes en leur montrant que la vraie lumière ne peut apparaître que dans une humble grotte. Cela fut ensuite prouvé par d’innombrables ermites qui vécurent dans des grottes, eux qui furent les grandes figures spirituelles et de véritables phares lumineux.
Mon sentiment est encore qu’il y a une autre raison, et non des moindres, pour lesquelles le Christ est né dans une grotte. En Terre Sainte, il demeure jusqu’à ce jour quatre grottes importantes. Elles demeurent comme elles étaient au temps de la venue du Christ dans le monde. L’une est la grotte de pierre de Béthléem, où Il est né. La seconde est la grotte du Mont de la Tentation où Il fut tenté par Satan. La troisième est la grotte du Golgotha, où Il ft crucifié, où Il fut enterré et où Il ressuscita. Et la quatrième est la grotte du Mont des Oliviers, d’où Il monta au Ciel. Ainsi les quatre évènements les plus importants de la vie du Sauveur sont liés à quatre grottes immuables. La maison où Il vécut à nazareth n’existe plus, non plus que celle de Capharnaüm. De tous les édifices qu’Il visita, il n’en reste plus un seul aujourd’hui, - qu’il s’agisse de la cour d’Hérode, de la maison de Pilate ou du Temple de Salomon. Tout ce qui fut construit de main d’homme a été ruiné par le temps. Mais ces quatre grottes, faites par Dieu, s’élèvent à présent tout comme elles le faisaient alors, en sorte que nul ne puisse douter qu’Il est réellement né, qu’Il fut tenté en tant qu’homme, qu’Il fut crucifié pour les péchés des hommes, mais aussi qu’Il ressuscita, et qu’Il monta aux Cieux en gloire dans Sa patrie éternelle où Il attend les Siens, qui sont les êtres vertueux. Celui qui est omniscient a connu à l’avance le cœur de pierre de l’homme et sa raison portée au doute, et c’est pourquoi, dans Sa Sagesse, Il lia ces grands évènements à quatre grottes immuables. Si le Christ était né dans une maison, en quelque ville ou village, est-ce que cette maison demeurerait debout comme le témoin de pareils évènements ? Non seulement la maison, mais l’entière cité où naquit Alexandre le Grand n’existe plus. La ville et même l’Etat où naquit le Grand Homère sont inconnus. Mais la sainte grotte du Christ à Béthléem demeure. Elle demeure et témoigne.
Sache aussi cea : de même que Son corps, la maison de Son âme n’était pas faite de main d’homme, mais par le Saint Esprit de Dieu, ainsi la maison qui abrita Son corps, la grotte de Béthléém, ne fut pas faite de main d’homme, mais par Dieu le Créateur et Sa Providence. Il la créa avant qu’Il ne créât les hommes sur la terre, et quand Il la créa, Il la prédestina à Son séjour temporaire sur la terre, pour le moment où Il viendrait visiter la descendance d’Adam et d’Eve. Et Il fit aussi en sorte que cette grotte soit le témoin permanent de Sa venue sur terre.
Ne t’étonne pas de ce que Dieu ait choisi pour Lu-même une si pauvre habitation. Ce qui est exalté par l’homme est souvent en abomination devant Dieu. Le palais royal de Rome était en abomination devant Dieu parce que c’était véritablement un repaire de malfaiteurs et de criminels, ainsi qu’un lieu de débauche. Mais ce qui est méprisé par l’homme et insignifiant à ses yeux est souvent ce que Dieu choisit et en quoi Il exulte. Telle est la méthode de tous les sages. Conformément à cette méthode, Il choisit des pécheurs pour Apôtres, et une grotte pour Son berceau.
Lettre 79 (p.149).
A un Orthodoxe d’Amérique qui a eu l’esprit troublé par un écrivain.
J’ai reçu le magazine que tu as envoyé, dans lequel figure la violente accusation de cet écrivain contre la foi Chrétienne. L’accusation est la suivante : La foi Chrétienne consiste à condamner la situation actuelle en Amérique. Il dit que la foi nous a conditionnés à travailler de plus en plus. Nous avons obéi à ce précepte et nous avons tous travaillé énormément. C’était une folie du travail. Désormais, nous avons besoin de créer une nouvelle foi qui nous enseignera à ne pas travailler. C’est comme cela que nous allons sortir de la crise. Ce nouveau sauveur du monde t’a troublé l’esprit et tu demandes des explications.
N’aie pas l’esprit troublé. Les mots qui ont été prononcés dans le trouble perdent la moitié de leur sens. Quand des enfants désobéissants sont troublés, ils s’en prennent à leurs parents. Récemment, une mère s’est plainte à moi de ce qu’elle en avait assez que son fils, prodigue, ne fasse que lui demander toujours plus d’argent. Quand elle lui rappelle qu’il convient de faire un bon et non un mauvais usage de l’argent, il se fâche et s’irrite contre sa mère. C’est la même chose qui arrive avec la foi Chrétienne, mère spirituelle de tous les peuples chrétiens. Cela lui advient depuis qu’elle est apparue dans le monde. Elle a été blâmée en toute chose par ceux qui ne pouvaient pas et ne voulaient pas se blâmer eux-mêmes. Saint Tertullien en écrit au second siècle : « Si le Tibre déborde, ou si le Nil n’inonde pas les terres, si le ciel retient la pluie, ou que la mer dévaste la terre, aussitôt l’on entend s’élever ce cri : » Les Chrétiens aux lions ! » De même ce cri contre la foi Chrétienne s’élève en Russie à cause de la piètre économie, en Espagne à cause de la mauvaise politique, et en Amérique à cause des millions de chômeurs ; et c’est le même cri à chaque fois : « Les Chrétiens aux lions ! »
Mais tu devrais savoir, ô disciple du Christ, que les persécutés survivront aux non-persécutés. Aucune foi dans le monde n’a jamais été aussi persécutée que la foi Chrétienne, selon qu’elle l’a été hier, qu’elle l’est aujourd’hui, et qu’elle le sera demain. Il n’y a rien là qui puisse surprendre les Chrétiens, car tout a été prévu et prédit par notre Sauveur, et Il a déjà répondu à toutes les accusations et à toutes les persécutions, en disant aux fidèles : « Réjouissez-vous et soyez dans la joie ! »
Il est vrai que la foi Chrétienne a toujours prescrit aux gens de travailler. L’Apôtre Paul écrit : « Que celui qui ne travaille pas ne mange pas. » Mais notre foi nous a appris à travailler pour le nécessaire. Cependant, en Amérique, la production a été bien supérieure aux besoins du monde entier, ainsi que tu peux le voir de tes propres yeux. Cet excès de production n’est pas le résultat d’une folie du travail, mais d’une folie de l’argent. Notre foi ne nous prescrit pas seulement de travailler, mais de travailler avec crainte de Dieu, compassion et amour fraternel. Cependant, quand le travail est détaché de tout ce qui le rend bénéfique et de ce qui confère à l’homme sa dignité, et lorsqu’il n’est rapporté qu’à l’argent exclusivement, alors il apporte la désolation au monde, comme toute autre malédiction, non moins que ne le ferait l’oisiveté complète. Je ne pourrai jamais croire que le travail, quelque énorme qu’il soit, soit dangereux pour les peuples, s’il est inséparablement relié à la crainte de Dieu, à la compassion et à l’amour fraternel. Ni n’est béni le travail de celui qui aime l’argent, ni ne l’est la compassion des paresseux. La loi du Christ, comme un tout – il n’y a pas de commandement séparé des autres – est la perfection, comme un arbre portant nombre de branches et de fruits, loin de n’être qu’une seule branche qui se dessèche de subsister seule. Sache que la loi du Christ est un rocher inébranlable, le roc du salut. Lorsque les gens désescaladent ce rocher, alors apparaissent nombre de législateurs et de lois, contradictoires et issues d’esprits étroits. Et c’est sur ce sable – ces nombreux législateurs autocrates et leurs lois – qu’un édifice de la société humaine ne peut tenir, selon les paroles du Christ.
La paix et la joie du Seigneur soient sur toi.
Lettre 76. (p.143).
A un homme qui prétend qu’il ne croit pas en Dieu.
Quelle sorte de péché as-tu commis pour qu’une telle calamité fonde sur toi ? Pour que tu coupes le lien qui te retenait à la source de vie et au donateur de sens ? Pour que tu te détournes de Celui dont l’être éternel est plus manifeste que ton être temporel, et par l’existence de qui nous pouvons seulement confirmer notre existence ?
Dieu ne se cache pas de l’homme. Mais un homme pécheur se cache de Dieu, puis il continue à se cacher de Lui jusqu’à ce qu’il Le perde complètement de vue. Comme il est écrit des ancêtres de l’humanité quand ils péchèrent : « Adam et Eve se cachaient du Seigneur Dieu parmi les arbres du jardin. » Il en est maintenant comme il en fut alors. Lorsque l’homme commet un grave péché, il se cache de Dieu dans la nature. Il se perd parmi la matière, il se perd parmi les arbres et les animaux, comme s’ils étaient ses prétendus cousins, et il se laisse dériver dans l’ombre de la nature. Et de même que l’on peut parler de « l’éclipse de Dieu », Soleil de Justice, par ceux qui ont dérobé Sa vue, cependant qu’Il est par essence le Créateur de la nature. Mais il s’agit juste là de notre manière humaine de parler. L’éclipse de soleil ne signifie pas que le soleil a perdu sa lumière, mais juste que quelque chose le dérobe à notre vue. De la même façon, l’éclipse de Dieu ne signifie nullement que l’on a perdu Dieu, ou qu’Il n’est pas là, mais que quelque chose s’interpose entre Dieu et l’homme, qui cache Dieu pour quelque raison humaine. Ce quelque chose est parfois le péché de l’homme.
Ce n’est pas la faute de la nature si une personne sans Dieu la vénère. La nature est entièrement opposée à ce que l’on renonce à Dieu et elle hait de haine mortelle et persécute ceux qui renoncent à Dieu et l’adorent, elle. Toute la nature, depuis le grand soleil jusqu’à l’atome le plus minuscule, témoigne harmonieusement d’une seule voix de l’être et de l’agir de son Créateur. Les Egyptiens de l’Egypte ancienne adoraient toute la matière, et plus que tout, une sorte de bœuf noir, qu’ils avaient appelé Apis. Selon une légende, un pharaon vint offrir un sacrifice à Apis. Mais, tandis qu’il se prosternait devant lui, Apis le frappa d’un coup de cornes et l’envoya baldinguer au loin. « Maintenant, je vois que tu es un bœuf et non un dieu ! » dit le pharaon avec colère. Et Apis répondit : « C’est ce que je voulais que tu voies ! Désormais, ne te prosterne que devant l’Un qui créa tout à la fois toi et moi. »
Tu dis : « Il est dur pour moi de croire avant d’avoir vu ! » Avec quoi veux-tu voir ? Avec l’œil de l’esprit ? Si tu veux voir avec l’œil corporel, Celui qui est plus grand que l’Univers aurait à rapetisser jusqu’à pouvoir s’adapter à ta vue limitée. Vois-tu ta raison avec tes yeux ? Mais tu serais contrarié si quelqu’un te disait qu’il te croyait dépourvu de raison pour ce qu’il ne peut pas voir en toi cette raison. Cependant, si tu veux voir Dieu en esprit, tu le peux, parce que l’esprit de l’homme est aussi plus grand que l’univers et parce que « Dieu est un Esprit. » Ton esprit a juste besoin d’être pur, car il a été écrit, selon la promesse divine, que seuls les purs verraient Dieu.
Aussitôt que tu le pourras, échappe en courant à l’obscurité qui s’est insinuée en toi comme une araignée. Lorsqu’Adam pécha, il s’enfuit en courant loin de Dieu. Mais le Sauveur compatissant ne s’éloigna pas à la course loin de de Sa création. Tout au contraire, il s’approcha d’Adam et l’appela : » Adam, où es-tu ? » Il est aussi tout près de toi, et t’appelle. N’entends-tu pas : » Blagoje, où es-tu ? » Tourne ton visage vers la lumière, ô fils de lumière. Le Père des Lumières t’appelle avec un ardent amour. Entends et sache-le : nul dans notre génération ne fut glorifié, si ce n’est ceux qui ont glorifié Dieu.
La compassion et la santé prodiguées par le Seigneur soient avec toi.
Lettre 74. (p.140).
Au politicien N.N. qui interroge sur la morale politique.
A ta lettre, je vois, en y glanant ici et là, que tu as tendance à accepter qu’il existe un ensemble de règles morales à part, valables en politique, lesquelles seraient différentes de la morale qui règle les autres affaires humaines et les relations avec autrui. Quelque joliment que tu puisses l’exprimer, cela peut seulement vouloir dire que ce qui est considéré comme malhonnête dans les affaires quotidiennes des hommes devrait être considéré comme honnête en politique, et que ce qui est inacceptable dans le reste des relations humaines devrait être acceptable en politique. Cette tendance dangereuse, qui ne t’est pas apparue la première fois, ni hier non plus, a eu un effet tel sur les gens qu’ils se sont véritablement mis à considérer que la politique est morale d’une façon qui lui est propre – c’est-à-dire immorale. N’as-tu jamais entendu ce jugement dans la bouche des gens au sujet de quelqu’un :
Crois-tu qu’il dit la vérité ? Non, c’est juste un politicien.
Vois-tu l’abîme qui sépare ta tendance du jugement des peuples ? Ton ensemble de règles spécifiques à la politique a été identifié par les gens comme un ensemble de mensonges et de duperies. Et tu dois compter sur le jugement des gens, puisque la politique, dans son meilleur sens, consiste en l’ensemble des affaires des gens ; elle est donc l’une des plus grandes affaires des gens. Je sais ce que tu veux. Tu voudrais trouver une compétence spéciale qui ferait avancer les gens et qui sauvegarderait l’Etat. Et ce talent spécial, inévitablement semblable à la passion du jeu de hasard, tu voudrais l’appeler morale politique. Je ne doute pas que tes intentions soient nobles, mais tout le reste de ce que tu dis tombe en-dehors des limites de la morale, en dehors des limites du Christianisme, et en-dehors des limites de la culture. Il s’agit là du jeu préhistorique du plus fort contre le plus faible, dans lequel, si un sourire hypocrite ne marche pas, montrer les griffes, et ce qui va avec, fonctionnera. Et à tout cela les gens répondent : « C'est la justice qui garde le pays et les cités. » Si tu choisis de mépriser cet axiome solide de notre peuple, comme trop crûment exprimé, écoute ce que les Anglais cultivés ont à dire, à savoir que « l’honnêteté est la meilleure politique. » Il y eut un temps, dans la longue éducation politique des Anglais où ils pensaient différemment. Mais l’expérience leur a appris que l’honnêteté est réellement la meilleure politique. Un grand homme d’Etat Américain a dit : « Lorsque les Américains entreront au Congrès avec les mêmes pensées et les mêmes sentiments que ceux qui sont les leurs lorsqu’ils entrent dans une église, alors notre pays sera affermi et notre peuple sera content. Même parmi les anciens païens de nos chers Balkans, les hommes d’Etat les plus célébrés étaient ceux qui s’en tenaient à la même morale dans les affaires publiques des citoyens, qu’à celle qu’ils observaient dans leurs propres affaires privées. Rappelle-toi le vertueux Aristide, et comment il agit lorsqu’il y eut un vote sur son exil de la patrie : D’illustres inconnus illettrés demandèrent à Aristide d’écrire sur un tesson de poterie : « L’exil pour Aristide » ! Et sans aucun doute, c’est ce qu’Aristide écrivit, ce qui était donner des bâtons pour se faire battre.
L’indivisibilité des différents domaines de la morale a été décrétée et affermie par la foi Chrétienne plus que par quoi que ce soit d’autre à aucune époque. L’une des principales causes de la confusion actuelle et de la misère morale qu’elle fait régner sur ce petit continent européen est la dualité des moarles : Il y aurait deux morales :L’une serait requise dans la vie privée, et l’autre s’appliquerait à la vie publique. Que la morale soit considérée ainsi comme une double face de Janus n’amène le peuple à rien de bon, et cela est attesté par la conduite des chefs de Jérusalem avant le Christ, et par l’ultime destinée du peuple d’Israël. Lorsqu’ils jugeaient le peuple, ils mettaient à mort les faux-témoins, mais dans la passion du Christ, ils cherchèrent de faux témoins. Plus encore, ils prétendirent entre eux que le Christ oeuvrait à l’avantage des Romains ( Jean 12 : 48), et devant Pilate le Romain, ils soutinrent que Christ était contre les Romains et contre César, parce qu’Il se décrétait Lui-même roi ( Jean 19 :12), ajoutant hypocritement : « Nous n’avons d’autre roi que César. » Telle est la morale duelle. Telle est la morale politique grâce à laquelle les politiciens Juifs voulaient sauver leur peuple, cependant qu’à la fin, ils le menèrent à sa ruine. Voyant à l’avance leur confusion, et le piège immoral des Pharisiens contre Lui, le Seigneur leur avait prédit à l’avance : « Et votre demeure sera désolée. » Vois le fruit de la morale politique. Vois la terrible leçon pour tous ces chefs du peuple qui scindent la morale en deux et prennent leurs distances vis-à-vis du solide axiome du peuple : « C’est la justice qui garde le pays et les villes. »
La paix et la santé du Seigneur soient sur toi.
Lettre 72. (p.136).
A une femme cultivée qui se plaint de n’être pas récompensée de ses bonnes actions.
Tu te plains parce que tu n’as pas reçu de louanges dignes de ce nom ni de récompense dans ton important travail de collecte de fonds pour un orphelinat. D’autres, qui n’ont pas la moitié de tes mérites, ont reçu les deux à la fois, mais toi, rien.
Mon Dieu, de quoi te plains-tu ? D’une chose dont l’Evangile dit que tu devrais te réjouir. Tu dis même que tu as fait tout cela en tant que Chrétienne, et que tu l’as accompli au nom du Christ. Sais-tu que c’est de la personne au nom de laquelle l’on commet une action que l’on reçoit sa récompense ? C’est ce qui figure dans l’Evangile. Une récompense s’attend non de la personne pour qui l’action est faite, mais de celle au nom de laquelle elle est faite. Un serviteur qui garde les moutons au nom de son maître attend une récompense du maître, non des moutons. Un soldat qui combat au nom de son roi attend de lui sa rétribution et sa médaille, mais non pas de ceux pour lesquels ou contre lesquels il combat. Et toi, si tu as accompli de bonnes actions au nom du Christ, en tant que Chrétienne, alors tu devrais attendre ta récompense du Christ, et de nul autre. Le Seigneur n’a-t-il pas promis une récompense éternelle à tous ceux qui font le bien en Son nom, ou qui souffrent l’injustice pour l’amour de Lui ? N’a-t-Il pas dit : « Réjouissez-vous et soyez dans la joie, car grande est votre récompense dans les cieux ? » Et aussi : « Quand vous avez fait tout ce qui vous a été commandé », dites alors : « Nous sommes des serviteurs inutiles, nous n’avons fait que ce que nous devions faire. » Un Etre invisible nous a envoyés dans ce monde. Un Etre invisible nous retire de ce monde. C’est cet Etre invisible que nous devons prier, c’est Lui que nous devons regarder, et c’est de Lui que nous devons attendre notre récompense. Qu’est-ce que pourraient nous donner des serviteurs mercenaires qui sont nos égaux et qui sont aussi pauvres que nous ? Et que pouvons-nous attendre de ceux qui descendent continûment vers le pays de la mort, comme des sauterelles qui s’élancent d’un talus dans un abîme ?
En outre, es-tu sûre que tu supporterais la gloire et les louanges des hommes ? Saint Jean Climaque doit avoir connu la nature mieux que toi et moi lorsqu’il écrivit que « nul hormis les Saints ne peuvent entendre les louanges des hommes sans que cela leur fasse de mal. » Seuls les Saints voient l’esprit des hommes et d’où proviennent les louanges de ceux qui les encensent. Parfois l’eau même la plus brouillée scintille dans le soleil comme la plus pure des eaux. Parfois, sous une fine couche d’eau claire se cache une couche profonde d’eau trouble. Telles sont souvent les âmes de ceux qui nous louangent. C’est pourquoi de saints hommes et de saintes femmes, quand on les loue, considèrent que cette louange est soit de l’ignorance soit un mensonge délibéré.
Il est plus de gens qui ont perdu leur âme à cause de la louange mondaine et de la gloire qu’à cause du mépris et de la moquerie. Sais-tu comment le Seigneur considère ceux qui recherchent la louange et la gloire ? Il les regarde comme des incroyants. Lis Sa conversation avec les Juifs et tâche de déterminer à quel camp tu appartiens. Christ dit : « Je n’agrée pas la gloire des hommes. » C’est ce qu’Il dit à propos de Lui-même. Et pour eux, Il dit : « Comment pouvez-vous croire, quand vous agréez la gloire les uns des autres et ne cherchez pas la Gloire qui vient de Dieu seul ? » ( Jean 5 :44). Ainsi, avec qui es-tu ? Avec le Christ ou avec les Juifs ? Si tu es du côté du Christ, ce que je te souhaite de tout cœur, alors tu ne peux pas chercher la gloire des hommes, mais seulement la Gloire de Dieu. N’envie pas ceux qui luttent pour s’attirer la louange et la gloire des hommes. Au contraire, sens-toi désolé pour eux. Tout comme ils se sentiront désolés pour eux-mêmes une fois qu’ils auront été déçus. Oui, je te le dis encore : Sens-toi désolé pour eux : parce qu’à cause de leur aveuglement, ils ont échangé ce qui est éternel pour ce qui est fugace, le divin pour le terrestre, et le vrai pour le faux.
Puisse Dieu t’illuminer et te bénir.
Lettre 71. (p.134).
A un homme modeste qui se repent de certaines de ses paroles.
Tu as bien fait de te repentir tout de suite. Dieu nous a laissé le repentir pour notre salut. Si cela n’avait pas été le cas, même les Apôtres n’auraient pas été sauvés, a fortiori le reste des fidèles. Tu as péché avec ta langue, tu t’es repenti avec ton cœur. Tu as dit contre ton voisin un mot qui t’a été inspiré par le démon. C’est comme si tu avais lancé une étincelle dans de la paille sèche. Le village entier l’a entendu et s’est moqué. Le voisin était amer et il t’a poursuivi en justice. Tu as payé un lourd tribut au péché et es devenu plus misérable encore. Tu es amer en toi-même. Il n’est pas si dur pour toi que la cour t’ait puni, mais il est dur que ton voisin offensé continue à te punir. Il ne veut plus te parler. Il garde le silence et se détourne de toi. Que faudrait-il que tu fasses ?
Remets la chose à Dieu et au temps ; prie le Créateur qui voit tout qu’Il donne un peu de bonne volonté à ton voisin. Recours à toutes les occasions de dire un mot gentil sur ton voisin, et attends ; Dieu, de bonnes paroles, et le temps feront leur œuvre. Et un jour, tu iras de nouveau à l’église avec ton voisin ramené à la paix.
Comme leçon pour le futur, rappelle-toi les mots du Sauveur : » Je te le dis : Au jour du terrible Jugement, les hommes auront à rendre compte de tous les mots vains qu’ils auront prononcés. » Cela veut-il dire que tout mot vicieux et erroné combat l’ordre de l’univers et offense le Créateur ? Un bon ou un mauvais mot que nous proférons à propos d’une personne, même s’il est prononcé dans le plus grand secret, est ressenti par l’univers entier et par le Créateur des affects. Ou bien comment pourrions-nous croire que nos paroles lui restent inconnues alors même que nos pensées lui sont toutes connues ? Les Grecs Anciens disaient qu’un côté de la lance de leur héros Achille blessait, tandis que l’autre guérissait. Nous ne savons pas, nous, ce qu’il en fut de la lance d’Achille, mais nous savons assurément que cela est vrai de la langue humaine. Les blessures sont causées par la langue et sont aussi guéris par la langue. « Avec la langue nous bénissons Dieu et maudissons les hommes. » ( Jas.3 :9).
Dans l’un de nos villages, ce terrible évènement se produisit ainsi : Une mère avait un fils unique, qui était écolier. La mère se comportait comme une folle avec son fils, et, dans sa colère, elle dit ces paroles insensées. « Si je devais ne jamais te revoir, je serais heureuse. » L’enfant fut si choqué par ses paroles, qu’il prit un fusil et se tua. A ses côtés, sur un papier d’écolier, il laissait ces mots : « Voici, mère, je me retire de devant ta face, juste pour te rendre heureuse. » O misérable bonheur de la mère ! Après que ce drame fut arrivé, la mère s’assit toutes les nuits devant la cheminée, éteignant le feu de ses larmes, jusqu’à ce qu’elle fût trouvée morte un matin, consumée, près du feu.
Vois-tu ce qu’une parole insensée peut faire ? Mais je ne te quitterai pas sans t’avoir donné un exemple de ce qu’une parole sensée peut faire. Durant la guerre, un soldat qui prenait facilement peur, fut envoyé en patrouille. Tout le monde savait comme il était aisément effrayé. Tout le monde rit en entendant que le commandant l’envoyait en sortie. Seul un soldat ne riait pas. Il s’approcha de son ami pour l’encourager. Mais le soldat effrayé dit : « Je vais sûrement mourir, l’ennemi est très proche. » Son ami lui répondit : » Ne t’inquiète pas, frère. Dieu est plus près encore. » Ces mots retentirent dans l’âme du soldat effrayé avec la résonance d’une grosse cloche. Et ils continuèrent à sonner en lui jusqu’à la fin de la guerre. Et ce soldat, qui avait été un lâche, revint de la guerre décoré de médailles décernées pour son courage. La bonne parole l’avait transformé et tellement affermi : « Ne t’inquiète pas, Dieu est plus près encore. »
La paix et la santé de Dieu soient sur toi !
Lettre 70. (p.132).
