mercredi 12 janvier 2011

La Lumière du Thabor n°16. Notes de lectures.

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Notes de lectures

ICONOGRAPHIE ET THEOLOGIE

Pour l’anniversaire du Concile de Nicée II, il nous semble qu’il faut rendre un hommage particulier ä deux œuvres iconographiques et théologiques qui, de façon différente, ont marque notre siècle, celle du grand Photios Kontoglou et celle de Léonide Ouspensky qui présente, pour nos lecteurs, l’avantage d’être en français.

Ces deux iconographes, dans leurs écrits, n’ont jamais séparé dogme et iconographie, ascèse et peinture des icônes.

Timothée et Hélène Pignot ont traduit pour la Lumière du Thabor le texte de Kontoglou qui suit, sur l’iconographie orthodoxe :

L’ICONOGRAPHIE ORTHODOXE : CE QU’ELLE EST

"Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de votre intelligence... " (Romains 12,2).

La religion du Christ est la révélation, par Lui, de la vérité. Et cette vérité est la connaissance du vrai Dieu et du monde spirituel. Mais le monde spirituel n’est pas ce que l‘on appelait communément -et qu’on appelle toujours- "spirituel".

Le Christ appelle Sa religion "vin nouveau", et "pain qui descend du ciel". L’Apôtre Paul dit : "Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici, toutes choses sont devenues nouvelles" (II Corinthiens 5,17).

Dans une telle religion, qui fait du fidèle un "homme nouveau", tout est "nouveau". De même, aussi, l’art auquel l’esprit de cette religion a progressivement donné forme, et qu’il a inventé pour en exprimer le Mystère, est un art "nouveau", un art qui ne ressemble à aucun autre, tout comme la religion du Christ ne ressemble à aucune autre, quoi qu’en puissent dire d’aucuns, qui n’ont d’yeux que pour certains traits externes sans signification.

L’architecture de cette religion, sa musique, sa peinture, sa poésie sacrée, tout en utilisant des moyens matériels, nourrissent d’esprit l’âme des fidèles. Les œuvres produites à travers ces moyens d’expression sont comme des degrés qui conduisent les croyants de la terre aux cieux, de l’état terrestre et temporaire d’ici-bas à l’état céleste et éternel. Et cela, autant qu’il est possible à la nature humaine.

Voilà pourquoi les arts de l’Eglise sont dits "anagogiques", c’est-à-dire qu’ils élèvent les phénomènes naturels, et leur font subir "la belle transformation". On appelle aussi ces arts "liturgiques" parce qu’à travers eux l’homme goûte à l’essence de la liturgie dans laquelle Dieu est adoré et par laquelle l’homme devient semblable aux Armées Célestes et reçoit la vie immortelle.
La peinture liturgique de l’Eglise, la peinture d’adoration, a pris forme avant tout à Byzance, où elle demeura l’Arche mystique de la religion du Christ et reçut le nom d’"hagiographie" ou peinture sacrée. Comme pour les autres arts de l’Eglise, le propos de l’hagiographie n’est pas de donner du plaisir à notre sens charnel de la vue, mais de le transformer en un sens spirituel, afin que dans les choses visibles de ce monde, nous puissions voir ce qui dépasse le monde.

Voilà pourquoi cet art ne relève pas de l’illusion théâtrale. L’art usant d’illusion naquit dans l’Italie de la "Renaissance", parce que cet art fut l’expression à la fois d’un christianisme déformé par la philosophie, et devenu une forme mondaine et matérialiste du savoir, et de l’Eglise Occidentale, qui était devenue un système temporel. Tout comme la théologie d’alors se mit à l’école de la philosophie des Anciens, de même, la peinture qui exprimait cette théologie suivit les traces de l’art des idolâtres de l’Antiquité. La période porte très bien son nom de "Renaissance", puisqu’à dire vrai, elle ne fut rien d’autre que la re-naissance de l’ancien mode de pensée matérialiste qui avait été celui du monde païen.

