jeudi 3 février 2011

La Lumière du Thabor n°36. Synodikon de l'Orthodoxie.

SYNODICON DE L'ORTHODOXIE



Le Synodicon de l'Orthodoxie est l'acte du concile de 843 qui, à la suite de la seconde crise iconomaque, a proclamé de nouveau la foi de l'Eglise dans les icônes et célébré son triomphe sur toutes les hérésies. A ce texte essentiel, qui affirme une fois pour toutes l'intangibilité de toutes les traditions de l'Eglise, se sont adjoints des actes relatifs à d'autres hérésies : les théories d'Italos sur les idées platoniciennnes, les thèses de Barlaam et d'Acindyne contre les énergies incréées de Dieu, etc. Nous donnons le texte du Synodikon relatif aux icônes, en omettant simplement quelques noms dans les louanges et les anathèmes. Dieu voulant, nous publierons un jour le texte complet.


En ce jour anniversaire où l'Eglise de Dieu nous a été rendue, nous offrons à Dieu l'action de grâce pour ce grand bienfait ; nous y joignons l'exposé des dogmes pieux et véridiques de notre foi, et la condamnation des inventions maudites de l'impiété.

Marchant dans la suite des paroles des Prophètes, dans la voie des exhortations apostoliques et dans les pas du récit évangélique, voici que nous célébrons la fête du Renouveau. En effet, la voix d'Isaïe, demandant que «les îles fêtent leur renouveau devant Dieu», s'adresse en symbole aux Eglises des nations ; et par «églises», il faut entendre non seulement les édifices et les splendeurs qui y scintillent, mais encore la multitude des fidèles qui les remplissent, ainsi que tous les hymnes et louanges du culte divin.
L'Apôtre, à son tour, lance la même exhortation : il commande de «marcher dans la nouveauté de la vie» et, s'adressant à tous ceux qui sont, «en Christ, devenus une nouvelle création», il les presse d'inaugurer leur renouveau.
Les paroles du Seigneur, enfin, déclarent ceci : «Il y eut la fête du Renouveau du Temple à Jérusalem ; et c'était l'hiver» : entendons soit l'hiver sensible, celui qui afflige nos sens quand le temps se met à la glace, soit l'hiver spirituel, la saison des tourmentes et des ouragans de fureur sanguinaire que le peuple juif s'apprêtait à déchaîner contre le Sauveur de tous les hommes.
L'hiver ! Nous avons nous aussi connu l'hiver, -et quel hiver ! celui qui verse l'horreur des plus grands maux ; mais le beau printemps de la grâce a fleuri pour nous, ce printemps divin qui nous rassemble aujourd'hui pour offrir à Dieu l'action de grâces et de reconnaissance pour la moisson promise ; si bien que nous crions, en empruntant la voix du psalmiste : «Eté et printemps, Tu les as formés ; qu'il Te souvienne de Ta créature !»
Oui, les ennemis du Seigneur, les insolents qui L'outrageaient, qui flétrissaient la sainte adoration que nous Lui rendons par les icônes, les blasphémateurs pleins d'orgueil, exaltés dans leurs sacrilèges, le Dieu des merveilles les a fracassés ; Il a précipité au sol la morgue de l'apostasie, Il n'a pas méprisé la voix de ceux qui crient vers Lui : «Souviens-Toi, Seigneur, de l'opprobre de Tes serviteurs, que je porte en mon sein, de l'offense de tous ces peuples, de l'outrage, Seigneur, de l'outrage que tes ennemis ont infligé à la contrepartie de ton Christ». Nous voyons dans cette contrepartie du Christ, ceux qui ont été rédimés par sa mort et qui ont cru en Lui, grâce à la prédication de la Parole et aux représentations des icônes. Car c'est par la parole et les icônes que la grande oeuvre de l'Economie du Salut se fait connaître et se manifeste à ceux que le Seigneur a délivrés par Sa Croix, Sa Passion et Ses miracles d'avant et d'après la Croix ; c'est de la parole et des icônes encore, comme d'une source, que vient l'imitation des souffrances du Seigneur : elle se transmet d'abord aux Apôtres, passe de ceux-ci aux Martyrs, et descend par ces derniers jusqu'aux Confesseurs et aux Ascètes.