A un prêtre non-Orthodoxe qui demande « pourquoi Dieu punit la Russie Orthodoxe. »
Es-tu sûr que la souffrance actuelle du peuple Russe Orthodoxe soit une punition de Dieu ? J’admets que je n’en suis pas sûr. Vois-tu, nous pouvons commettre une faute si nous considérons que toutes les souffrances, soit individuelles, soit nationales, sont une punition de Dieu. Les trois croix du Golgotha nous rendent pensifs quand nous considérons la souffrance de quelqu’un. Le Christ fut-il crucifié de par la volonté de Dieu ? Dans la longue liste des souffrants, nous voyons aussi des prophètes, des Apôtres, et nombre d’autres femmes et hommes brillant par leurs vertus. Leurs souffrances n’étaient clairement pas une punition de Dieu. S’ils souffrirent à cause du péché, ce ne fut pas pour leur propre péché. De même, le Christ qui était sans péché, et qui fut soumis aux pires tortures fut supplicié pour le péché – non pas pour le sien, mais pour les péchés de l’humanité. Les souffrances de la Sainte Russie sont certainement dues au péché, mais au péché de qui ? C’est ce que tu devrais te demander. Rappelle-toi, toi qui es un excellent connaisseur de la Sainte Ecriture, comment le Seigneur expliqua la mort des dix-huit hommes sur lesquels tomba la tour de Siloam. Il dit qu’ils ne périrent pas comme s’ils étaient les pires pécheurs ou les plus malhonnêtes de tout le peuple de Jérusalem, mais parce que leur mort serait un avertissement adressé à de plus grands pécheurs qu’eux. Ce n’était de loin pas les plus grands pécheurs, mais, « je vous le dis », avertit le Seigneur, « si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous de la même façon. » ( Luc 13).
Est-ce que la Russie était le pays le plus pécheur au point de devoir supporter les pires des souffrances qui existent dans tous les pays ? Deux choses sont claires aux yeux du monde entier : premièrement, que le peuple Russe a brûlé dans la flamme des tourments comme les trois adolescents, jadis, dans la fournaise de Babylone ; secondement, que les théories matérialistes et athées qui ont allumé cet incendie en Russie ne provenaient pas du peuple Orthodoxe Russe, mais des peuples non-Orthodoxes. Tout le reste fait partie du mystère de la Providence de Dieu. Nous ne pouvons pas nous immerger trop profondément dans ce mystère glacial. Nous pouvons chercher à comparer les souffrances de la Russie aux souffrances du vertueux Job, ce qui a été utile à beaucoup à l’époque, et l’est encore. Dans les souffrances de la Russie nous pouvons voir un signal de Dieu aux autres pays, en sorte qu’ils se gardent du matérialisme en théorie et en pratique, en pensée et en action ; Toutes les nobles âmes du monde au siècle précédent ont prouvé l’absence de sens commun et la dangerosité de ces théories. Mais les paroles n’ont servi de rien ; C’est pourquoi l’horreur de ces théories s’est vue appliquée en pratique. Tout comme la tour de Siloam est jadis tombée sur ces dix-huit hommes, ainsi naguère la tour des idées fausses et des théories erronées est tombée sur le peuple de la grande Russie, afin que l’humanité voie et se dégrise de toutes ces théories destructives et fatales. Mais qui oserait dire que cette tour de mensonges modernes est tombée sur la Russie parce que la Russie était plus pécheresse que n’importe quelle autre société ? C’est comme si j’entendais de nos jours l’avertissement du Christ : « Oui, je vous le dis, à moins que vous ne vous repentiez tous, vous périrez tous de même, ô nations et tribus ! » Avec cet avertissement du Seigneur, nous pouvons apprendre de l’expérience de l’histoire. Aucune révolution ne finit de la façon dont elle commence. C’est ce que nous enseigne l’histoire. Souvent, ce qui a été combattu au commencement des révolutions triomphe à la fin. Cela vaut inconditionnellement pour la foi du Christ, persécutée – non abolie-, sur laquelle l’on cracha, combattue bien qu’elle fût sans souillure, mais qui finalement ne fut pas anéantie. Et il est clair que ni la mission Slave ni la mission Russe dans le monde ne consiste en ce qui arrive maintenant en Russie, mais en ce qui adviendra à la fin de la Révolution.
En aucun cas, le monde ne pourra démesurément utiliser contre elle la souffrance actuelle du peuple de Russie qui se trouve dans la cruelle fournaise. Et le peuple Russe sortira bien évidemment de ce feu plus lumineux, plus solide et plus glorieux que jamais auparavant. Même un forgeron ordinaire ne met pas le fer dans la flamme pour le punir, mais pour en obtenir quelque chose de meilleur. Nous pensons et croyons que le Créateur du peuple Russe n’a pas permis que cette grande nation entre dans le feu de la souffrance pour le punir et l’exterminer, mais pour que, par ce terrible exemple, Il avertisse les autres pays et leur rende sensible, ainsi qu’au peuple Russe, qu’Il pourrait les glorifier tous autant qu’il se peut avant le Ciel.
La paix et la santé de Dieu soient sur toi.
Lettre 69. (p.129).
A un fabricant du nom de Marinko qui demande si le Seigneur
a réprimandé sa mère.
Aux noces de Cana, l’on fut à court de vin. La Mère de Dieu vit que les convives étaient étonnés cependant que l’hôte était en proie à la honte. Emue de compassion, elle demanda de l’aide à son fils, ou ne fût-ce que son conseil, lui signalant : » Ils n’ont plus de vin. » Et Jésus répondit : « Quelle part ai-je avec toi, femme ? » Ces paroles du Seigneur t’apparaissent comme une réprimande, et c’est pourquoi tu m’en écris, me posant la question de savoir si cela en est une.
Non, ce n’est pas une réprimande. Cela l’aurait-il été que la Mère de Dieu l’aurait à ce moment ressenti plus que nous ne le ferions aujourd’hui. Et si elle avait compris cela comme une réprimande, elle n’aurait pas ajouté un mot de plus. Mais, au contraire, elle dit immédiatement aux serveurs : « Faites tout ce qu’Il vous dira de faire. »
« Quelle part ai-je avec toi, femme ? » Ces paroles sont dues à l’illumination et non à la réprimande. Le Seigneur veut illuminer Sa mère, non la réprimander. Par compassion, elle pensait aux besoins corporels, qui sont bas, de ceux qui étaient présents, et lui pensait aux besoins spirituels qui sont élevés. Elle voulait que toute chose se passe bien, selon la coutume, sans que personne soit déçu ni honteux, et Lui voulait éveiller les endormis et guérir les âmes humaines souffrantes. Il est venu parmi le peuple afin de changer notre être aqueux en vin ; pour changer nos cendres en feu. La Mère de Dieu, cela est vrai, voudrait que son fils accomplisse une bonne action pour le
peuple, mais la bonne action qu’elle a à l’esprit est des moindres. Il veut accomplir une bonne action pour le peuple et, en cela, Son cœur est en accord avec celui de Sa mère – mais Il veut que cette action soit sublime, conformément à Sa sublimité, et qu’elle soit bénéfique à toutes les générations jusqu’à la fin du monde. Pour les besoins de la fête des noces, à ce moment-là, le vin aurait pu être emprunté dans le voisinage. Le vin n’est pas rare en ce pays. Mais le vin n’est pas important. C’est le miracle qui l’est. Les gens boivent du vin, et l’oublient, mais un miracle ne s’oublie pas. Le vin, en tant que besoin corporel, appartient au monde, tandis qu’un miracle, en tant que besoin spirituel, appartient au Royaume des Cieux. La Mère de Dieu pensa un moment au premier. Le Seigneur pensait à ce dernier. Le Seigneur, qui était Prophète, voyant clairement que les pensées de Sa Mère étaient loin des siennes, voulait l’élever du royaume d’en bas au royaume d’En Haut. C’est pourquoi Il dit doucement : « Qu’ai-je à faire avec toi, femme ? » Saint Jean Chrysostome écrit à ce propos ce qui suit : » Cela n’était pas des paroles pour réprimander sa mère, mais il s’agissait d’un arrangement domestique pris sous le regard de la divinité, c’est-à-dire qu’il fallait disposer dans l’âme de Sa Mère la pensée du Royaume des Cieux, ainsi que dans les âmes de ceux qui diraient ces mots. Rappelle-toi comment le Christ dit à la sœur de Lazare : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et te mets en peine pour beaucoup de choses, mais une seule chose est nécessaire. » Ces paroles n’étaient pas non plus des paroles destinées à réprimander mais à illuminer l’esprit. Le Royaume des Cieux est au-dessus de tout, et tous les soucis et tous les soins humains doivent être dirigés vers le Royaume.
Mais pourquoi le Seigneur dit-il « femme » et non « mère » ? Pour distinguer plus clairement entre ses pensées à Lui et ses pensées à elle. Parce que, s’il avait dit « mère », nous n’aurions guère prêté attention aux paroles en question, et nous n’aurions pas non plus senti la différence entre leurs deux pensées à ce moment-là. C’est ainsi qu’Il donna à Pierre une leçon plus dure encore, disant : « Loin de moi, Satan ! Tu ne penses pas à ce qui est de Dieu, mais à ce qui est des hommes. » Mais s’Il lui avait dit : « Loin de moi, Pierre », ou bien « ô homme », Pierre n’aurait pas non plus remarqué l’abîme qui le séparait du Seigneur.
Est-ce que la Mère de Dieu a compris son Fils à ce moment-là et en a-t-elle bien reçu la leçon ? Tout-à-fait. Elle cessa immédiatement de donner des conseils au Conseiller et des directives au Directeur des âmes, et, avec douceur et désobéissance elle retourna à son rôle – qui était de Lui préparer le chemin parmi le peuple. C’est pourquoi elle parla aux serviteurs et leur dit : « Faites tout ce qu’Il vous dit. » Et quand les serviteurs eurent fait tout ce qu’Il leur avait dit de faire, alors, avec tous les autres, elle attendit l’inattendu en tremblant.
Frère, écoutons aussi la Très Sainte Mère de Dieu. Faisons tout ce que son Fils a commandé de faire. Cela est en notre pouvoir. Et lorsque nous aurons fait tout ce qu’Il nous a commandé de faire, attendons l’inattendu en tremblant. Ce qui est dire, attendons de Lui un miracle – le miracle de changer l’homme corporel en spirituel, l’homme terrestre en céleste, l’eau en vin enfin.
La paix et la joie du Seigneur soient sur toi.
Lettre 68. (p.127)
A la communauté de Saint Elie, au sujet d’un semeur d’ivraie.
Vous me dites qu’un jeune homme est venu parmi vous pour y répondre une nouvelle foi. Il parle mal de tout. Il est contre l’Eglise, contre les Saints, contre les icônes, contre la Croix, contre les jours de fêtes des Saints, et il est spécialement monté contre la Sainte Mère de Dieu. Il va de maison en maison, de boutique en boutique, et il distribue gratuitement des journaux et des livres dans lesquels figure ce dont il parle – toutes sortes de blasphèmes contre la vraie Foi. Il dit qu’il vient d’Amérique et qu’il veut dispenser aux gens l’illumination. Il dit aussi que tous en Amérique croient de la manière dont il le fait. Il ne révèle pas à quelle secte il appartient, mais il est déjà évident à tes yeux qu’il est hérétique et qu’il appartient à une secte.
Ce n’est pas moi qui vous parlerai, frères ; laissons parler les Apôtres de Dieu. Voici ce que l’Apôtre Paul commande : « Rejette l’hérétique, parce qu’il est perverti, qu’il pèche, et qu’il s’est déjà condamné lui-même. » ( Titus 3 : 10-11). Saint Pierre appelle de tels gens de faux-maîtres et de faux prophètes, prophétisant leur apparition au monde. « Il y a aussi de faux maîtres parmi vous qui introduiront des hérésies condamnables, parlant avec orgueil et répandant des blasphèmes. » (2 Pierre 2). Le clairvoyant Jean l’Evangéliste avertit : « Bien-aimés, n’ajoutez pas foi à tout esprit que ce soit, mais sondez si les esprits sont de Dieu ; car beaucoup de faux prophètes sont venus dans le monde. » ( 1 Jean 4).
Et quant à moi, je vous dis, frères, que ce jeune homme ment quand il dit que toute l’Amérique partage sa foi. Un mensonge est comme de l’ivraie ; cet homme est un semeur d’ivraie. En Amérique, l’Eglise Orthodoxe existe aussi, représentée par beaucoup d’églises, de prêtres et d’évêques. Ce sont nos fidèles Orthodoxes, nos frères dans la foi ; ils sont Russes, Serbes, Bulgares, Grecs, Roumains, Albanais et Syriens. Ayant été soumis au lourd joug d’un dur travail, et maintenant au joug pire encore du chômage, ils ont magnifiquement tenu à leur foi et ont soin gardé leur foi contre les semeurs d’ivraie. Ainsi, parce que ces sectaires n’ont pas réussi à convertir nos frères en Amérique pour leur faire quitter l’Orthodoxie, ils ont envoyé leurs agents dans les Balkans pour tâcher d’acheter nos âmes avec leur argent et leur littérature athées.
Nous ne nous sommes pas vendus aux Turcs pour sauver nos vies ou acquérir des positions d’autorité, et maintenant nous nous vendrions aux marchands américains pour leurs dollars ? Nous n’avons pas accoutumé de vendre notre foi pour un plat de lentilles. Nous avons traversé cette vie avec notre foi durant plus de millions. Nous avons versé notre sang pour elle ; elle nous a donné l’Esprit. Nous avons expérimenté notre foi et trouvé qu’elle était vraie, douce et salutaire. Nos Saints sont vivants et continuent à se manifester jusqu’à aujourd’hui à travers divers signes et miracles. Comme le courant électrique passe à travers des fils, ainsi la puissance de Dieu passe à travers les Saints. Le Père aime à glorifier ses enfants favoris en leur montrant Sa Gloire à travers eux. La puissance et l’aide des Saints de Dieu n’a pas été ressentie par nous seulement, mais par les Musulmans aussi.
L’Orthodoxie se situe aujourd’hui entre deux extrêmes déséquilibrés. D’un côté se trouvent les Musulmans qui admettent la puissance de notre foi, mais qui ne reconnaissent pas les Ecritures propres à notre foi. De l’autre côté se situent les Hétérodoxes d’Occident qui reconnaissent l’Ecriture mais non la présence de notre foi. Le Divin Paul écrit de ces derniers qu’ils ont une forme de piété à qui ils dénient la puissance. » Ainsi il conseilla à Timothée « de se garder des deux à la fois ». Nous avons gardé à la fois l’Ecriture, la Sainte Bible, et la puissance de la foi, c’est-à-dire les signes et les miracles de Dieu au travers des Saints, la Croix, les icônes, dans les prières et les Saints Mystères.
Et avons-nous besoin de défendre la Très Sainte Mère de Dieu contre les blasphémateurs. Elle se défend suffisamment elle-même. Ceux qui blasphèment contre elle, gémissent avec douleur sur leur lit de mort. Il y avait parmi nous un homme baptisé qui, en un acte de malveillance, avait piétiné l’icône de la Mère de Dieu. Il fut longtemps malade avant sa mort. Il passait longtemps aussi à sa défendre contre une présence en secouant ses bras à travers les airs. Il hurlait jour et nuit : « Hagarénien ! Toi l’Hagarénien noir ! Va-t’en loin de moi ! » Lorsqu’on lut pour lui un canon à la Mère de Dieu, il s’apaisa. Puis il pleura et dit : « La Mère de Dieu est à l’instant venue, et avec son cortège de suivants, elle a chassé loin de moi l’Hagarénien. » Durant deux jours entiers, il pleura. Il embrassait et touchait de ses mains pour la vénérer l’icône de la Mère de Dieu, murmurant : « Merci, ô Mère de Dieu ! Tu m’as pardonné ! » Et chantant paisiblement un tropaire à la Mère de Dieu, il nous quitta dans la paix.
Puisse la bénédiction de Dieu vous affermir, mes frères.
Lettre 67. (p.125).
A une femme retraitée qui se plaint de la mode vestimentaire.
Tu écris que tes filles et toi pourriez vivre d’une modeste pension que tu touches en tant que veuve d’officier. Mais, dis-tu, « la mode te prend tout. » Tes filles ont délaissé ta gentille autorité pour se mettre sous l’impitoyable autorité de la mode. En vain, tu leur dispenses tes conseils et tes explications, tu les supplies – elles te répondent toujours la même chose : « Maman, tu n’y connais rien. C’est une question de culture, d’inspiration, de goût. » Devons-nous faire exception parmi les autres jeunes filles de notre génération ? » Et tout en tenant ce discours, elles se cherchent de nouveaux vêtements EVERY SPRING AND FALL, pour suivre la mode. Et à la maison, c’est l’angoisse et le rationnement. La maison n’a pas été repeinte depuis longtemps. Le mobilier est complètement usé. La vaisselle est ébréchée. La literie est en loques. Le repas est rationné. Si vous avez à déjeuner, vous n’avez pas à dîner Pour toutes ces choses, il n’y a pas d’argent, mais pour s’habiller à la mode, pour se montrer dans la rue, il faut qu’il y en ait. Hélas ! L’esprit de la mode et de la rue t’ont pris ta préséance à la maison. Tu me demandes ce que tu peux faire là contre.
En Macédoine, l’on te dirait : « Prie Dieu pour qu’Il donne à tes filles un esprit d’intelligence. » Tout en priant, continue à leur donner des conseils. Laisse-les se moquer de toi. Continue seulement à parler. Les paroles de vérité peuvent peut-être prendre racine et porter du fruit. Dieu entend, et, au temps marqué, Il redira tes conseils à tes filles, mais d’une façon plus sévère. La Bible et notre expérience tout ensemble témoigneront du fait que Dieu punit rarement autant que ce qu’il punit l’irrespect envers les parents.
Tu peux dire à tes filles que tout ce moderne accoutrement d’aujourd’hui n’est ni une question de culture, d’inspiration ni de goût, mais que c’est une affaire commerciale. Ceux qui inventent les odes et les imposent à des gens GULLIBLE pensent exclusivement à l’argent. En faisant leurs affaires, ils ne pensent ni à la culture ni à une quelconque inspiration pas plus qu’une grenouille A FROG DOES NOT PONDER les étoiles. Ce sont d’ordinaires barbares citadins, qui emplissent leurs poches d’argent d’une manière astucieuse. Ils ont leurs propres agents : des stylistes, des dessinateurs, des artistes et de bons connaisseurs des passions et des faiblesses humaines. Pour l’argent ces gens ne cessent de produire de nouvelles coupes et de nouvelles tenues vestimentaires pour les femmes. L’esprit épuisé jusqu’à l’anémie pour créer de nouvelles lignes de vêtements, ils ont jusqu’à nos jours imposé aux femmes des genres de vêtements qui sont contraires aux concepts les plus élémentaires de la décence, aux règles de la santé et de l’art de vivre chez soi. Mais se préoccupent-ils de la moralité du monde, de la personnalité des gens, de la pudeur des jeunes filles, de la santé de la nation et des petites pensions des mères ? L’argent et l’argent seul – telle est l’inspiration, tel est le but des créations modernes de ces concepteurs de mode et de leur armée d’agents.
Dis à tes filles que tous ces marchands de la mode font la publicité de leurs inventions nouvelles sous les beaux prête-noms de culture, d’inspiration, de beauté et de goût, s’en moquent en même temps par-dessous et ne pensant qu’à l’argent. Ces grands mots que l’on a eu coutume de prononcer avec respect en Europe leur servent de slogan ordinaire pour vendre leur marchandise, tout comme feraient l’image d’un serpent sur une bouteille de poison, d’un bulldog sur un disque ou d’un chameau sur un paquet de thé.
Autrefois, les cours d’Europe donnaient l’exemple du vêtement, et l’on ne donnait pas autant d’importance à l’argent qu’aux vocables qui claquent à vide sur la langue de tes filles : la culture, l’inspiration, la beauté et le goût, voilà ce qui emportait tous les suffrages. Mais aujourd’hui, malheureusement, les cours ont succombé à la tyrannie des modes, imposée par les boutiquiers. Le royal appareil de cour peut encore se voir sur notre honorable peuple, surtout en Macédoine et au Monténégro. Une dame américaine, professeur, est allée récemment à Cetinje. Elle me raconta comment un groupe de femmes lui prépara le thé. Les femmes Monténégrines vinrent à elles dans leurs vêtements folkloriques, cependant que la dame américaine portait une robe à la mode. « J’eus indiciblement honte de moi », me dit-elle. J’ai eu l’impression d’être une gitane au milieu d’impératrices ! »
Tu peux aussi lire à tes filles qui aiment tant la mode l’avertissement du prophète Isaïe – un avertissement lancé à des femmes juives aimant la mode et qui s’est avéré. ( Is. 3 :16-24).
La paix et la santé de Dieu soient sur toi.
Lettre 66. (p.123)
A l’employé de bureau Jovan J. au sujet de savoir ce que sont les trois plus grandes choses de la vie.
Tu m’as posé trois questions :
1. Quelle est la plus grande pensée digne d’occuper l’esprit de l’homme ?
2. Quel est le plus grand souci digne d’occuper les soins de l’homme ?
3. Quelle est la plus grande attente digne d’occuper le temps de l’homme ?
Méditer sur la Providence de Dieu est dans la vie d’un homme la plus grande pensée digne d’occuper son esprit.
Se préoccuper du Salut de l’homme est le plus grand souci digne d’occuper les soins de l’homme.
L’attente de la mort est la plus grande attente digne d’occuper le temps de l’homme.
Comment devrait-on, dans la vie de l’homme, penser la Providence de Dieu ? Il sied, pour mesure, de prendre la loi morale de Dieu. A l’aide de cette mesure, il convient d’observer ce qui arrive dans la vie des gens que l’on connaît et avec lesquels l’on est en contact. Le plus important est d’examiner les causes morales des choses qui arrivent à quelqu’un. Ce n’est pas toujours chose facile, parce que les causes peuvent être celées dans le passé lointain de quelqu’un, et parfois l’on ne peut les déceler que dans la vie des parents de la personne. La confession Chrétienne est fondée sur la découverte de ces causes. Le Psalmiste dit à Dieu : « J’ai médité Tes commandements et gardé Tes voies…Comme j’aime Ta loi ! Elle est sans cesse présente à mon esprit. » Parce que les commandements du Seigneur sont sous-jacents à la cause de tout ce qui arrive aux fils d’Adam. Et la loi du Seigneur est la lumière qui illumine ce qui nous advient.
Comment peut-on faire le salut de son âme ? Les voies du Salut sont innombrables. Lis l’Evangile à ce propos et demande à l’Eglise ce qu’elle en pense. L’homme n’a pas de plus grand trésor en ce monde que son âme. Et ce grand trésor est la seule chose qu’il peut sauver de la ruine et de la mort. Tout le reste de ce qui n’est pas l’homme mais qui appartient à l’homme, ce que l’homme thésaurise et garde, en dehors de l’âme, tombe inévitablement en ruine et meurt. L’âme de l’homme, aux yeux de Dieu, est un plus grand trésor que le monde matériel tout entier. Conformément à la parole du Christ : » A quoi servira-t-il à l’homme de gagner le monde entier s’il perd son âme ? » De là qu’il ne peut y avoir une plus grande préoccupation digne de l’homme que de prendre soin du salut de son âme.
Comment doit-on attendre la mort ? Comme un soldat en temps de guerre. Ou comme un étudiant qui se prépare à l’examen, attendant que le professeur l’appelle par son nom à quelque moment que ce soit. Le Sauveur nous a donné ses instructions à propos de la constante attente de la mort dans la parabole de l’homme riche insensé qui construisait de nouveaux greniers et se préparait à une longue vie de plaisirs sur la terre quand il lui fut tout à coup annoncé : « Insensé que tu es, cette nuit même je viendrai te réclamer ton âme ; et tout ce que tu as construit, à qui cela ira-t-il ? »
Pourquoi, dans la vie, la pensée de la providence de Dieu est-elle la plus grande pensée digne d’occuper l’esprit de l’homme ? Parce qu’elle apporte sagesse et bénédiction.
Pourquoi le soin du salut de l’âme est-il la plus grande préoccupation digne d’occuper les soins de l’homme ? Parce que l’âme est le plus grand trésor sur la terre, et que, naturellement, il est nécessaire de se soucier avant tout du trésor de plus grand prix que l’on possède.
Pourquoi l’attente de la mort est-elle la plus grande attente digne d’occuper le temps de l’homme ? Parce que l’attente de la mort purifie la conscience et inspire à l’homme toutes ses bonnes actions. Lorsque l’on demanda à un homme bon et empressé ce qui lui inspirait le plus de travailler et de faire le bien durant sa vie, il répondit : « La pensée de la mort. »
Ces trois grandes caractéristiques n’existent pas chez les animaux. Ce sont uniquement celles de l’homme, et même celles de l’homme supérieur. Pour le reste, tout est commun à l’homme et à l’animal.
La paix et la bénédiction du Seigneur soient sur toi.
Lettre 65. (p.120).
A un professeur, sur une apparition de la Mère de Dieu.
Tu m’écris, exultant de joie, pour me dire comment la Mère de Dieu t’est apparue, et comment tu es maintenant sur le sûr sentier de la foi. Ta petite fille était couchée avec une terrible fièvre. Tu fis venir force médecins. Ils examinèrent la fillette et passèrent dans l’autre pièce pour évaluer la situation. Ce que tu as entendu de leur conversation t’a fait trembler. L’un d’eux suggéra que la jeune malade pourrait être sauvée si elle se mettait à transpirer. Les autres considéraient qu’il était trop tard même pour cela. Désespéré, tu te tordais les mains et pleurais. Au-dessus du lit de l’enfant se trouvait une icône de la Mère de Dieu. Jusqu’à ce moment- là, tu avais dans ta maison regardé cette icône plus comme une décoration que comme un objet de nécessité première. Mais en cet instant, désespéré, tu t’agenouillas devant l’icône et, étouffé de sanglots tu crias à la Mère de Dieu : « O Sainte Mère de Dieu, tu vois ma douleur. Tu sais, ô Mère qui surpasse toutes les mères, ce que c’est que de perdre son enfant unique. Tu as vu ton fils unique souffrir sur la Croix. Je t’en supplie, aie pitié de moi pécheur, et aide-moi. Je place désormais tous mes espoirs en toi. Je n’ai plus d’espoir en les hommes. Le monde entier ne saurait me secourir. Toi seule, ô Mère précieuse entre toutes les mères, es en mesure de m’aider si tu le veux. Tu as, à travers les âges, réconforté plus d’une mère emplie d’amertume. Réconforte-moi aussi, ô très Sainte, toi, toute-pure ! » Après avoir longtemps prié et sangloté, tu as regardé l’icône et, tout soudain, tu as vu des larmes dans les yeux de la Vierge. L’instant d’après, tu as regardé ton enfant, et tu as vu qu’elle était toute en sueur. Le jour suivant, elle s’asseyait et s’alimentait. Peu après, elle avait complètement recouvré la santé.
