vendredi 3 février 2012

SAINT ISSAC LE SYRIEN. HOMELIES ASCETIQUES. (Extraits).














HOMELIES ASCETIQUES
de SAINT ISAAC LE SYRIEN.
LA VIE ET LA MORT
SELON SAINT ISAAC LE SYRIEN.
Traduction de Presbytéra Anna.



Tant que tu as des pieds, cours derrière l'oeuvre bonne, avant que d'être lié de ce lien indissoluble de la Mort, qui, lorsqu'il est noué, ne peut plus être délié. Tant que tu as des mains, tends-les vers le Ciel, pour Prier, avant que tes bras ne se démettent de leurs jointures; car alors, quand même tu voudras Prier, tu ne le pourras plus. Tant que tu as des doigts, signe-toi du Signe de la Croix, avant que la Mort ne vienne à jamais dissoudre la force harmonieuse de leurs muscles. Tant que tu as des yeux, emplis-les de larmes, avant que la poussière ne recouvre tes noirs habits, & que tes pupilles, en un regard aveugle, ne se fixent, immobiles, dans une direction que tu ignoreras. En vérité, oui, emplis de larmes tes paupières, tant que la puissance du Discernement peut gouverner ton Coeur,avant que ton Ame ne lui soit arrachée, laissant à l'abandon ce coeur, telle une demeure désertée par celui qui naguère l'habitait. O toi, l'homme avisé, ne te laisse pas abiser par l'espérance d'une longue vie. Car, tout comme la rose expire sous le vent, ainsi, qu'un souffle passe sur un seul de ces éléments qui composent ton corps, & tes genoux tout-à-coup faibliront, sans que tu l'aies escompté. Et, tandis que tu songeras que tout cela n'est rien, & que tu te préoccuperas de soigner un mal léger, l'austère figure de la Mort, soudain, s'approchera, elle qui tourne en dérision les sages, & tout aussitôt tu Mourras. O Misère de notre nature! Comme nous sommes solidement attachés, par l'amour de cette matière, que Dieu ne veut pas nous laisser!
Imprime en ton Coeur la Pensée du Départ, ô toi qui es homme, & sans cesse redis-toi: «  Prends garde, ô mon Ame! Voici, l'Ange est à la porte, & c'est pour toi qu'il vient. Que suis-je donc indolent? Mon départ est Eternel, et il n'y aura point de retour ».

Saint Isaac le Syrien.
Soixante-Quatrième Homélie ascétique.



PERLES SPIRITUELLES
recueillies parmi les Sentences
des HOMELIES ASCETIQUES
de SAINT ISAAC LE SYRIEN.
Traduction de Presbytéra Anna.



L'homme briguant l'estime ne saurait être affranchi des causes de l'aflliction.

Par le dur labeur de la Prière, & par l'anxiété de ton Ame, communie à ceux qui gardent un coeur brisé, & tu verras s'ouvrir à tes requêtes la Source des Miséricordes.

Garde-toi de lire les doctrines hérétiques, car elles ont le pouvoir, plus que nulle autre doctrine, d'armer contre toi l'esprit de Blasphème.

Il est tout aussi honteux pour les esclaves du ventre & de la chair de sonder les Choses Spirituelles, qu'il le serait pour une prostituée de discourir sur la Chasteté.

Chaque fois que tu veux entreprendre une oeuvre bonne, apprête-toi d'abord aux épreuves qui viendront t'assaillir, & ne révoque pas en doute la Vérité.

Celui qui peut avec joie souffrir l'Injustice, quand même il détient entre ses mains le pouvoir de la repousser, celui-là, en conscience, a reçu pour sa Foy la Consolation de Dieu.

L'homme qui sait avec Humilité endurer des accusations portées contre lui, celui-là est parvenu à la Perfection, & devant lui les Saints Anges s'émerveillent, car il n'est pas de Vertu plus haute, ni plus difficile à atteindre.

Quand l'épreuve surprend l'homme d'iniquité, il n'a point devant Dieu cette assurance nécessaire pour L'invoquer, ni pour atteindre de Lui son Salut, puisqu'aux jours heureux il se tenait par trop loin du Vouloir de Dieu.

Avant que ne commence la guerre, cherche ton allié; avant que des maux affligeants ne s'abattent sur toi, Prie-Le : Alors, au temps de l'épreuve, tu Le trouveras, & Il t'entendra.