Mais, exactement comme ces théologiens, pataugeant dans les marécages bourbeux de la philosophie, étaient incapables de goûter et de comprendre l’eau fraîche et limpide de l’Evangile "qui jaillit jusque dans la vie éternelle", de même, les peintres qui furent à l’origine de la Renaissance n’étaient pas à même de comprendre la profondeur mystérieuse de l’iconographie liturgique de l’Orient, l’art sacre de Byzance. Et, à l’instar des théologiens qui croyaient pouvoir parfaire, au moyen de la philosophie, la religion du Christ, qui leur semblait trop simple, parce qu’ils n’étaient pas en mesure de pénétrer les abîmes de cette divine simplicité, les peintres crurent qu’ils amélioraient l’art liturgique, appelé plus simplement "byzantin", en le rendant "plus conforme à la nature".

Ainsi se mirent-ils au travail, copiant ce qui était "naturel" -visages, vêtements, édifices, paysages- tout fut reproduit tel qu’il apparaît dans la nature ; ils créèrent une iconographie fondée sur ce même rationalisme dont les théologiens voulaient tisser leur théologie. Or, le type même de théologie que donne le rationalisme est identique au type d’iconographie religieuse qu’on obtient en copiant la nature.

C’est pourquoi leurs œuvres ne portent aucun Mystère, n’ont aucun caractère spirituel réel. Ce sont des hommes déguisés en saints que vous avez sous les yeux -non de véritables saints. Regardez les divers tableaux de la Mère de Dieu ; ces "madones" qui posent d’un air hypocrite, et ces saintes vierges en pleurs, larmoyantes, qui semblent plus fausses encore ! Cadavres et idoles pour hommes creux ! Notre peuple qui, depuis des siècles, a été richement et profondément nourri à la foi du Christ, même si, extérieurement, il semble inculte, appelle une femme qui se donne l‘air respectable, mais ne l‘est pas en réalité une "Frankopanaghia", c’est-à-dire "Vierge des Franks" : le peuple fait donc clairement la distinction entre la "Vierge Franque" (occidentale) et la vraie Vierge, la Mère du Christ Notre Dieu, l’austère Hodighitria, Celle qui est "plus vénérable que les Chérubins et plus glorieuse incomparablement que les Séraphins". En d’autres termes, de la manière la plus simple qui soit, il différencie nettement et précisément l’art du monde de l’art du culte.


Les peintres religieux occidentaux, voulant décrire les visions surnaturelles de la religion, prenaient pour modèles certains phénomènes naturels -nuages, couchers de soleil, la lune, le soleil avec ses rayons. Par leur moyen, ils tentèrent de dépeindre la gloire céleste et le monde de l’immortalité, nommant "spirituelles" des choses qui sont purement sentimentales, émotionnelles, et en aucune façon spirituelles.

Mais, vainement. Car la béatitude de l’autre vie n’est pas une continuation du bonheur passionnel de ce monde, et n’a rien à voir non plus avec la satisfaction des sens dans cette vie. Parlant des biens de la béatitude à venir, l’Apôtre Paul dit qu’il s’agit de choses "que l’œil n’a point vues, que l’oreille n’a point entendues, et qui ne sont pas montées au cœur de l’homme".

Des lors, comment ce monde, qui est au-delà de tout ce que l‘homme peut saisir avec les sens -comment ce monde pourrait-il être représenté par un art qui est "naturel" et s’adresse aux sens ? Comment peindre ce qui "dépasse la nature et les sens " ?

Certes, l’homme emprunte toujours des éléments au monde sensible, "à cause de ses sens", mais, pour pouvoir exprimer "ce qui dépasse les sens", il doit dématérialiser ces éléments, il doit les élever à un degré plus haut, il doit les transfigurer du charnel au spirituel, comme la foi transfigure les sentiments de l’homme et, de charnels qu’ils sont, les rend spirituels. "J’ai vu, dit saint Jean Climaque, des hommes passionnément adonnés à l’amour charnel, qui, ayant reçu la Lumière, et commencé à suivre le Christ, virent cette passion charnelle déchaînée se transformer en eux, par la grâce divine, en un amour intense pour le Seigneur".