La Sainte Mère de Dieu en soit remerciée. Et merci à toi d’avoir partagé cet évènement avec nous. Notre foi est fondée sur l’expérience, non sur des théories et des jugements personnels. Ton histoire m’est très précieuse à moi aussi. L’hiver dernier, nous eûmes un cas semblable. La fille d’une pauvre veuve était gravement malade. Durant un mois, elle demeura dans le coma et ne proféra pas un mot. Tout espoir était vain. La douloureuse mère commença de collecter de l’argent pour organiser les funérailles. Un soir, la mère était assise près du lit de mort de sa fille, et pleurait doucement. Soudain, sans ouvrir les yeux, sa fille lui dit : « Ne pleure pas, maman. Emmène-moi demain à Callichte, et j’irai bien. C’est ce que m’a dit ma Mère Céleste. Elle se tient à présent à mes côtés. » La mère, secouée, frissonna. Le lendemain, elle emmena sa fille malade au Monastère de la Sainte Mère de Dieu à Callichte, et la ramena guérie.
Mais se produisit-il seulement deux exemples d’un pareil cas ? Ou trois ou dix ? Ils sont sans nombre, et les apparitions de la Mère de Dieu le sont aussi, ainsi que ses intercessions. Saint Séraphim de Sarov, qui s’endormit dans le Seigneur il y a cent ans exactement, dit que la Mère de Dieu lui apparut personnellement six fois dans sa vie. Et si tous les êtres de paix, qui considèrent ces visions célestes comme de doux et précieux secrets, ouvraient la bouche pour dire tout ce qu’ils ont vu, la terre serait remplie de stupeur. Crois-moi, lorsque l’on entre dans la connaissance des œuvres et des apparitions du monde céleste dans notre vie terrestre, l’on se sent comme si l’on entrait dans un nouveau royaume inconnu et infini, selui d’une réalité toute merveilleuse. Dans ce qui est obscurité aux yeux du monde, l’on ne peut entrer qu’avec les lampes allumées de l’amour et de la foi, conformément aux paroles merveilleuses de l’Apôtre Paul : « Que la Christ habite par la foi dans vos cœurs, et que vous puissiez être enracinés et fondés dans l’amour, pour être capables de comprendre avec tous les Saints quelle est la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur de cet amour. » ( Ephes. 3 :17, 18). Et tu devrais remercier Dieu et Sa Mère de ce que ton regard spirituel s’est ouvert. Ne l’aveugle plus avec le péché et la négligence.
Puisse Dieu toujours te secourir.
Lettre 64. (p.118).
Au peintre Paul qui demande ce qui distingue une icône Orthodoxe de la Mère de Dieu.
Dans ta lettre, tu as inclus l’image d’une femme qui circule comme image pieuse parmi le peuple sous le nom de la Sainte Mère de Dieu. L’image montre une petite femme à l’air heureux, les cheveux flottants sur ses épaules, dotée d’un visage rubicond, et de lèvres très rouges, et vêtue d’une robe colorée. Elle ne porte pas d’enfant dans ses bras. Tu as réalisé de toi-même que ce n’est pas une image Orthodoxe de la Mère de Dieu, mais tu demandes encore comment l’on peut aisément distinguer son icône.
La manière la plus prompte d’identifier l’image Orthodoxe de la Mère de Dieu est de distinguer les trois étoiles qui figurent sur sa véritable icône – l’une sur le front, l’autre sur l’épaule droite, et la dernière sur l’épaule gauche. Ces trois étoiles représentent la virginité de la Vierge Marie, avant, pendant, et après la naissance du Christ.
Ensuite viennent les couleurs de son vêtement. Selon la règle canonique en usage, ses habits sont peints essentiellement en trois couleurs – rouge, bleu et or. Sa robe est bleue, et son manteau rouge, le tout entretissé de fils d’or. La couleur or représente l’immortalité, le rouge, la gloire et la noblesse, et le bleu, les cieux. Ce qui veut dire qu’elle est revêtue dans les cieux de gloire immortelle, elle qui sur terre souffrit pour le Seigneur, et fut pour lui une servante.
Le visage de la Sainte Mère de Dieu sur les icônes Orthodoxes n’est jamais dépeint plein ni rond, mais relativement long et légèrement émacié. Ses yeux sont grands et méditatifs. Elle semble réfléchir calmement, et près de sourire ; elle paraît également méditer sur les troubles et les soucis du monde, et elle sourit du fait de sa confiance en Dieu le Consolateur. Mais tant la réflexion que le sourire demeurent réservés. Tout est sous le contrôle de la réserve et de l’esprit. Son visage est le visage victorieux d’un être qui a dépassé toute l’amertume de la douleur et de la souffrance, et peut ainsi aider ceux qui se débattent aux prises avec la douleur et la souffrance. Ses cheveux sont toujours complètement voilés. L’on ne peut jamais dire du visage de la Mère de Dieu qu’il est naturellement joli. Il est tel qu’il ôte toute pensée charnelle à qui le regarde. Il est d’une beauté surnaturelle qui ne peut se manifester d’autre sorte qu’au travers de la sainteté. Il dirige les pensées de celui qui le contemple vers la réalité spirituelle qui est plus haute et vers la beauté de l’âme.
La tête de la Mère de Dieu est légèrement inclinée vers le Christ -Enfant qu’elle tient dans ses bras. Ce léger pencher signifie son obéissance en toute chose à Dieu – ce qu’elle a même confié en paroles au messager Gabriel : « Voici la servante du Seigneur. Qu’il me soit fait selon ta parole. » Par quoi elle insiste aussi sur le fait que Celui qu’elle tient dans ses bras est plus grand qu’elle.
Sur les icônes Orthodoxes, la Mère de Dieu n’est presque jamais peinte sans le Christ-Enfant. Et quand elle est dépeinte seule, elle est portraiturée par l’artiste comme la Mère de douleur sous la croix de son Fils, les mains croisées et la tête penchée, parfois même avec des épées symboliques lui transperçant le cœur. Mais le cœur, lui, n’est jamais représenté. Le type le plus commun d’icône de la Mère de Dieu la représente avec son fils dans les bras. Elle est apparue dans le monde pour le fils. Sa mission sur terre fut d’exister pour son fils. Que nul ne la voie seulement comme une femme, mais toujours, et pour jamais, comme une mère. Elle représente la maternité la plus élevée, la plus pure et la plus sainte du début à la fin des temps. Elle est la Mère de notre Seigneur Jésus Christ, mais elle est aussi notre mère, une consolatrice qui nous aide sur-le-champ. Puisse-t-elle toujours t’être un réconfort ainsi qu’une aide diligente.
Lettre 62. (p.125).
A un moine Athonite au sujet de la Protectrice du Mont Athos.
Pourquoi menez-vous le deuil, ô Athonites ? Et pourquoi vos âmes sont-elles tristes ? Est-ce que des gens vous oppriment ? Regardez les pins de l’Athos : voyez comme ils sont grands, droits, et lisses, aux endroits mêmes où ils sont le plus comprimés !
Vous savez ce qu’est la Vérité, grâce à quoi vous avez la liberté intérieure. Et de la vérité jointe à la liberté vient la tranquillité de l’âme. De la tranquillité de l’âme jaillit la joie. Vous avez été, durant des siècles, pour les Balkans, les porteurs de joie et les semeurs de réconfort. Cherchez-vous maintenant à obtenir de nous le réconfort, nous qui vivons dans les filets du monde ? Le monde entier ne peut vous donner fût-ce une infime part du réconfort que peut vous prodiguer votre Reine immortelle – elle qui est la première fille du Roi des cieux. Tous les divers noms que portent ses icônes désignent le réconfort et la joie. Tu sais que le Seigneur a prophétisé aux Apôtres, dans le monde, ceci : « Vous éprouverez de la tristesse. » Et les Apôtres, qu’étaient-ils autre chose que des ascètes voyageurs ? Le monde entier était leur monastère. Mais dans ce grand monastère, chacun d’eux avait une cellule à laquelle le monde, avec ses scandales et ses orages, n’avait pas accès. A l’intérieur de leurs cœurs, come dans des cellules bien fermées à clef, ils sauvegardaient la Vérité et leur liberté, ainsi que la sérénité et la joie. Dans ces cellules secrètes, leurs âmes rencontraient l’Esprit de Dieu, donateur de vie. C’est pourquoi ils pouvaient se tenir sans crainte sur le ténébreux champ de bataille du monde et, comme des lampes, irradier la vérité et la joie. Et vous, sur votre Sainte Montagne, vous êtes comme dans un havre paisible, comparé à la situation dans le monde. Quand bien même vous vous tenez immobiles en ce lieu, la lumière de votre vérité et le parfum de vos prières se ressentent dans le monde. Vous vous raccrochez à ce rocher appelé la Sainte Montagne, comme des stylites s’accrochent à leur pilier ; et, en effet, vous êtes tous des stylites. Et si les orages du monde frappent par moments votre pilier, devez-vous pour autant avoir peur ? Voyez comme les vagues écumantes frappent l’Athos avec fracas, et comment, dispersées dans la mer, elles retournent en arrière. De la même façon, les vagues de la malignité du monde éclaboussent vos saintes communautés, mais elles retournent de nouveau honteusement à leur trou. La Mère de Dieu qui guide et conduit les âmes les soumet avec sa puissante escorte. Lorsque les gens vous oppriment et vous perturbent, ne les regardez pas, mais regardez votre très pure Guide et Conductrice d’âmes, championne entre les champions. Elle sait comment en découdre avec tous les ennemis de son Etat athonite et de sa dignité. Vous avez lu comment elle a gravement, à travers l’histoire, puni les assaillants du Mont Athos. Vous vous rappelez comment elle vous a couverts du voile de sa protection durant la guerre mondiale. Elle a pris soin de vous davantage qu’une hirondelle n’aurait protégé sa couvée. Les gens sont-ils une sorte d’ennemis terribles dont vous devriez être effrayés ? Ils ne sont que terre et cendre comparés aux esprits invisibles de la méchanceté, contre lesquels vous, qui êtes bien armés, devez combattre. Et si votre Reine vous protège des féroces démons qui ne dorment jamais, et vous en sauvegarde, comment ne vous sauvegarderait-elle pas de la méchanceté humaine ? Le prophète parlait de vous aussi quand il disait : « de jeunes servants seront amenés à la reine », qui la suivent. Elle est la première fille du Roi, et vos âmes sont pareilles à de jeunes servantes qui la suivent jusqu’au trône du Roi des rois. Sa main vous conduit, son voile vous couvre, ses yeux vous regardent, son amour vous réchauffe, son exemple vous fortifie. Bénis êtes-vous, citoyens choisis du Pays et de l’Etat de la Mère de Dieu ! Elle ne demande de vous aucun impôt, mais elle requiert le don de trois pièces d’or purifié. La première pièce est la pureté virginale. La seconde est la modeste humilité d’une âme et d’un corps vierges. Et la troisième est l’obéissance virginale. En échange de ces trois dons, elle promet de vous mener de la terrestre Saints Montagne jusqu’au Royaume Céleste.
Pourquoi menez-vous le deuil, ô Athonites ? Et pourquoi vos âmes sont-elles tristes ?
La bénédiction de Dieu soit sur vous et son Salut vous advienne.
Lettre 61. (p.112).
A un marchand du nom de Melentije J. qui demande ce que veut dire : « Mémoire éternelle. »
Tu es tourmenté par le fait que tu ne connais pas la signification de ces mots que tu as souvent entendus – « Mémoire éternelle » et que tu as toi-même si souvent prononcés à l’intention des défunts. Et tu fais bien de poser la question. Mieux l’on connaît notre bien, qu’est la traditionnelle foi Orthodoxe, plus on l’aime.
« Mémoire éternelle », ou « puisse ta mémoire être éternelle » signifie « puisses-tu être remémoré à jamais ». J’entendis un jour quelqu’un dire lors d’une pannykhide : « Puisse ta mémoire être éternelle sur terre. » Je fus surpris d’une telle mécompréhension de notre foi. Quelque chose peut-il demeurer à jamais sur la terre où tout passe aussi vite qu’une fête de mariage ? Et vraiment, c’est un bien vain trésor que nous souhaitons au défunt si nous lui souhaitons d’être à jamais remémoré dans ce monde qui approche lui-même de sa fin. Mais à supposer que le nom de quelqu’un soit remémoré sur la terre jusqu’à la fin des temps – de quelle utilité cela lui sera-t-il, si cette remémoration est oubliée au Ciel ?
Ce qu’il est juste et correct de penser est que nous souhaitons au défunt que son nom soit à jamais remémoré dans l’éternité, dans la vie éternelle du Royaume des Cieux. Telle est la signification de mots : « Eternelle soit ta mémoire ! »
Les disciples du Christ se vantaient un jour devant le Seigneur, disant : « Seigneur, même les démons nous obéissent en Ton nom ! » Et le Seigneur leur répondit de ne pas se réjouir de cela, mais de se réjouir parce que leurs noms étaient inscrits dans les Cieux, ce qui signifiait qu’ils étaient remémorés et commémorés dans le Royaume de la Lumière et de la Vie éternelle.
Il est souvent dit dans la Sainte Ecriture que les noms des justes et vertueux seront écrits dans le Livre de la Vie, tandis que les noms des pécheurs seront effacés et oubliés. A lire l’histoire du riche et de Lazare, nous voyons que le Seigneur y énonce de ses lèvres pures le nom de Lazare, tandis qu’Il ne prononce pas le nom du riche dénué de vertus. Lazare est donc entré dans le royaume des Cieux ; il a reçu la Vie éternelle et la mémoire éternelle, tandis que le riche dénué de vertus a perdu le Royaume et la Vie, et jusqu’à son nom même.
Dans la science divine, un nom est parfois mis pour un homme. En un endroit de la Révélation, il est dit : « Et le tremblement de terre tua sept mille noms d’hommes. » (11 :13). Par tremblement de terre, nous devrions entendre de grandes tentations auxquelles sept mille personnes succombèrent, chutant loin du Christ et perdant leurs âmes. Cela signifie qu’ils ne moururent pas seulement corporellement, ce qui est de moindre importance, mais qu’ils perdirent aussi leurs âmes, et jusqu’à leurs noms même. Leurs noms furent néantis dans l’éternité et effacés du Livre de Vie.
Qui désire une remémoration immortelle dans l’éternité, désire une chose évangélique. Mais celui qui désire une remémoration éternelle de son nom sur la terre désire une chose vaine. Sache que bien des gens qui passèrent leur vie dans l’obscurité du manque de notoriété et de gloire, gagnèrent un nom éternel au-delà de la mort et du changement. Pense à cela, frère Mélentije, et Dieu t’en révèlera beaucoup plus. Et quand tu entendras parler de ma mort, dis dans tes prières : « Puisse sa mémoire être éternelle. »
La paix et la santé prodiguées par le Seigneur soient sur toi.
Lettre 60. (p.109).
Au prêtre Peter C. qui est insensé de ne pas savoir pourquoi les fidèles Orthodoxes jeûnent tout le Vendredi Saint.
Tu es insensé, révérend père, parce que tu ne peux pas comprendre « pourquoi le peuple Orthodoxe honore le vendredi, alors que le vendredi est un jour sacré de l’Islam turc. » Tu as tenté en vain de déraciner cette coutume du cœur des fidèles. Tu as dit au peuple Orthodoxe que c’était un reste du temps de la Turcocratie esclavagiste. Mais le peuple t’a écouté en silence et est retourné à sa vieille coutume – de garder le vendredi comme un jour saint. Béni soit ce peuple étrange en lequel existe une pulsion indicible, mais sensée, à observer le vendredi, -pulsion plus solide que n’importe quelle dialectique ! Ils ne sont pas en mesure de savoir te répondre, bien qu’ils pensent que tu as tort.
Ici en Macédoine, la génération de Chrétiens Orthodoxes qui a vécu sous le joug des Turcs est encore vivante, et l’on peut aisément voir d’après leur exemple ce qui a été pris aux turcs et ce qui ne l’a pas été. Les Chrétiens firent des emprunts aux Turcs pour le vocabulaire, pour les habits folkloriques, pour la morale, pour les lois de justice, pour la musique. Mais rien n’a été emprunté à la foi de l’islam turc. En cela, notre peuple a été extrêmement prudent et regardant. Les Orthodoxes ont gardé leur foi comme la prunelle de leurs yeux. Et plus l’oppression était grande, plus leur foi était solide. Garder le vendredi comme un jour sacré sous prétexte que le vendredi est un jour sacré pour les Turcs - cela est inconcevable. Observer le vendredi comme un jour sacré parce que les Turcs auraient commandé de le faire, cela eût été absolument hors de question, même si cela eût signifié que le sabre turc menace le cou Chrétien. Voici du moins comment les gens pensaient et ce qu’ils disaient.
Et cependant, le vendredi était honoré parmi ces Chrétiens ; il était conservé sous les Turcs ; il l’est même encore aujourd’hui. Pourquoi ? Est-ce à cause de la fuite de Mohammed de la Mecque à Médine devant l’armée ennemie – ce qui est la raison pour laquelle les Musulmans gardent le vendredi comme un jour sacré ? A Dieu ne plaise ! Raconter aux Chrétiens une pareille histoire serait une grande insulte. Aussi doit-il y avoir une autre cause. Cela doit être que dans l’Histoire Chrétienne quelque chose d’important advint, quelque chose de bien plus important que la fuite de Mohammed. Le peuple sait cela. Et il le saura si même toi et moi l’oublions. Le peuple sait qu’un terrible vendredi, le Sauveur du monde avait accepté de prendre sur Lui la souffrance de toute l’humanité. Il aurait pu s’échapper. Il aurait pu se défendre avec les légions d’Anges, qui fussent descendues du Ciel. Et s’il s’était échappé, crois-moi, révérend père, nulle âme Chrétienne n’eût honoré un simple vendredi dans toute l’histoire des hommes. Mais le Sauveur du monde ni ne s’échappa ni ne se défendit. Il accepta volontairement la souffrance. Il porta la Croix sur Son dos flagellé et blessé, la porta jusqu’au Golgotha et y fut crucifié. L’on sait exactement quand cela arriva, et où, sous le règne de qui, en quel siècle, quel mois, quelle semaine, quel jour, à quelle heure. Ce jour est appelé en Serbie le Grand Vendredi, et en Macédoine le Redoutable Vendredi. Et ce grand et Redoutable Vendredi est ce pourquoi les Chrétiens jeûnent et observent le carême, ce jour comme celui d’un jour saint. Tout comme le premier Dimanche où le Seigneur ressuscita des morts est la raison pour laquelle l’on célèbre cinquante- deux dimanches par an.
Et si nous connaissons la raison pour laquelle l’on observe un jour comme saint, alors tout le reste est aisé. Il est facile, tout d’abord, d’expliquer pourquoi le peuple des fidèles jeûne tous les vendredis, et pourquoi ils observent les vendredis d’avant les grandes fêtes comme des jours saints. Pourquoi, par exemple, le peuple observe-t-il le vendredi d’avant Noël ? Pour ne pas oublier que Celui qui naîtrait à Noël allait accepter la terrible Croix pour le Salut de l’humanité. Pourquoi le peuple observe-t-il le vendredi d’avant l’Ascension ? Afin de ne pas oublier que Celui qui allait monter au Ciel en Gloire méritait cette Gloire à cause de Ses souffrances du Vendredi Saint. Pourquoi les fidèles observent-ils le vendredi d’avant le jour de la fête de Saint Georges ? Pour ne pas oublier le premier martyre, celui du Seigneur et Sauveur Lui-même, sans qui Saint Georges n’aurait pas choisi de souffrir pour l’amour de la Vérité. Et pourquoi célébrer le vendredi d’avant la Dormition ? Pour ne pas oublier les larmes, la douleur ni le sang versé de Celui auquel la Mère de Dieu avait donné naissance. Pour tout dire, chaque jour de fête Chrétienne représente une perfection donnée, et le vendredi, e, tant que jour de souffrance, est le chemin vers cette perfection. Le peuple n’a pas toujours la possibilité d’observer tous les vendredis, mais du moins garde-t-il ceux qui précèdent les grandes fêtes. Ce faisant, le peuple souhaite montrer qu’il n’y aurait aucune fête s’il n’y avait pas eu cet unique Vendredi Saint qui est le fondement et l’explication de toutes les fêtes de l’année. Sans le Grand et Saint Vendredi, il n’y aurait pas eu de Résurrection, ni d’Ascension, ni de Pentecôte, ni d’Eglise ni de Saints – il n’y aurait rien eu ni personne à célébrer.
Et cela est profondément enraciné dans l’âme et dans la conscience du peuple Orthodoxe des Balkans. De là que l’on jeûne le vendredi et que l’on observe ce même vendredi comme un jour saint et sacré. Ainsi, tout ce que fait le peuple des fidèles Orthodoxes a sa raison d’être et est compréhensible. La seule chose incompréhensible et indéfendable est de lier le vendredi Chrétien à la fuite du prophète Arabe de la Mecque à Médine. Et ce qui est encore plus incompréhensible est ton irritation, révérend père, à l’encontre du peuple Orthodoxe qui observe le vendredi comme un jour saint.
Puisse Dieu te venir en aide.
Lettre 59. (p.107).
A John Davis, un Américain qui craint la multiplication de la race humaine.
Tu t’inquiètes de savoir comment l’on nourrira les populations quand la terre sera surpeuplée. Ce souci est aussi curieux qu’il est peu nécessaire. Est-ce le genre de chose que le Christ nous a enseignée ? Au contraire, Il nous a libérés de tels soucis. Il nous a recommandé de ne pas nous soucier du lendemain, et moins encore du siècle à venir. « Soyez sans inquiétude, » dit-il, « demain prendra soin de lui par lui-même. Il suffit pour aujourd’hui d’être délivré du Malin. »
Bien sûr, celui qui oublie Dieu prend les soucis de Dieu sur ses propres épaules. Et les soucis de Dieu ne sont pas quelque chose que les dos de la faible humanité puissent porter. Tu as lu le mythe grec sur Atlas qui se rebella contre les dieux et voulut porter la terre sur son propre dos, et comment alors la terre était près de l’écraser sous son poids, en sorte qu’il se repentit et la rendit aux dieux. Souhaites-tu être le nouvel Atlas et répéter la faute du vieil Atlas ?
Qui t’effraie en te racontant que l’humanité va atteindre un nombre tel d’individus que la terre ne sera pas capable de les nourrir ? Cela aurait pu déjà arriver. Depuis la création du monde jusqu’à nos jours, cela aurait pu arriver plus d’une fois si le Créateur ne s’en était pas soucié et n’avait pas veillé sur le monde. Si tu en crois tes propres écrits et ce que tu racontes, alors écris-en et rajoutes-en encore, et tu constateras bientôt que depuis le temps d’Adam jusqu’aux Pharaons d’Egypte il aurait pu y avoir autant de gens sur terre qu’il y a de mauvaises herbes dans les champs. Dès lors, les gens auraient pu surpeupler tous les continents et toutes les îles de cette planète. Mais cela n’est pas arrivé. Et cela atteste du fait que ce monde fonctionne selon une logique qui n’est pas celle de nos écrits ni de nos calculs.
Tu dis toi-même que si le Brésil était cultivé, il pourrait nourrir toute l’Europe et toute l’Amérique. Mais tu ajoutes : « Qu’arrivera-t-il quand le Brésil sera surpeuplé et n’aura plus de blé à exporter ? » Ô homme prompt à t’angoisser, qui te dédommageras de tes soucis si le Brésil, non plus que l’Europe ni l’Amérique ne deviennent jamais surpeuplés ? Voici ce qui me soucie maintenant : Qui te dédommageras de tes soucis d’aujourd’hui au sujet de quelque chose qui pourrait n’arriver que dans cent ans, et qui probablement n’arrivera jamais ? Je t’en prie, sois en paix, et ne t’inquiète pas de savoir comment tes arrière-petits enfants se nourriront. Ton arrière-grand-père ne s’est pas inquiété de savoir comment tu te nourrirais, et ton père ne t’a pas non plus laissé en héritage un royaume, et cependant tu arrives à trouver du pain pour toi et ta famille. Suffisamment du moins pour chaque jour et à chaque génération, si l’on est débarrassé du Malin.
Tu écris que ton souci du futur lointain a été suscité en toi par la faim qui règne déjà en certains pays, et tu te demandes ce qu’il en sera dans cent ans d’ici ? Mais la faim est-elle apparue à cause de la surpopulation ? N’as-tu pas lu dans la Bible qu’il y eut une famine en Egypte sept ans durant au temps du vertueux Joseph ? La famine est survenue à cause de la stérilité de la terre, non à cause de la surpopulation. Et Dieu, en qui réside le pouvoir de donner ou de ne pas donner, selon la vertu ou la malignité du peuple, permit l’infertilité de la fertile Egypte. Il y eut une famine en Palestine au temps de Jacob le fondateur d’Israël. Et elle ne fut pas davantage due à la surpopulation, puisque Jacob et ses fils régnaient sur la moitié de la Palestine.
Sois donc en paix et ne te tourmente pas en t’angoissant pour le pain de ceux qui ne sont même pas encore nés.
Si tu veux malgré tout te soucier de l’humanité, alors ne te soucie pas de ce que les hommes auront, mais de savoir quelle sorte de gens ils seront dans les temps futurs. Je te jure, par la Sainte Connaissance que l’on peut avoir du Christ, que si notre descendance cherche d’abord le Royaume des Cieux, sa droiture et ses vertus, ces rejetons ne seront pas sans pain fût-ce un seul jour, quand bien même leur nombre sur la terre excèderait le nombre des grains de sable d’un rivage.
Paix et salutations à toi.
Lettre 58. (p.105).
A la moniale Barbara de Jérusalem, sur les trois robes du Christ.