Avant que de chanceler, appelle & supplie; & avant que de prononcer un voeu, tiens prêt ce que tu promets, car c'est là ta provision pour la suite des jours?

C'est au Temps de la Paix que Noé bâtit l'Arche, &, près de cent ans à l'avance, il en assembla les poutres. Au Temps de la Colère périrent les Iniques, mais l'Homme Vertueux se réfugia dans l'Arche.

Chéris les Pauvres, car, par eux, tu peux obtenir Miséricorde.

Ne dédaigne pas ceux qui sont difformes de naissance, car, par un égal privilège, tous, nous irons dans la Tombe.

Aime les pécheurs, mais déteste leurs oeuvres; & ne ls méprise pas pour leurs fautes, de crainte d'être tenté de semblable manière.

Mieux vaut éluder les passions par l'amas des Vertus, qu'en opposant à ces passions lutte & résistance. Car, lorsque les passions, quittant leur lieu, se dressent pour la bataille, elles impriment sur l'esprit images & idoles, & cette campagne, dans sa violence, suffit à émousser l'esprit, enténébrant l'intellect qu'elle trouble durablement. Mais, qu'un homme se règle sur la première conduite que nous avons dite, & les passions, lorsqu'elles sont refoulées, sur son esprit ne laissent nulle trace.

Comme le dauphin choisit de nager & d'évoluer là où la mer est en sa surface calme & immobile, de même lorsque la Mer du Coeur est paisible & tranquille, loin de toute colère & de tout courroux, alors viennent bouillonner en elle les Révélations & les Divins Mystères, lesquels à chaque instant la ravissent.

Ce qui advient au poisson hors de l'eau advient aussi à l'intellect, lorsqu'abandonnant le souvenir de Dieu, il se mêle d'errer dans le souvenir de ce monde.

Comme le poisson périt à cause du manque d'eau, ainsi les mouvements noétiques & spirituels, que Dieu y faisait fleurir, s'évanouissent du coeur du moine, lorsqu'il aime à demeurer & à passer sa vie dans la compagnie des mondains.

Plus la langue d'un homme fuit le bavardage, plus son intellect est illuminé, jusqu'à discerner de subtiles pensées; car le bavardage ne fait qu'embrouiller l'intellect raisonnable.

Qui n'aime l'homme doux & humble? L'orgueilleux , seul, & le diffamateur, qui sont étrangers à ses oeuvres.

Fuis les querelles dogmatiques, comme tu fuirais un lion rugissant; & ne t'y embarque jamais de toi-même, non plus avec les enfants qu'a enfantés l'Eglise qu'avec des étrangers.

Lorsque leurs inrellects ont été ravis par l'Esprit, les Saints du Siècle à venir cessent un temps de Prier, &, par un Miracle admirable, demeurent dans cette Gloire Bienheureuse.

Pareille à la fissure du rocher où Dieu parla à Moïse, telle est la Cellule d'un Solitaire, selon qu'en témoignent les Pères.

Je maintiens aussi que ceux qui sont châtiés dans la Géhenne sont fouettés des Verges de l'Amour qu'ils ont repoussé. Oui, qu'est-il de si amer & de si véhément que le tourment de l'Amour? Je veux dire que ceux qui ont acquis la conscience d'avoir péché contre l'Amour souffrent de ce fait un plus grand tourment qu'ils ne souffriraient de la crainte d'aucun châtiment. Car la douleur qu'inflige à leur coeur le péché contre l'Amour est plus cuisante que ne l'eût été n'importe quel tourment. Et il serait incongru de penser que, fût-ce dans la Géhenne, les pécheurs puissent être privés de l'Amour de Dieu. L'Amour est ce fruit né de la Connaissance de la Vérité qui, selon l'aveu commun, est donné à tous. La Puissance de l'Amour oeuvre alors de deux sortes : Elle tourmente les pécheurs, comme il arrive ici-bas, lorsqu'un ami souffre à cause d'un ami; mais elle devient une source de Joie pour ceux qui ont observé ses préceptes. Aussi dis-je que là est le tourment de la géhenne: dans l'amer Regret. Mais l'Amour, par sa réjouissance, grise les Ames des Enfants du Paradis.