Ainsi, les éléments matériels mêmes que l’iconographie byzantine a empruntés au monde des sens, elle les a surnaturellement transmués en réalités spirituelles ; et, étant passés, comme l’or dans le feu qui l’affine, par le creuset d’une âme pure vivant selon les commandements du Christ, ils expriment, à la mesure des possibilités d’un homme porteur d’un corps matériel, ce dont parle l’Apôtre, "ce que l’œil n’a point vu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme".

La beauté de l’art liturgique n’est pas une beauté charnelle, mais une beauté spirituelle. C’est pourquoi quiconque juge cet art d’après les critères du monde trouve que les figures de la peinture sacrée de Byzance sont laides et repoussantes, au lieu que, pour le croyant, elles possèdent la beauté de l’esprit, qu’on appelle "la belle transformation".

L’Apôtre Paul dit : "Nous (qui prêchons l’Evangile et vivons selon le Christ), sommes le parfum suave du Christ parmi ceux qui sont sauvés, et parmi ceux qui périssent. Pour ceux qui ont en eux l’odeur de la mort (de la chair), nous sentons la mort ; pour ceux qui ont en eux l’odeur de la vie, nous sentons la vie » (II Corinthiens 2,15-16).

Le béni et bienheureux saint Jean Climaque raconte : "II y avait un ascète qui, chaque fois qu’il lui arrivait de voir une personne d’une grande beauté, homme ou femme, glorifiait de tout son cœur le Créateur qui l’avait faite ; un simple regard faisait ainsi jaillir et renouvelait son amour pour le Seigneur, et il en versait un torrent de larmes. Et c’était merveille de voir que ce qui aurait causé la perte d’une autre âme était devenu, pour la sienne,…
…l’occasion de couronnes célestes et d’une exaltation au-dessus de la nature. Quiconque perçoit de cette façon la beauté est déjà incorruptible, avant même que les morts ne se lèvent lors de la Résurrection Universelle".

VERS L’UNITE ?
De Léonide Ouspensky. Ymka-Press, 1987.

L. Ouspensky a publié très récemment un intéressant petit livre sur le sens dogmatique de l’icône qui vient compléter son œuvre essentielle "La Théologie de l’icône" parue aux éditions du Cerf.

Dans "Vers l’Unité ? ", L.O., sur un ton très critique à l’égard de l’œcuménisme, rappelle le fondement dogmatique et ecclésial de l’iconographie : "Nous connaissons Dieu par la parole et par l’image. Cette forme de confession est préservée dans l’Eglise orthodoxe, tout comme y est préservée la foi des premiers siècles, des Conciles œcuméniques et des saint Pères. L’identité de la foi et de sa confession verbale et picturale prouve l’identité de l’Eglise elle-même, parce que l’authenticité de celle-ci se reconnaît, non par le nombre des fidèles, ni par la perfection de l’organisation, ni par quelque autre qualité, mais uniquement par la fidélité à la Tradition apostolique dans la confession et dans la vie".

Inversement, l’hérésie a pour conséquence la perte de la représentation iconographique authentique : "Le vice introduit, dans le dogme trinitaire, par le catholicisme romain (papisme) a modifie le caractère même de l’unité, en orientant le christianisme Occidental sur la voie de l’autorité extérieure. Cela devait naturellement marquer tout l’ensemble de la vie doctrinale et canonique, y compris l’art religieux".

En 1948, L. Ouspensky avait déjà publié un texte assez court très essentiel -qu’on aimerait voir republier : "L’icône, vision du monde spirituel, quelques mots sur son sens dogmatique". II y écrivait notamment : "L’icône est donc, comme nous l’avons dit, un témoignage de la déification de l’homme, de la plénitude de la vie spirituelle, une communication par l’image de ce qu’est l’homme en état de prière sanctifiée par la grâce. C’est en quelque sorte de la peinture d’après nature, mais d’après la nature rénovée, à l’aide de symboles. Elle est le chemin et le moyen ; elle est la prière même. De là, la majesté de l’icône, sa simplicité, le calme du mouvement, de là le rythme de ses lignes et de ses couleurs qui découle d’une harmonie intérieure parfaite.