Notre Dieu, donc, s'est souvenu de cet outrage que les ennemis du Seigneur ont infligé à la part de son Christ, et Il a frémi dans Ses entrailles ; Il s'est laissé fléchir par les prières de Sa Mère et les supplications des Apôtres et de tous les saints, qui ont subi avec Lui la même offense et ont été vilipendés en même temps que les icônes ; et cela s'est produit, semble-t-il, afin que, ayant souffert avec Lui dans leur chair, ils partagent aussi avec Lui les insultes des iconoclastes. Notre Dieu a donc entendu leur supplique et Il a exécuté l'arrêt qu'Il avait déjà pris : ce qu'Il avait autrefois réalisé, voici qu'Il l'accomplit de nos jours pour la seconde fois. Une première fois, en effet, après de longues années de déshonneur et d'infamie à l'égard des saintes icônes, Notre Seigneur avait permis le retour et le rétablissement de la piété véritable ; aujourd'hui, pour la seconde fois, après bientôt trente ans de persécutions, Il nous a restaurés, indignes que nous sommes, et Il nous a donné de fuir nos oppresseurs, d'échapper à nos tourmenteurs, de prêcher la foi véritable, d'adorer sans crainte les icônes, enfin de célébrer la fête qui nous comble de tous les fruits du Salut.
En effet, les icônes nous font voir les souffrances que le Maître accepta pour nous, Sa Croix, Sa Sépulture, Hadès mis à mort et l'Enfer dépouillé ; nous y voyons les combats des martyrs et leurs couronnes, le Salut même, enfin, opéré au milieu de la terre par Celui qui, le premier, nous invita à la lutte, qui, le premier, en fixa le prix et la récompense, et qui enfin, victorieux, reçut le premier la couronne du triomphateur.
Telle est la fête et la solennité universelle que nous célébrons aujourd'hui ; en elle nous nous réjouissons et sommes ravis d'allégresse, nous exultons en prières et nous répandons en processions, nous chantons des hymnes et des psaumes : «Quel Dieu est grand comme notre Dieu ? Tu es Notre Dieu, Toi seul fais des prodiges !» Ceux qui rabaissaient Ta gloire, Tu T'es joué d'eux ; ceux qui bravaient Ton icône, Tu les a fait trembler et les a mis en fuite.
Telle est l'action de grâce que nous offrons à Dieu, tel est le trophée que le Maître a élevé sur ses adversaires ; pour les luttes et les combats contre les iconomaques, nous les exposerons et les raconterons plus en détail ailleurs. A présent, comme en un lieu de repos après la traversée du désert, nous voici entrés en possession de la Jérusalem spirituelle : imitant donc Moïse, ou plutôt, suivant le commandement divin, nous estimons juste et conforme à notre devoir de graver dans les coeurs de nos frères, comme une stèle de pierres majestueuses prêtes à recevoir l'écriture, les bénédictions dues à ceux qui observent la Loi et les malédictions qu'attirent sur eux-mêmes ceux qui la transgressent. C'est pourquoi nous lançons solennellement ces acclamations :
A ceux qui reconnaissent la venue de Dieu le Verbe dans la chair et qui la confessent en parole, de bouche, de coeur et d'esprit, par les icônes et le dessin -mémoire éternelle !
A ceux qui savent que pour la seule et même hypostase du Christ, il existe une diversité dans les essences ; qui attribuent donc à Son hypostase à la fois le créé et l'incréé, le visible et l'invisible, le passible et l'impassible, le descriptible et l'indescriptible ; qui rapportent l'incréé et les attributs de même sorte à l'essence divine et affirment les autres de la nature humaine, notamment le fait d'être descriptible ; qui confessent, enfin, tout cela par la parole et par l'iconographie -mémoire éternelle !
A ceux qui croient et qui prêchent, c'est-à-dire annoncent l'Evangile, en écrivant les mots et en peignant les choses ; et qui confessent que ces deux moyens, la prédication par le langage et la confirmation de la Vérité par les images, concourent à une seule et même utilité -mémoire éternelle !
A ceux qui par la parole évangélique sanctifient leurs lèvres, puis les auditeurs en qui elle pénètre, et qui savent et enseignent que les yeux sont sanctifiés de la même manière par les icônes sacrées et que par elles notre esprit s'élève à la connaissance de Dieu, comme il le fait par les églises divines, les vases sacrés et les autres trésors du saint patrimoine -mémoire éternelle !