Ce Jour-là, au Jour du Jugement, Dieu ne nous jugera pas sur la psalmodie, ni sur l'abandon de la Prière, mais sur ce qu'en les délaissant, nous aurons ouvert la voie aux démons.

L'Hésychia mortifie les sens extérieurs, & ressuscite les mouvements intérieurs, là où un mode de vie tout extérieur agit à l'inverse, ressuscitant les sens extérieurs, & tuant les mouvements intérieurs.

A quel signe reconnaît-on qu'un Homme a atteint à la Pureté du Coeur, & quand un Homme sait-il que son Coeur est entré dans la Pureté? Lorsqu'il voit tous les hommes devenus bons, & que nul ne lui paraît plus impur ni souillé, alors, en vérité, son Coeur est Pur.

Chaque fois que, sur ta route, tu goûtes une Paix immuable, demeure sur tes gardes : Tu es très loin de ces divins sentiers où marchèrent les pieds appesantis des Saints. Car, aussi longtemps que tu chemineras sur la Voie qui conduit au Royaume, t'approchant davantage de la Cité de Dieu, le déchaînement des épreuves qui t'assailleront sera pour toi un signe. Plus, en effet, tu t'approcheras, plus avant tu progresseras, plus se multipliera contre toi l'assaut des épreuves & des tentations.

La Foy est la porte ouvrant sur les Mystères. Ce que les yeux du corps sont aux objets des sens, telle est la Foy aux yeux de l'Intellect Contemplant les Trésors cachés.

Amour de Dieu est le Paradis, lieu de la jouissance de toute Félicité, là où le Bienheureux Paul goûta les Nourritures Suaves & Spirituelles.

Avant que nous ne trouvions l'Amour, c'est sur une terre d'épines que nous labourons, & c'est entre les épines que nous semons, & que nous moissonnons, quand même notre semence est celle de la Vertu.

L'Homme qui a trouvé l'Amour, celui-là, chaque jour & à chaque heure, mange & boit le Christ, & par là, devient immortel. «  Celui qui mangera ce pain que je lui donnerai, dit le Seigneur, ne verra pas la Mort jusque dans l'Eternité ». Bien Heureux celui qui se sustente du pain d'Amour qu'est Jésus-Chrit! Celui qui se nourrit d'Amour se nourrit du Christ, Dieu de toute chose, comme en témoigne Jean, le Disciple qui clame & crie : «  Dieu est Amour ».

Amour est le Royaume, - cet Amour dont le Seigneur, mystiquement, promit à Ses Disciples de manger dans Son Royaume. Car, lorsque nous L'entendrons dire : «  Vous mangerez & boirez à la table de mon Royaume », que croyons-nous que nous mangerons, sinon l'Amour? Loin qu'il nous faille nourriture & boisson, l'Amour suffit à nourrir un Homme. Tel est « le Vin qui réjouit le Coeur de l'Homme ». Ah! Bien Heureux celui qui communie à ce Nectar! Car des impudiques en ont bu, & ils ont connu la honte; des pécheurs en ont bu, & ils ont désappris les chemins de l'errance; des ivragnes en ont bu, &, devenus sobres, ils ont aimé le jeûne; des riches en ont bu, & ils ont choisi la pauvreté; des pauvres en ont bu, & se sont enrichis d'Espérance; des malades en ont bu, & ils sont devenus sains; des ignorants en ont bu, & ils sont devenus Sages.

Tout comme il est impossible, sans un navire, de passer l'immense océan des mers, ainsi, nul, sans la crainte de Dieu, ne peut atteindre à l'Amour. Mais si, lorsque nous traverserons jusqu'à Dieu la mer de ce monde, montés sur cette barque de la pénitence, nous ne prenons pas pour pilotes les bateliers d ela crainte, alors nous sombrerons dans le noir abyme des ondes.

L'homme qui choisit de voir en Dieu un vengeur, pensant par là témoigner de sa justice, ce même homme accuse Dieu d'être dénué de Bonté. Loin de nous cette pensée, qu'il puisse jamais se trouver de vengeance parmi cette Fontaine d'Amour, cet Océan débordant de Bonté! Mais le dessein de Dieu, la fin qu'Il poursuit, n'est rien que l'amendement des hommes; & si nous pouvions être dépouillés de la dignité de notre libre-arbître, alors peut-être Dieu ne chercherait-Il même pas à nous corriger par la réprobation.