"II convient de préciser que cet état de sanctification n’est pas à confondre avec celui de l’extase. En effet, l’état extatique n’est pas une union de la nature humaine avec Dieu, il ne transfigure pas la créature. II est une rupture de l’âme avec l’organisme sensible (raptus), une vision qui arrive parfois à des débutants dans la vie spirituelle. A mesure que le débutant croît dans la grâce, sa nature s’en pénètre tout entière ; il n’est plus ébloui par la vision du monde surnaturel ; il "connaît dès ici-bas, dès la vie présente, le mystère de sa déification" (saint Symeon ie Nouveau Théologien, sermon 83, chapitre 3).

"Seuls les hommes qui, par expérience personnelle, connaissent cet état peuvent créer de telles images, révélant la participation de l’homme à la vie du monde transfiguré qu’il contemple.
Et seule une telle image, authentique et convaincante, peut nous communiquer son élan vers Dieu Aucune imagination artistique, aucune perfection technique ne peuvent remplacer ici la connaissance positive "provenant de la vision et de la contemplation".

"Il est facile de comprendre à présent pourquoi tout ce qui rappelle la chair corruptible de l’homme et l’espace physique est contraire à la nature même de l’icône, car "la chair et le sang ne peuvent hériter le Royaume de Dieu, et la corruption n’hérite pas l’incorruptibilité" (I Corinthiens 15, 50).

"De tout ce qui précède, il ne résulte nullement que, seuls, les saints puissent faire des icônes. L’Eglise n’est pas composée seulement de saints. Nous tous en faisons partie par les Sacrements, et cela nous confère le devoir, le droit, l’audace de marcher sur la trace des saints. Tout peintre orthodoxe, vivant dans la Tradition, peut faire des icônes authentiques. Ceci explique les exigences de l’Eglise, en ce qui concerne le côté moral de la vie des peintres d’icônes. La peinture d’icônes n’est pas seulement un art, c’est une ascèse quotidienne. Mais la source inépuisable qui abreuve l’art sacré est l’Esprit Saint, par l’intermédiaire de l’Eglise, par la contemplation des hommes, dont la prière a été sanctifiée par la grâce divine. C’est pourquoi l’Eglise Orthodoxe, parmi les différents ordres de saints, docteurs, martyrs, etc., possède un ordre de saints peintres d’icônes canonisés pour leur art".

On mentionnera aussi, sur l’iconographie orthodoxe, le livre du Père Grégoire Krug, qui était un iconographe remarquable :

MOINE GREGOIRE KRUG.- Carnets d’un peintre d’icônes ; L’Age d’ Homme, 1985.

Malgré certaines affirmations quelque peu contestables sur I’icône de la Trinité, en particulier l’identification de l’"Ancien des Jours", du livre de Daniel avec Dieu le Père, ce livre, qui commente plusieurs icônes de l’Eglise, est issu de l’expérience intense d’un iconographe exceptionnel.

Le livre d’A. Troubetzkoi, Trois études sur l’Icône, Ymca-Press/L’Œil est plus contestable, du fait de son nationalisme extrême qui veut faire croire qu’il n’y a aucune trace d’influence italienne dans l’architecture de la cathédrale de la Dormition à Moscou (p. 113) et aussi que les icônes grecques anciennes avaient "une certaine froideur et abstraction", tandis que les icônes russes seraient de ce point de vue leur "antithèse".

Nous rappelons enfin que nous avons-nous-mêmes publié dans La Lumière du Thabor N° 10, l’une des meilleures études sur l’iconographie orthodoxe, celle du Docteur A. Kalomiros, Figures Célestes.

LIVRES RECUS

PERE GEORGES MACRIS - The Orthodox Church and the Oecuinenical Movement during the Period 1920-1969 - "L’Eglise Orthodoxe et le mouvement œcuménique durant la période 1920-1969". St Nectarios Press.

Ce livre du Père G. Macris, une des figures importantes de l’Orthodoxie aux U.S.A., tente avec succès une histoire de l’œcuménisme dans une période assez récente, et singulièrement, de l’évolution du patriarcat œcuménique vers un unionisme de plus en plus irréversible.