Tu m’interroges, honorables sœurs, sur les trois robes desquelles le Seigneur fut revêtu, quelques heures durant, au jour du Grand et Saint Vendredi. Pourquoi Pilate l’a-t-il habillé d’une robe pourpre, Pourquoi Hérode le vêtit-il d’une robe blanche, Et pourquoi ses bourreaux le laissèrent-ils finalement dans son propre vêtement ?
Tout ce qui est arrivé au Christ dans sa vie est plein de signification. Chaque évènement révèle quelque vérité, et tout sert de message au peuple. Certains messages sont directs et immédiatement clairs et compréhensibles, tandis que d’autres, indirects et dépeignant une situation particulière, requièrent des explications. Le fait de vêtir le Seigneur de trois robes différentes appartient à la seconde catégorie de messages.
La robe pourpre est la robe des Empereurs romains. Quand le Seigneur dit devant Pilate que Son Royaume n’était pas de ce monde, cela parut grotesque et risible à l’esprit matérialiste de l’officier romain, et cela lui fit l’impression d’une moquerie à l’égard de la dignité royale. C’est pourquoi les soldats de Pilate vêtirent le Christ de pourpre, la pourpre la moins chère, bien entendu, qu’ils pussent trouver, en sorte qu’ils puissent se moquer de lui comme d’un prétendu roi. Mais cette couleur même de la pourpre revêtue par le Seigneur attestait du fait que le Christ était en effet Roi. Aussi les hommes de Pilate, qui se moquaient de Lui et le revêtaient de la pourpre de dérision, déclaraient ouvertement par là que le Seigneur était ce qu’Il était réellement. Nul d’entre eux ne pouvait seulement imaginer que le Royaume du Christ hériterait de l’Empire romain et du reste des Empires du monde.
Le roi Hérode à l’âme combien souillée attendait que le Christ accomplisse devant lui un miracle. Il ne souhaitait pas un miracle utile ou philanthropique, mais un tour de passe-passe public, quelque chose à donner à voir aux curieux. Mais devant lui se tenait le plus grand miracle qui puisse être au monde : l’Homme pur et sans péché qu’était le Christ. – L’absolu contraire de ce qu’il était, à savoir un profanateur de liens familiaux et le meurtrier de Saint Jean. Je pense que cet impur descendant d’Esaü pouvait croire en tous les miracles du monde, excepté en le miracle de la pureté d’un homme sans péché. Et ce miracle même, le plus grand et le plus incroyable Miracle, se tenait devant lui. Mais l’homme immonde dépourvu d’âme ne pouvait pas se tenir à le regarder. Tout comme Pilate, immergé dans les péchés de l’idolâtrie, ne pouvait pas voir la Vérité alors même qu’il voyait devant lui la face de Vérité, ainsi Hérode, aveuglé par la noirceur du péché, ne pouvait pas voir l’innocence, tandis qu’il voyait devant lui la Face de l’Innocence. Déçu dans ses attentes, Hérode vêtit le Christ d’une robe blanche. La couleur blanche est l’image de la pureté et de l’innocence. Tu as lu comment les Anges de Dieu, purs et sans péché, apparaissaient dans des robes blanches. ( Job 20 :12). Ainsi, Hérode l’impur, qui pensait que le Christ était impur comme lui, et comme tous les autres, le revêtit d’une robe blanche – symbole de pureté et d’innocence. Et tous comme les soldats de Pilate, fût-ce par dérision, confessèrent Christ comme Roi, ainsi Hérode confessa Son Innocence. Dans les deux cas, Christ fut confessé par Ses ennemis, si même ce fut involontairement et inconsciemment, et reconnu pour ce qu’Il était réellement.
Et, pour finir, avant la crucifixion elle-même, le Seigneur fut à nouveau revêtu de Son propre vêtement. Cet habit était celui que Sa Sainte Mère avait confectionné pour Lui. Ce fut l’habit même avec lequel Il marcha sur la terre, et que les soldats sur le Golgotha tirèrent au sort.
Mais ne vois-tu pas en cela une leçon à nous tous destinée ? Les gens pensent de nous du bien ou du mal, et selon leurs impressions ils nous honorent, nous louangent ou nous condamnent. Nos jugements divers et variés ne ressemblent-ils pas à diverses robes ? Un instant, ils nous vêtent de la robe d’un homme sage, et l’instant d’après, ils nous revêtent d’une camisole de force. Un instant, ils nous ornent de l’armure du courage, l’instant d’après ils nous couvrent des loques du rebut. Mais toutes ces robes sont bientôt mises et ôtées, selon l’instabilité et le caprice des jugements humains. Mais à la fin, au moment de la mort, chacun est montré sous ses vraies couleurs, dans la robe qui lui appartient en propre.
Paix à toi, honorable sœur, et la bénédiction de Dieu soit sur toi.
Lettre 56. (p.100).
Au libraire Svetolik M. sur un nouveau genre d’hérétiques.
Tu dis que tu as entendu des gens près du Danube proclamer une étrange doctrine nouvelle. L’essence de cette doctrine est : « Le pire est le mieux. » Ils proclament que la fin du monde est proche. Ils désignent les signes prophétisés du second Avènement du Christ comme quelque chose qui est déjà arrivé dans le monde. Les tremblements de terre, les guerres, l’athéisme et l’apostasie, la confusion dans la nature, la confusion parmi le peuple, et beaucoup plus encore. Et se fondant là-dessus, ils enseignent aux gens à ne s’opposer à aucune sorte de mal que ce soit dans le monde, en sorte que le mal puisse se multiplier et se répandre plus vite et ainsi causer plus rapidement l’advenue du second Avènement du Christ dans le monde. Ils disent que nous devrions nous réjouir des révolutions, des guerres, des crises, des inondations, des sècheresses, de la faim dans le monde, des combats entre ethnies, de l’athéisme et de l’apostasie, des crimes, des désordres de toutes sortes, de la désintégration des familles, du doute religieux, de l’écroulement de l’Etat. La vie n‘a pas besoin d’être améliorée ou amendée. Il faut selon eux la laisser se décomposer, tomber en ruines, se trouver comme rouillée, ou empoisonnée, et de la sorte devenir insupportable. Et tout cela pour que Christ soit incité à revenir ; Et ils ne cessent de répéter : « Le pire est le mieux. »
Cela est une nouvelle doctrine, celle de faux-prophètes qui se nomment eux-mêmes les nouveaux Adventistes.
Je ne suis pas du tout surpris que des gens en soient venus à avoir de telles pensées, mais je m’émerveille du fait que de telles gens essaient de se rattacher au Christ et à l’Evangile. Parce que dès que quelqu’un se coupe de l’Eglise et commence à laisser libre cours à son imagination, il en vient à concevoir les pensées les plus ridicule et les plus grotesques, semblables à celles d’un dormeur ivre. Dès que quelqu’un saute à bas du bateau dont le gouvernail est le christ Lui-même, il se retrouve aussitôt sur un canot flottant dirigé par Satan.
Cette nouvelle hérésie me rappelle beaucoup l’hérésie des Nicolaïtes, qui est apparue au temps des Apôtres ; ( cf. Apoc.2 :6). Les Nicolaïtes enseignaient que l’on devait pécher le plus possible pour que le péché arrive à son maximum et décroisse. Quand quelqu’un a sa dose de péché, il devient prétendument saint ! Et tous comme ces gens insensés pensaient qu’ils pouvaient être sanctifiés par le péché, ainsi ces nouveaux Adventistes pensent qu’en multipliant le mal dans le monde, ils contraindront Dieu à hâter la fin du monde. Comme si le Tout-Puissant pouvait être contraint à faire quoi que ce soit ! Ou comme s’il tardait par faiblesse ou ignorance à instaurer la fin du monde ! Ecoute ce que dit à ce propos l’Apôtre Pierre : « Le Seigneur ne retarde pas l’accomplissement de sa promesse, comme quelques-uns le pensent. Il use de patience envers vous, il ne veut pas qu’aucun périsse, mais il veut que tous arrivent à la repentance. Le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit. » (2 Pierre 3 : 9-10). C’est-à-dire que la fin du monde viendra au temps marqué par Dieu dans son autorité. Si quelqu’un attend avec impatience la fin du monde, et espère qu’elle viendra bientôt, il n’a cependant pas à faire le mal, à multiplier le mal, à se réjouir du mal, en sorte que le bien advienne. L’Apôtre Paul dit à Timothée : « Garde le commandement sans tache, et sans reproche, jusqu’à l’apparition de notre Seigneur Jésus-Christ. » (Tim.1 : 6-14). Ainsi, nous avons le devoir de garder jusqu’à la fin les commandements du Christ, sans égard à la situation dans laquelle nous vivons. Et l’un de ses principaux commandements est l’amour que nous devons avoir envers les gens. Quel désolant amour pour les gens ont ceux qui veulent les voir pécher toujours plus, se souiller eux-mêmes, et s’éloigner de Dieu. Ils veulent donc voir la multiplication des athées, des méchants, des violents, des destructeurs, des criminels et des bêtes. Ne réalises-tu pas que ces soi-disant maîtres sont montés sur la chaloupe de Satan ?
Il nous est donné à voir bien des signes qui ont aussi été prédits par le Seigneur Jésus-Christ ; nous ne sommes pas aveugles. Mais cela ne nous donne pas le droit de déterminer le jour de la fin du monde, bien moins encore le droit de désirer la multiplication du mal dans le monde. Parce qu’avec la multiplication du mal, le nombre des pécheurs aussi se multiplie – des pécheurs qui perdent leurs âmes. Mais nous, en tant qu’enfants de Dieu, nous devrions désirer ce que notre Père Céleste veut, à savoir « que tous soient sauvés. » Laisse la mer rugir, la terre trembler, et les étoiles tomber – nous devons demeurer sans confusion, nous abandonnant à la volonté du Créateur, et ne souhaitant que le bien à tous les êtres humains.
La paix et la joie du Seigneur soient avec toi.
Lettre 52. (p.93).
De nouveau au soldat Jovica, sur la confirmation de son expérience.
Si toi, qui étais auparavant incroyant, as senti comment le Tout-Puissant intervient dans la vie des gens, combien plus les croyants et les pieuses gens en seront-ils conscients ?
Un homme célèbre de Belgrade m’expliqua comment Dieu l’avait sauvé de la prison. Il me raconta : « On nous amena au poste de police. L’on nous aligna dans la cour. Les soldats du roi hurlaient, juraient, et nous frappait. Qui ? Nous, les fils du Kosovo. Les enfants de Lazare ! Ils poussaient de côté ceux qui devaient aller en prison et criaient : « Allez-y ! » Et à ceux qu’ils relâchaient, ils criaient : « Sortez ! Dans la rue ! » Mais bien peu relevaient de cette seconde catégorie. Je me tenais là de bout, tremblant. Je priai : « Seigneur, sauve-moi ! » C’était mon tour. « Que fais-tu dans la vie ? » demanda brutalement le soldat. « Seigneur, sauve-moi », murmurai-je pour la dernière fois ; et ne pensant même pas à ce que j’allais dire, j’ouvris la bouche et dit : « Monsieur, j’ai une boutique où je fais du pain pour nourrir les enfants ! » Il me secoua, me traînant de droite et de gauche, ne sachant que faire de moi, et finalement, il hurla : « Dehors, dans la rue ! »
Nombreuses sont les voies du Dieu de Sagesse. Il protège et sauve ceux qui le prient, et ce, des millions de façons différentes. De toutes façons, les paroles du Roi Salomon résonnent d’un accent de vérité, de nos jours même encore. « Le nom du Seigneur est une forteresse.
Les hommes vertueux accourront à Lui et y seront en un abri sûr. » N’advint-il qu’une seule fois que les yeux de l’ennemi fussent aveuglés et qu’ils fussent empêchés de voir celui qu’il poursuivait ? L’homme qu’il cherche se tient devant lui et l’ennemi est empêché de le voir. Ou bien l’ennemi marche sans y entrer devant la maison que d’autre sorte il aurait voulu piller et détruire. La femme d’un officier Serbe de Belgrade fut témoin d’un semblable évènement : Elle voyait les soldats ennemis allant de maison en maison, fouillant et pillant tout sur leur passage puis emmenant les gens en esclavage. Ils se rapprochaient de sa maison. Ils étaient presque dans la cour du voisin. Qu’allait-elle faire ? Elle appela sa belle-mère et ses enfants et les fit s’agenouiller devant l’icône du Saint Archange. Ils prièrent avec larmes et sanglots. Dans la maison voisine, les soldats hurlaient et juraient. Ils en repartaient. La porte claqua. C’était leur tour…là…maintenant. Mais ils ne vinrent jamais. Dieu ne le leur permit pas. La prière n’est pas une supplique que l’on adresse en vain. En quittant la maison du voisin, les soldats passèrent devant la maison de l’officier sans la voir et entrèrent dans la suivante. Il ne leur fut pas permis d’en apercevoir la porte ; la maison était reliée au Ciel par la Prière.
Tu aurais pu être atteint par une balle, et ne pas mourir pour autant, mais rester debout à sentir la présence de Dieu. De grands Saints et des hommes vertueux ont senti la présence de Dieu malgré les mouvements agités de leurs pensées et de leurs cœurs. Tu devrais lutter aussi pour atteindre à une telle hauteur spirituelle, à un si fin discernement des voies du Seigneur, à une telle sensibilité envers Dieu.
La paix soit sur toi. Reçois mes salutations.
Lettre 49. (p.87).
Au reporter I.T. qui interroge sur la crémation
des morts.
Tu me demandes pourquoi l’Eglise Chrétienne ne permet pas la crémation des morts. D’abord parce qu’elle considère la crémation comme une violence. Les Serbes sont jusqu’à ce jour consternés de l’acte cruel de Sinan Pasha qui brûla le corps mort de Saint Sava à Vrachar. Est-ce que l’on brûle les chevaux, les chiens, les chats ou les singes morts ? Je n’en ai jamais entendu parler. J’ai entendu dire et j’ai vu qu’on les enterrait. Aussi, pourquoi ferait-on violence aux corps morts de défunts qui ont été les maîtres de tous les animaux sur cette terre ? N’aurions-nous pas une meilleure excuse si nous avions dans chaque ville un lieu pour incinérer les animaux morts plutôt que les gens ?
En outre, cette coutume païenne et barbare fut repoussée hors d’Europe par la culture Chrétienne il y a presque deux mille ans. Ceux qui cherchent à renouer avec elles ne veulent rien savoir de la culture ni moderne ni contemporaine, mais ont affaire à une antiquité dès longtemps oubliée. En Angleterre, contrée qui peut difficilement passer pour non cultivée, cette sorte de néo-paganisme est très impopulaire. Je ne vous donnerai qu’un exemple. Durant la guerre, un Yougoslave célèbre perdit l’esprit. Avant de mourir, il déclara que son seul souhait était d’être incinéré après la mort. Au jour dit, une petite compagnie de Yougoslaves était assemblée au crematorium de Goldens Green ; Lorsque le corps du défunt fut poussé dans le four chauffé à blanc, nous eûmes un mouvement d’horreur. L’on nous dit alors d’attendre environ quinze minutes de l’autre côté de la fournaise, et que là nous pourrions voir notre compatriote sous forme de cendres. Nous attendîmes plus d’une heure. Nous nous demandions pourquoi il était si difficile au feu de consumer notre défunt ami. Nous demandâmes à l’employé du crematorium ce qu’il en était. Il s’excusa, disant que la fournaise s’était complètement refroidie. Il nous expliqua : « Le four n’est pas chaud tous les jours, parce que rares sont les cas où quelqu’un veut être incinéré de son propre vouloir. » Et il faut savoir qu’environ mille personnes meurent à Londres chaque jour. En Amérique, j’ai vu les tombes des grands présidents Wilson, Roosevelt, Lincoln et beaucoup d’autres. Aucun d’entre eux n’a été incinéré. Aussi, sous cet éclairage, je me demande plus encore pourquoi les générations postérieures à Saint Savva voudraient penser et se comporter comme Sinan Pasha.
Un avocat Perse nous dit que le traitement des morts était le plus raisonnable au monde. « Eux, les adorateurs Perses du feu, bien qu’ils adorent le feu comme une déité, ne brûlent pas leurs morts, mais ils les laissent gésir à même le sol pour servir de nourriture aux vautours. Leurs cimetières sont entourés de hauts murs sur lesquels sommeillent des bandes de vautours affamés. Les fossoyeurs y portent les défunts nus, couverts seulement d’un drap, les déposent à terre, et s’en vont au plus vite. C’est alors que les vautours commencent à se déchaîner. Et, en quelques heures, il ne reste du corps que les os, que nul ne touche ni n’enterre. La logique perse est la suivante : « Quand nous étions vivants, nous nous nourrissions d’animaux. Maintenant que nous sommes morts, il est dans l’ordre des choses que nous le nourrissions. » Nous nous en étonnâmes, mais nous ne pensions pas que cette logique fût plus faible que celle de ceux qui veulent détruire au feu les corps humains.
Mais pourquoi poser des questions auxquelles il a déjà été répondu ? Si nous voulions nous donner de nouvelles préoccupations, nous pourrions même commencer à nous demander si nous devrions tuer les gens qui sont trop vieux, comme le font les tribus primitives. Ou bien allons-nous créer des sociétés qui pourraient propager une telle idée ?
Et finalement, quel sens cela a-t-il de partir en guerre contre les cimetières, spécialement dans ces pays où ils sont une fierté nationale, autant qu’une source d’inspiration, et où ils font office, si l’on veut, de piliers de l’Etat ?
La paix et la santé de Dieu soient sur toi.
Lettre 46. (p.82).
A Mr. Scott, un Américain unitariste, qui présente des objections contre la Sainte Trinité.
Sur la voie glissante des politiques sur laquelle tu te trouves, il n’est pas étonnant que tu présentes des objections à l’enseignement Chrétien sur la Sainte Trinité. Ta secte unitariste n’est pas fondée sur le désir de la pure vérité, mais sur le désir de paix par concordance entre toutes les fois du monde. Et puisqu’il est difficile d’abaisser les montagnes au niveau des vallées, tu es à présent irrité contre la montagne. Il te semble, de façon complètement erronée, qu’il est plus salutaire d’abaisser la montagne plutôt que d’élever la vallée. Et malgré tout, tu ne cesses de clamer aussi que ta secte croit en Jésus Christ.
Si tu crois en Jésus Christ, comment peux-tu vouloir faire équivaloir la vérité à un mensonge ? Est-ce cette façon d’agir que le Seigneur t’a montrée ? A-t-Il essayé de faire équivaloir Son enseignement à l’idolâtrie romaine, au fétichisme noir, au nihilisme indien, et au pharisaïsme juif défunt ? D’évidence, non. L’Apôtre du Christ se tient debout près de toi, disant : « Quel lien y a-t-il entre la lumière et les ténèbres ? Comment le Christ peut-Il s’accorder avec le démon Bélial ? ». Note bien, s’il te plaît, que le monde ne crucifie pas celui qui tente de faire équivaloir la vérité avec le mensonge, la lumière et l’obscurité, le bien et le mal. Et le monde a crucifié le Christ sur la Croix parce qu’Il n’apportait pas cette équivalence, qu’Il n’apportait pas le mélange du pot-pourri, qu’Il ne jouait pas comme les politiques avec la vérité. Il est donc évident que tu ne crois pas en Jésus-Christ.
Essaie, s’il te plaît, dans quelque champ que ce soit de la littérature ordinaire, de combiner et de faire équivaloir des vérités établies avec des demi-vérités ou des mensonges, et tu verras quelle sorte de résistance tu rencontres. Essaie par exemple de mettre en parallèle la lumière électrique avec la lumière d’une bougie ; ou la rotondité de la terre avec l’idée que la terre est plate ; ou bien n’importe quel évènement de l’expérience. Comme par exemple ceci : deux hommes discutent : L’un, avec une bonne vue, dit qu’il voit trois aigles au-dessous des nuages, et l’autre, affligé d’une mauvaise vue, affirme qu’il ne voit pas d’aigle du tout. Si tu es sensé, tu examineras la vue des deux hommes, après quoi tu ajouteras foi à celui qui a une meilleure vue. Mais puisque ta secte ne tient pas compte de la vérité mais ne s’occupe que de faire équivaloir une chose à une autre, tu diras à ces deux hommes : « Puisque je n’élèverai pas mes yeux vers les hauteurs pour y examiner ce qui y est, ce serait pour le mieux si tous deux vous faisiez la paix, que vous vous entendiez bien mutuellement, et que vous vous accordiez à dire que vous ne voyez tous deux qu’un seul aigle ! »
Telle est ta façon de faire, ton enseignement, ta politique. Le monde n’a pas suivi ta secte comme ses fondateurs pensaient qu’il le ferait. Jusqu’à aujourd’hui, ta communauté n’est restée qu’une petite secte insignifiante au milieu du monde Chrétien, tel un rocher dans la mer. Pourquoi ? Parce que même si les gens se préoccupent de paix, ils se préoccupent davantage de vérité.
Et la vérité sur le Dieu Unique de la Trinité est entrée dans le monde au travers de la révélation de Celui qui voit tout, par le Fils de Dieu, Jésus Christ. La Déité Trine se compose de trois hypostases qui s’accordent entre elles. Trois hypostases, une personne. Cette belle et haute Réalité ne peut jamais équivaloir paisiblement à de basses et brutales conjectures.
Puisse l’Esprit de vérité t’illuminer.
Lettre 45. (p.80).
A Stamer I., un conducteur de train qui se plaint que son travail est ennuyeux.
Tu dis que tu en as assez de ton travail. Tout autre travail te paraît meilleur que le tien. Pour l’instant, tu es triste et mal parce que tu n’es pas en mesure de trouver une meilleure carrière. J’ai longuement réfléchi avant de prendre mon stylo en main et de te répondre. En pensée, je vivais ton expérience, ta position sociale, ton travail. Je m’imaginais à ta place, dans la locomotive, dans le bruit strident. Tout noirci de fumée et en sueur, je regardais devant moi d’un œil vigilant. Derrière moi, il y avait des gens - des personnes âgées, des parents, des enfants, des aristocrates, des diplomates, des officiers, des paysans, des ouvriers, des travailleurs. Tous étaient placés là par la force des circonstances, et tous dépendaient de moi. Ils discutaient entre eux ou se parlaient en pensée. Chacun dirige ses mêmes pensées vers la destination où il s’arrêtera, et il a hâte de descendre. Mais qu’ils arrivent ou non à leur destination finale dépend de moi, et je ne dépends que de Dieu. Ils n’ont pas idée combien de choses dépendent de moi. Ils ne pensent même pas à moi, ils ne me connaissent pas. Et cela même me cause de la joie. Quand nous repartîmes après le premier arrêt, personne ne vint à moi pour me voir ni faire ma connaissance. Nul ne se demanda : « Cet homme est-il fou, ou aveugle peut-être, à moins qu’il ne soit ivrogne ? Nous nous fions à lui au point de lui remettre nos vies. Il est à cette heure l’homme le plus important dans cette cité fiévreuse dont nous serons dans quelques heures des citoyens. » Nul n’avait pareilles pensées, et cela me rendait incroyablement content. Cela me donne de la joie que tant de gens m’aient confié leurs vies sans me questionner, moi qui suis dissimulé dans cet engin, invisible, inconnu de tous. Et ne me sentant plus de joie, je me mets à glorifier Dieu.
« O Dieu grand et merveilleux ! Gloire à toi et merci de m’avoir donné une vie, une raison de vivre et un travail de cette importance ! Tu m’as donné un travail, non pas celui de Ton œuvre, ô Seigneur, puisque Toi aussi, dissimulé aux regards, contrôle une machine par l’entremise de Ton Saint Eprit. Ta machine à Toi est gigantesque. Tes passagers sont sans nombre. Tu es le conducteur du monde entier. Nombreux, si nombreux sont les passagers qui ne pensent pas à Toi, qui ne questionnent pas le Mystère de Ton Etre, mais qui avec foi empruntent ce véhicule et circulent indéfiniment. Et cela doit inexplicablement Te contenter. Tu sais où Tu donneras du repos à Tes passagers, où Tu les nourriras, et qui Tu feras descendre du train et où. En vérité, ils savent très peu de la première et de la dernière station de Ton train tout merveilleux, mais ils embarquent avec foi, et descendent avec foi – avec foi en Toi qui es caché, invisible, et inconnu à leurs yeux. Combien de fois, par milliers, je Te glorifie, Te louange, Te prie, et m’incline devant Toi, mon Créateur et Conducteur Tout Puissant qui voit tout. A Toi seul je me fie, face à tous les dangers qui guettent devant ce train. Toi seul me secourras et m’aideras à atteindre ma destination finale avec tous les passagers à bord.
Mon jeune ami, quel meilleur travail que le tien voudrais-tu avoir ? Y a-t-il un meilleur travail que le tien ? L’Apôtre Pierre était un pécheur et Paul fabriquait des tentes. Imagine comme est grand ton travail et de quelle importance il est, comparé au leur. Ensuite de quoi, glorifie la Providence de t’avoir confié ce travail.
La santé et la bénédiction de Dieu soient avec toi.
Lettre 44.