L'Esprit qui a trouvé la Sagesse Spirituelle est sembalable à un Homme qui, trouvant à l'eau un navire tout paré de ses agrès, s'y embarque, & le mène droit de la mer de ce monde jusqu'à l'Ile du Siècle à venir. Car, l'intuition qu'il nous est donné d'avoir, tant que nous sommes en ce monde, du siècle futur, nous le représente pareil, en quelque manière, à un îlot sorti de l'océan; & celui qui s'en approche cesse de peiner parmi les lames furieuses des apparences de ce siècle.

Le plongeur se jette nu à la mer pour y trouver une perle; & le Moine qui est Sage, accomplit, dénué de tout, le voyage d ela Vie, jusqu'à ce qu'il trouve en lui la Perle sans prix, Jésus-Christ le Seigneur; & lorsqu'il Le trouve, il ne cherche plus à acquérir rien autre que Lui.

Le serpent protège sa tête lorsqu'on écrase son corps; & le Solitaire avisé garde en tout Temps sa Foy, car elle est Source & Origine de sa Vie.

Le chien qui lèche une rape boit son propre sang, mais il ignore son mal, tant est douce la saveur du sang; & le solitaire qui s'abaisse à goûter la vaine gloire consume sa vie, mais ne voit pas son mal, tant la flatterie semble douce à qui s'en abreuve.

La gloire de ce monde est semblable à un récif, lequel à peine affleure sous l'eau de la mer; & comme celui-ci demeure ignoré du marin, jusqu'àce que son navire, en le heurtant s'y drosse, s'emplisse de saumure, & sombre dans l'abyme, ainsi de la vaine gloire pour un homme, jusqu'à ce qu'elle l'entraîne & cause sa perte.

N'approche point sans Prière les Mystères contenus dans les Divines Ecritures, mais, implorant l'aide de Dieu, dis : «  Seigneur, accorde-moi de percevoir la Puissance qui est en ces Paroles ». Et considère que la Prière est la clef de l'Intelligence véritable des Divines Ecritures.

Une petite Ascèse toujours continuée est une grande force; car une eau légère persévérant à tomber goutte après goutte vient à bout d'une roche dure.

Comme il n'est pas d'enfants nés sans mère, ainsi, il n'est pas de passions nées sans distraction de l'esprit, non plus que de péché sans commerce avec les passions.

Bien-être & oisiveté sont ruine de l'âme, plus capables que les Démons de lui porter préjudice.

Si tu contrains ton corps lorsqu'il est faible, le faisant oeuvrer à ce qui excède sa force, tu instilleras dans ton âme ténèbre sur ténèbre, & porteras en elle un surcroît de confusion.

Justice & miséricorde voisinant en une même âme sont comme un homme qui, sous un même toit, adorerait Dieu & les idoles ensemble.

Tout comme en un même lieu ne peuvent exister le feu & l'herbe ensemble, ainsi, justice & miséricorde ne peuvent habiter une seule & même âme.

Comme un grain de sable ne peut valoir le poids d'un lourd amas d'or, ainsi, s'il les faut comparer, la Justice dont Dieu fait usage ne saurait contrebalancer l'effet de Sa Miséricorde.

Soyez persécutés, mais ne persécutez point; soyez crucifiés, mais ne crucifiez point; soyez lésés, mais ne lésez point; soyez outragés, mais n'outragez point. Témoignez de la clémence, non du zèle, pour ce qui regarde au mal. Tenez-vous à la Bonté, non à la justice.

Soyez l'ami de tout un chacun, mais, en l'âme, demeurez Solitaire.

Si tu ne peux être miséricordieux, parle, du moins, comme si tu n'étais qu'un pécheur. Si tu n'es pas un pacificateur, tiens-toi du moins, en esprit, pour un incapable. Si tu n'es pas victorieux, ne t'exalte pas, du moins, plus haut que les vaincus. Si tu ne peux fermer la bouche d'un qui dénigre son semblable, retiens-toi, du moins, de renchérir sur ses dires.

Nul homme n'a d'intelligence s'il n'est humble, & celui qui manque d'Humilité est dépourvu d'Intelligence. Nul n'est Humble s'il n'est pas Hésychase, & qui n'est pas Hésychaste n'est pas Humble non plus. Mais nul n'est Hésychaste qu'il ne soit en Joie.