C’est au début des années 1960 seulement, selon le Père G. Macris, que cette évolution est devenue évidente et que "la théorie des branches" a été officiellement acceptée par cette Eglise. Le livre fait, en même temps, l’historique des protestations orthodoxes -mettant en lumière tout particulièrement le rôle du Métropolite Philarète de New-York et celui du Père Pantéléïmon de Boston dans le combat contre l’œcuménisme.

Nous ferons deux petites critiques à cet excellent livre dont nous traduirons quelques extraits : l’origine de l’œcuménisme dans l’Eglise de Grèce est beaucoup plus ancienne qu’il ne le laisse supposer, et on aurait aimé en lire une genèse plus détaillée ; d’autre part, la protestation orthodoxe aurait pu être examinée de façon plus large et plus systématique, l’auteur se limitant trop souvent à l’histoire de l’Eglise en Amérique, qui lui est plus proche.

On lira aussi du Père G. Macris "The Anti-Christ Life Style, "Le Mode de vie sous l’Antichrist", où l’auteur montre avec beaucoup d’acuité que la venue de l’Antichrist doit être préparée par une mentalité, par un mode de vie qui est à la fois le résultat et le moteur de l’apostasie. Le Père Georges analyse les signes de ce mode de vie antichristique à notre époque.

St GREGOIRE.DE NYSSE - Le But Divin. Editions Tequi, 1986.

Pendant des siècles, le petit traité de saint Grégoire de Nysse, "Enseignements sur la vie chrétienne", ou pour les érudits "De Instituto Christiano", est demeuré presque totalement inconnu -seul un petit extrait s’en trouvait publié dans Migne (PG 46, 287 ss). Conservé grâce aux émigrés de Constantinople, en Italie, longtemps oublié, ce texte du grand cappadocien a été retrouvé par W. Jaeger. Les éditions Tequi en publient maintenant une traduction intégrale.

On lira en particulier les pages de saint Grégoire de Nysse sur la prière :

"Surtout, persévérons dans la prière. Car elle est le coryphée du chœur des vertus, et c’est encore par elle que nous demandons à Dieu toutes les autres. Celui qui persévère dans la prière, communie à Dieu : il Lui est uni par une consécration mystique, une force spirituelle, une disposition qu’on ne peut exprimer. Car désormais, prenant l’Esprit pour guide et pour soutien, il brûle de la charité du Seigneur et bouillonne de désir, ne pouvant se rassasier de prière. De plus en plus, il s’enflamme de l’amour du bien, et ravive la ferveur de son âme, selon cette parole de l’Ecriture : "Ceux qui me mangent auront encore faim, ceux qui me boivent auront encore soif". Et ailleurs : "Dans mon cœur tu as donné la joie". Et le Seigneur Lui-Même a dit : "Le royaume des cieux est au-dedans de vous"...

"Tel nous est montré le but de la piété ; tel il se propose à ceux qui embrassent "la vie précieuse à Dieu". Cette vie se résume dans la purification de l’âme et dans l’habitation de l’Esprit en elle, à mesure que progressent les œuvres bonnes.
Que chacun de vous prépare donc son âme suivant ces exemples : qu’il l’amène à être remplie de l’amour de Dieu, et qu’il se consacre à la prière et aux jeûnes selon la volonté de Dieu. Qu’il garde présentes à sa mémoire les paroles de l’Apôtre qui nous ordonne : "Priez sans relâche" et "...persévérant dans la prière" et encore celles du Seigneur dans l’Evangile : "... A plus forte raison Dieu vengera ses élus, qui nuit et jour crient vers lui". Car, dit l’Ecriture, "il proposa cette parabole pour enseigner qu’il faut toujours prier, et ne jamais se lasser".

VLADIMIR MOSS - The imperishable word. True Orthodox Christianity in the Twentieth Century. "Le verbe immortel. ILe vrai christianisme orthodoxe au XXème siècle".

V. Moss est une personnalité exceptionnelle de l’Eglise orthodoxe en Angleterre. Zélé pour la foi, il garde une conscience ecclésiologique rigoureuse qui l’amena à quitter, il y a quelques années, l’ERHF, avec la bénédiction de cet homme de Dieu que fut le Père Ignace d’Hébron en Palestine. "The imperishable word" est l’un des premiers livres de V. Moss, dont nous traduirons quelques extraits.