Au missionnaire Petar S. qui demande « ce qu’est le blasphème contre le Saint Esprit. »
Tu lis dans l’Evangile ces paroles du Christ : « Tout péché et tout blasphème sera pardonné, mais le blasphème contre le Saint Esprit ne sera pas pardonné aux hommes ; ni dans ce monde, ni dans le monde à venir. » Tu demandes donc : Quel est le blasphème contre le Saint Esprit ? »
C’est le blasphème contre la vérité et contre la vie qui vient du Saint Esprit. Une personne athée, dénuée de foi, qui déteste et persécute la vérité de Dieu, blasphème contre l’Esprit. Un suicidé, qui a détesté et détruit la vie en lui-même, a blasphémé contre l’Esprit. Parce que le Saint Esprit est appelé Esprit de vérité et Donateur de vie. Dans l’Evangile de Jean, il est dit par trois fois que le Seigneur Jésus Christ a invoqué le Saint Esprit – l’Esprit de vérité. ( 14 :26, 15 :26, 16 :13). Ainsi, celui qui renonce à la vérité et s’en moque renonce au Saint Esprit et s’en moque, et il renonce à Dieu, et s’en moque, Dieu qui est Esprit et Vérité. Pourquoi ce péché est-il impardonnable, demandes-tu, si tout autre péché est pardonnable ? Vois, l’amour de l’argent de Zachée lui fut pardonné, les péchés de la chair de la femme adultère lui furent pardonnés, le larron sur la croix fut pardonné de son crime, et les péchés de bien d’autres leur furent pardonnés. Alors pourquoi la renonciation de la Vérité, l’absence de foi et le blasphème contre le Saint Esprit ne seraient-ils pas pardonnés ? Parce que dans tous les autres cas, le pécheur eut honte et se repentit, mais dans ce cas-là il n’est ni honte ni repentir. Ailleurs, quand bien même un être humain avait péché, il se reliait encore à Dieu à travers la honte et le repentir. Mais ici, tous les liens avec Dieu ont été brisés, et un homme athée et dénué de foi est infiniment et complètement séparé de Dieu. Dans un cas, il y a eu faiblesse, dans cet autre cas il y a eu orgueil hautain. Dans un cas, une âme traverse la ténèbre, mais désire la lumière. Dans cet autre cas, une âme traverse la ténèbre et appelle la ténèbre lumière. Si un individu n’a nul désir du tout d’être sauvé, Dieu ne force pas un tel homme à faire son Salut pour être sauvé.
Le second blasphème contre le Saint Esprit est la haine de la vie et le suicide par quoi quelqu’un s’ôte la vie. L’Esprit Saint est appelé le donateur de vie. Lorsque quelqu’un reçoit la vie du Saint Esprit mais qu’il l’ignore et, de ce fait, n’en remercie pas Dieu, il peut être pardonné. Mais si quelqu’un reçoit la vie, la vie de l’Esprit de Vie, et, sachant d’où il a reçu cette bénédiction, ne prodigue pas de remerciement, même en ce cas il peut être pardonné. Mais si quelqu’un reçoit la vie, la vie de l’Esprit de Vie, et rejette au loin avec mépris cet Esprit, une telle personne ne sera pas pardonnée, ni dans ce monde, ni dans le monde à venir. Pour comprendre cela, nous devons premièrement comprendre ce que veut dire pardonner. Pardonner un pécheur signifie lui rendre l’entièreté de la vie. Mais si quelqu’un ne veut pas vivre, et même méprise et déteste la vie, alors Dieu n’a plus rien à lui donner. C’est pourquoi il est effacé du Livre des vivants.
Prie Dieu qu’Il te garde et qu’Il garde les tiens de ces impardonnables péchés qui sont la marque de la rébellion insensée de la créature contre le Créateur.
La miséricorde et la santé du Seigneur soient sur toi.
Lettre 43. (p.77).
Au recteur d’église, dénommé Dragic, qui se sent parfois comme transporté hors de soi.
Tu écris que tu te sens parfois comme un homme nouveau, transformé et en état de renaissance. Cela t’arrive habituellement durant la prière, dans la quiétude de la nuit. Comme si ce monde disparaissait à tes yeux ; toutes les pensées cessent, pensées sur le monde, pensées sur les gens, pensées sur les choses, pensées sur les corps ; une paix inhabituelle emplit ton âme ; tu remarques une sorte de lumière en toi, et tu ressens une joie indicible. A quoi s’ajoute un merveilleux parfum, qui ne peut être comparé à rien sur terre. Un parfum suave et vivifiant. Tu te sens alors hors de toi-même. Et quand tout cela cesse et disparaît, comme l’arc-en-ciel s’évanouit de devant tes yeux, tu te sens attristé : parce que cela n’a pas duré encore et encore, toujours plus longtemps sans cesse ni fin, durant des années et des siècles, oui, durant l’éternité entière. Et tu demandes ce que cela peut être.
Je pense, mon frère, que l’Esprit de Dieu a touché ton âme. C’est ce dont le Seigneur a parlé lorsqu’Il a dit : « Le Royaume de Dieu est en vous. » Parce que quand l’Esprit de Dieu règne dans nos âmes, alors tout ce qui est de nous s’arrête en nous, et tout ce qui est de Dieu vient à l’être. Aussi longtemps que nos pensées sensuelles, que nos désirs terrestres et que notre orgueil règneront en nous, aussi longtemps le Royaume de Dieu ne sera pas en nous. Mais nous serons au royaume des ténèbres, de la peur, de la tristesse et de l’ignorance. Mais aussitôt que l’Esprit de Dieu entre en nous et y règne, alors, toute chose est différente, chaque chose devient son contraire. Je te conseille de t’humilier en te prosternant jusqu’à terre devant la magnificence du Dieu Très Haut, qui t’a montré ce Mystère de par Sa grande pitié. Mais ne va pas raconter cela à beaucoup, ni à ceux qui ne sont pas consacrés – et surtout ne parle pas du reste que je ne mentionne pas ici, en sorte de ne pas exposer au ridicule ce qui est le plus sacré ; – lis à ce propos ( Matt. 7 :6), en sorte aussi que ton cœur ne s’élève pas sur les cimes de l’orgueil dont l’on tombe dans l’abysse de l’Hadès. Ecoute et vois comment l’Apôtre nous met en garde : « Celui qui pense être debout, laisse-le jusqu’à ce qu’il tombe ! »
Ton cas ne correspond en rien à quelque chose qui n’ait déjà été entendu, à rien qui soit inconnu de l’Eglise. Beaucoup de ceux qui furent vertueux et agréables à Dieu ont senti ce suave Mystère, et ils en ont relaté quelque chose à des âmes de Chrétiens emplis de foi. Ils ont parlé non pour se vanter, mais pour partager leur joie et susciter en leurs amis une foi plus forte, leur donner à attendre les promesses du Sauveur, en sorte aussi qu’ils en viennent à une plus joyeuse glorification du Seigneur.
Une nuit d’hiver, je dormais dans la maison d’un fidèle. Lorsque les enfants furent couchés, il me raconta ce qu’il appelait « le plus grand secret de sa vie ». Il me dit : « J’ai cherché, des années durant, à voir
Un miracle de Dieu. Cela ne me fut pas donné. Un matin, à l’aube, je me levai et commençai de prier Dieu ; Soudain, une lumière apparut en moi, et j’éprouvai une immense paix en même temps que je sentis un parfum suave – tout comme cela t’est arrivé. « Depuis lors », poursuivit-il, « je cessai de chercher un miracle de Dieu, parce que j’avais vu le plus grand miracle qui ait jamais été entendu ou attendu par un fidèle. »
Cela ne nous est-il pas une confirmation de ce que l’Apôtre a dit : « Ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas entré au cœur de l’homme ; ce que Dieu a préparé pour ceux qui L’aiment. »
Paix et santé de Dieu sur toi.
Lettre 38. (p.69).
A deux amis qui débattent pour savoir si l’on devrait donner la Communion à ceux qui sont malades.
L’un de vous dit que non. L’on ne devrait pas, selon lui, donner la Communion à un malade, parce qu’il est une croyance selon laquelle le malade risque de mourir s’il a reçu la Communion. L’autre dit que l’on devrait la lui donner, parce que c’est un péché grave qu’un homme quitte cette vie sans la Communion.
Je suis du côté du second. Tel est le commandement de l’Eglise. Bien des ascètes du désert, qui vivaient loin des églises et des prêtres avaient peur de mourir sans la Communion. Et ils priaient Dieu avec ferveur qu’Il leur envoie un prêtre avec la Communion juste avant que leur mort ne survienne. La Providence aimante de Dieu agréait ces prières émanées d’êtres qui avaient su plaire au Seigneur, et Il leur envoyait l’un de ses « serviteurs de l’autel », pour leur donner la Sainte Communion.
Ayant reçu la Communion, ils irradiaient de joie et quittaient ce monde contents et paisibles. Il y eut des cas où un malade avait demandé la Communion, mais mourait avant que le prêtre ne puisse la lui apporter. Cependant alors, il ressuscitait, recevait la Communion, et mourait une seconde fois. Un tel cas apparut récemment dans la ville de Kraljevo. Ces cas montrent clairement ce qu’est la volonté de Dieu.
Il est fou de penser qu’un malade doive mourir après qu’il ait reçu la Communion. Beaucoup d’exemples vivants montrent qu’il en est autrement. J’ai personnellement été témoin de cas où l’on a donné la Communion à des fidèles gravement malades, dont l’on pensait qu’ils allaient mourir d’un moment à l’autre. Or, aujourd’hui même, ils sont vivants. Si les malades mouraient de la Communion, alors il serait logique de croire aussi que ceux qui sont en bonne santé risquent de mourir de la Communion. Mais c’est là une croyance insensée autant qu’un blasphème. S’il arrive qu’un malade meure après avoir reçu la Communion, cela veut dire qu’il meurt de sa maladie, non de la Communion. Telle était sa destinée, selon la volonté de Dieu ; Mais il meurt avec une âme purifiée et pardonnée, en paix avec Dieu et avec les hommes.
Un homme raisonnable pense à la mort tant qu’il est encore en bonne santé ; combien plus pensera-t-il à la mort lorsqu’il sera malade ! Au royaume de la mort, rien n’est plus certain que la mort. A l’homme riche et en bonne santé qui faisait des plans pour s’enrichir plus encore jusque dans un lointain avenir, Dieu dit : « Fou que tu es,, cette nuit même, je vais te redemander ton âme, et tout ce que tu as accumulé, à qui cela ira-t-il ? »
Lorsqu’un homme malade meurt, celui qui l’a empêché de communier se repent amèrement. Dans une certaine ville, un homme tomba malade. Le prêtre l’entendit dire, et vint offrir la Confession et la Communion. Sa femme refusa, disant : « Il n’est pas à l’article de la mort, père, non pas encore. » Le prêtre repartit donc. Cette nuit-là, l’homme mourut. Alors sa femme se mit à se lamenter, disant : « Malheur à moi qui ne l’ai pas laissé recevoir la Communion ! »
Savez-vous, frères, que la Communion est de plus d’importance pour l’homme qui meurt que tous les requiems du monde ?
La paix de Dieu soit avec vous.
Lettre 34. (p.62).
Au capitaine Pierre qui demande « ce que les Serbes doivent au Christ. »
Ta question est une bonne question. Les Anglais se posent souvent la question : « Qu’est-ce que les Anglais doivent au Christ ? » Et ils y répondent par une longue liste de bonnes choses reçues du Christ. A présent, tu demandes à propos de ton peuple : « Qu’est-ce que les Serbes doivent au Christ ? » En vérité, je te répondrai que les Serbes doivent beaucoup plus au Christ que les Anglais. Les Anglais doivent quelque peu à Rome aussi, mais les Serbes ont des dettes envers le Christ en absolument toute chose.
Tout d’abord, les Serbes ont une dette envers le Christ pour Ses fidèles éminents. Seuls les Saints, hommes et femmes, d’entre les Serbes ont atteint à une grandeur et à une visibilité qui peut se percevoir à des siècles et à des générations de distance. Et la Sainteté provient du Christ Seigneur et de Sa Sainte Foi. Si nous disions que les Serbes n’ont pour seule dette envers le Christ que Saint Sava, le roi spirituel et le guide des âmes durant toute la vie des fidèles du peuple Serbe jusqu’à aujourd’hui, la dette serait déjà incommensurable. Et Saint Sava n’est pas la seule étoile illuminée par le Soleil du Christ ; autour de Saint Sava se tiennent aussi les lumineuses étoiles que sont les brillants Saints Serbes.
Les Serbes ont aussi des dettes envers le Christ pour ce qui est des principes fondamentaux de leur vie et de leur conduite. Ils ont des dettes envers Lui pour ce qui est de leur Foi en le Dieu vivant, en le jugement de Dieu, en la Providence, en le Divine Justice et en la compassion du Christ, enfin en l’immortalité dans les Cieux. Ils ont aussi des dettes envers le Christ pour ce qui est de comprendre la nature non à travers la nature elle-même, mais à travers Dieu ; et pour ce qui est de comprendre les destins des peuples et de la nation non en fonction des causes matérielles, mais en fonction des causes morales et spirituelles. En d’autres termes, pour ce qui est de l’entière vérité sur tout cela et sur le monde, les Serbes ont des dettes envers le Christ. Et partout où leur conduite est concernée, ils ont en toute chose des dettes envers l’enseignement du Christ. L’honnêteté, la modération, la tempérance, la pureté, l’amour des frères, la modestie, la compassion, le pacifisme, l’amour du travail, l’esprit brillant, le courage dans la défense de la justice, le sacrifice de soi, et toutes les autres vertus – tout cela est venu aux Serbes grâce à leur Foi en Christ.
Les Serbes ont aussi des dettes envers le Christ pour leurs bonnes et belles coutumes. Toutes ces coutumes sont essentiellement et symboliquement évangéliques. Ces coutumes ne sont pas seulement les ornements de la vie, mais l’ordre premier et souverain qui sert de garde-fou à la vie du peuple Serbe, l’empêchant de courir à sa ruine, et de tomber dans la confusion et la décadence.
Les Serbes ont aussi des dettes envers le Christ pour ce qui est de l’inspiration des expressions artistiques de leurs âmes et de leurs idéaux, à travers les chants, les proverbes, les contes et les créations de leur esprit et de leurs mains.
Les Serbes ont aussi des dettes envers le Christ pour ce qui est de l’époque de leur premier royaume, puis pour l’époque de l’esclavage, comme aussi pour l’époque de la libération. C’est-à-dire qu’ils ont des dettes envers le Christ pour leurs régimes anciens et récents, pour ce qui est de la sagesse dans la création des Etats, pour leur héroïque résistance et leur espérance visionnaire au temps de l’esclavage, aussi bien que pour leur héroïque endurance et pour le sacrifice d’eux-mêmes aux temps de libération.
Ai-je fait le tour de tout ? Non, loin de là. J’ai seulement commencé la liste des dettes des Serbes envers le Christ. Mais je pense que je t’ai donné une ligne directrice d’après laquelle tu seras en mesure de calculer d’autres dettes de ton peuple envers le Christ Sauveur. Et une fois que tu auras comptabilisé toutes les dettes des Serbes envers le Christ, tourne la page et compte toutes les attentes du Christ dont Il espère que les Serbes L’honoreront. Réfléchis et demande-toi : « Qu’est-ce que le Christ attend des Serbes ? »
La paix et la joie de Dieu soient avec toi.
Lettre 33. (p.60).
Au professeur M.M. qui ne veut pas commémorer son Saint patron à cause de sa douleur.
J’ai reçu ta lettre. Tu y confirmes ce que j’ai déjà lu dans le journal, à savoir que tu ne célèbreras pas le jour de fête de ton Saint patron. Je partage de tout cœur avec toi ta peine. Mais je dis aussi ceci : « Puisses-tu avoir pitié, ô Dieu, de ton honorable fils. » Tu demeures avec cette peine seule et unique, tandis que tu me charges de deux autres encore : premièrement, tu ne célèbres pas ton Saint, et deuxièmement tu l’annonces dans le journal. Cinquante mille personnes vont lire que tel Serbe ne célèbrera pas son Saint pour sa fête. Est-ce que cela ne scandalisera pas un grand nombre d’entre eux ? Si tu avais seulement pu garder le silence ! Ou si seulement tu t’étais contenté d’informer tes amis qui devaient venir à ta fête. Pourquoi le monde Orthodoxe tout entier aurait-il à trébucher comme devant un obstacle du fait que tu ne remplis pas une obligation morale et religieuse ? Ne vois-tu pas que ton Saint, Georges, t’a déjà puni en t’incitant à publier ton péché envers lui à la face du monde entier. Car tout péché se fait connaître.
Mais tout d’abord, pourquoi ne célèbres-tu pas ton Saint ? A cause de ta peine ? Ne devrions-nous donc glorifier nos Saints que lorsque nous sommes heureux et prospères ? Nos ancêtres nous donnent un exemple différent de celui-ci. Le Tsar Lazare célébra son Saint juste avant sa défaite au Kosovo. Le général Todor célébra son Saint en captivité, parmi les prisonniers. Sa femme était en proie à une profonde souffrance, mais elle commémora cependant le Saints et reçut des hôtes chez elle. Notre peuple donne un semblable exemple de cela, même jusqu’à aujourd’hui. Durant la guerre mondiale, les soldats Serbes célébraient la fête de leur Saint dans les tranchées remplies d’eau et de cadavres. Ce que je suis en train de te dire peut te paraître un conte, mais c’est absolument vrai.
Le jour de sa fête, un soldat dans une tranchée allumait un cierge et le plaçait sur le front de son camarade tué à ses côtés. Sur la poitrine de son ami défunt, il plaçait du pain et du vin. Et lui-même, bien qu’il fût tête-nue, continuait de faire feu comme il lui était ordonné. « Que signifie tout cela », lui demanda son supérieur. « C’est le jour de la fête de mon Saint, chef ! …J’ai donc pensé que cela pourrait aussi être le requiem de mon ami, et qu’il pouvait servir de table d’oblation dans cette mare croupissante. »
Un cierge, du pain, du vin, et l’absence de couvre-chef ! Comprends-tu cela ? Il y a ici présence de quatre symboles : la lumière de la foi, la dépendance envers Dieu, l’amour de Dieu, et la prière à Dieu. C’est ce qui est d’importance lorsque l’on célèbre les fêtes des Saints Serbes, lorsque l’on commémore les Saints de Dieu les fils de Dieu. Es-tu dans l’incapacité de montrer ces quatre éléments de célébration lors de la fête de ton Saint ? Ou penses-tu que ta maison, dont l’on a sorti un mort il y a quelques semaines, est le lieu d’une plus grande souffrance qu’une tranchée remplie de cadavres et de sang encore frais ?
Il est complètement illogique de ne pas célébrer ton Saint, en prenant ta douleur pour excuse. C’est précisément dans les temps de souffrance et d’épreuves que nous devrions commémorer nos Saints et tomber à genoux en prière devant eux, avec une ferveur encore accrue. C’est le moment où les Saints, ou plutôt Dieu à travers les Saints, aide davantage et plus promptement. Mais lorsque tout se passe pour le mieux et conformément à notre vouloir, alors nous ne remarquons pas l’aide que nous apporte la célébration de notre Saint, puisque nous avons déjà tout ce qu’il nous faut.
Je suis pleinement convaincu que Saint Georges apparut au Général Todor dans sa prison, et que c’est lui qui l’en a fait sortir. Nombreux, si nombreux sont les exemples qui montrent que ceux qui célébrèrent Dieu et leur Saint en des temps de troubles furent promptement délivrés de ces derniers. La Sainte Ecriture le confirme aussi. Lis la façon dont les Apôtres Paul et Silas glorifièrent Dieu tandis qu’ils étaient enchaînés dans leur cachot, et comment la terre trembla à ce moment-là, en sorte que les chaînes tombèrent des pieds des prisonniers. ( Actes 16 :25).
Je maintiens mon point de vue selon lequel le fait de ne pas célébrer la fête de son Saint provient de la confusion des perceptions. Seuls ceux qui considèrent la fête des Saints comme un évènement aussi joyeux qu’un mariage pourraient ne pas la célébrer. Mais toi, en tant qu’homme éduqué, tu devrais savoir et enseigner aux autres que si un mariage n’est pas célébré durant un deuil, la fête d’un Saint, elle, l’est. Et d’autant plus qu’il y a deuil.
La paix et le réconfort de Dieu soient avec toi.
Lettre 32. (p.58).
Sur l’office pascal à Jérusalem.
Ce qu’on attendait est arrivé ! Lorsque le vieux patriarche chanta « Christ est Ressuscité ! », la lourde pierre du tombeau fut retirée de dessus nos âmes. Nous nous sentîmes comme des esprits sans corps. Comme si nous étions ressuscités ! Soudain, les voix de tonnerre des nations et des tribus rugirent, comme si s’étaient fait entendre de grandes eaux, en bas près du Sépulcre, en haut près du Golgotha, dans les galeries de côté, contre les piliers, sur les bords de l’iconostase, sous les fenêtres. Partout où il y avait de l’espace pour une tête humaine, un être entier s’était faufilé dans la place. Par ces exclamations, nos frères d’Asie et d’Afrique exprimaient leur joie. C’était un spectacle étrange pour les Européens, mais tels sont les gens d’Orient. Leur douleur touche à l’extase, tout comme leur joie. Durant la Semaine Sainte, ils sanglotaient tout fort autour du Sépulcre du Seigneur, embrassant la tombe, y apposant leur visage et leurs mains, se battant la poitrine, poussant des cris de deuil, et voici que ce matin ils rugissaient et criaient de joie. Comme des enfants – sincères et sans réserve. Est-ce que le Seigneur n’avait pas promis le Royaume des Cieux aux enfants ? J’ai entendu un Copte dire des Européens : « Ils savent comment rire, mais ils ne savent pas comment se réjouir ». La joie des Orientaux se manifeste sans rire, surtout la joie plus haute, la joie spirituelle. »
« Que Dieu se lève et que Ses ennemis se dissipent », dit le Patriarche. Christ est Ressuscité. Et les Grecs le chantaient en grec : » Christos Anesti ». Le Tombeau est transformé en Paradis, une salle de torture devient un palais de joie. Nous tenons des cierges à la main, mais nos âmes sont plus brillantes que des cierges.
Les Russes chantent en russe le « Christ est Ressuscité ! » : « Christos Vaskrisi. » Ils chantent magnifiquement et avec une grande contrition, d’une voix douce comme la soie, comme seuls les Russes savent le faire. Mais à cette heure, en ce lieu, même les chants les plus vilains sembleraient beaux. Et le visage le plus laid, lui aussi, semblerait beau. La lumière et la joie de la Résurrection changent tout, transforment tout – les voix, les visages, les choses. Tout autour de nous est beau, pur, saint, céleste.
Christ est Ressuscité ! chantent les Arabes, battant des mains et dansant sur leurs pieds. Des larmes mouillent leurs visages. Les milliers de cierges brillent, surgis de tous côtés. L’expression de la tristesse est mise au service de la joie. Comme est grande l’âme humaine dans sa sincérité ! Il n’y a rien d’autre de plus grand que Dieu et que Ses anges.
Christ est Ressuscité, chantent les Serbes, les Coptes, les Arméniens, les Bulgares, les Abyssiniens, les Noirs, les uns après les autres, chacun dans sa langue et dans ses tons. Tous chantaient magnifiquement. Je te le redis, tous les gens autour de nous semblaient beaux et bons. Les fils et les filles d’Afrique Noire, tous étaient beaux et bons comme des Anges. C’est un miracle que seul le Seigneur Ressuscité peut accomplir. Tel est l’unique vrai fondement de la fraternité parmi le peuple des fidèles joint en communauté – voir que tous les fidèles sont aussi bons et beaux à voir.
Après que toutes les langues eurent à leur tour résonné, chantant le tropaire de la résurrection, la procession autour du Saint Sépulcre s’ébranla. Les Asiatiques et les Africains avec leurs coiffes respectives entonnaient un chant bien à eux, rythmé de leurs battements de mains :
« Une seule Foi est la véridique,
La Foi Orthodoxe ».
Suivaient le canon et la liturgie. Mais toutes les lectures et tous les chants étaient couverts par un seul chant, le même, victorieux, et ce chant de victoire résonnait toujours : « Christ est Ressuscité des morts ! »
A l’aurore, le service pascal s’achève dans l’église, mais se poursuit dans nos âmes. Nous avions commencé à voir toute chose dans la lumière de la gloire pascale du Christ, et toute chose semblait différente en ce jour de ce qu’elle était la veille. Toute chose, en la Résurrection, est plus belle, plus perceptible, plus glorieuse. Ce n’est qu’en cette lumière de la Résurrection que la vie revêt tout son sens.
A midi, la glorieuse procession de l’Antipâque se déroule à travers l’entière Cité Sainte, et la lecture de l’Evangile se fait en maintes langues. Après quoi, nous regardâmes comment les Arabes exécutaient des jeux d’épée et portaient le patriarche sur leurs mains.
Nous ressentîmes le désir d’aller à l’église russe de Sainte Marie Madeleine à Gethsémani; et nous fûmes invités par les gentilles moniales Russes. Nous descendîmes donc à nouveau la Via Dolorosa. Mais voici que tout était à présent différent, beau, radieux. L’âme s’éprouvait tellement à l’aise ! La victoire avait englouti la mort, et avec elle les tourments et les souffrances. Rien d’autre ne peut se voir dans la glorieuse lumière de la Résurrection que la Résurrection elle-même.
En vérité, oui, en vérité, le Christ est Ressuscité !
Lettre 31. (p.56).
Lettre écrite de Jérusalem à propos du grand et saint Samedi.
Voici que nous sommes ici, à Jérusalem, le plus grand champ de bataille dans l’histoire de la race humaine. C’est le Kosovo de l’humanité. Bien des batailles ont été livrées ici entre les armées du Royaume des Cieux et le royaume de ce monde. Les armées du Royaume des Cieux ont toujours semblé plus faibles, et, dans la souffrance, essuyaient toujours une défaite avant la victoire. Le commandant des armées du Royaume des Cieux, notre Sauveur Jésus Christ, a combattu dans la plus grande bataille qui se soit déroulée en ce lieu, et Il y a gagné la plus grande victoire. Toutes les batailles qui ont eu lieu après la sienne, menées par Ses armées lumineuses, ressemblent à Sa bataille tant pour ce qui est des souffrances que pour ce qui est des victoires.
Depuis six jours déjà, nous avons vécu à travers les souffrances de notre Seigneur. Nous avons fait le tour de tous les lieux de Son supplice, et nous les avons inondés de nos larmes. Nos âmes se sont senties torturées. Mais, physiquement, et contrairement à toute attente, nous nous sentons tous très bien. Nous dormons peu, jeûnons beaucoup, nous restons des heures debout aux offices, et nous marchons tout le jour, montant et descendant les escarpements à travers la Cité Sainte. Et nul n’est fatigué, nul n’est malade, nul ne se plaint. Mais l’âme est comme oppresse par la pierre du tombeau. Rien en ce monde, rien autre que la Résurrection de notre Seigneur supplicié, ne peut enlever la pierre du tombeau pour ressusciter nos âmes. Nous avons peine à attendre le temps qui nous sépare du grand Samedi, afin d’entrer dans le tout glorieux Dimanche.