A ceux qui savent que la Verge et les Tables, l'Arche, le Chandelier, l'Autel et l'Encensoir, dépeignaient à l'avance en figure la Toute Sainte, Marie Mère de Dieu ; qui confessent que ces choses la préfigurèrent en effet, mais qu'elle ne fut pas ces choses, mais bien une jeune vierge, et qui demeure vierge après avoir mis Dieu au monde ; ceux donc qui connaissent cela et qui, pour cette raison, décident de représenter la Mère de Dieu telle qu'elle fut, dans une icône, et s'abstiennent de la figurer par les ombres de la Loi -mémoire éternelle !
A ceux qui acceptent et reconnaissent les visions des Prophètes, telles que le Divin même les a formées et façonnées ; qui croient tout ce que le choeur des Prophètes a vu et annoncé ; qui maintiennent la tradition, écrite et non écrite, transmise par les Apôtres et reçue par les Pères, et qui, pour cette raison, représentent et vénèrent sur des icônes les choses et les êtres saints -mémoire éternelle !
A ceux qui comprennent le vrai sens des paroles de Moïse : «Prenez garde à vous, parce que le jour où le Seigneur Dieu a parlé dans l'Horeb, sur la montagne, vous avez entendu la voix des paroles, mais vous n'avez point vu d'image» ; à ceux qui savent répondre en orthodoxe à cette interdiction ancienne de l'image et qui disent : «Si nous avons vu quelque chose, nous l'avons vu bel et bien», comme le fils du tonnerre nous l'enseigne : «Ce qui était au commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu, ce que nous avons contemplé de nos yeux, ce que nos mains ont touché du Verbe de Vie», voilà ce dont nous rendons témoignage. Et comme les autres disciples du Verbe l'ont aussi proclamé : «Nous avons mangé et bu avec Lui», non seulement avant la Passion, mais aussi après la Passion et la Résurrection. Ceux donc qui, par la force reçue de Dieu, sont capables de distinguer entre le précepte de la Loi et l'enseignement de la grâce ; qui savent que l'invisible de la première se rend, sous la seconde, visible et palpable ; à ceux qui, par conséquent, représentent et adorent dans des icônes Celui qui a été vu et touché -mémoire éternelle !
Ainsi que les Prophètes ont vu, que les Apôtres ont prêché, que l'Eglise a reçu, que les Docteurs ont dogmatisé et que l'univers a cru ; ainsi que la grâce a brillé, que la vérité a été démontrée et l'erreur dissipée ; ainsi que la Sagesse a clairement prêché, et que le Christ a décerné le prix de la victoire : ainsi nous pensons, ainsi nous disons, ainsi nous proclamons, vénérant sans cesse le Christ Notre Dieu Véridique avec tous Ses saints, en paroles, en écrits, en pensées, par des sacrifices, des temples et des icônes ; nous adorons et vénérons le Christ comme Notre Seigneur et Notre Dieu ; nous révérons Ses saints à cause de Lui, le Maître de tous, et comme Ses serviteurs authentiques ; et nous les honorons d'une adoration relative : telle est la foi des Apôtres, telle, la foi des Pères, telle la foi des Orthodoxes, telle enfin la foi qui a affermi l'univers.
Et l'affection fraternelle et la piété filiale nous poussent à chanter les héros de la foi, pour la gloire et louange de la piété pour laquelle ils ont combattu, et à les honorer de ces acclamations :
A Germain, Taraise, Méthode et Nicéphore, évêques authentiques et hiérarques de Dieu, champions et docteurs de l'orthodoxie -mémoire éternelle !
A Ignace, Photios, Stéphane, Antoine et Nicolas, les patriarches saints et orthodoxes -mémoire éternelle !
A tous les écrits ou paroles publiés et proférés contre les saints Patriarches Germain, Taraise, Méthode et Nicéphore ; Ignace, Photios, Stéphane, Antoine et Nicolas -anathème !
A tous les actes et innovations qui ont été ou seront à l'avenir perpétrés contre la tradition de l'Eglise et contre l'exemple ou l'enseignement de nos Pères saints et vénérables -anathème !
(...)
A saint Jean Damascène, prêtre et poète, qui par ses paroles et ses écrits, dans des luttes sans nombre, s'est montré l'adversaire inébranlable des hérésies et des ennemis des sacro-saintes icônes -mémoire éternelle !
A Théophane, le très saint higoumène -mémoire éternelle !
Comme ces bénédictions adressées aux Pères descendent aussi sur nous, leurs enfants, qui brûlons d'imiter leur piété, de même les malédictions retombent sur les parricides et les contempteurs des commandements du Seigneur. C'est pourquoi, d'une voix unanime, nous l'assemblée plénière des fidèles, nous leur jetons ici la malédiction qu'ils ont eux-mêmes appelée sur leur tête.