Deux thèmes dominent les recherches de V. Moss : la vénération des saints orthodoxes d’Angleterre, et une admiration immense pour la confession de foi héroïque de l’Eglise des Catacombes en Russie, à laquelle il a consacré plusieurs articles.

A propos de la Russie, V. Moss, se fondant sur un certain nombre de prophéties importantes, pense qu’avant la fin, en Russie, une renaissance de l’Orthodoxie se produira, dont l’âme sera l’Eglise des catacombes. Nous reviendrons, en 1988, année anniversaire du Millénaire de la Russie, sur ce thème.

H.PASDERMADJIAN - Histoire de l’Arménie. Paris, Librairie Samuelian, 1986. 4ème édition.

Dans le centre de Paris, rue Monsieur le Prince, se trouve la librairie H.Samuelian, où l’on peut dénicher les livres les plus rares concernant le Proche Orient, l’Anatolie, ou l’Orient le plus lointain. Les ouvrages sur la Russie, la Grèce, l’Arménie, l’Asie Mineure y sont nombreux. L’histoire troublée et douloureuse de l’Arménie étant trop souvent méconnue en France, la librairie Samuelian a pris en charge l’édition d’un monument important : l’ouvrage du grand professeur H.Pasdermadjian.

Ce livre, qui englobe l’histoire de l’Arménie, depuis les origines jusqu’au traité de Lausanne, apparaît comme un modèle d’érudition et de composition. Apres une description de la géographie du pays -qui en fait une forteresse naturelle, en même temps qu’un pont entre l’Orient et l’Occident, entre l’Europe et l’Asie profonde- l’auteur traite, en huit chapitres, de l’Arménie antique et médiévale, puis, en dix chapitres, de l’Arménie des temps modernes, subsistant sous le joug persan et ottoman, et parvenant, au prix d’innombrables massacres, à reconquérir son identité. A propos de la conversion de l’Arménie au christianisme, survenue vers 300, grâce aux efforts de saint Grégoire l’Illuminateur, l’auteur note : "On peut considérer cet événement comme le point central de l’histoire de ce peuple. C’est en effet par rapport à lui que toute la suite des événements s’est ordonnée" et rappelle que l’Arménie fut le premier grand pays à devenir chrétien.
Toutes les pages que H. Pasdermadjian consacre aux luttes politiques qui, aux dix-neuvième et vingtième siècles, ont eu l’Arménie pour point central, offre le double intérêt de la précision historique et du souffle patriotique ; fils lui-même d’un des héros de la prise de la Banque Ottomane en 1896, l’historien montre avec précision, comment l’attitude des grandes puissances (Angleterre, Russie, France, Allemagne), presque toujours dictée par des motifs d’intérêt à courte vue, et favorable à un empire ottoman moribond, a entraîné les pires catastrophes, d’abord pour les Arméniens, ensuite pour elles-mêmes. Cette partie du livre renferme d’importantes leçons : même un exterminateur comme le « sultan rouge » trouvait des appuis dans les nations européennes dites « chrétiennes ». A propos d’un politique opportuniste comme Disraeli, H. Pasdermadjian fait remarquer que, par toute sa philosophie et son usage de la propagande, il a été le précurseur des dictateurs modernes.

Une carte de l’Arménie vient compléter cette édition, et ajoute à la valeur de cet ouvrage remarquable.

Sur la tragique question du génocide arménien perpétré par les Turcs -génocide qui mérite d’être considéré dans tous les livres d’histoire comme l’une des pages les plus horribles de notre histoire moderne, on peut lire :

TRIBUNAL PERMANENT DES PEUPLES - Le Crime de Silence. Le Génocide des Arméniens. Paris, éditions Flammarion, collection Champs, 1984.

On aimerait aussi qu’une histoire de la catastrophe de l’Asie Mineure en 1924, où les Turcs ont massacré les populations chrétiennes devant l’œil indifférent des Puissances, soit publiée en français.

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