Où sont ces Adventistes de Backa, qui viennent à Jérusalem et vivent les souffrances spirituelles que nous avons expérimentées ? Il ne leur viendrait pas à l’esprit de célébrer le Samedi à la place du Dimanche. Voyez, ce Samedi ne nous a pas apporté la délivrance. Ce jour du Samedi, nous résumons toutes les souffrances du Seigneur, nous faisons la somme de tous Ses tourments. Et nous attendons Dimanche pour atteindre au soulagement, au repos, à la délivrance.
« Qu’est-il arrivé au Seigneur aujourd’hui ? » demande Ilija, le chef de cérémonie. « Il est descendu dans l’Hadès pour se proclamer Lui-même et proclamer Son Evangile à ceux qui ont trépassé avant Sa venue. De cette façon, Il peut prendre sous Sa domination toutes les générations de l’humanité, passées, présentes et futures. Il peut expliquer à tous la Vérité et offrir à tous le Salut. »
Est-ce que les Adventistes célèbrent la descente dans l’Hadès et non la Résurrection ?
Plusieurs fois aujourd’hui, nous sommes allés à l’église du Saint Sépulcre. Nous souhaiterions rester toujours en ce lieu. C’est comme si notre Hôte invisible nous appelait à Lui sur le Golgotha, en sorte qu’Il puisse guérir nos blessures spirituelles avec Ses blessures corporelles. Cette église est appelée l’Eglise de la Résurrection. Elle-même est ressuscitée plusieurs fois. L’empereur païen Hadrien l’a détruite jusqu’à ses fondements et a dressé sur son emplacement un temple aux idoles païennes Jupiter et Vénus, abominations de Rome. Julien l’Apostat, l’Arabe Omar, et le Perse Hozroe la pillèrent et la ruinèrent à leur tour. Mais cette église continua de ressusciter après la mort de ces destructeurs, avec plus de gloire et de beauté chaque fois. N’est-ce pas là une résurrection? Et est-ce que la Croix du Christ n’y fut pas aussi enterrée et ressuscitée?
O grand Seigneur Christ, le seul irrésistible, Toi, le Tout Puissant !
Ce qui, même parmi les choses, est relié à Ton nom, ressuscite. Comment n’en serait-il pas de même pour le peuple et les nations ? Et comment n’en feras-tu pas de même, O Vérité éternelle et Vie éternelle !
Lettre 30. (p.54).
Lettre écrite de Jérusalem sur le Vendredi Saint.
Le jour s’est levé de la commémoration du plus grand crime qui se soit perpétré sous le soleil. Ce jour, qui est sujet de crainte et de honte pour la conscience humaine jusqu’à la fin des temps. C’est une coutume pour les pèlerins, ce jour, de marcher sur la Via Dolorosa – sur la Voie de Douleur- tant en esprit qu’en la parcourant à pied. Il s’agit du chemin de Croix – du chemin qu’a parcouru le Christ en portant Sa Croix jusqu’au Golgotha. Nous partîmes de Gethsémani et nous avançâmes sur le chemin qui montait. Nous nous arrêtâmes dans la maison de Joachim et d’Anne, les parents de la Mère de Dieu. Nous pensions à celle-ci, la Mère aux grandes douleurs. Etait-elle dans cette terrible procession ? Non. Nous verrons par la suite ce qu’il en fut.
Nous passâmes par le palais de Pilate. Ce fut comme si nous passions sur les cendres d’un volcan éteint. Mais le feu de la passion et la puanteur de l’injustice notoire se ressentaient encore. Là fut jugé et condamné le Maître de Justice. Là fut frappé par les Sans-loi l’Etre et l’Incarnation de l’Innocence. Il ne lui resta pas un lambeau de peau qui n’ait été entamé. Les Juifs s’étaient assuré la nuit précédente qu’il ne lui resterait plus de peau sur les os. Et les soldats Romains se contentèrent, avec leurs fouets, d’entailler plus profond les mêmes blessures. Ceux qui étudient les lois romaines et le système juridico-légal de Rome devraient venir en ce lieu pour y être à jamais dégoûtés d’un tel summum inhumain d’abjection immonde.
Nous vîmes le lieu où le Seigneur tomba sous la Croix. Comment ne serait-Il pas tombé ? Il avait été suffisamment dur de supporter en silence, toute la nuit durant, les fausses accusations, les malédictions et les faux témoins, et plus dur encore de supporter la puanteur des crachats sur la face, et les blessures qui étaient non moins nombreuses que les bonnes actions qu’Il avait faites pour le peuple. Ô Seigneur, si seulement nous avions pu être là, pour recevoir Ta Croix et la porter, et pour T’élever sur nos mains et Te porter ! C’était ce que nous pensions, versant des larmes sur la terre du chemin de Douleur, qui deviendrait la Rivière de Douleur si toutes les larmes versées par les Chrétiens y coulaient ensemble. Béni soit Simon de Cyrène qui fut amené par sa destinée à se trouver là présent ce jour, en sorte de prendre sur lui la Croix du Seigneur et d’alléger les souffrances de Celui qui souffrait pour toute l’humanité.
Nous passâmes ensuite devant la maison de Sainte Véronique. De la fenêtre de sa maison, Véronique avait aperçu l’horrible procession. La Face défigurée du Seigneur avait ému de compassion son cœur de jeune fille. Ce visage n’avait plus forme humaine, mais semblait une pièce de tissu tachée de sang, de crachats, de sueur et de poussière. La jeune fille voulut témoigner de la compassion au Seigneur – elle courut au-devant du Condamné et essuya Sa Face d’un linge propre ; Celui qui souffrait en silence ne pouvait pas la remercier, mais Il récompensa d’autre sorte cette faveur qu’elle lui faisait : l’Image de la Face du Christ demeura imprimée sur le voile de Véronique.
Nous parvînmes au lieu où la Mère de Dieu rencontra son Fils. Le cherchant ici et là, elle arriva par une allée de côté et tout soudain Le rencontra face à Face. C’était à peine si elle pouvait le reconnaître. Supporta-t-elle cette vue ? Ce qu’elle Voyait n’était plus qu’une immense blessure en forme d’Homme. Mais, par cette blessure, l’entièreté de l’humanité empoisonnée était guérie. Il ne lui dit rien. Elle ne lui dit rien. Mais leurs âmes se comprirent l’une l’autre et entrèrent en communication profonde l’une avec l’autre. « Mon enfant, mon beau printemps, comment Ta Beauté s’est-elle flétrie ? » sanglotait l’âme de Sa Mère.
Enfin, nous sommes là. Devant le rocher sanglant. Devant le Golgotha. Il est minuit. L’heure exacte où le Christ fut monté sur la Croix. Les coups de marteau résonnent dans nos âmes.
Nous restâmes là jusqu’à trois heures de l’après-midi, nos âmes clouées au pied de la Croix. Oh, puisse ce sang Sien s’éverser sur nos âmes ! A trois heures, Christ rendit l’Esprit. A ce moment précis, la nature s’insurgea contre le crime humain : la terre trembla, les rochers se fendirent, le soleil se couvrit d’un voile noir.
Seule la Résurrection pouvait remédier à de telles souffrances. Seule la Résurrection du Christ pouvait rendre la paix à la nature ainsi qu’à nos consciences.
Lettre 29. (p.51).
A une jeune fille cultivée, sur les cinq plaies du Christ.
Tu m’écris que tu as entendu de vieilles femmes colporter un conte relevant de la fiction, à propos des cinq blessures du Christ, et tu demandes comment ce conte a pu voir le jour.
Hélas, jeune fille, lis le Nouveau Testament ! Malheur à vous , Serbes, si vous ne vous humiliez pas vous-même devant le Ciel et la terre, pour semblable ignorance de votre Foi ! Laissez de côté tous les autres enseignements et toutes les autres lectures, jusqu’à ce que vous appreniez ce qui est le plus fondamental et le plus salutaire. Les enseignements de la Foi viennent en premier ; tous les autres enseignements sont secondaires. En Angleterre, tout le monde lit la Sainte Ecriture : Les hommes d’Etat, les politiques, les écrivains, les travailleurs ordinaires, tous s’efforcent de parsemer leurs discours, leurs articles, leurs livres, de paroles empruntées à la Sainte Ecriture. Ils s’efforcent d’orner et d’appuyer leurs paroles, qui ne sont qu’humaines, par des paroles divines, tout comme si l’on voulait ajouter des diamants pour ornementer magnifiquement un travail d’art fait à partir de simple verrerie.
Les cinq plaies du Christ ne sont pas seulement des mots : elles sont une terrifique réalité. Il est nécessaire de ne pas les ignorer, et de les connaître mieux que des paroles ordinaires. Le Christ reçoit deux plaies aux mains, deux plaies aux pieds, et l’une au côté. Toutes cinq furent faites au fer noir. A cause du péché de l’homme qui est plus noir encore. Les mains qui bénirent furent percées. Les pieds qui marchèrent sur le seul sentier de Vérité, y conduisant les autres, furent percés aussi. Et sa poitrine qui éversa le feu de l’amour céleste sur les poitrines froides des hommes, fut également percée.
Le Fils de Dieu permit que Ses mains fussent percées par le fer pour les péchés de maintes mains – une forêt, une myriade de mains- qui avaient tué, volé, brulé, pillé, disposé des pièges, commis de la violence. Il permit que Ses pieds fussent percés pour les péchés de pieds sans nombre – une myriade de pieds – qui avaient marché sur la voie diabolique, séduit l’innocence, supprimé la justice, profané les saints temples, piétiné la bonté. Et Il permit que Sa poitrine soit percée pour l’amour de myriades de cœurs durs comme la pierre, dans lesquels se trouvaient toute méchanceté et toute vilité, toute pensée de blasphème, tout désir animal ; et en lesquels étaient imaginés à travers les siècles des desseins diaboliques – dessein de dresser un frère contre un frère, un voisin contre un voisin, et les peuples contre Dieu.
Les mains du Christ furent percées – en sorte que les mains de chacun pussent être guéries d’actions pécheresses. Les pieds du Christ furent percés – en sorte que les pieds de chacun se détournassent des chemins du péché. La poitrine du Christ fut percée – en sorte que le cœur de chacun soit lavé des désirs et des pensées pécheresses.
Lorsque le terrible Cromwell, le dictateur d’Angleterre, se mit à piller les biens et les propriétés des monastères, à les fermer, et à en interdire l’accès, une procession bruyante et tapageuse de quelques centaines de pieuses gens déferla sur les routes à travers la terre d’Angleterre, en signe de protestation. En tête de la procession, le peuple brandissait des bannières sur lesquelles figurait l’inscription : « Les cinq blessures du Christ ». Les gens chantaient des chants spirituels, et l’on célébrait des offices en plein champs. Le terrible dictateur entra dans une grande frayeur ; et ce qui l’effraya plus que tout le reste fut ces bannières, en sorte qu’il cessa son oppression contre les églises et les monastères..
Que les cinq plaies de Jésus t’enseignent, jeune fille, à clouer tes cinq sens au Dieu vivant.
Cinq blessures de Jésus – cinq sources du plus pur sang, dans lesquelles l’humanité a été lavée et par lesquelles la terre a été sanctifiée. Par ces cinq sources, tout le sang du Dieu de vertu a été répandu, jusqu’à la dernière goutte. Le merveilleux Seigneur, qui avait pu multiplier le pain et nourrir cinq mille personnes affamées avec cinq miches de pain, continue de multiplier Son très pur sang, dont Il nourrit des millions de fidèles devant des milliers d’autels. Voici ce qu’est la Sainte Communion, ô fille de Jésus. Au jour du Vendredi Saint, penche-toi de toute ton âme sur la Sainte Mère de Dieu aux pieds de la Croix, en sorte que toi aussi sois baignée de ce sang vivifiant qui s’écoule des cinq plaies de Jésus. De telle façon qu’avec une âme purifiée et revivifiée, tu puisses, au jour du Dimanche de Pâque, t’exclamer joyeusement avec les femmes Myrrhophores : « Christ est Ressuscité ! »
Lettre 28. (p.49).
A une communauté de moniales Orthodoxes sur les sept paroles prononcées par le Christ en Croix.
Vous vouliez connaître la signification de ces sept paroles que le Christ a prononcées en Croix. Ne sont-elles pas claires ?
La première parole est la suivante : « Pardonne-leur, Père, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » Par ces paroles, le Seigneur a manifesté, en premier lieu, Sa compassion envers ceux qui Le tuaient, eux dont la malignité ne le laissa pas en paix, fût-ce durant l’agonie sur la Croix. En second lieu, Il proclama du haut du rocher du Golgotha cette vérité qui n’avait jamais été établie, à savoir que ceux qui font le mal ne savent jamais ce qu’ils font. En tuant un homme vertueux, ils ne font en fait que se tuer eux-mêmes, tout en glorifiant l’être vertueux. Piétinant la loi de Dieu, ils ne voient pas la meule du moulin qui descend invisiblement vers eux pour les broyer. En se moquant de Dieu, ils ne voient pas comment leurs visages sont transformés en gueules animales. Rendus hagards par le mal, ils ne savent jamais ce qu’ils font.
La seconde parole est celle-ci : « En vérité, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le Paradis. » Cette parole s’adressait au larron repentant sur la croix. C’est là une parole très réconfortante pour les pécheurs qui se repentent fût-ce même à la dernière minute. La compassion de Dieu est sans bornes, ineffablement. Sur la Croix même, le Seigneur poursuit encore Sa mission. Jusqu’au dernier souffle, Il sauve ceux qui manifestent la moindre volonté d’être sauvés, si minime soit-elle.
La troisième parole s’adresse à la Mère de Dieu : « Femme, voici ton Fils. » Ainsi parla le Seigneur à Sa Sainte Mère qui se tenait au pied de la Croix, l’âme crucifiée. Et à Jean l’Apôtre, Il dit : Voici ta Mère ». Ces paroles montrent quel soin un fils se doit, comme tout un chacun, d’avoir de ses parents. Vous voyez aussi que Celui qui a donné aux hommes ce commandement : « Honore ton père et ta mère », s’acquitte lui-même, au moment ultime, de ce précepte.
La quatrième parole est celle-ci : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Ces mots montrent la faiblesse de la nature humaine, mais aussi sa clairvoyance. L’homme souffre…Mais il existe un mystère sous la douleur humaine. Vois, ces seuls mots furent à même de détruire l’hérésie, secouèrent l’Eglise par la suite, qui proclamèrent que c’était la Divinité en tant qu’Homme qui souffrait sur la Croix. Car le Fils éternel de Dieu fut incarné en tant qu’homme, pour cette raison même – afin qu’Il puisse souffrir et mourir pour l’humanité en tant qu’il était un être de cette humanité. Si la Divinité en Christ avait souffert, cela aurait voulu dire que la Divinité serait également morte. Et cela est inconcevable. Immergez-vous autant que vous le pouvez dans ces grandes paroles, qui sont terribles : « Mon Dieu, mon Dieu, pour quoi m’as-tu abandonné ? »
La cinquième parole fut : « J’ai soif ». Son sang s’était répandu. De là venait cette soif. Le soleil, qui se couchait à l’ouest, était sur son visage déjà, et, s’ajoutant à tous ses autres tourments, le desséchait grandement. Il est naturel que Christ ait eu soif. Mais, Seigneur, étais-tu réellement assoiffé d’eau ou d’amour ? Es-tu assoiffé en tant qu’homme ou en tant que Dieu ? Ou les deux ? Ici, l’officier romain te donna à boire une éponge trempée dans du vinaigre. Ce fut là la seule goutte de compassion que Tu reçus du peuple durant ces trois heures où Tu étais sur la Croix ! Le soldat Romain allège le péché de Pilate – le péché de l’Empire Romain envers toi, même s’il ne le fait qu’avec du vinaigre. A cause de quoi tu allais détruire l’Empire Romain et en installer un autre à la place.
La sixième parole murmure : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit. » Le Fils remet Son esprit dans les mains du Père, en sorte que l’on puisse savoir qu’Il était venu du Père et non de Sa propre volonté, comme les Juifs l’en accusaient. Mais ces paroles furent aussi dites comme un témoignage rendu à l’adresse de tous ces Bouddhistes, Pythagoriciens, Occultistes, et à tous ces philosophes qui ont inventé des théories fantaisistes sur la réincarnation des âmes en autres hommes, en animaux, en plantes, en étoiles ou même en minéraux. Renoncez à vos fantaisies et voyez où va l’esprit de l’homme vertueux : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit. »
La septième parole énonce : « Tout est accompli ». Cela ne veut pas dire que sa vie est finie. Non. C’est la mission de la rédemption de l’humanité qui est finie. Un acte Divin du seul vrai Messie de l’humanité était achevé, et la vie commençait à peine. La tragédie était achevée mais non le drame. Le dernier acte glorieux était à suivre – la défaite de la mort, la résurrection et la gloire.
Lettre 7. (p.14).
A une jeune fille qui ne peut pas se décider à choisir entre le mariage et le monachisme.
Si tu as des doutes, mon enfant, sache que tu es plus vraisemblablement destinée au mariage plutôt qu’au monastère. La vie monastique est pour ceux qui ne doutent pas. Saint Sava n’a eu aucun doute à ce propos. Non plus que Sainte Théodora, Sainte Xénie, ou Sainte Euphémia ; non plus que maints autres qui furent les vrais maîtres de la vie monastique. N’importe qui ne peut recevoir ce don d’avoir la faculté de vivre la vie angélique des moines et des moniales. Seuls le peuvent ceux à qui il est donné.
Tu dis que tu t’assieds souvent au coin du feu avec ta mère et que vous examinez le pour et le contre de cette vie-là. Mais, je te le dis, ce n’est pas la quantité de pour et de contre qui importe, car ce ne sont pas eux qui décideront du chemin que tu dois prendre ; mais ce qui en décidera sera l’attrait – oui, celle de ces deux vies qui t’attirera le plus. L’amour est au-dessus de toutes les raisons. Si l’amour de Dieu ne te mène pas à la paisible solitude monastique dans l’hésychia, alors, l’amour de ce qui est mondain te maintiendra dans le monde et te conduira au mariage. Mais, même dans ce dernier cas, tu peux aussi être bénie de la bénédiction de Sarah et de Rachel, sans oublier celle de ta mère.
Le grand amour de Dieu ne tolère pas le monde ; il n’aime pas la compagnie ; il recherche la solitude. Cet amour a incité des myriades d’âmes à quitter la voie large du monde et à partir pour les déserts silencieux et muets, afin de s’y unir secrètement à leur Créateur qui est tout amour, tant de par Son nom que par Son essence. Mais, surtout, ces êtres partaient pour le désert afin de s’y rendre dignes de la vision de Dieu et de l’union avec Dieu. Les moines et les moniales prennent sur eux alors de s’y adonner au jeûne, aux durs travaux, à l’humilité, aux veilles, à la pauvreté, à l’obéissance – dans un seul et unique dessein – celui de se rendre dignes de cette union spirituelle avec leur Seigneur. Et sur ce chemin étroit, l’âme est rendue digne de cette union avec Dieu, quand elle est libérée, purifiée, et ornée de vertus. De quoi l’âme d’une personne seule a-t-elle besoin de se libérer ? De tous les liens qui la retiennent attachée et de toutes les relations humaines. De quoi a-t-elle besoin de se purifier ? De tout ce qui est prétendument amour, mais amour corporel, charnel et terrestre, de l’amour du corps, des proches, des amis, de son village natal ou de sa ville, de ses biens, des habits, des bijoux etc…De quoi l’âme doit-elle être ornée ? Des perles de la foi, de la chaîne d’argent de l’espérance et des joyaux de toutes les autres vertus. Le corps fatigué d’un moine est celui d’un être usé, dont le voile lumineux couvre la santé céleste qui n’est jamais mise à mal.
Je t’écris de la sorte, non pour te rendre attractive la vie monastique, mais plutôt pour t’en détourner, parce que si tu quittes le monde avec le doute au cœur, je crains que l’envie et le regret du monde n’augmente en toi et ne te submergent bientôt. Tu seras corporellement dans un monastère, mais en pensée ton âme sera dans le monde. Et le monde tourmente davantage dans le miroir de l’âme qu’il ne le fait dans la réalité.
Sois reconnaissante envers Dieu de ce qu’à côté de l’étroit sentier monastique, Il t’en a défini un autre, une voie plus large vers le salut et la vie éternelle. Aussi, prends la voie plus large, mon enfant, celle qui correspond mieux à tes tendances. Prends cette voie, mais avec crainte de Dieu, et en t’en remettant entièrement à Dieu. Car tu devrais savoir que même ce chemin plus aisé est impraticable sans Dieu.
Puisse la bénédiction de Dieu être avec toi.
Lettre 18. (p.33).
A monsieur P.J. qui demande pourquoi la veilleuse est allumée devant l’icône.
Tout d’abord, la veilleuse est allumée devant l’icône parce que notre foi est la lumière, le Christ a dit : « Je suis la lumière du monde ». La lumière de la veilleuse nous rappelle la lumière avec laquelle Christ illumine nos âmes.
En second lieu, pour nous rappeler la lumière qui caractérise la personnalité du Saint devant l’icône duquel la lumière est allumée, parce que les Saints sont appelés « fils de lumière ».
En troisième lieu, pour que cette lumière repousse nos sombres actions, nos pensées de malignité et nos désirs mauvais, et qu’elle nous soit une invite sur le sentier de la lumière évangélique. En sorte que nous luttions avec ferveur pour nous acquitter du commandement du Sauveur : « Que votre lumière brille devant les hommes, en sorte qu’ils puissent voir vos bonnes actions. »
En quatrième lieu, pour que ce soit là un petit sacrifice nôtre fait à Dieu, qui a sacrifié pour nous le tout de Sa personne. Cela peut être un petit signe de notre grande gratitude, et de notre brillant amour envers Celui que nous prions pour notre vie, pour notre santé, pour notre salut et pour toutes les autres choses qui ne peuvent nous être données que par l’amour céleste qui est sans bornes.
En cinquième lieu, parce que cette lumière éloigne de nous les puissances mauvaises qui nous attaquent, parfois même durant la prière, et qui détournent nos pensées de notre Créateur, puisque les esprits mauvais aiment l’obscurité et frissonnent d’horreur devant toute lumière, et plus encore devant la lumière destinée à l’usage de Dieu et de ceux qui ont su lui plaire.
En sixième lieu, pour nous pousser à nous engager à nous enflammer nous-mêmes. Tout comme la mèche et l’huile brûlent dans la lampe de l’obéissance à la volonté divine, ainsi, laissons nos âmes brûler de la flamme de l’amour qui traverse toutes les souffrances, tout en demeurant toujours obéissants à la volonté de Dieu.
En septième lieu, pour nous enseigner que tout comme la lampe ne peut pas être allumée sans notre main, ainsi notre cœur, qui est notre veilleuse intérieure, ne peut pas être allumée sans le saint feu de la Grâce de Dieu, si même ce cœur nôtre a été empli de toutes les vertus. L’huile est l’ensemble de toutes nos vertus, mais la flamme qui les allume provient de Dieu.
Lettre 22.
A S.P., un retraité, qui explique la guerre sino-japonaise à sa propre manière.
J’admets que j’ai été surpris par ton explication de la guerre qui met actuellement aux prises les Chinois et les Japonais. Tu dis : « La dangereuse ombre de la guerre a été éloignée d’Europe. La guerre est passée de l’autre côté du monde, où règne la nuit quand il fait jour ici. » Et tout en te réjouissant, tu prédis la paix pour l’Europe.
Est-ce que la paix peut t’être agréable alors que tu entends parler de guerres entre les peuples, où que ce soit dans le monde ? Peux-tu apprécier le manger et le boire, le divertissement et le cinéma, le rire et l’humour, lorsque tu étends ta pensée jusqu’aux champs de la Mandchourie, et que tu y vois des gens et du bétail gelé, ensanglanté, mourant de faim – des peuples devenus sauvages, alors qu’ils descendent du même ancêtre que de celui dont vous descendez, ton propre peuple et toi-même ? Chaque soir, tu écoutes ce que la radio fait grésiller à tes oreilles, et tu penses que cela te rend plus sage ! La chose la plus importante que la radio pourrait te relater en ces jours-ci serait de te faire entendre les cris de milliers de blessés, les gémissements de milliers de mourants, et les pleurs des mères veuves et de leurs enfants orphelins dans chacun de ces deux grands empires humains. Ce sont là des gens comme toi, des âmes vivantes, désirant la vie et le bonheur. Et le même soleil qui brille sur toi brille aussi sur eux. Le même œil de Dieu plein de larmes qui te voit les regarde aussi.
Aussi, ce n’est pas le moment de se réjouir, mais celui de se lamenter ; de se lamenter non pas seulement pour un homme ou deux, mais pour des nations, des tribus, des Etats entiers. Si les dirigeants Européens décrètent un jour national de deuil pour la mort de quelque prince de Bourbon ou de Savoie, comment peuvent-ils pardonner et ne pas déclarer le deuil pour les morts violentes de milliers et de milliers d’êtres humains, qui sont tous princes aux yeux du Créateur ? Si les peuples d’Europe étaient plus illuminés, ils décrèteraient un deuil national pour la mort de ceux qui sont tués en quelque endroit du globe que ce soit. Ils fermeraient les bars, les salles de jeux, les casinos et les cinémas, et interdiraient toutes sortes de divertissements ridicules tant que le sang serait versé entre frères et voisins. Ils feraient tout par amour du deuil et par empathie. Combien les Cieux se réjouiraient si les Slaves étaient les premiers à mettre cette attitude en pratique !
Tu peux rire ou te moquer au vu de ce que je t’écris. Pilate rirait aussi. Mais je sais que le Christ ne rirait pas.
Et en ce qui concerne tes prédictions, lorsque tu prétends que la paix de l’Europe est assurée du fait que le feu de la guerre s’éloigne d’elle pour se retrouver au loin, sois très prudent et méfie-toi de tes dires. Ne va pas te mettre à croire tes prédictions. Si une forêt brûle d’un côté, est-ce que le vent ne peut pas tout aussi bien porter les étincelles de l’autre côté également ?
La paix de Dieu et Sa compassion soient avec toi.
Lettre 19. (p.33).
A un fils qui est tombé sous la malédiction de ses parents.