A ceux qui acceptent en théorie l'Economie et l'Incarnation de Dieu le Verbe, mais ne supportent pas de la voir représenter sur les icônes ; qui font donc semblant de confesser notre salut, mais en réalité, le renient bel et bien ; à ces faux chrétiens -anathème !
A ceux qui s'attachent de façon erronée au terme d'indescriptible et refusent pour cette raison de représenter le Christ Notre Dieu Véridique, qui a en commun avec nous, de façon presque identique, la chair et le sang ; à ceux donc qui montrent par ce refus qu'ils sont des Phantasiastes -anathème !
A ceux qui admettent, à contre-coeur, les visions des Prophètes, mais rejettent les images que les Prophètes ont contemplé -ô merveille- avant même l'Incarnation du Verbe ; qui tantôt prétendent sottement que c'est l'essence même de Dieu que les Voyants ont vue, elle qui est invisible et insaisissable ; et tantôt consentent à dire que les Prophètes ont eu la révélation d'une image de la Vérité, de ses types et de ses figures, mais refusent catégoriquement de représenter le Verbe devenu homme et les Souffrances qu'il a acceptées pour nous ; à ces contempteurs -anathème !
A ceux qui entendent le Seigneur dire : «Si vous croyiez en Moïse, vous croiriez en moi» et ce qui suit, et qui connaissent cette parole de l'Ecriture : «Le Seigneur Dieu vous suscitera d'entre nos frères un Prophète comme moi» dite par Moïse à ceux qui ont des oreilles pour entendre ; et qui, ensuite de cela, affirment bien avoir reçu ce Prophète, mais ne proposent pas dans des images la grâce de ce Prophète et le Salut du monde ; qui ne représentent pas ce Prophète tel qu'Il a été vu, qu'Il s'est mêlé aux hommes, a souffert, guéri des maladies incurables, a été crucifié, a été enseveli et est ressuscité, tel enfin qu'Il a tout accompli et supporté à cause de nous ; à ceux donc qui ne souffrent pas de voir sur les icônes ces hauts faits du salut de l'univers, qui ne les vénèrent ni ne se prosternent devant elles -anathème !
A ceux qui persistent dans l'hérésie iconomaque, ou pour mieux dire dans le reniement de la foi et dans l'hostilité au Christ ; qui ne veulent ni se laisser ramener par la Loi de Moïse sur la voie du salut, ni regagner sous la houlette des enseignements apostoliques, le chemin de la piété, ni prêter l'oreille aux exhortations et aux explications des Pères pour revenir de leur erreur, qui, enfin, n'ont pas souci du consentement unanime des Eglises de Dieu partout répandues ; mais qui se rangent une fois pour toutes sous la bannière des juifs et des païens -car les blasphèmes que ces derniers profèrent contre le Prototype, les iconomaques ne rougissent pas de les lancer, à travers l'icône, contre Celui que l'icône représente. A ceux donc qui s'avèrent irrémédiablement possédés de cette erreur et qui ferment l'oreille à toute parole divine comme à tout enseignement inspiré ; à ces membres déjà pourris de l'Eglise et qui se détachent d'eux-mêmes du corps des fidèles -anathème ! (...)
A tous nos Pères saints et bienheureux, à tous les hommes théophores, très sacrés et saints parmi les saints, qui se sont réunis dans les saints et divins Conciles Oecuméniques ; qui ont été les Grands Prêtres authentiques de Dieu, les champions et les docteurs de l'Orthodoxie et qui ont livré le bon combat pour la foi orthodoxe des chrétiens -mémoire éternelle !
A tous les patriarches glorieux et orthodoxes -mémoire éternelle !
La Sainte Trinité les a glorifiés !
Aux chrétiens orthodoxes -mémoire éternelle !
Tels sont les hommes qui ont lutté et combattu jusqu'à la mort pour la défense de la foi et de la piété. Supplions instamment Notre Dieu qu'Il nous accorde d'être instruits et fortifiés par l'exemple de leurs épreuves et de leur enseignement ! Qu'Il nous donne aussi d'imiter jusqu'à la fin leur vie et leurs actes divins ! Puissions-nous l'obtenir, par la grâce et les miséricordes du Grand Prêtre Suprême, le Christ Notre Dieu Véridique, par les prières de notre Souveraine dont la gloire dépasse toute gloire, la Mère de Dieu et Toujours Vierge Marie, par les supplications des anges semblables à Dieu et de tous les saints. Amen.

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