Nous ne devrions point nous affliger à l'excès de ce que nous chutons en quelque matière, mais d ece que nous nous attardons dans notre chute; car les Parfaits eux-mêmes tombent souventes fois. Mais, s'attarder dans sa chute est Mort & ruine totale de l'âme.

Il n'est de connaissance, quelque riche qu'elle soit, qui ne s'infirme pas; mais le Ciel & la terre ensemble ne peuvent contenir les Trésors de Connaissance qui sont ceux de la Foy.

Vraiment, il faudrait, s'il était possible, que la confusion fût appelée le char du Démon, pour ce que Satan, dès longtemps, affectionne d'y monter comme un automédon, &, portant avec lui le torrent des passions, il investit la pauvre âme, la plongeant dans le gouffre de la confusion.

Ce n'est pas à la peine, mais à l'Humilité qu'est accordé le prix. Celui qui fait fi de cette dernière perd aussi la première.

Ce n'est point l'accomplissemnt des commandements que demande le Christ, mais la guérison de l'âme, en vue d elaquelle seule Il fit aux créatures raisonnables don de Ses préceptes.

Un charisme reçu sans épreuves n'est rien que désastre pour ceux qui le reçoivent.

Choisir ce qui est bon appartient au bon vouloir de l'homme qui le désire; mais mener à bien le choix du bon vouloir appartient à Dieu.

Voici des siècles que les générations battent le sentier du Christ, lequel passe aussi par la Croix & la Mort de la Croix. Comment se peut-il donc qu'à toi seul les afflictions rencontéres en chemin soient étrangères au sentier? Ne souhaites-tu mettre tes pas dans les pas des Saints? Ou aurais-tu quelque idée d'inventer un chemin à toi, pour y faire route sans souffrir?

La Voie de Dieu est une Croix quotidienne. Nul n'est monté au Ciel par la facilité, car nous savons où mène la voie d ela facilité, & comment elle s'achève.

Sans afflictions, en vérité, il n'est pas de Vie.

L'homme charnel craint la Mort comme une bête la boucherie. L'homme raisonnable, lui, craint le Jugement de Dieu. Mais l'Homme qui est devenu un Fils est paré des Beautés de l'Amout, & n'est point enseigné par l'aiguillon de la crainte. «  Moi, dit-il, & la Maison d emon Père, nous servirons le Seigneur ».

L'Homme Miséricordieux est à soi-même le médecin de son Ame qui, comme assisté d'un vent impétueux, reconduit hors de son moi la ténèbre des passions.

Conquiers les méchants par ta noble gentillesse, &, par ta Bonté, porte à l'admiration les hommes zélés. Au vindicatif, par ta Compassion, inspire la honte. Avec les affligés, afflige-toi en esprit. Aime tous les hommes, mais reste loin de tous.

Le Silence est la préfiguration d'un Mystère du Siècle à venir, mais les mots sont les instruments d ece monde.

Les passions sont comme ces chiens accoutumés à lécher le sang dans l'échoppe des bouchers. Quand ils sont sevrés de ce dont leur vice aime à se nourrir, ils se tiennent aux portes, & ils hurlent, jusqu'à ce que passe la force de leur habitude ancienne.

L'Homme qui s'assied dans l'Hésychia, & qui fait l'expérience de la Bonté de Dieu, n'a guère besoin d'arguments propres à le persuader, & son $ame n'est point malade du mal d'Incrédulité, comme est l'âme de ceux qui révoquent en doute la Vérité. Car le Témoignage de sa propre Inntelligence suffit à le persuader, mieux que ne le feraient les interminables discours de ceux qui derrière eux n'ont pas l'Expérience Spirituelle.

Sache donc avec certitude que de se tenir debout n'est pas en ton pouvoir, & que cela ne ressortit pas àn ta Vertu non plus, mais qu'il appartient à la Grâce même, qui te porte sur Ses paumes, que tu ne sois pas inquiété par les épreuves ni les maux de l'existence.

L'Humilité, même sans Oeuvres, obtient le pardon d ebeaucoup d'offenses; mais, sans elle, les oeuvers ne nous sont de nul profit, & nous préparent bien plutôt de grands maux.

Tout homme paisible n'est pas Humble, mais tout Humble est Paisible.

Fais route devant Dieu dans la Simplicité du Coeur, & non selon l'ordre de la connaissance. La Simplicité est assistée par la Foy, mais les délibérations obscures & embrouillées le sont par l'orgueil, & ce qui suit l'orgueil est la séparation d'avec Dieu.

Lorsque tu te prosternes devant Dieu, deviens en pensée comme la fourmi, comme les choses rampantes de la terre, comme la limace, & comme le petit enfant minuscule encore balbutiant. Ne Lui dis rien qui soit selon l'ordre de la connaissance, mais parlant avec le raisonnement d'un Enfant, approche-toi de Dieu, & marche devant Lui, pour être jugé digne de cette Providence toute paternelle qu'ont les pères pour leurs petits enfants.

L'homme, s'il ne change son coeur & ne deveint semblable au petit Enfant, ne peut recevoir la Connaissance Spirituelle. Car, seulement alors, il expérimente ce Ravissement qui appartient au Royaume des Cieux, ce « Royai=ume des Cieux », par qui les Ecritures entendent la Spirituelle Vision de Dieu.

Il est impossible, sans épreuves, que l'homme croisse en Sagesse en la lutte spirituelle, comme il est impossible qu'il perçoive son Dieu, qu'il connaisse Celui qui est sa Providence, & qu'il soit secrètement confirmé dans sa Foy, si ce n'esst par la vertu d el'Expérience Spirituelle qu'il s'est acquise.

Jamais l'homme n'apprendra ce qu'est la Puissance Divine, tant qu'il demeurera dans le confort, menant somptueuse vie.

Tout comme un homme dont la tête est immergée sous l'eau ne peut respirer l'air subtil qui se déverse dans le vide abyme de l'atmosphère, ainsi, celui qui enfouit son esprit dans les soucis de cette vie ne peut inspirer comme un Souffle ce que livre la Perception du nouveau Monde à venir.

C'est pour l'Homme un Don Spirituel venu de Dieu que de percevoir ses péchés.

La Vie t'a été donnée pour la Pénitence. Ne la dissipe pas en de vains propos.

La Croix est la porte ouvrant sur les Mystères. Par cette porte l'Esprit entre dans la Connaissance des Célestes Mystères. La Connaissance de la Croix gît cachée dans les souffrances de la Croix. Plus grande notre participation à Ses souffrances, plus grande la Perception des Mystères, que nous acquérons par la Croix. Car, selon la Parole de l'Apôtre, «  comme abondent en nous les souffrances du Christ, ainsi le Christ a fait abonder notre Consolation. » - 2. Cor.1,5-. Et par Consolation, le Divin Paul entend cette Contemplation qu'est la Théoria, laquelle s'i,terprète à son tour comme étant la Vision de Dieu par les Yeux d el'Ame. Car de cette Vision naît la Consolation.

La Prière offerte à Dieu durant la Nuit possède une Puissance plus grande que la Prière du jour. D'où vient que tous les êtres Vertueux ont Prié la Nuit, combattant, avec la pesanteur du corps, la douceur du sommeil, & par là repoussant les limites de notre nature corporelle.

Il n'est rien que Satan lui-même ne craigne plus que la Prière offerte durant la Veille d ela Nuit. Et quand elle ne serait pas exempte de quelque distraction, elle ne s'avère pas vide de profit, à moins que l'objet qu'on y demande, peut-être, ne soit point souhaitable.

Celui qui dédaigne le malade ne verra pas la lumière, & le jour de celui qui détourne son visage de la vue d'un homme que presse l'affliction deviendra ténèbres. Quant aux fils de l'homme qui méprisent la voix d'un être souffrant des tribulations amères, ils chercheront à tâtons leur chemin, les yeux frappés de cécité.

Car, à moins que ceux qui voyagent, jour après jour, n'avancent sur la route, diminuant ainsi d'autant le chemin qui leur reste à parcourir, s'is s'avisent au contraire de vouloir demeurer sur place, jamais ils ne verront devant eux diminuer la route, & jamais, non plus, il ne leur sera donné d'arriver à destination. Ainsi en est-il aussi pour nous. Si nous ne nous contraignons pas peu à peu, jamais nous n'aurons la force de nous abstenir des choses corporelles, en sorte de regarder librement vers Dieu.

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