Tu dis que tu t’es disputé avec ton père, que tu t’es séparé de lui, et qu’il t’a maudit tandis que vous étiez en train de vous séparer. Et maintenant tu demandes si cette malédiction a de l’importance.
Elle en a, sans aucun doute. Comment la malédiction des parents pourrait-elle ne revêtir aucune importance ? Le monde spirituel est affecté par de bien plus petites choses, et même par de simples pensées ordinaires ; aussi comment ne serait-il pas marqué par la malédiction d’un parent proférée à juste titre ? Le vertueux Noah maudit les descendants de Ham, parce que Ham avait ridiculisé son père Noah. Et cette malédiction subsiste encore et reste pratiquée dans les tribus Noires – les Chamites, jusqu’à aujourd’hui même.
Dans notre contrée, la terrible malédiction d’une mère s’est récemment réalisée. Un fils prodigue a été repris par sa mère. Dans sa colère, le fils lança des injures à l’adresse de sa mère. Dès là que sa mère se reprit à le gronder. Il frappa alors sa mère et lui administra des coups de bâton. La mère se mit à pleurer, et, dans sa douleur, elle proféra ses mots : « Fils indigne ! De même que je pleure aujourd’hui, puisses-tu pleurer le jour le plus heureux de ta vie ! » Après quelque temps, sa mère mourut, et son fils demeura sans remords ni pardon. Or la malédiction de sa mère ne tarda pas à se réaliser. Le jour de ses noces – le jour le plus heureux de sa vie, les invités du mariage faisaient feu avec des carabines. Une balle perdue frappa le marié et il tomba en geignant. La mort vint sans tarder, mettant un terme à ses gémissements et à sa vie.
L’ancien commandement de Dieu, stipulant qu’il convient d’honorer ses parents fut confirmé par le Christ lui-même lorsqu’il prononça ces mots de sa propre bouche si pure : « Honore ton père et ta mère. » Que nul donc ne croie que ce commandement fut uniquement celui de Moïse et non celui du Christ.
Toutefois, si un parent athée, un sans Dieu, maudissait son fils pour être devenu Chrétien, alors une telle malédiction retomberait sur sa propre tête. Mais, dans ton cas, tu es en faute, et la malédiction reste sur ta tête. Aussi dépêche-toi d’aller trouver ton père, tant que vous êtes tous deux vivants, et supplie-le de te retirer sa malédiction et de te bénir. Puisses-tu aller bien et puisses-tu avoir beaucoup d’années sur la terre.
Puisse le Seigneur t’aider.
Lettre 20. (p.35).
A un étudiant qui demande « qui sont les pauvres en esprit ».
« bénis sont les pauvres en esprit car le Royaume des Cieux est à eux », dit le Seigneur Christ. Ce point t’embarrasse. Ton embarras provient de ce que tu mélanges les concepts de pauvreté, celui qui désigne les peuples pauvres peu développés, et la « pauvreté » que loue Christ.
La pauvreté spirituelle, ou l’humilité, est la vertu des plus grands esprits que le monde ait jamais eue. C’est la conscience propre de n’être absolument rien devant la magnificence de Dieu, de sa propre inanité devant la pureté du Créateur, de sa complète dépendance envers l’infini pouvoir du Seigneur.
Le roi David dit de lui-même : « Je suis un ver de terre et non un homme. » Ce n’était pourtant pas un esprit lent, loin de là, mais un grand esprit, celui d’un homme de génie. Son fils, le très sage Salomon disait : « Crois en le Seigneur de tout ton cœur, mais ne crois pas en ta raison. » C’est là ce que veut dire être pauvre en esprit : se tourner complètement vers Dieu, ne croire qu’en lui et ne pas se fier à soi-même.
Béni soit celui qui peut honnêtement dire : « Ma force n’est rien, ma raison est faible, ma volonté est chancelante ; Seigneur, aide-moi ! »
Un pauvre en esprit est un Saint qui, comme l’Apôtre Paul, peut dire : « Je ne connais rien, excepté le Christ ! »
Un pauvre en esprit est un homme de science qui, comme Newton, admet que son ignorance est infiniment plus grande que sa connaissance.
Un pauvre en esprit est un homme riche qui, comme Job, dit : « Je suis entré nu dans ce monde, j’en sortirai nu. »
Saint Sava, le roi Stéphane de Déchani et le tsar Lazare se sentaient tous pauvres en esprit. Que dis-je ? Tous les Apôtres, les Saints et les êtres vertueux, ainsi que des myriades de pieux hommes de Dieu vécurent en ce monde comme des pauvres en esprit. A cause de quoi, conformément à la promesse de Dieu, ils ont hérité le Royaume des Cieux.
Ne crois pas que la personne qui manque de connaissance soit aussi ignorante que celui qui s’enfle de la connaissance qu’il a.
La pauvreté spirituelle est par essence l’opposé de l’esprit hautain et vantard. Christ a voulu nous préserver de ce qu’il y a de plus stupide, l’esprit hautain, et de la vantardise fatale, quand Il loua les pauvres en esprit.
La paix et la joie du Seigneur soient avec toi.
Lettre 24. (p.41).
A une famille pieuse qui demande « comment le Christ est ressuscité ».
N’est-ce pas assez de savoir que le Christ est ressuscité ? Pourquoi se tourmenter avec la question de savoir comment Il est ressuscité ? Mais ce sont l’amour et l’étonnement qui posent en vous cette question, et en aucune façon le doute, et, dès lors, mes chères âmes, j’aime que vous posiez cette question.
Il est ressuscité tout comme le soleil se lève tout soudain en Asie, en sorte que le jour fait s’évanouir la nuit. C’est comme si quelqu’un allumait un interrupteur électrique dans une chambre sombre, et que soudainement il y ait de la lumière. De quelle manière se fit la Résurrection du Christ faisant passer de la mort à la vie – en silence et en l’espace d’un instant.
Vous demandez-vous encore avec curiosité comment ? J’aurais tendance à penser qu’Il ressuscita tout comme la lumière apparut dans la ténèbre totale lorsque le monde fut créé au commencement. Des gens à l’esprit grossier pensent : « Quelle sorte de fabrique terrifiante fut celle qui put produire la lumière dans le monde ? » Et comme les machines de cette fabrique durent être immenses ! Quelle puissance pareille à celle de combien de millions de chevaux et d’éléphants a-t-il fallu pour conduire ces machines, et combien de millions d’années ont-elles dû passer avant que la lumière ne soit finalement répandue sur le monde ? Mais non. Aucune fabrique, aucune machine, zéro million de puissance en chevaux et zéro million d’années ne furent requis. Il ne fallut nullement de grands efforts. Seule une puissante parole fut prononcée par Dieu et la lumière apparut et remplit le monde entier. » Et Dieu dit : « Que la lumière soit ». Et la lumière parut. » Il n’a pas même prononcé cette parole de façon audible, mais Il l’a seulement pensée, puisque la Pensée de Dieu équivaut à Sa Parole. Il l’a fait paisiblement et instantanément.
C’est semblablement qu’est apparue la Résurrection du Christ. Oui, c’est de la même manière qu’est apparue cette nouvelle lumière qui révéla le monde spirituel aux hommes rationnels. Tout comme cette lumière physique de l’univers avait révélé ce monde à tous les yeux, ainsi la lumière de la Résurrection du Seigneur a révélé à tous les peuples ce monde spirituel – la terre maternelle des esprits immortels. De là, cette lumière-ci n’est en aucune sorte moindre que cette lumière-là. Mais les deux sont apparues silencieusement et instantanément, selon l’absolu pouvoir du Créateur, conformément à son plan d’absolue sagesse, à Son indicible compassion et à Son infini amour.
Tu as entendu dire comment des gens doués créent et imaginent de grandes inventions ingénieuses avec une facilité et une vitesse déconcertantes. Combien plus le peut le Donateur de tous les dons, le Créateur de tous les génies ! N’avez-vous pas lu avec quelle facilité et avec quelle promptitude le Seigneur ressuscita la fille de Jaïre et le fils de la veuve de Naïn ? Et Lazare à Béthanie ? Il proféra une parole et le miracle se produisit. « Car avec Dieu, toute chose qu’Il profère devient un monde possible ! » et il en va de même avec tout ce qu’Il pense. Ainsi, Christ s’est Lui-même ressuscité. Encore plus aisément et plus promptement. Et sans même une parole.
Et maintenant, mes chers enfants, puisque vous savez que le Seigneur est ressuscité, je vous demande de vous engager vous-mêmes à méditer pour savoir comment vous aussi vous pourrez mériter la résurrection, en sorte qu’Il puisse vous ressusciter aussi.
Il s’est ressuscité Lui-même pour l’amour de vous ; pour attester que vous ressusciterez par Lui et serez comme Lui dans la gloire et la beauté éternelles.
Aussi, adorez le Seigneur ressuscité et chantez-Lui l’hymne matutinale. « Les Anges dans les Cieux chantent les louanges de Ta Résurrection, ô Seigneur. Rends-nous sur la terre aussi dignes de Te glorifier avec un cœur pur. »
Lettre 27. (p.47).
A des amis se trouvant à l’hôpital, sur la question de savoir ce qui témoigne de la Résurrection du Christ.
Ma conscience, premièrement, témoigne à mes yeux de la Résurrection du Christ, après quoi en témoignent ma raison et ma libre volonté. Ma conscience me dit : « Tant de souffrances subies par le Christ pour le bienfait et le Salut de l’humanité ne sauraient être rétribuées par moins que la Résurrection et que la Gloire céleste. Les souffrances muettes du Christ vertueux sont couronnées par une Gloire ineffable. Cette assurance me donne paix et satisfaction. Ma raison, quantà elle, me dit : « Sans la glorieuse victoire de la Résurrection, l’œuvre entière du Fils de Dieu serait demeurée dans la tombe, Son entière mission n’eût pas été accomplie. Ma volonté, elle, me dit : « La Résurrection du Christ me sauve d’une suspecte hésitation entre le bien et le mal et me dirige fermement sur le sentier du bien. Et sur ce sentier encore, brille pour moi, me donnant élan et force d’âme. »
Outre ces trois voix qui, de l’intérieur, témoignent toujours en moi d’une seule et même chose, j’ai aussi dans l’externalité de fiables témoins. Oui, j’ai là pour témoins les glorieuses femmes myrrhophores, les douze Apôtres, et plus de cinq cents autres témoins – tous ceux qui ont vu et entendu le Christ après la Résurrection, non pas en rêve, mais tandis qu’ils étaient éveillés, et non pas l’espace d’une minute, mais durant quarante jours entiers. L’ardent Saul me l’atteste, ce Juif qui fut le plus grand persécuteur des Chrétiens. Il atteste avoir vu la Lumière du Christ ressuscité au beau milieu du jour, assure qu’il entendit Sa voix, et qu’il obéit à Son commandement. Trente ans plus tard, Paul ne revint pas sur ce témoignage, pas même au moment où l’épée de Néron se tenait au-dessus de sa tête à Rome. Saint Procope, le général Romain, m’est un autre témoin de la Résurrection du Christ. Il s’était mis en route vers les pays de l’Est pour y néantir les Chrétiens, lorsqu’en chemin Christ lui apparut et le convertit à Lui. Dès là, au lieu de transpercer les Chrétiens par l’épée, Procope se livra volontairement pour être à son tour lui-même transpercé. M’attestent aussi de la Résurrection du Christ les milliers de Martyrs des Balkans, et ce jusqu’à nos jours, où sont apparus les Nouveaux Martyrs de Moscou.
Toutes les âmes bonnes et vertueuses que je rencontre dans la vie me sont aussi un témoignage de ce fait, lorsque je les vois se réjouir de ce qu’ils entendent proclamer la Résurrection du Christ d’entre les morts. Cet évènement parle à leur conscience, émeut leurs âmes et réjouit leurs cœurs.
Je reçois également semblable témoignage des pécheurs et de ceux qui haïssent le Christ. Du fait même qu’en tant que méchants et pécheurs ils renient la Résurrection du Christ, je tire le témoignage de la réalité de leur contraire. Au tribunal, chaque fois, la conduite des témoins est examinée, et leur témoignage est jugé en fonction de cette conduite. Lorsque des témoins sobres d’esprit, purs et saints clament que Christ est ressuscité, je reçois et j’accueille joyeusement leur témoignage comme étant vrai. Et lorsque les impurs, dénués de vertu et de sainteté renient la Résurrection du Christ, ils donnent à mes yeux alors d’autant plus de force au témoignage des précédents, et ils me convainquent d’autant plus de la vérité de la Résurrection de mon Seigneur. Parce que ce qu’ils renient, ils le renient à cause de leur malignité, non pas en vertu de la connaissance du Divin.
Maintes nations et tribus me donnent aussi ce témoignage de la Résurrection, car par la foi en le Christ ressuscité, ils sont eux-mêmes ressuscités, passant de la sauvagerie à l’illumination, de l’esclavage à la liberté, de la fange de l’immoralité et de la ténèbre mentale à la Lumière des enfants de Dieu. La résurrection du peuple Serbe m’atteste aussi de la Résurrection du Christ.
Le mot lui-même de Résurrection d’entre les morts atteste de la même chose. Si ce terme n’avait pas désigné la Résurrection du Christ d’entre les morts, ce mot n’aurait pas existé dans notre dictionnaire. Lorsque Paul prononça pour la première fois ce mot dans une Athènes très cultivée, les Athéniens furent cependant désorientés et abasourdis.
Aussi, enfants de Dieu, puis-je vous saluer à nouveau en vous disant : « Il est vraiment ressuscité ! ».
Lettre 11. (p.21).
Au travailleur Zdravko T, qui demande quelle est la signification des paroles du Christ : « Je suis venu jeter le feu sur la terre. »
Nous parlons souvent du feu de la jalousie, du feu de la haine, du feu de la luxure, du feu de toute passion vicieuse. Bien sûr, un tel feu n’a pas été apporté sur la terre par Christ, le roi de Gloire et de Vérité. Loin de là ! Ce feu impur provient du tourbillon de feu de l’Enfer qui éclabousse la terre.
Le Christ, Lui, a apporté le feu sacré dont Il brûle d’éternité en éternité. Tel est le feu de la Vérité et de l’Amour, un feu pur et divin, émané de l’éternel foyer qui se nomme la Sainte Trinité. C’est le feu de la Vérité duquel s’épanche la chaleur de l’Amour.
C’est le feu dont un Chrétien brûle cependant qu’il demeure inconsumé, tout comme le buisson ardent dans le désert qui brûla mais ne se consuma pas.
C’est le feu que le prophète Jérémie sentit dans ses os, et qui le conduisit irrésistiblement à proclamer la Vérité de Dieu. ( Jér. 23 :29).
C’est le feu qui descendit sur les Apôtres en forme d’ardentes langues de feu, qui éclaira et illumina ces simples pécheurs pour en faire les plus grands et les plus sages des hommes.
C’est le feu qui brilla sur la face de l’archidiacre Stéphane et lui donna l’apparence d’un ange de Dieu.
C’est le feu spirituel de la Vérité et de l’Amour par lequel les Apôtres et les missionnaires ont régénéré le monde, revivifiant le corps mort d’une humanité sans Dieu, le purifiant, l’éclairant et l’illuminant. Toute chose dans ce monde qui a partie liée avec le bien provient de ce feu céleste que le Seigneur a jeté sur la terre.
C’est le feu céleste par lequel l’âme est purifiée tout comme l’or est purifié par le feu terrestre. Dans la Lumière de ce feu céleste, nous apprenons à connaître la voie ; nous percevons d’où nous sommes et où nous allons ; nous apprenons à connaître notre Père céleste et notre patrie éternelle. Dans ce feu, notre cœur est réchauffé par un Amour ineffable pour le Christ, tout comme les deux Apôtres, à Emmaüs, le sentirent dans leur cœur et le décrivirent : « Est-ce que nos cœurs ne brûlaient pas en nous tandis qu’Il nous parlait ? »
C’est ce feu qui poussa le Christ à descendre du Ciel sur la terre et qui nous incite à nous élever à notre tour vers le Ciel.
Nous sommes tous baptisés dans ce saint feu, conformément à la parole de Jean : « Je vous baptise dans l’eau, mais Lui vous baptisera dans le Saint Esprit et dans le feu. »
Ce feu génère dans le cœur un zèle indescriptible pour tout bien que ce soit. Il rend joyeux et contents les vertueux et tourmente les pécheurs. Il nous tourmente souvent nous aussi, jusqu’à ce que nous soyons complètement purifiés de toute injustice et de toute impureté. Car il est écrit : « Dieu est un feu qui consume les pécheurs. »
La paix et la joie du Seigneur soient avec toi.
Lettre 10. (p.20).
A un jeune professeur qui demande « s’il y a de vrais Chrétiens aujourd’hui. »
Des vrais Chrétiens aujourd’hui ? Oui, il y en a beaucoup. S’il n’y en avait pas, le brillant soleil disparaîtrait. Pourquoi une lampe si précieuse illuminerait-il une terre habitée par des bêtes ?
J’aurais besoin de beaucoup de papier pour te rapporter par écrit tous les beaux exemples donnés par les nombreux Chrétiens que j’ai rencontrés dans ma vie. Et il te faudrait beaucoup de temps pour les lire et rasséréner ton âme. Pour l’instant, il suffira que tu médites ce seul exemple. L’été dernier, nous étions tous à Macva. Nous attendions le train dans une petite gare. Je regardais alors attentivement une vieille femme paysanne. Son visage était vieux et fané, mais illuminé par cette mystérieuse lumière qui se remarque souvent sur les visages des gens spirituels. Je lui demandai : » Qui attendez-vous, ma sœur ? » « Eh bien,…toute personne que le Seigneur voudra bien m’envoyer », répondit-elle. En conversant plus longtemps, nous découvrîmes ce qui suit : Elle venait chaque jour à la gare pour voir s’il n’y aurait pas là quelque pauvre voyageur qui aurait besoin de nourriture et d’un gîte. Et si semblable personne se présentait, elle le recevait comme s’il était envoyé par le Seigneur. Et elle l’emmenait dans sa maison sise à un kilomètre de la gare.
Il apparut encore au cours de notre conversation qu’elle lisait également la Sainte Ecriture et assistait aux offices de l’Eglise, qu’elle jeûnait et observait toute la loi de Dieu. Par la suite, ses voisins nous dirent que c’était une sainte vivante.
Je me mis à la louer de son hospitalité évangélique. Mais avant que je pusse achever, elle soupira et murmura : » Ne sommes-nous pas tous hôtes du Christ chaque jour de notre vie ? » Et des larmes brillaient dans ses yeux.
Comme est douce et compatissante l’âme du peuple Chrétien ! Mon jeune ami, si tu dois devenir un enseignant du peuple Chrétien, tu risques de te retrouver souvent embarrassé. Puisse la divine Grâce de Dieu briller sur toi !
Lettre 9.
A un forgeron dénommé Costa, au sujet de la signification des
paroles du Christ : « Je ne suis pas venu apporter la paix mais l’épée. »
Se peut-il qu’un homme aussi sincère et aussi compatissant que toi ne connaisse pas la signification de ces paroles ? Je pense que tu la connais, mais que tu attends seulement confirmation de ton savoir. A ceux qui sont sincères et compatissants, Dieu révèle Ses Mystères à l’aide de Son Esprit. Si tu avais été le seul forgeron à Jérusalem à l’époque où le Christ a été crucifié, il n’y aurait eu personne pour fabriquer les clous de Sa Croix.
« Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix mais l’épée. » Ainsi a parlé le Seigneur. Lis cela comme s’Il avait dit : « Je ne suis pas venu pour réconcilier la vérité et le mensonge, la sagesse et la stupidité, le bien et le mal, la justice et la violence, la bestialité et l’humanité, Dieu et Mammon. Mais je suis venu avec une épée pour trancher l’une d’avec l’autre ces doubles entités, en sorte qu’elles ne se mélangent pas. »
Avec quoi trancheras-tu, ô Seigneur ? Avec l’épée de la Vérité. Ou avec l’épée de la Parole de Dieu, ce qui est la même chose. Car la Vérité est la Parole de Dieu, et la Parole de Dieu est la Vérité. L’Apôtre Paul conseille : « Prenez le glaive spirituel qui est la Parole de Dieu. » Et Saint Jean a vu dans une vision « le Fils de l’Homme se tenir debout entre sept cierges, tandis que de sa bouche sortait une épée à double tranchant. » Que peut représenter l’épée qui sort de Sa bouche sinon la Parole de Dieu, la Parole de Vérité ? Telle est l’épée que Jésus-Christ a apportée sur la terre. Cette épée est faite pour le Salut par la Parole, non pas pour réconcilier le bien et le mal – ni maintenant ni plus tard ni jamais.
D’après les paroles suivantes du Christ, nous voyons que cette interprétation est la bonne : « Car je suis venu pour monter un homme contre son père, une fille contre sa mère, et une belle-fille contre sa belle-mère. » Si un fils décide de suivre le Christ et que son père reste dans la ténèbre du mensonge, l’épée de la Vérité du Christ les séparera. La Vérité est plus chère au Christ que le père. Et si une fille décide de suivre le Christ, mais que sa mère demeure inébranlable dans son reniement du Christ, quelle sorte d’union peut-il y avoir entre elles ? Il en va de même entre la belle-fille et la belle-mère.
Mais ne va pas mésinterpréter ceci comme s’il s’agissait que celui qui vient pour apprendre à connaître et à aimer le Christ doive être immédiatement séparé de ses proches. Ce n’est pas ce qui est écrit ; Il est suffisant d’être séparé en son âme et de n’y recevoir aucune des paroles ni aucune des actions des incroyants. Parce que si les croyants étaient immédiatement séparés des incroyants, deux camps opposés apparaîtraient dans le monde. Et dans ce cas, qui enseignerait et corrigerait les incroyants ? Le Seigneur Lui-même, trois ans entiers durant, a supporté à Ses côtés Judas l’incroyant. Le sage Paul écrit : « Un mari incroyant est sanctifié par sa femme croyante, et une femme incroyante est sanctifiée par son mari croyant. »
Pour finir, je te dirai comment le célèbre Théophylacte d’Okhrid explique ces paroles du Christ. « Lorsqu’on est avec un père, une mère et une belle-mère, l’on en vient à comprendre ce qui est ancien, et lorsqu’on est avec leur fils et leur fille, l’on comprend tout ce qui est nouveau. Le Seigneur, donc, souhaite que Son nouveau commandement divin puisse conquérir nos vieilles habitudes et nos anciennes coutumes de pécheurs. »
Ainsi, ces paroles que l’on peut dire au sujet de l’épée qui a été apportée sur la terre, sont pleinement appropriées au Christ faiseur de paix et donateur de Sa même paix. Car Il donne Sa paix céleste, comme un baume céleste, à ceux qui croient sincèrement en Lui. Mais Il n’est pas venu apporter la paix entre les fils de Lumière et les fils des ténèbres.
Salutations à toi et aux enfants. Que la paix et la bénédiction de Dieu soient avec toi.
Lettre 8. (p.16).
A un prêtre au sujet de la crise mondiale.
Tu me demandes, ô homme de Dieu, d’où vient la crise d’aujourd’hui et ce qu’elle signifie.
Qui suis-je donc pour être interrogé sur une si grande question ? « Tu ne devrais parler que lorsque ce que tu as à dire vaut mieux que le silence », dit Saint Grégoire le Théologien. Et bien que je croie que le silence vaudrait mieux pour le moment, je vais toutefois te donner mon opinion là-dessus, pour l’amour de toi.
« Crise » est un mot grec qui signifie jugement, discernement. Dans la Sainte Ecriture, ce mot est souvent utilisé. Le Psalmiste dit : « Les Sans-Dieu, donc, ne se tiendront pas debout au Jugement. » ( Ps 1 :5). Ailleurs, il dit : « Je chante au Dieu de compassion et de jugement ». ( Ps 101 :1). Le sage Salomon écrit : « Le jugement de tous vient du Seigneur ». ( Prov. 29,26). Le Sauveur Lui-même dit que « le Père a donné tout pouvoir de jugement au Fils ». Après quoi, Il dit : » Maintenant le Jugement du monde vient ». ( Jean 5 :22, 12 :31). L’Apôtre Pierre écrit : » Car il est temps que le jugement de la maison de Dieu commence. » (1 Pierre 4 :17).
Mais si tu remplaces le mot « jugement » par le mot crise, voici ce que tu lis : » Les Sans-Dieu, donc, ne se tiendront pas debout dans la crise », « Je chante au Dieu de compassion et de crise », « La crise de tous vient du Seigneur », « Le Père a donné au Fils tout pouvoir de crise ». « Maintenant la crise du monde vient ». « Car il est temps que la crise de la maison de Dieu commence ». Tu vois alors que tu as remplacé le compréhensible par l’incompréhensible.
Jusqu’à présent les nations européennes avaient utilisé le terme de « jugement » au lieu du terme de « crise », si bien qu’il en était résulté pour eux une certaine peur et un certain trouble. Maintenant l’ancien mot –« jugement » est remplacé par le nouveau – le compréhensible par l’incompréhensible. Lorsqu’il y avait une sécheresse, les gens disaient : « C’est le jugement de Dieu ! » Quand il y avait une inondation, ils disaient : « C’est le jugement de Dieu ! » Quand il y avait une guerre ou un fléau, ils disaient encore : » C’est le jugement de Dieu » ; Quand il y avait de la grêle, des calamités naturelles, des tremblements de terre, la peste, des rats, et autres périls semblables, ils disaient toujours et à chaque fois : « C’est le jugement de Dieu. » Et cela voulait dire : « C’est la crise, à cause de la sécheresse, des inondations, des guerres, des fléaux, etc…Aujourd’hui la crise économique et financière est également considérée par le peuple comme due au jugement de Dieu ; cependant, ils ne disent pas « jugement », mais « crise ». Ainsi la confusion croît et les épreuves se multiplient. Car quand nous utilisions un mot compréhensible, « le jugement », nous comprenions en même temps la cause du trouble qui régnait ; nous savions que c’était le Juge qui avait permis les épreuves ; nous savions que le Juge était Dieu ; et la finalité de l’épreuve était également connue. Cependant, depuis que nous avons utilisé le mot « crise », un mot incompréhensible à tous et à chacun, plus personne ne sait plus rien expliquer – ni le pourquoi, ni l’origine, ni la fin de ces troubles. Voici donc la seule différence entre la crise d’aujourd’hui et ces crises que constituent la sécheresse, les inondations, la guerre, les insectes tueurs, les pestilences ou tout autre fléau que ce soit.
M’interroges-tu sur la cause de la crise d’aujourd’hui ou sur le jugement de Dieu de ce jour ? La cause en est la même, à tout jamais. La cause des sécheresses, des inondations, des pestilences et de tout autre fléau de l’humanité est aussi la cause de la crise d’aujourd’hui. Et la cause de cette crise est l’apostasie des peuples. Les peuples ont causé cette crise à cause du péché d’apostasie, et Dieu a permis cela pour éveiller les peuples, en sorte qu’ils puissent recouvrer leur bon sens, devenir plus spirituels et revenir à Lui. C’est par les péchés modernes que vient la crise moderne. Dieu a réellement utilisé des moyens modernes pour redonner du sens commun aux peuples modernes. Il a frappé les banques, la bourse, la monnaie et les finances. Il a renversé les tables des changeurs dans le monde entier, tout comme Il l’a fait il y a longtemps dans le temple de Jérusalem. Ila autrefois créé une panique sans précédent parmi les marchands et les changeurs. Il arrache, abat, agite, sème la confusion et terrifie. Tout cela pour obliger les petits esprits des sages d’entre les Européens et les Américains à se réveiller, à reprendre leurs esprits et à devenir plus spirituels. En sorte que bien qu’ils soient ancrés aux amarres de la sécurité matérielle, ils puissent se souvenir de leurs âmes ; confesser leurs transgressions et s’incliner devant le Dieu Tout Puissant, le Dieu vivant. Combien de temps la crise durera-t-elle ? Aussi longtemps que les esprits des peuples resteront inchangés. Jusqu’à ce que ces gens hautains et pleins d’eux-mêmes qui ont causé cette crise capitulent devant le Tout-Puissant. Jusqu’à ce que les peuples et que les nations se souviennent qu’il convient de traduire le terme incompréhensible de « crise » en le terme compréhensible de « jugement », en sorte qu’ils puissent dire dans leur propre langage : » C’est là le jugement de Dieu !» Toi aussi, honorable frère, tu devrais dire : « C’est là le jugement de Dieu », au lieu de dire sans comprendre : « C’est la crise ». Et toute chose deviendra claire.
Salutations et paix sur toi.
Lettre 6. (p.12).
A un marchand en souffrance qui dit qu’il est damné.
Tu dis que tu es damné.
Tes amis t’ont abandonné. Les uns détournent de toi la tête, les autres t’insultent. Seule la foi en Dieu te garde de perdre la tête et de te faire du mal, dis-tu.
Tu as perdu tes biens. – Cela ne veut pas dire que tu es damné. Si tu as échoué en tant que marchand, cela ne veut pas dire que tu es l’incarnation d’un échec en tant qu’homme. Tu n’es pas né avec ta fortune. La fortune s’est attachée à toi au cours de ta vie. De toutes façons, à la fin d’une vie, celui qui la possède doit se séparer de sa richesse. Mais tu es amer parce que tu as dû, toi, t’en séparer avant la fin de ta vie. Toutefois, cette même situation a servi à rendre beaucoup de gens heureux. Parce que s’étant désenglué de la pourriture de la fortune en ce monde, ils eurent encore assez de temps pour enrichir leurs âmes de Dieu. Mais pour ceux qui s’ôtent le joug de la fortune en même temps qu’ils perdent la santé du corps, il se pourrait qu’il soit trop tard et qu’ils perdent tout.
Tu dis que tu as travaillé honnêtement. Une rétribution éternelle est promise à l’honnêteté – non pas une rétribution temporelle en ce monde. Un travail honnête peut vous faire devenir riche ou pauvre ; Mais tout comme la fortune ne fait pas d’un homme riche plus qu’un homme, ainsi la pauvreté ne fait pas d’un homme moins qu’un homme. Celui qui pense d’autre sorte ne vit pas à l’ère Chrétienne, mais dans les temps anciens et sans Dieu, durant lesquels la valeur d’un homme se mesurait en poids d’or. C’est pourquoi le Seigneur s’est permis ceci, à savoir de se laisser crucifier sur le Golgotha, pour détruire parmi les peuples cette notion de mesure barbare en or, et pour introduire sa nouvelle mesure morale et spirituelle.
Selon la mesure du Christ, ce qui fait la valeur éternelle de l’homme ne se voit rien ajouter par les richesses, ni rien diminuer de par l’appauvrissement. Les fluctuantes marées, hautes et basses, de cette substance qu’est l’or, qui ne suit pas le corps dans la tombe, dépend dépendent de la force de l’amour de chacun pour la loi de Dieu.
Et si tes amis t’ont laissé à tes difficultés et que maintenant ils détournent la tête ou se moquent ouvertement de toi, cela est certes vraiment douloureux, mais ce n’est rien en fait qu’une nouvelle preuve de l’ancienne expérience humaine. Quand le Seigneur Christ a été crucifié, où étaient ceux qui avaient crié « Hosannah ! » ? Il n’y avait plus personne en vue. Seuls les indifférents et les moqueurs se tenaient à proximité de la Croix. Les soldats Romains bâillaient d’ennui et les Juifs aboyaient leur malignité. A proximité de ta croix, il y a aussi des bailleurs indifférents ou des chiens malicieux. Réjouis-toi de savoir qu’une goutte de ton amertume est faite d’une matière semblable à l’océan d’amertume du Seigneur crucifié.
Il est bon que tu gardes la foi. Elle te soutiendra en ces jours difficiles qui passeront et se dissiperont comme un brouillard. Vois, un homme tient une canne à la main, et cette canne l’aide à gravir une côte. Certaines personnes arborent une canne comme un ornement, d’autres en tiennent une pour qu’elle les aide sur les sentiers difficiles. La foi en Dieu orne l’homme tout autant qu’il le soutient. Quand tu étais riche, ta foi était de l’ordre de l’ornement, mais maintenant elle est devenue pour toi un soutien nécessaire. Et elle revêt un caractère plus brillant quand elle sert et qu’elle aide que quand elle ne fait que décorer.
Tu dis que tu risques de devenir fou. Ne t’inquiète pas – très peu sont devenus fous à cause de la pauvreté, mais beaucoup sont devenus insensés à cause de leur argent.
Tu dis que tu pourrais te faire du mal. Penses-tu au suicide ? Cela serait vraiment fait pour réjouir le Diable. Cela signifierait non pas sui vre la volonté de Dieu, ni même ta volonté propre, mais celle de Satan. Imagine-toi une corde autour du cou ; dès lors, c’est la vie éternelle qui est perdue pour toi. En vérité, il n’y a rien dans ce soudain tournant infortuné de ta vie qui puisse t’éloigner de la foi en le Dieu vivant, Lui qui donne et reprend, reprend et redonne, afin par là de mettre à l’épreuve notre foi et notre amour.
Les gens sans foi descendent à la rivière avec Judas pour se pendre et les âmes dotées d’une foi héroïque montent jusqu’au Golgotha pour boire la coupe de l’amertume – et ressusciter.
Puisse Dieu t’aider.
Lettre 5. (p.11).
A une mère qui ne pouvait pas retrouver la tombe de son fils défunt.
Tu dis que tu as cherché ton fils dans sa tombe à travers tout le cimetière militaire. Tu as fait le voyage de Zlatibor à Corfou et de Corfou à Thessalonique. Tu es monté sur le Kajmakcalan et sur le mont Mackov Kamen. Tu es descendue dans les vallées de la mort. Dès que tu apprenais qu’il y avait quelque part un cimetière militaire, tu t’y précipitais. Tu suppliais qu’on te lise les listes des morts qui se trouvaient enterrés en tous ces lieux. Toi-même aussi tu lisais les noms inscrits sur les tombes, mais nulle part tu ne pouvais trouver trace de ton fils.
Chère mère, ne t’afflige pas. L’excès de tristesse est un péché. « La terre appartient au Seigneur en sa totalité. » Où que la tombe de ton fils puisse être, ce sera quelque part sur la terre de Dieu. Lorsque tu touches la terre devant ta maison, tu touches le bord de la tombe de ton fils. Et l’œil de Dieu, qui voit tout, traverse l’étendue de toute la terre, et veille sur les morts aussi bien que sur les vivants. Si ton fils demeure caché à tes yeux, il n’est pas caché de Dieu. C’est Dieu Lui-même qui l’a caché à tes yeux pour que ton cœur se purifie sous l’emprise de la souffrance. Mais Dieu l’a fait aussi pour te préparer une joyeuse surprise, Lui qui dans Ses palais éternels t’arrange une joyeuse rencontre avec ton fils.
Par ailleurs, les tombes des grands Saints demeurent souvent inconnues. La tombe du Prophète Moïse est demeurée inconnue, aussi bien que celles de nombreux Apôtres et Martyrs du Christ, comme aussi celles de nombreux ermites du Désert et de grands jeûneurs. Nous célébrons leur mémoire ; nous construisons des églises qui leur sont dédiées, nous prions pour demander leurs intercessions. Mais nous ne savons pas où sont leurs tombes. Aussi ne t’afflige pas, parce que l’œil de Dieu qui voit tout sait où est la tombe de ton fils, comme Il sait où sont les tombes de tant de Saints dont les emplacements demeurent inconnus.
Une mère à Déber avait un fils enterré sur une terre lointaine. A cause de son grand âge, elle ne pouvait pas aller s’incliner sur la tombe. Aussi a-t-elle pensé à un moyen de commémorer son fils. Tous les samedis, elle va au cimetière militaire de Déber. Là reposent des soldats dont les mères en grand tourment viennent visiter les tombes de leurs fils. Sur ces tombes, elle allume des cierges et murmure des prières. Et elle demande au prêtre de commémorer le nom écrit sur la croix, et, avec lui, le nom de son cher Anastase. Tu peux faire de même, et ta douleur s’apaisera.
Mais il est toutefois plus important que tu penses à l’âme de ton enfant plutôt qu’à sa tombe. Sache que son âme n’est contenue en aucune tombe terrestre. Elle est plus proche de toi que d’aucune tombe.
Il y avait une autre mère durant la guerre, qui fit le voyage jusqu’au champ de bataille pour voir la tombe de son fils. La tombe était sous le feu des combats lorsqu’elle y alla, en sorte que l’on ne la laissa pas s’y rendre. Elle s’en retourna chez elle inconsolable. Puis, soudain, par un effet de la Providence divine, son fils apparut dans la chambre. La mère se précipita pour étreindre ses pieds et s’écria : « Où es-tu, mon fils ? » Il répondit : « J’ai fait le voyage avec toi, mère, et me voici revenu ici. » Il lui dit aussi qu’il allait bien et qu’elle devrait cesser de s’affliger.
Tu devrais toi aussi cesser de t’affliger, et commencer de faire l’aumône pour le repos de l’âme de ton fils. Par les larmes tu as suffisamment ameubli la terre de ton cœur ; il est temps maintenant de laisser le fruit venir à maturation. Les fruits les plus précieux que produisent les larmes sont la prière, les aumônes et la dévotion à la volonté de Dieu. Que ta prière soit pour toi une des branches de la croix et que l’aumône soit l’autre. De ces deux barres, fais une croix pour ton fils. La prière élève jusque dans les hauteurs et l’aumône s’éploie sur l’horizon. Et que ta dévotion à Dieu te soit le clou qui tient les deux barres de la croix ensemble.
Ne sépare pas la prière de l’aumône, et la lumière des Cieux qui réconforte tombera lentement sur ton cœur comme la rosée sur l’herbe assoiffée.
Que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur toi.
Lettre 4. (p.8).
A un théologien qui se plaint de l’incroyance de certaines gens.
Il y a beaucoup d’amère vérité dans ta lettre. Mais éloignons de nous le désespoir. Le désespoir est le lot de la mort – ce désespoir qu’accueillent les incroyants quand ils rencontrent la mort.
Il y a eu beaucoup d’époques plus dures pour l’Eglise du Christ, mais ni les combattants ne se découragèrent, ni la bataille ne fut perdue. Contente-toi de lire dans Saint Basile le Grand la description de la condition de l’Eglise : La peinture qu’il en fait est aussi sombre que la plus sombre des nuits sur une mer tempétueuse. Il semblait alors que la fin du monde était proche, et le Jugement de Dieu imminent. Et pourtant, depuis ce temps-là seize siècles ont passé. Non seulement la foi en Christ n’a pas été détruite, mais en outre elle a gagné la planète entière et illuminé tous les confins du monde. Et bien qu’elle n’ait pas illuminé chaque être de la même manière, les rayons de sa lumière ont atteint tous les lieux, les uns directement, les autres indirectement.
Il y a quelques jours que le Professeur Manning de New York me rendait visite. C’est une âme riche, emplie tout autant de connaissances humaines que de foi. Je l’ai interrogé sur la foi des étudiants Américains.
Il m’a dit : « Je sais que la foi du Christ est une force irrésistible. Comme le mercure dans un baromètre, cette force monte et descend, mais elle ne diminue jamais en quantité. Les esprits superficiels et ignorants ont certainement tort quand ils prédisent la fin et la ruine du Christianisme. Il y a cent ans de cela, quand les sciences naturelles et le positivisme gagnaient en force, seuls cinq étudiants à l’université de P. s’inscrivirent en théologie. Cinq seulement ! Et lorsque ces cinq- là s’inscrivirent, les autres se moquèrent d’eux, disant : « Ne réalisez-vous pas que la foi touche à sa fin ? » Aujourd’hui, cependant, une centaine d’années plus tard, il y a des centaines d’étudiants inscrits en théologie à cette même université. »
C’est ainsi que me parla un Américain au sujet des Américains. Et toi, qui es Serbe, regarde combien de théologiens l’on peut compter dans une seule école de théologie. Plus de deux cents ? Fut-ce l’incroyance de deux cents pères, de deux cents mères et de deux cents étudiants qui t’a amené ce nombre de théologiens dans cette école, ou fut-ce la foi ? Ce fut la foi, sans aucun doute.
Et si quelques Chrétiens ont perdu la foi, de qui est-ce la tragédie, sinon la leur ? « Est-ce que leur incroyance mettra un terme à la foi de Dieu ? » Ainsi interrogeait l’héroïque Apôtre du Christ dans les premiers jours d’une histoire qui a maintenant duré dix-neuf siècles. Le grand nombre de ces siècles a rendu justice à sa brillante vision du futur. Tu devrais, toi aussi, assumer cette brillante vue apostolique du futur du Christianisme. Tu devrais également écrire un essai sur l’Eglise que tu intitulerais : « L’Eglise triomphante du Christ. »
Ta douleur, qui est causée par l’incroyance de certaines gens, est une manifestation de ton amour pour le Seigneur. Tu sais toi-même que la douleur est une des plus communes expressions de l’amour.
Prends garde, en outre, à ne pas te mettre à haïr ceux qui ne croient pas. Ce te serait fatal et ce leur serait inutile. Regarde-les avec compassion comme tu le ferais en voyant des voyageurs attaqués et dérobés par des bandits de grand chemin. Ressens de la compassion pour eux comme tu en ressens pour les mendiants sans-abri de la rue.
Et prie Dieu pour eux. Tu seras ainsi un missionnaire. Que la première règle de ton travail de missionnaire soit de prier pour les apostats.
Que la Grâce de Dieu soit avec toi.
Lettre 3. (p.6).
A une femme cultivée dont l’on se moque parce qu’elle va à l’église.
Je réponds aux moqueries avec un sourire.
Leurs moqueries proviennent d’un cœur empli de malignité ; que ton sourire à toi soit sans méchanceté ; L’ignorance se caractérise par la moquerie, la connaissance par le sourire. Par leurs moqueries, ils augmentent la valeur de ta prière qui s’élève devant le Juge éternel ; Dieu apprécie davantage les prières d’une âme courageuse et hardie lorsqu’elle est cernée des flèches de la malignité, de la haine, du dépit et de la moquerie ; De plus,toutes ces flèches sont émoussées à la pointe et pointues à leur autre extrémité ; aussi elles rebondissent sur toi sans te faire de mal, cependant qu’elles blessent ceux qui les décochent.
La femme du roi-David, Michaella, se moqua un jour de la prière exultante de joie de son mari. A cause de quoi, le Tout Puissant punit Michaella, « et Michaella, la fille de Saul, fut stérile jusqu’à son dernier jour. » Qui observe attentivement les destinées des gens se convaincra aisément que Dieu punit sévèrement ceux qui se moquent des choses saintes, fût-ce à notre époque encore, fût-ce aujourd’hui même.
Aussi peux-tu dire à ceux qui se moquent de toi – si tu penses que la parole a plus de force et de pouvoir sur eux que le silence -, tu peux donc leur dire : « Ai-je tort ou bien ne priez-vous pas pour tel ou tel motif des marchands, des employés, des officiers de police ? Aussi, pourquoi vous moquez-vous de moi quand je prie notre Créateur éternel ? N’est-il pas plus incongru de prier les gens sans pouvoir, et donc inefficaces, plutôt que le Tout Puissant ? N’est-il pas plus ridicule de s’incliner devant ce qui n’est que poussière plutôt que devant le Seigneur et Donateur de Vie ?
L’un des Prophètes dit : « Maudit soit l’homme qui met sa confiance dans l’homme ». Celui qui met sa confiance dans un homme mortel, dans un être chimérique à la vie brève, et non en Dieu, Celui qui veille sur toute chose, est d’évidence maudit. Cette malédiction qui est sur lui et sur sa maisonnée peut s’observer dans l’expérience quotidienne ; Il est clair qu’est maudit un homme qui prie un autre homme au lieu de prier Celui qui peut tout et veille sur tout. Mais méfie-toi : Parfois le silence est plus bénéfique que des mots aussi forts que ceux-ci.
Les premières moqueries, durant la prière, portent la confusion dans l’âme. Mais tu as survécu aux premières moqueries, et n’as pas abandonné la prière. Une moquerie rejetée est un encouragement. Tu dis que tu as expérimenté cela toi-même. Et maintenant, Dieu semble plus près de toi, l’église t’est plus chère, la prière t’est plus douce. Sache que viendra un temps où les moqueries cesseront, et où l’on commencera de t’approuver, de t’admirer, et de te louer. Et, dès lors, ton âme sera plus en danger que maintenant. Car, à présent, tu apprends l’humilité, mais alors tu auras à combattre l’orgueil. Mais c’est là une autre question, une autre tentation. Sache que ceux qui nous tourmentent avec des moqueries sont nos ennemis. Et c’est d’eux que le Seigneur parlait lorsqu’Il nous disait : « Aimez vos ennemis. » Alors qu’ils ne savent pas ce qu’ils font, ils nous font du bien. En nous rendant amers et en nous mettant dans l’embarras, ils ajoutent de l’huile à la flamme du feu de Dieu qui brûle en nous. En aboyant derrière notre dos lorsque nous allons à l’église de Dieu, ils nous amènent plus près du Seigneur. En faisant de cette terre un bien triste lieu pour nous, ils nous rendent les Cieux d’autant plus chers. Le givre et le vent ne font apparemment pas de bien aux arbres, mais ils leur en font tout de même, sans le vouloir. Ainsi en va-t-il entre tes ennemis et toi.
Aussi pardonne-leur, bénis-les, et prie pour eux, et, par-dessus tout, aime-les comme tes plus grands bienfaiteurs après Dieu.
Mais si ton âme n’endure pas cette vaine pérégrination dans la poussière terrestre, et a honte du Christ à jamais, alors, non seulement le peuple se moquera de toi, mais les démons aussi.
Va visiter les maisons de détresse aussi souvent que tu le peux. Va aussi visiter le cimetière. Pense à la croix du Christ et vénère-la aussi souvent que possible. Pense aussi à la fin de la vie. Tout cela aussi t’aidera à t’établir dans ta vie de prière et t’aidera à atteindre la pleine et entière victoire.
Puisse la paix de Dieu et Sa compassion être sur toi.
Lettre 2. (p.4).
A un homme qui dit qu’il croit en Dieu mais qu’il ne Le prie pas.
Lutte, afin d’affermir la foi en toi. Avec le temps, tu sentiras le besoin de la prière. Ta foi n’est pas solide, et c’est pourquoi elle ne t’incite pas encore à la prière ; Certains d’entre nous ont déjà regardé un filet d’eau tomber sur la roue d’un moulin : La roue, lors, ne bougeait toujours pas. Puis il arriva bien davantage d’eau, et la roue se mit à tourner.
La foi est une force spirituelle. Une foi frêle n’incite pas l’esprit à penser à Dieu, ni le cœur à prier Dieu. Mais une grande foi meut tout à la fois l’esprit, le cœur, et l’entière âme de l’homme. Tant qu’il y a une grande foi en l’homme, elle meut son âme devers Dieu, de par sa propre force. Tu dis que tu as lu la parole du Sauveur : « Ton Père sait de quoi tu as besoin avant même que tu ne L’en pries. » Tu en as donc conclu que la prière n’était plus nécessaire. Dieu sait en effet à l’avance ce dont tu as besoin, mais Il veut aussi que nous Le priions. C’est pourquoi le même Sauveur nous a recommandé de prier sans cesse, et Il nous a enseigné comment prier.
Cela est plus facile à expliquer à un parent qu’à toi, qui es un jeune homme non encore marié. Les parents aussi savent par avance ce dont leurs enfants ont besoin, mais ils attendent en outre que leurs enfants le leur demandent. Parce que les parents savent que le fait de demander adoucit et élève le cœur de l’enfant ; cela les rend humbles, doux, gentils, obéissants, miséricordieux et reconnaissants. Vois-tu lors combien de divines étincelles sont allumées par la prière dans le cœur d’un homme ? J’ai lu l’histoire suivante : Un voyageur, en chemin, s’arrêta devant une maison. Dans cette maison se tenait une sorte de rassemblement de travailleurs. A un moment donné, ils firent silence dans la pièce. Les travailleurs s’agenouillèrent pour la prière. L’un d’eux sortit de la maison et se mit à en faire le tour. Le voyageur lui demanda ce qui se passait à l’intérieur :
« Ils sont en train de prier Dieu », expliqua le travailleur. « Cela m’a gêné de devoir faire de même, aussi suis-je sorti. » Le voyageur cessa d’interroger et attendit. « Que fais-tu ici à attendre ? » lui demanda alors le travailleur. L’autre répondit : « J’attends que quelqu’un sorte, afin de pouvoir lui demander quelles sont les bonnes directions à prendre pour mon voyage. » « Je peux te les indiquer » dit le travailleur. Mais le voyageur secoua la tête : « Comment quelqu’un qui a honte devant Dieu et devant ses frères pourrait-il me montrer le chemin ? »
Je ne pense pas que tu aies honte de la prière, mais je crois que tu n’as juste pas assez de foi. Dès lors, nourris l’enfant qui est en toi. Quand il sera grand, devenu un héros, il te rendra tes efforts au centuple. C’est la foi d’un héros, ou une foi héroïque, qui pourra mouvoir la roue intérieure de ton être, en sorte que tu en reçoives une nouvelle vie. La paix et la bénédiction de Dieu soient avec toi.
Lettre 1. (p.3).
A un travailleur qui demande ce qu’est la vie spirituelle.
Eh bien, la vie spirituelle est la vraie vie. Tout le reste n’est que matière.
Notre corps est matière – terre empruntée à la terre. Terre, eau, feu et air – le corps humain est construit à partir de ces quatre éléments. Il est façonné avec un tel talent et si merveilleusement qu’il est impossible de le décrire avec des mots. Et cependant, le corps n’est que matière – il n’est pas vie. C’est un véhicule, non le passager. C’est une cage, non l’oiseau.
Alors, qu’est-ce que la vie ? La Sainte Ecriture l’explique clairement dès sa première page : « Et le Seigneur Dieu fit un homme avec la poussière de la terre, et Il souffla par Ses narines le Souffle de Vie, et l’homme devint une âme vivante. » Comprends-tu ce que ces mots signifient indirectement et directement ? Dieu a créé le corps de l’homme à partir de la terre – c’est-à-dire qu’Il l’a créé indirectement ; et Il souffla en l’homme le Souffle de Vie à partir de Lui-même – c’est-à-dire directement. Ainsi l’homme est devenu une âme vivante. Et de la sorte, l’homme est apparemment de la matière, mais il est la matière d’un être qui contient en lui l’Esprit de Vie qui vient directement du Créateur.
De par cet Esprit de Vie, l’homme entretient et garde une relation avec son Créateur Lui-même et avec tout le monde céleste qui se tient autour du Créateur. Quand bien même corporellement nous rampons sur la terre avec les insectes, en vérité cette petite flamme nous garde reliés et attachés au plus haut des Cieux et à l’éternité.
L’âme qui vit dans le corps, à jamais supportée et rendue vivante par ce divin Souffle de Vie – telle est la vie de l’homme. Pratiquement parlant, la vie spirituelle est lutte incessante pour nous rendre dignes de ce Divin Souffle qui habite en nous. Pourquoi devrions-nous lutter et nous rendre dignes de cette divinité qui demeure en nous. Parce que c’est là un don intérieur du Créateur. Nul d’entre nous ne l’a acheté ni n’a payé pour l’obtenir, mais c’est l’Amour éternel qui nous l’a octroyé. C’est la vérité : l’on ne paie pas un don. C’est pourquoi un don est offert. Mais celui qui reçoit un don aussi précieux que la Vie se doit au moins de se montrer digne et de prouver qu’il est à la hauteur de ce don.
Comment pouvons-nous répondre à l’Amour de Dieu, si ce n’est par l’amour ? Et comment pouvons-nous nous montrer dignes de ce don divin, cela nous est expliqué par la science qui se nomme science spirituelle. C’est une science au-dessus de toutes les autres sciences, tout comme le Souffle de Vie de Dieu est au-dessus de toute matière. Cette science ne vient pas de l’homme, mais elle provient du Saint Esprit de Dieu. Et c’est le Donateur de ce très précieux don qu’est la Vie qui a Lui-même enseigné aux fidèles comment se rendre dignes de ce don.
Si tu veux entrer dans le champ que t’ouvrira cette brillante et douce science, puisses-tu désirer devenir un être béni. La paix et la joie du Seigneur soient avec toi.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire