dimanche 9 janvier 2011

La Lumière du Thabor n°11. La Dormition de la Mère de Dieu.

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LA DORMITION DE LA MERE DE DIEU

Commentaire du 1er canon,
en suivant saint Nicodème

" Quand fut achevée la construction du Temple du Seigneur, dit l’Ecriture, Salomon convoqua les Anciens d’Israël à Jérusalem pour faire monter de la cité de David, qui est Sion, l’Arche de l’Alliance du Seigneur. Les prêtres portèrent l’Arche de l’Alliance et la Tente de réunion avec tous les objets sacrés qui y étaient. Le roi Salomon et tout Israël avec lui sacrifièrent devant l‘Arche, moutons et bœufs en quantité innombrable. Les prêtres apportèrent l’Arche de l’Alliance du Seigneur à sa place, au Débir du Temple, c’est-à-dire au Saint des Saints, sous les ailes des chérubins. En effet, les Chérubins étendaient leurs ailes au-dessus de l’emplacement de l’Arche et taisaient un abri au-dessus de l’Arche et de ses barres …" (3 Rois 8, 1).

Si, pour transporter l’Arche symbolique et sans âme dans le Saint des Saints du Temple, s’assemblèrent, en grande pompe et en grand cortège, le roi Salomon et son peuple, il était plus que juste qu’aujourd’hui s’assemblassent toutes les multi­tudes des orthodoxes pour fêter, dans l’allégresse, la vénérable Dormition de la Mère de Dieu, l’Arche vraie et vivante de Dieu, et pour célébrer solen­nellement sa Métastase sainte et porteuse de vie. Car, aujourd’hui, Celui qui dispense la sagesse, le nouveau Salomon et Roi de la paix, notre Seigneur Jésus-Christ, le Fils de la Toujours Vierge Marie, a voulu prendre sa Mère Toute-Sainte et la trans­férer dans le Saint des Saints du ciel, non fait de main d’homme, afin que là où le Fils règne, règne aussi avec Lui Celle qui l’a enfanté. Et si là où est notre Maître, là aussi est son serviteur, comme Lui-même l’a dit, sans mentir : "Si quelqu’un me sert, qu’il me suive, et là où je suis, là sera aussi mon serviteur. " (Jean 12, 26).

Il était donc juste, mille fois juste, que le Christ reçût sa Mère Toute Sainte, dans son royaume pour régner avec Lui éternellement. Comme le Christ n’est pas entré dans un sanctuaire fait de main d’homme mais dans le ciel, pour se présenter devant Dieu, - c’est Paul qui l’a dit aux Hébreux : "Car ce n’est pas dans un sanctuaire fait de main d’homme, image du véritable, que le Christ est entré, mais dans le ciel même, afin de se tenir désormais, pour nous, présent devant la face de Dieu... " 9, 24 - de même, sa Mère devait entrer dans le ciel pour demeurer .inséparable de son Fils.

Frères, nous aussi, fêtons et célébrons la fête, la solennité brillante et universelle de la Mère de Dieu ; car si pour saint Jean Chrysostome, toutes les fêtes de saints ressemblent aux étoiles, il est certain que la présente fête ressemble à la pleine lune lumineuse et argentée qui dissipe l’obscurité de la nuit et éclaire le cercle de la terre. Tous, sans exception, chantons la Mère de notre Dieu : patriarches, évêques, prêtres, rois et princes et tous les juges de la terre, hommes et femmes, jeunes hommes et vierges, vieillards et enfants ; en ce jour, tous les chœurs angéliques entourent la couche sacrée de la Vierge ; les Trônes supérieurs, Chérubins et Séraphins, l’ordre intermédiaire des Seigneuries, des Puissances et des Dominations et l’ordre dernier, Principautés, Anges, Archanges, les uns précédant, les autres suivant, tous formant le cortège de Celle qui monte au ciel.

Et le Roi Suprême lui-même, le Fils Unique et Verbe de Dieu et Dieu, le Fils selon la chair de la Vierge, est Lui-même invisiblement présent aux funérailles de sa Mère bien-aimée. Il reçoit dans ses mains très pures son âme toute lumineuse, et dans trois jours, II ressuscitera son Corps qui a porté la Vie, afin de la recevoir tout entière dans les cieux.

Et nous, nous suivrons saint Nicodème l’Athonite, nous irons avec lui au Banquet dont parle l’Evangile, Banquet magnifique et royal, où sont servis les mets les plus fins et les plus savoureux de la Théologie Orthodoxe, ce mystère caché, inaccessible aux méthodes académiques quelles qu’elles soient, ce don excellent et parfait qui vient d’En-Haut, du Père des Lumières et que seuls les Pères de l’Eglise, qui par le jeûne et la prière… ont reçu la grâce, connaissent, et parmi eux, le divin Cosma le Mélode, l’auteur de ce canon de la Dormition et les Pères cités dans le commentaire qui suit. Nous avons donné le commentaire de tous les tropaires du premier Canon et les hirmis des Odes I et IX qui ont trait à la fête.

"Sauveur, fortifie mon esprit, car j’ose célébrer le rempart du monde, Ta Mère toute-pure. Donne de la force à mes paroles et du poids à mes pensées, car tu combles les demandes faites avec foi. Donne-moi une langue, des expressions, des pensées dont je n’aie pas à rougir, car tout don d’illumination vient de Toi, l’Illuminateur qui as habité le sein toujours vierge". Ikos de la fête.

ooo

ODE I

HIRMOS

PAREE DE LA GLOIRE DIVINE,
TA MEMOIRE ILLUSTRE ET SACREE
Ô VIERGE,
A REUNI DANS LA JOIE TOUS LES FIDELES.
AVEC MARIAM EN TÊTE,
CHOEURS ET TAMBOURINS CHANTENT TON FILS UNIQUE
QUI S’EST COUVERT DE GLOIRE !

Par cet hirmos, le Mélode s’adresse à la Mère de Dieu et lui dit : "Mère de Dieu toujours Vierge, la mémoire illustre et sacrée de ta Dormition, parée, ornée, resplendit dans la gloire divine. N’est-ce pas toi, en effet, que le prophète Ezéchiel a vue dans la gloire de Dieu ? "Et voici que la gloire du Seigneur emplissait la maison". (Ezéchiel 43, 5).

Cette fête de la Mère de Dieu REUNIT en ce jour, DANS LA JOIE, TOUS LES FIDELES chrétiens. Si la mémoire de ceux qui furent simplement des Justes est, selon Salomon, célébrée par les peuples dans la joie, "quand les Justes sont célébrés, les peuples sont en liesse", (Proverbes 29, 2), combien plus doivent être en liesse les peuples qui célèbrent la Dormition de la Mère de Dieu plus sainte que tous les saints et pour les siècles des siècles !

Après avoir traversé, à pieds secs, la Mer Rouge, les fils d’Israël se divisèrent en deux chœurs, d’un côté les hommes avec Moyse à leur tête, et de l’autre, les femmes avec Mariam. "Mariam la prophétesse, sœur d’Aaron, saisit un tambourin, et toutes les femmes la suivirent, avec des tambou­rins, formant des choeurs de danse. Et Mariam leur fit reprendre en chœur : chantons le Seigneur qui s’est couvert de gloire" (Exode 15,20).

De même, les chrétiens, réunis aujourd’hui pour célébrer ta mémoire, ô Mère de Dieu, chantent en des hymnes spirituelles ton Fils Unique qui s’est t’ouvert de gloire.

Si le Mélode ne mentionne pas ici Moyse le chef du chœur des hommes, et ne fait pas allusion au passage de la Mer Rouge, comme l’exige la règle de la composition des Canons, mais parle de Mariam, le chef du chœur des femmes, c’est pour montrer que celle qui est célébrée en cette fête est une femme qui s’appelle aussi Mariam, nom qui signifie maîtresse. Mariam, la sœur de Moyse, était la figure de la virginité de Marie la Mère de Dieu, comme l’explique saint Grégoire de Nysse, l’une et l’autre étant restées vierges. En accord avec Cosma notre Mélode, saint Jean Damascène dit : "Avec Mariam la prophétesse, ô âmes jeunes et vierges, dansons avec des tambourins, mortifiant nos membres terrestres que symbolisent les tambourins mystiques" (Deuxième Homélie sur la Dormition).

Et André de Crète : "Formez un chœur et chantez avec des cymbales, faites retentir vos cantiques comme Mariam, avec vos tambourins, et prenez la tête du choeur des vierges..."

Pour la tradition ascétique, le tambourin, fait de la peau d’un animal mort, symbolise la mortification des membres du corps terrestre. Cf .La Lumière du Thabor N°7 , pages 36 sq.

Tropaire

"LA MILICE DES ANGES IMMATERIELS
"PRENAIT SOIN, DANS SION, DE TON CORPS DIVIN,
"QUAND ARRIVA SOUDAIN, DES CONFINS DE LA TERRE,
"LA FOULE DES APOTRES QUI L’ENTOURA.
"AVEC EUX, Ô VIERGE TOUTE-PURE,
"NOUS GLORIFIONS TA MEMOIRE SACREE.

Et à nouveau, Cosma s’adresse à la Mère de Dieu et lui dit : « Ô Vierge Mère de Dieu, la milice céleste des anges immatériels prenait soin et servait ton corps divin, dans la cité de Sion, quand tu remis ton âme plus que sainte entre les mains de ton Fils et Dieu". Dans sa Troisième Homélie sur la Dormition, saint Jean Damascène dit, lui aussi : "Les anges immatériels et invisibles prirent soin du Corps de la Mère de Dieu, Corps qui pour avoir reçu Dieu, devint principe de vie et entourèrent, comme servants, la Mère du Maître. Et la foule des Apôtres, soudainement rassemblée des confins du monde où ils prêchaient l’Evangile, se trouvèrent tous réunis".


Dans sa Deuxième Homélie il célèbre cette réunion des Apôtres : "Les Apôtres dispersés par toute la terre, pour prêcher par les langues diverses et harmonieuses de l’Esprit et prendre dans leurs filets les hommes... Sur un ordre divin, la nuée, telle un filet, les amena des confins de la terre à Jérusalem... Et ceux qui avaient vu le Verbe et l’avaient servi, s’occupèrent de sa Mère, comme il se devait, et puisèrent en elle leur part de la riche et précieuse bénédiction. Car, qui doutera qu’Elle est la source de la bénédiction, le jaillissement de tous les biens ?" Juvénal, le patriarche de Jérusalem, lors du IVème Concile Œcuménique de Chalcédoine en 451, interrogé par l’impératrice Pulchérie, sur le Corps de la Mère de Dieu, répondit : "Tous les saints Apôtres, qui s’étaient partagé l’univers, pour y prêcher le Salut aux Nations, furent rassemblés en un clin d’œil à Jérusalem. Le Mélode termine son tropaire, en associant aux anges et aux apôtres, les chrétiens, qui eux aussi glorifient la mémoire vénérable de sa Dormition qui dispense la vie, car par l’intercession de la Vierge, nous jouissons de tous les biens divins…Avec eux, ô Vierge toute Pure, nous glorifions ta mémoire sacrée.

Tropaire

"TU AS DEPASSE LA NATURE,
"Ô INNOCENTE QUI ENFANTAS DIEU,
"ET TU AS REMPORTE SUR ELLE
"TOUS LES PRIX CE LA VICTOIRE,
"MAINTENANT, A L’IMITATION DE TON FILS ET CREATEUR,
"TU TE SOUMETS A LA NAURE,
"TU MEURS ET RESSUSCITES,
"POUR VIVRE AVEC TON FLS ETERNELLEMENT.

Contemplant ave son œil spirituel, les prodiges et les merveilles surnaturels de la Mère de Dieu, Cosma lui dit, dans ce tropaire : "Ô Toute-innocente, d’âme, d’esprit et de corps, toi seule as atteint sur la terre, la cime de l’innocence e de la pureté ; toi seule as conçu et mis au monde le Verbe Dieu ; tu as ainsi remporté bon nombre de grands prix et élevé des trophées de victoire sur la nature commune des hommes. En effet, tu as vaincu la nature en concevant sans semence ; tu as vaincu la nature, en portant, sans fatigue, dans ton sein, le Verbe pendant neuf mois : l’Enfant et le volume de son Corps, de l’Hypostase de la Personne divine, ne t’ont imposé aucune fatigue. Tu as vaincu la nature en mettant au monde le Verbe Dieu, sans douleur, sans accouchement, sans corruption ; le Verbe Dieu, né de toi, gui t’a trouvée Vierge, t’a laissée Vierge à jamais. Tu es la porte fermée, contemplée jadis par le Prophète : "Cette porte sera fermée, elle ne s’ouvrira point et personne n’y passera ; car le Seigneur, le Dieu d’Israël, est entré par là. Elle restera fermée" (Ezéchiel 44, 2)

Par les trophées et les victoires remportés sur la nature, d’abord dans ta vie, ensuite dans ta mort, tu as imité ton Créateur et Dieu.
-- Comment ?
-- Comme Lui s’est soumis à la mort, toi aussi Mère de Dieu, tu t’es soumise à la mort. Comme Lui, en mourant volontairement, s’est soumis aux lois de la nature, pour ressusciter après trois jours du tombeau, toi aussi, ô Toute-Sainte, en mourant, tu t’es soumise aux lois de la nature pour ressusciter après trois jours.

Après ta mort, ton âme toute-sainte devait s’unir, de nouveau, à ton Corps très pur, être ressuscitée, et après ta résurrection, monter avec ton Corps au ciel, où maintenant, tu partages l’éternité avec ton Fils, glorifiée avec Lui à jamais. Morte et ressuscitée surnaturellement, ô Vierge, tu n’as pas été vaincue par la nature, mais à nouveau, t l’as vaincue, remporté sur elle la victoire et dressé des trophées. Ainsi, ta mort est devenue vie, ta nécrose est devenue résurrection, ta sépulture est devenue cause de vie de résurrection. Comme ton fils fut surnaturel dans sa nature, ainsi que l’a fort bien dit Hiérothée : "Je dirais que ce qu’il y a de plus nouveau dans le nouveau, c’est Jésus qui a été surnaturel dans les choses de la nature" ; toi aussi, Mère de Dieu, en te soumettant en tant que mortelle, aux lois de la nature, tu as été surnaturelle, en tant que Mère de Dieu. Avec Cosma, beaucoup de saints et des théologiens affirment la Résurrection de la Mère de Dieu.

Saint Jean Damascène, dans la troisième Homélie sur la Dormition, écrit : "Comme l’or se purifie dans le creuset, de même, la Toute-Sainte devait déposer, dans le creuset de la mort, la matière terrestre et opaque de la mortalité, pour ressusciter ensuite du tombeau, dans sa chair incorruptible et pure, scintillante dans la splendeur incorruptible. Aujourd’hui, elle reçoit le commencement d’une seconde existence (la résurrection) de Celui qui lui avait donné la première… Entrons dans le tombeau (de la Vierge) et apprenons l’étrange mystère : son Corps s’est levé, s’est élevé, est monté au ciel et se trouve près de son Fils, au-dessus de tous les ordres angéliques. Rien, en vérité, ne sépare la Mère de son Fils".

Et plus loin : "Ainsi le Corps très saint déposé dans le tombeau glorieux et merveilleux, devait être élevé, après trois jours, dans les lieux célestes", et plus loin encore : "Comme le Corps saint et pur que le Verbe Dieu a pris d’elle et a uni à son Hypostase est ressuscité le troisième jour du tombeau, de même, elle aussi, devait être transférée du tombeau vers un autre port, près de son Fils..."

Saint Grégoire Palamas, dans son Homélie sur la Dormition, parle avec clarté et netteté de cet événement : "Elle seule se trouve maintenant, avec son corps glorifié par Dieu, près de son Fils, dan les c:ieux... Car si l’âme qui, dès ce monde, possède la grâce de Dieu, monte au ciel quand elle quitte ce monde... comment le Corps gui a reçu en lui le Fils Unique et prééternel de Dieu, la source inépuisable de la grâce et qui l’a mis au monde, ne serait-il monté au ciel... C’est pourquoi le Corps qui a enfanté est glorifié avec son Fruit, d’une gloire toute divine : avec le Christ déjà ressuscité après trois jours, est ressuscitée l’Arche de sa Sainteté, selon le Cantique prophétique (psaume 131,1). Pour ses disciples, la preuve de sa Résurrection des morts, furent les linceuls et les linges qui seuls restèrent dans le tombeau et furent trouvés par ceux qui étaient venus la chercher : comme pour son Fils et Maître, il ne lui était pas nécessaire de demeurer davantage sur la terre. Aussi est-elle immédiatement montée du tombeau dans les cieux qui sont au-dessus des cieux..."

Le divin Marc d’Ephèse, dans ses Canons sur la Dormition, dans un tropaire de l’Ode IX du ton 7 chante : "Qu’elle soit magnifiée par nos acclamations et nos cantiques, la Toute Pure. / Qu’elle soit dignement proclamée Toute-Bienheureuse, / car elle est morte puis ressuscitée comme Mère du Seigneur, / confirmant ainsi la résurrection universelle que nous espérons tous" ; et dans un autre tropaire :


"La Mère de la vie accepte la mort.
Déposée dans le sépulcre,
après trois jours, elle ressuscite en gloire,
pour régner avec son Fils
et. prier pour le pardon de nos fautes".

ODE III

Tropaire

"TE SACHANT FEMME MORTELLE
"ET SURNATURELLEMENT MERE DE DIEU,
"VOYANT EN TOI LE TABERNACLE DE LA DIVINITE
"RESPLENDISSANT DANS LA GLOIRE,
"LES APOTRES TE TOUCHERENT, O TOUTE-PURE,
"DE LEURS MAINS, EN TREMBLANT.

Matérielle dans sa nature, notre glorieuse Souveraine pouvait, certes, être facilement touchée, mais en tant que Mère de Dieu, ayant dépassé les lois de la nature, elle était difficilement touchable, du moins par le grand nombre. Instruit de cela, notre divin Mélode se tourne encore vers la Mère de Dieu pour lui dire : "Ô Mère de Dieu Toute-Pure, Salomon a dit de toi, dans son Cantique : toute belle est ma bien-aimée, il n’y a pas de défaut en toi". (4, 7). Les glorieux Apôtres et disciples de ton Fils, te sachant femme mortelle, selon la nature, tributaire de la mort, s’approchaient avec confiance et assurance de ta couche mortuaire où reposait ton Corps très pur et sacré. Ils savaient aussi que, comme vraie Mère du Fils Unique et Verbe de Dieu par qui tout a été fait, tu étais au-dessus des bornes de la nature, et n’osaient pas pour cela, craintifs, t’approcher. Mais unissant l’audace à la crainte, ils s’approchèrent quand même et touchèrent ton Corps qui reçut Dieu, pour l’ensevelir ; ils firent cela non pas avec des mains profanes, mais hésitantes, tremblantes et craintives ; car ils le voyaient scintiller de toutes parts, de la gloire et de la splendeur divines, tel un autre soleil éclatant.

Quand le soleil se couche et disparaît à l’horizon occidental, il laisse la lueur de ses rayons, pour preuve de sa présence. De même, l’âme de la Vierge toute-sainte, plus éclatante et plus brillante que le soleil, bien que sortie du Corps qui a porté la Lumière, a imprégné de son rayonnement ce Corps mort, qui emplissait de joie et de beauté les yeux des bienheureux Apôtres. Cette gloire du Corps de la Vierge, Ezéchiel, le plus voyant des prophètes, l’a contemplée et énigmatiquement annoncée : "Et voici que la gloire du Dieu d’Israël arrivait du côté de l’Orient (c’est la Vierge) et la terre (le Corps de la Vierge) resplendissait tout autour de sa gloire". (Ezéchiel 43, 2). Procope applique à la Toute-Sainte la prophétie de Job 28, 5 : "La terre d’où sort le pain. En-dessous, elle est retournée comme par le feu, elle est le lieu des pierres de saphir". Il s’agit, dit Procope, du Corps pur et sans tache de la Vierge qui devait mettre au monde Dieu qui a donné la Loi.

Si le visage de Moyse a été grandement glorifié au point que les fils d’Israël ne pouvaient le regarder, si le visage d’Etienne l’archidiacre a brillé comme la face d’ un ange, si le visage de saint Sisoé a resplendi dans la mort comme le soleil, quelles ont dû être la gloire et la splendeur de la Lumière du Corps de la Mère de Dieu, même après la mort, du Corps qui avait conçu et mis au monde le Soleil de Justice, le Verbe et Dieu suprême du Père ? André de Crète, expliquant les paroles du divin Denys l’Aréopagite, à propos de la Mère de Dieu : "Puis après avoir contemplé ce spectacle (la Mère de Dieu morte), tous les hiérarques crurent bon de la louanger", il dit : "Quelle était cette vision ? Quelle était cette beauté incomparable ? Une vision lumineuse et belle qui s’offrait alors à ces théoleptes. Puisse mon discours être à la mesure du rayonnement de la Lumière divine dans laquelle baignait le Corps, principe de vie et tout lumineux de la Mère de Dieu…." 

Tropaire

"LA JUSTICE DE DIEU INTERVINT
"ET COUPA LES MAINS SACRILEGES DU PROFANATEUR.
"ELLE SAUVA L’HONNEUR DU A L’ARCHE VIVANTE,
"LA GLOIRE DE LA DIVINITE
"EN QUI LE VERBE S’EST FAIT CHAIR.

Ce tropaire évoque le miracle qui se fit, quand les Apôtres portaient la couche mortuaire du Corps de la Vierge qui avait reçu Dieu, pour le déposer dans le sépulcre. Ce miracle est rapporté par bon nombre d’écrivains ecclésiastiques, comme Maurice, l’auteur des Synaxaires et Diacre de la Grande Eglise de Sainte Sophie de Constantinople ; le Commentateur Anonyme des Canons et saint Jean Damascène dans sa Deuxième Homélie sur la Dormition, racontent que lorsque les Apôtres qui portaient le Corps bienheureux de la Mère de Dieu, accompagnés de Juifs pieux et reconnaissants, descendaient de la Montagne de Sion, un impie, excité par le Diable contre Dieu, saisit de ses deux mains la couche, et tenta de la renverse à terre ; son audace fut punie sur le champ. Le Commentateur Anonyme des Canons dit que les mains coupées de l’impie restèrent accrochées au lit mortuaire. Le miracle le convertit aussitôt. Il demanda aux Apôtres de prier pour lui .Sur l’ordre de Dieu, il plaça ses avant-bras sur ses mains coupées et, ô miracle, elles furent réunies.

C’est ce miracle que notre Mélode rapporte en disant dans un tropaire : LA JUSTICE DE DIEU INTERVINT ET COUPA LES MAINS SACRILEGES DU PROFANATEUR IMPIE. La tradition iconographique a noté ce miracle et on voit, à part quelques rares exceptions, sur les Icônes de la Dormition, l’Ange coupant avec son glaive les mains de l’impie qui restent accrochées au lit mortuaire. Dieu agit ainsi pour sauver l’honneur et la gloire de sa Divinité et pour que le Corps glorieux de la Mère de Dieu apparût plus vénérable, faisant de tels miracles. Et Jean Damascène le célèbre en disant : "Le Corps est porté par les mains des Apôtres et le Roi des rois le recouvre de l’éclat de sa divinité invisible".

Cette histoire de l’impie rappelle celle de l’Arche de l’Ancien Testament où Dieu fait mourir Uzza qui, étant indigne, tendit la main et toucha l’Arche de l’Alliance : "Et la colère du Seigneur s’enflamma contre Uzza et Dieu le frappa sur place à cause de sa faute. Uzza mourut là, près de l’Arche de Dieu…" (2 Rois 6, 7). L’Arche était portée par un char traîné par des bœufs qui la faisaient pencher mais elle ne tomba pas. "Uzza, dit encore l’Ecriture, marchait à côté de l’Arche de Dieu... Comme on arrivait à l’aire de Nakon, Uzza étendit la main vers l’Arche de Dieu et la retint, car les boeufs la faisaient verser". (2 Rois 6, 6).

Si Dieu a fait mourir Uzza, pour avoir seulement osé porter la main sur l’Arche, -dans un but louable, pour l’empêcher d’être renversée- combien plus devait être châtié l’impie audacieux et sacrilège qui se jeta contre la couche de la Mère de Dieu, non pour l’empêcher de verser, mais tout au contraire, pour la verser à terre ? C’est donc en toute justice que Dieu a châtié l’audacieux, afin de sauvegarder le respect et l’honneur dus à l’Arche Vivante de la Toute-Pure Mère de Dieu, dans le sein de laquelle son Fils et Verbe s’est fait Homme parfait : "Et le Verbe s’est fait chair". (Jean 1,14).

Le Mélode a emprunté les paroles de son tropaire à Grégoire le Théologien : "Je connais un certain Uzza qui, pour avoir seulement osé toucher l’Arche que malmenaient les bœufs périt, afin que fût sauvegardé l’honneur dû à l’Arche de Dieu". Discours Théologique I.

Selon Josèphe l’historien Juif, Dieu fit périr Uzza comme sacrilège pour avoir tendu la main et touché l’Arche sacrée, ce qui était réservé aux prêtres, mais, pour Théodoret, Uzza était prêtre et aurait dû porter lui-même avec les autres prêtres l’Arche, sur les épaules, et non pas en charger des bœufs. Dans le livre des Paralipomènes, il est écrit : "Les fils des Lévites portèrent l’Arche de Dieu sur leurs épaules avec des barres, comme Moyse l’avait ordonné d’après la parole du Seigneur". Paralipomènes 15, 15. Bien que les prêtres fussent nombreux, seul Uzza périt, parce que, toujours selon Procope, c’est lui qui aurait conseillé de placer l’Arche sur un chariot tiré par des bœufs.

ODE IV

Tropaire

"PEUPLES, VOYEZ ET ADMIREZ
"LA MONTAGNE SAINTE DE DIEU,
"VISIBLE A TOUS,
"S’ELEVE AU-DESSUS DES COLLINES CELESTES !
"CIEL TERRESTRE, ELLE MONTE
"HABITER LA TERRE INCORRUPTIBLE DU CIEL

Ce tropaire est composé d’emprunts faits au prophète Isaïe :
"Il adviendra dans les derniers jours
"que la montagne du Seigneur paraîtra
"et que la maison du Seigneur sera fondée
"sur le sommet des montagnes,
"qu’elle s’élèvera par-dessus les collines
"et que toutes les nations y afflueront" (Isaïe 2, 2) ;

et au prophète Michée qui dit à peu près la même chose : "Il adviendra dans les derniers jours, que la montagne du Seigneur paraîtra, prête sur le sommet des montagnes, qu’elle s’élèvera par-dessus les collines, et les peuples s’y rendront". (Michée 4, 1.)

La montagne c’est, selon la lettre, la ville de Jérusalem et allégoriquement, la Mère de Dieu.
Le Mélode s’adresse donc aux fidèles chrétiens réunis pour la fête de la Dormition et les exhorte en disant : Levez les yeux de vos âmes et vous verrez, spirituellement, et vous serez émerveillés par un spectacle étrange. Qui ne serait pas étonné de voir une montagne monter par-dessus une autre montagne ? Qui ne s’étonnera pas, aujourd’hui, de voir exaltée la MONTAGNE SAINTE DE DIEU, VISIBLE A TOUS, la Mère de Dieu comparée à la montagne qui est haute, stable, non cultivée et ombragée par des arbres touffus ? Elle S’ELEVE, aujourd’hui AU-DESSUS DE TOUTES LES MONTAGNES, selon Isaïe.

-- Quelles sont ces montagnes ?
-- Ce sont les saintes milices angéliques, selon l’explication anagogique de Grégoire le Théologien qui en parle dans son Homélie sur le Baptême.

Donc, la Mère de Dieu avec son Corps, telle une montagne vivante, monte aujourd’hui au-dessus de toutes les milices, de tous les chœurs angéliques, des Trônes, des Chérubins et des Séraphins eux-mêmes, qui se tiennent dans la proximité de Dieu et devient ainsi incomparablement plus vénérable et plus glorieuse. Comme les montagnes qui dépassent en hauteur les collines, la Mère de Dieu, Montagne spirituelle, apparaît aujourd’hui, dans sa glorieuse résurrection, son transfert et son ascension, supérieure et au-dessus de toutes les collines célestes, que sont les anges incorporels. Dans certains manuscrits de ce Canon, on lit « Demeures » au lieu de « Montagnes ». « Demeure » alors a le même sens que « Montagne », parce que la Mère de Dieu est montée au-dessus de toutes les demeures des Justes, seule à être assise à la droite du Fils, comme Mère et Reine. Mais le terme de « Montagne » est plus adéquat, parce que conforme aux prophéties d’Isaïe et de Michée.

Le Mélode dit encore : "CIEL TERRESTRE" ; pour avoir enfanté Dieu, la Mère de Dieu est un "CIEL", et "TERRESTRE" à cause de son Corps matériel. Aujourd’hui, elle "HABITE LA TERRE INCORRUPTIBLE ET CELESTE" sue foulent les pieds de ceux qui sont "DOUX" selon l’Ecriture : Bienheureux les doux, car ils hériteront la terre". (Mattieu 5, 5).

En accord avec ce tropaire, Jean Damascène célèbre la Dormition, disant dans sa Deuxième homélie sur cette fête : "Aujourd’hui, la Vierge qui a été vraiment un CIEL vivant, va habiter les demeures célestes. Et c’est peu dire que l’appeler Ciel, car celui qui possède la connaissance l’élèvera bien au-dessus de tous les cieux".

Tropaire

"Ô INNOCENTE, TA MORT A ETE LE PASSAGE
"DANS LA VIE ETERNELLE ET SUPERIEURE
"D’ICI-BAS, ELLE T’A TRANSPORTEE
"DANS LA VIE VRAIMENT DIVINE ET IMMUABLE
"OU TU CONTEMPLE, DANS LA JOIE,
"TON FILS ET SEIGNEUR.

Une fois de plus, le Mélode s’adresse à la Mère de Dieu : "Ô vase de toute innocence, dit-il, ô Mère de Dieu, tu es comme une échelle qui s’élève de bas en haut, un pont qui fait passer d’un lieu à un autre. Ainsi, ta mort a été un passage, une échelle, un pont pour la vie sans fin et supérieure, elle t’a transférée de cette vie éphémère et terrestre, à la vie réellement divine et sans fin".

Saint Jean Damascène, dans sa Deuxième Homélie sur la Dormition, disait : "Tu es le pont qui mène à la Vie et l’échelle qui fait monter au ciel ; ta mort t’a procuré l’immortalité" ; et dans sa Première Homélie : "Nous n’appellerons pas mort ton transfert sacré mais dormition ou départ ou encore séjour dans un autre pays. Tu as quitté ton corps pour aller vers ce qu’il y a de meilleur".

La mort ne t’a-t-elle pas fait passer de la mer des choses d’ici-bas au ciel, pour y contempler dans la joie et l’allégresse du cœur ton Fils et Dieu, pour y être glorifiée avec Lui dans l’éternité en tant que sa Mère, dans la béatitude douce et indescriptible, dans la Lumière indicible, dans les biens ineffables, les choses "que l’œil n’a point vues, que l’oreille n’a point entendues et qui ne sont pas montées au cœur de l’homme". (I Corinthiens 2, 9).

Et pour David, tu as été, jusqu’à ce jour, quelque peu inférieure aux anges, par la mortalité de ton Corps ; aujourd’hui, par cette mortalité et ta mort, tu es montée au-dessus de tous les ordres angéliques. C’est ainsi que te célèbre Grégoire Palamas : "Aujourd’hui nous fêtons la Dormition ou Métastase de celle qui fut quelque peu inférieure aux anges, mais qui dans sa proximité avec Dieu, a dépassé à un degré incomparablement supérieur les anges, les archanges et toutes les puissances hypercosmiques... ". (Homélie 37).

Que déduire de cela ? Que ta mort ne doit pas être appelée mort mais bien vie immortelle et éternelle. La mémoire de ta mort n’a rien d’affligeant ni de triste, elle est joyeuse et allègre. Le même Grégoire dit encore : "Sa mort a été porteuse de la vie, elle l’a transférée dans la vie céleste et éternelle, et la mémoire de cette mort est une fête universelle et pleine de joie". Et Jean Damascène, dans sa troisième Homélie : "La mort ne t’a pas faite bienheureuse, ô Mère de Dieu, c’est toi qui l’as embellie, en détruisant sa tristesse et en la changeant en joie".

Tropaire

"LES PORTES CELESTES S’OUVRIRENT,
"LES ANGES CHANTERENT
"ET LE CHRIST ACCUEILLIT LE TRESOR
"MATERNEL ET VIRGINAL.
"LES CHERUBINS SE SOUMIRENT A TOI
"DANS L’ALLEGRESSE
"ET LES SERAPHINS TE GLORIFIERENT DANS LA JOIE.

Le début de ce tropaire a été emprunté au Psaume 23, 7 de David : "Princes, élevez vos portes, élevez-vous, portes éternelles ! Le Roi de gloire va faire son entrée !" Dans ce psaume, le Roi-Prophète fait allusion à l’Ascension du Seigneur, où les anges inférieurs ordonnent aux supérieurs, d’ouvrir les portes des cieux, pour que le Christ, le Roi de gloire, entre. Ici, le Mélode applique ce psaume à l’Ascension corporelle de la Mère de Dieu ; les portes des cieux s’ouvrent pour laisser passer la Mère de Dieu, la Reine ; les anges la louangèrent en la voyant monter corporellement aux cieux.
-- Quelle hymne ont-ils chantée ?
-- Ecoutons Jean Damascène nous le dire dans sa Première Homélie : "Les puissances des cieux allèrent à sa rencontre avec des hymnes sacrées, des cérémonies saintes en disant : Quelle est celle qui monte, vêtue de blanc, qui apparaît comme l’aurore, belle comme la lune, brillante comme le soleil ? Ô combien tu es belle, combien tu es douce ! Tu es la fleur des champs, le lys dans la vallée ; c’est pourquoi les jeunes filles t’aiment…Le Roi t’a emmenée dans sa chambre ; tous les Pouvoirs montent la garde, les Principautés te bénissent, les Trônes te chantent, les Chérubins émerveillés, les Séraphins en liesse glorifient la Mère, selon la nature humaine, de leur Seigneur. Le Christ, le Fils Unique, reçut avec joie dans les cieux, sa Mère, le joyau de la virginité, le trésor le plus précieux de tous les trésors". Et il ajoute les paroles pleines de grâce et de douceur adressées par la Mère bien-aimée à son Fils bien-aimé, au moment de lui remettre son esprit : "Entre tes mains, mon Enfant, je remets mon esprit. Accueille mon âme que tu as gardée sans tache. A toi, je remets mon Corps, et non à la terre ; garde-le intact ; il a été ta demeure que tu as laissée vierge en naissant. Prends-moi près de toi, afin que là où tu es, toi l’Enfant de mes entrailles, je sois aussi. Je me hâte d’aller à toi qui vint à moi sans te séparer du Père..."

Le même a noté, dans sa Deuxième Homélie, les paroles du Fils bien-aimé adressées à sa Mère bénie : "Mère bénie, viens à ton lieu de repos. Lève-toi, mon aimée, ma belle parmi les femmes et viens. Car voici, l’hiver est passé. Le temps de chanter est arrivé. Tu es toute belle mon amie et il n’y a point en toi de défaut. Tes parfums ont une odeur suave".

Puis le Mélode termine son tropaire en disant : LES CHERUBINS SE SOUMIRENT A TOI DANS L’ALLEGRESSE. Cette soumission n’est pas une résignation, mais une cause d’allégresse ; soumission et humilité étaient pour eux gloire et exaltation.

LES SERAPHINS LA GLORIFIERENT, eux aussi, DANS LA JOIE, comme ils le font pour leur Dieu et Créateur.
-- Pourquoi ?
-- Parce qu’ils savent que toi seule, ô Vierge, tu es la frontière entre le Créateur et les créatures, que toi seule as reçu la plénitude de tous les charismes divins que tu distribues aux anges et aux hommes selon la mesure de leur pureté et de leur amour pour toi ; plus ils mettent leur joie à te glorifier, plus ils reçoivent, par toi, les illuminations divines ; plus ils t’aiment, plus ils participent aux charismes de Dieu.

Le divin Grégoire Palamas, la lumière de Thessalonique proclame tout haut : "Elle seule est la frontière entre la nature créée et incréée, nul ne va à Dieu que par elle et par le Médiateur qu’elle a mis au monde ; tout don de Dieu ne vient que par elle aux anges et aux hommes". Homélie sur l’Entrée de la Vierge au Temple.

Dans les "Princes qui élèvent leurs portes" du psaume 23, Grégoire le Théologien voit les puissances angéliques qui reçoivent l’ordre de s’élever, de devenir plus hautes, pour laisser passer le Christ qui monte au ciel. (Homélie sur la Pâque). On peut entendre ici, par PORTES, les puissances célestes qui s’élevèrent, s’ouvrirent, pour contenir davantage le Mystère de la Vierge montant au ciel. On retrouve la même explication au Doxastikon des vêpres de la fête où les anges inférieurs disent à ceux gui sont au-dessus :
"ELLES S’AVANCERENT, INVISIBLES,
AU-DESSUS DE LA TERRE
ET CRIERENT AUX PUISSANCES SUPERIEURES :
VOICI QUE S’APPROCHE LA FILLE DE DIEU,
LA REINE DE L’UNIVERS :
OUVREZ LARGES VOS PORTES
ET ACCUEILLEZ LA MERE DE LA LUMIERE..."

ODE V

Tropaire

"LE PEUPLE DES APOTRES,
"PORTE COMME PAR UNE NUEE,
"SE RASSEMBLA A SION, DES CONFINS DE LA TERRE,
"POUR TE SERVIR, Ô VIERGE.
"TU ES LA NUEE LEGERE D’OU LE DIEU SUPREME,
"LE SOLEIL DE JUSTICE,
"A BRILLE SUR TOUS CEUX QUI ETAIENT DANS LES"TENEBRES
"ET DANS L’OBSCURITE.

Dans ce tropaire, il est question du miracle gui eut lieu lors de la Dormition de la Mère de Dieu où les Apôtres furent amenés par des nuées à Sion.

"Ô Marie toujours Vierge, dit notre Mélode, la foule des Apôtres sacrés, assise "COMME" sur une nuée, fut amenée des confins de la terre à Jérusalem. Cosma emploie l’adverbe "COMME" dans le sens de similitude, parce que les nuées qui portèrent les Apôtres ressemblaient à des nuées, sans l’être en réalité ; elles n’étaient pas des nuages formés de vapeur et d’évaporations naturelles ; elles étaient surnaturelles, formées sur l’ordre de Dieu, peut-être même étaient-elles les puissances angéliques elles-mêmes.

Le Mélode pale d’une NUEE au singulier et non de nuées au pluriel. Dans la Troisième Homélie sur la Dormition, saint Jean Damascène emploie le même : "Que se prépare la nuée universelle et supra Céleste, et que les ailes des vents amènent des confins de le terre les Apôtres à Sion. Quels sont-ils ceux qui, telles des nuées et tels des aigles, volent vers cette dépouille (le Corps mort de la Mère de Dieu), la cause de la Résurrection de tous, pour servir la Mère de Dieu ?" S’il dit NUEE au singulier, c’est que ces nombreuses nuées étaient unies entre elles, et paraissaient n’en former qu’une.

La multitude des Apôtres s’est donc rassemblée à Sion, des confins du monde où ils se trouvaient, pour servir et célébrer ton ensevelissement, ô toi, la nuée légère de tout péché, car les péchés alourdissent et précipitent vers le bas. Sur cette Nuée, Isaïe a prophétisé : "Voici le Seigneur est assis sur cette NUEE LEGERE" Isaïe 19,1. Et comme le soleil sensible que cache une nuée, sort de cette nuée et apparaît au monde, de même le Fils du Très Haut, caché, couvert dans ton sein très pur, ô Mère de Dieu, a brillé de toi comme d’une nuée légère et lumineuse, SOLEIL DE JUSTICE ; il a éclairé ceux qui étaient dans les TENEBRES, égarés dans l’impiété, assis à l’ombre de la mort et du châtiment, c’est-à-dire dans le péché, qui est une ombre, gui nous cache le soleil.

Pourquoi le peuple des Apôtres s’est-il rassemblé à Sion ?
-- Parce que, selon saint Jean Damascène et saint André de Crète, là vivait la Mère de Dieu, là elle a rendu son âme, là elle était couchée sur son lit mortuaire.

"En elle (Sion), dit Jean Damascène, a pris fin la Loi de la lettre et a été proclamé l’avènement de la Loi de l’Esprit ; en elle, le Législateur a mis fin à la figure de la Pâque, le Dieu de l’Ancien et du Nouveau Testament nous a donné la Pâque véritable... en elle, le Christ s’est montré aux Apôtres, ressuscité des morts et a rassuré Thomas et par lui toute la terre, lui montrant clairement qu’il était Dieu et Seigneur, possédant deux natures, même après sa Résurrection, avec chacune ses énergies et sa volonté libre, qui demeureront telles dans les siècles infinis .. Elle (Sion) est l’acropole des Eglises, le séjour des Apôtres. En elle, s’est répandue en de multiples langues, semblables à du feu, et avec un grand bruit, l’effusion du Saint Esprit sur les Apôtres. En elle, le théologien (Jean) prit chez lui la Mère de Dieu et la servit en tout. Elle (Sion) est la Mère des Eglises de tout l’univers, elle est devenue la maison de la Mère de Dieu, après la Résurrection de son Fils". Deuxième Homélie sur la Dormition.

Tropaire

"LES LANGUES DIVINES DES HOMMES THEOLOGIENS,
"INSPIREES PAR L’ESPRIT,
"FIRENT RETENTIR, COMME DES TROMPETTES,
"L’HYMNE DE L’EXODE DE LA MERE DE DIEU :
"REJOUIS-TOI PURE, SOURCE DE L’INCARNATION DE DIEU,
"PRINCIPE DE VIE ET SALUT DE L’UNIVERS !

Les LANGUES DIVINES : c’est-à-dire portées et mues par le Saint-Esprit. DES HOMMES THEOLOGIENS ; le Mélode appelle HOMMES THEOLOGIENS les divins et saints Apôtres, théologiens par excellence, directement enseignés par le Verbe Dieu, de qui ils ont appris la vraie et sûre théologie de la Foi et chez lesquels tous les théologiens ont puisé les dogmes de la théologie. Saint Denys l’Aréopagite, dans le IIIème Chapitre des Noms Divins, appelle les Apôtres théologiens et évoque la Dormition de la Mère de Dieu : "Pierre, la cime très vénérable des théologiens... " et dit que Hiérothée, son maître et prédécesseur, gardait avec les théologiens tous les écrits des saints Apôtres, ceux des Prophètes, et qu’il les appelle en plusieurs endroits THEOLOGIE.

CES LANGUES DIVINES des Apôtres INSPIREES PAR L’ESPRIT, chantèrent à la Mère de Dieu l’hymne de l’Exode, les chants funèbres qui retentissaient plus fort et plus clairement que le son de la trompette. Il convenait donc d’appliquer aux Apôtres ce que Dieu avait dit des prêtres de jadis : "Les prêtres sonneront de la trompette". Nombres 10, 8, et Isaïe : "Fais éclater ta voix comme la trompette". Isaïe 54, 1.



Ensuite le Mélode révèle l’hymne que les Apôtres chantèrent à la Mère de Dieu : "Réjouis-toi, Mère de Dieu, devenue incorruptible, tu es la source et la cause de l’Economie de l’Incarnation du Verbe Dieu, qui s’est fait le commencement, le principe de la vie et du salut de tous les hommes !"

Ensuite il appelle la Mère de Dieu : SOURCE DE L’INCARNATION DE DIEU, parce que de son sang très pur, comme dans des flots plus que doux et agréables, Dieu le Verbe a puisé la chair, lui a donné consistance par l’action du Saint Esprit, et est sorti d’Elle Dieu Parfait et Homme Parfait. Tous les admirables éloges, tous les hymnes funèbres que les divins Apôtres chantèrent aux funérailles de la Mère de Dieu, celui qui désire les connaître pourra les trouver dans les Trois Homélies de saint Jean Damascène et dans les Trois Homélies de saint André de Crète sur la Dormition.

Ces éloges sublimes qu’offrirent alors les Apôtres à la Mère de Dieu, l’oiseau du Ciel, l’aréopagite Denys, a commencé à les raconter, puis, pris de vertige, il n’en a pas terminé le récit, mais étonné et émerveillé, il s’écria à Timothée : "Tu n’ignores pas que nous-mêmes jadis, avec lui et d’autres nombreux parmi nos frères en sainteté, nous vînmes ensemble contempler ce Corps (de la Mère de Dieu), qui fut principe de vie et don de Dieu... C’est après cette contemplation qu’on décida que chaque grand prêtre, selon ses forces, célébrerait la bonté infiniment puissante de l’essence théarchique... " et il termine disant "Mais à quoi bon te redire ici tout ce qui, dans cette réunion, fut dit de Dieu ?" Chapitre III des Noms Divins ; et plus loin, il ajoute : "Laissons de tels mystères, qu’il ne faut point livrer à la foule et qui te sont familiers".

ODE VI

"LE DIEU ET ROI DE L’UNIVERS
"T’A COMBLEE DE CHOSES SURNATURELLES.
"DANS TA MATERNITE,
"IL T’A GARDEE VIERGE
"ET DANS LE TOMBEAU,
"IL A PRESERVE TON CORPS DE LA CORRUPTION.
"IL T’A GLORIFIEE PAR UNE ASCENSION DIVINE,
"PRESENT D’UN FILS QUI HONORE SA MERE.

Ô Mariam, dit Cosmas, morte et vivante, le Roi de l’univers t’a comblée de toutes les merveilles surnaturelles. Vraiment, tout ce qui te concerne est étrange. André, le proèdre de Crète, jubilant disait de toi : "...Tout ce qui la concerne est, en vérité, ce qu’il y a de vraiment nouveau". Et saint Germain de Constantinople, s’adressant, lui aussi, à la Toute-Sainte, lui dit : "Tout ce qui est tien est étrange, vrai, justifié. Ô désirée par-dessus tout et plus douce que le rayon de miel, nous te servirons en désirant tout ce qui est tien, désir grandement récompensé par toi ; louer ce qui est tien, c’est te louanger ; puissions-nous ne jamais y manquer". Homélie sur la Dormition.

Puis, le Mélode ajoute que Dieu le Verbe Lui-Même, Le Fruit de tes entrailles, qui t’a gardée Vierge lors de l’enfantement (tu l’avais conçu sans semence et mis au monde sans corruption, sans briser les sceaux de ta virginité) a préservé ton Corps de la décomposition dans le tombeau.
Ce Corps a certes connu la séparation, c’est-à-dire celle de l’âme et du corps, mais pas la décomposition pendant les trois jours passés dans le tombeau, et de surcroît, il l’a glorifié en le ressuscitant et en le faisant monter au ciel.

Et André de Crète s’écrie à nouveau : "Le miracle est digne de Dieu et de la Foi : dans l’enfantement le sein n’a pas été corrompu et dans la mort, la chair n’a pas connu la décomposition. Quel miracle ! Lors de l’accouchement tu as échappé à la corruption et dans le tombeau à la décomposition..."

Jean Damascène, dans la Deuxième Homélie sur la Dormition : "Elle devait, dans l’enfantement, garder la virginité intacte, et dans la mort, son Corps incorruptible". Et saint Germain de Constantinople, dans l’homélie sur la Dormition :

"Bien que le tombeau ait reçu un corps humain, ton Corps qui porta Dieu ne devait pas être dévoré par la décomposition de la mort, car tu devais être transférée vivante au ciel, dans le séjour de la vie, et laisser le tombeau vide, sans ta chair : et ton esprit devait rester séparé de la vie des hommes, par la force invisible de Celui qui est né virginalement de Toi, le Christ notre Dieu".

Pour notre Mélode, toutes ces merveilles, cette gloire et ces privilèges, ont été donnés à Toi ô Vierge, par le Verbe Dieu le Bien-aimé à sa Mère Bien-aimée, par le Dieu béni à sa Mère bénie, par le Fils Unique à sa très sainte Mère. Le lien naturel qui unit le Fils à sa Mère, la Maternité à la Filialité, a poussé le Fils à donner à sa Mère l’honneur et les prérogatives qui furent ceux de son propre Corps, du Corps de son hypostase divine reçu de la Vierge. Les privilèges du Corps de l’Hypostase divine qui connut la séparation (âme-corps) et la mort, mais non la décomposition dans le tombeau, le Fils les a transmis au Corps qui reçut Dieu, celui de sa Mère Toute-Sainte, sauvegardant ainsi sa relation de Fils avec sa Mère.

-- Qui nous prouve que le Corps de la Mère de Dieu n’a pas été corrompu dans le tombeau ?

-- L’Impératrice Pulchérie, gui avait construit à Constantinople une magnifique Eglise en l’honneur de la Mère de Dieu, pour y déposer, comme trésor, le Corps de la Vierge, interrogea au IVème» Concile Œcuménique de 451 à Chalcédoine le Patriarche Juvénal de Jérusalem, sur le Corps de la Vierge. Le Patriarche répondit :

-- L’Ecriture Sainte et inspirée ne dit rien de la mort de Marie la Toute-Sainte Mère de Dieu. C’est par une tradition très ancienne et vraie que nous savons que lors de sa glorieuse Dormition, tous les Apôtres qui parcouraient à l’époque l’univers pour le salut des nations, furent réunis, en un seul instant, à Jérusalem, enlevés et portés au-dessus de la terre. Arrivés près du Corps de la Vierge, ils eurent une vision angélique, entendirent la psalmodie céleste et virent, dans la gloire divine, la Mère de Dieu remettant son âme entre les mains de Dieu. Quant à son Corps qui porta Dieu, il fut emmené, aux chants des anges et des Apôtres, et déposé dans le tombeau à Gethsémani où pendant trois jours les anges psalmodièrent sans relâche.

Après le troisième jour, les chants angéliques cessèrent, les Apôtres qui se trouvaient au tombeau l’ouvrirent, afin que l’un d’eux, absent le jour de l’ensevelissement, pût vénérer le Corps qui reçut Dieu.
Mais le tombeau était vide, les linceuls à terre, un parfum suave les enveloppa. Etonnés par ce merveilleux mystère, ils pensèrent que Celui qui avait bien voulu prendre chair, se faire Homme et naître d’Elle selon la chair, le Verbe Dieu et Seigneur de gloire, Celui qui avait gardé intacte sa virginité après l’enfantement, avait enlevé son Corps très pur et exempt de toute souillure, l’avait couvert d’honneur en le rendant incorruptible et en le transférant au ciel avant la résurrection commune et universelle.

Saint Jean Damascène dit, dans la deuxième Homélie sur la Dormition, que Pulchérie, après avoir écouté, demanda à Juvénal de lui envoyer les linceuls qui furent trouvés dans le tombeau, pour les déposer dans l’Eglise des Blachernes qu’elle avait édifiée.

En vérité, Dieu a comblé la Mère de Dieu de choses surnaturelles...

Tropaire

"Ô VIERGE, TU ES EN VERITE LE CHANDELIER LUMINEUX
"DU FEU IMMATERIEL,
"L’ENCENSOIR D’OR AU CHARBON DIVIN,
"LA COUPE, LA VERGE, LA PIERRE GRAVEE PAR DIEU,
"L’ARCHE SAINTE, LA TABLE DU VERBE DE VIE
"PLACEE, PAR TON FILS, DANS LE SAINT DES SAINTS !

L’antique tente ou tabernacle de Moyse, était divisée en trois parties : le parvis, le Lieu Saint appelé aussi Sanctuaire Cosmique et le Saint des Saints, tout comme nos églises, qui elles aussi, comprennent trois parties : le Narthex, le Catholicon et le Sanctuaire. Le Tabernacle de Moyse figurait la création. Le Saint des Saints symbolisait d’après Théodoret, le ciel, le Sanctuaire cosmique symbolisait le monde terrestre ; c’est pourquoi il était accessible, en tout temps, aux prêtres, alors que le Saint des Saints ne l’était qu’une fois l’an et pour le Grand-Prêtre seul. Le chandelier d’or à sept branches, dont les sept lampes devaient brûler jour et nuit, était placé dans le Sanctuaire cosmique, de même que la table des pains dits de proposition, sur laquelle étaient placés douze pains, renouvelés chaque semaine et symbolisant les douze tribus d’Israël en adoration devant leur Dieu, l’encensoir d’or, qui était en réalité un autel, destiné à recevoir chaque matin et chaque soir l’encens qu’on faisait brûler, symbole des prières d’Israël ; l’Arche où étaient conservées les tables de la Loi écrites par Dieu, l’urne remplie de la manne et la verge d’Aaron, étaient placées dans le Saint des Saints, comme en témoigne Paul : "Un tabernacle fut, en effet, construit. Dans la partie antérieure, appelée le Lieu Saint, étaient le Chandelier, la Table et les pains de proposition. Derrière le second voile se trouvait la partie du tabernacle appelée Saint des Saints, renfermant l’autel d’or pour les parfums et l’Arche de l’alliance, entièrement recouverte d’or. Il y avait dans l’arche un vase d’or contenant la manne, la verge d’Aaron qui avait fleuri et les tables de l’alliance ». Hébreux 9, 2.

Sachant que tous les objets cultuels ci-dessus figuraient la Mère de Dieu, Cosma réunissant tout ce qui se trouvait en-deçà du voile : la table et le chandelier, de même que tout ce qui se trouvait de l’autre côté du voile : l’encensoir d’or, l’arche et son contenu, dit à la Mère de Dieu :
Ô Mariam toujours vierge, ton enfant béni, ton Fils unique, lors de ta mort, ne t’a pas abandonnée à la décomposition du tombeau, mais il t’a placée dans le Saint des Saints non fait de main d’homme, pour l’habiter.

Tu es le chandelier dont les sept lampes symbolisaient les sept dons du Saint-Esprit. Tu es la vraie Table (des pains de proposition) de Vie qui nourrit et rassasie tout âme affamée de Pain Vivant et dont Grégoire le Théologien dit : "Le Pain, c’est la parole de Dieu dont se nourrissent les âmes affamées de Dieu". Tu es le vrai Encensoir d’or du charbon immatériel et divin, du Seigneur Jésus Christ dans ses deux natures : divine et humaine, comme le charbon qui est fait de deux natures : de feu et de terre. Oui, tu es l’Encensoir d’or, car comme l’or qui est supérieur en valeur à tous les autres métaux, de même toi aussi, ô Vierge, tu es en sainteté supérieure et au-dessus de tous les Justes et de tous les Saints, pour avoir enfanté et mis au monde Dieu.

Tu es l’Urne d’or pour avoir contenu la Manne plus que douce, le Christ ; et qui en mange ne mourra pas mais vivra éternellement.

Tu es la vraie Verge d’Aaron qui fleurit et produisit des noix, car tu as produit la noix spirituelle, le fruit de la Vie, Jésus-Christ.

Tu es la Table (de la Loi) gravée par Dieu, car sur toi a été gravé le Verbe de Dieu, c’est-à-dire qu’il a pris chair sans semence dans ton sein, gravé par le doigt de Dieu, c’est-à-dire par la puissance et l’énergie du Saint-Esprit, appelé Doigt de Dieu par le Seigneur Lui-même : "Si c’est par le Doigt de Dieu que je chasse les démons... "
Luc 11,20.

Enfin, tu es la vraie Arche sainte qui contenait les objets sacrés, c’est-à-dire qu’en toi se sont accomplis les mystères surnaturels et étranges du Verbe Principe de Vie.

ODE VII

Tropaire

"MOYSE, DANS SA COLERE, BRISA LES TABLES DIVINES
"ECRITES PAR LE SAINT-ESPRIT.
"MAIS SON MAITRE,
"QUI GARDA INTACTE CELLE QUI L’A ENFANTE,
"L’INTRODUIT EN CE JOUR DANS LES DEMEURES CELESTES.
"EXULTANT AVEC ELLE, CRIONS AU CHRIST :
"DIEU DE NOS PERES ET LE NOTRE,
"COUVERT DE GLOIRE, TU ES BENI !

Dans le Livre de l’Exode, il est écrit que pendant que Moyse parlait avec Dieu sur le Mont Sinaï, quarante jours et quarante nuits, le peuple Hébreu au cou raide se révolta contre le frère d’Aaron et demanda à ce dernier de lui donner des dieux et de le ramener en Egypte. Aaron réunit toutes les boucles d’oreilles des femmes, fit un veau en métal fondu et dit : "ISRAËL VOICI TES DIEUX QUI T’ONT FAIT MONTER DU PAYS D’EGYPTE". Il éleva un autel devant le veau et lui offrit des holocaustes et tous s’assirent pour manger et boire et adorèrent le veau comme Dieu.
Sur l’ordre de Dieu, Moyse descendit du Sinaï, portant deux tables sur lesquelles était gravée la Loi : les Dix Commandements. Voyant le peuple ivre et hurlant, il jeta les tables de la Loi à terre et les brisa. Cette histoire, on peut la lire dans le Livre de l’Exode, au chapitre 32,15. "Moyse prit le chemin du retour et descendit de la montagne, tenant en mains les deux tables du témoignage, tables écrites des deux cotés, écrites sur l’une et l’autre face. Ces tables étaient l’œuvre de Dieu et l’écriture en était celle de Dieu, gravée sur les tables... Lorsqu’il approcha du camp, il aperçut le veau et les chœurs de danse ; Moyse s’enflamma alors de colère. Il jeta les tables qu’il tenait en mains et les mit en pièces au bas de la montagne".

C’est à cette histoire que le Mélode se réfère dans ce tropaire, disant que MOYSE, DANS SA COLERE, BRISA LES TABLES DIVINES ; elles étaient l’œuvre de Dieu, faites d’une pierre précieuse et non pas ordinaire, selon certains. Ces TABLES étaient ECRITES PAR LE SAINT-ESPRIT. Pourquoi le Mélode dit-il ECRITES PAR LE SAINT-ESPRIT, alors que l’Ecriture dit qu’elles l’étaient par le doigt de Dieu ? "Et Dieu remit à Moyse les deux Tables du Témoignage, tables de pierre, écrites par le DOIGT DE DIEU" Exode 31,18.

-- Nous répondrons que le DOIGT DE DIEU révèle le Saint-Esprit : "Si je chasse les démons, dit le Seigneur, par le Doigt de Dieu... » Luc 21, 20, le DOIGT de Dieu c’est bien le Saint-Esprit de Dieu.

Si Moyse a brisé les tables de pierre, le Seigneur et maître de Moyse, le Christ, Lui, n’a pas brisé, dans une colère, sa Mère symbolisée par les Tables de la Loi. Loin de nous une telle pensée. Si les tables de pierre l’ont préfigurée, elle n’était pas pour cela une Table insensible et sans âme, comme la pierre des Tables de la Loi, mais la Pierre vivante et animée, sur laquelle le Seigneur n’a pas gravé de simples paroles, mais le Verbe de Dieu vivant et hypostatique, a pris en elle un corps et l’a gardée hors de l’atteinte de la dissolution dans le tombeau ; maintenant il l’a fait habiter dans les demeures célestes et éternelles. Alors nous, exultant avec celle qui monte au ciel, nous crions au Christ : DIEU DE NOS PERES ET LE NOTRE, COUVERT DE GLOIRE, TU ES BENI !

Tropaire

"AU SON DES CYMBALES, AVEC NOS LEVRES PURES,
"AVEC LA CITHARE HARMONIEUSE DE NOS COEURS,
"LA TROMPETTE ECLATANTE : LA PENSEE ELEVEE
"ET NOS MAINS ACTIVES,
"ACCLAMONS EN CE JOUR MEMORABLE ET ILLUSTRE,
"L’ASCENSION DE LA VIERGE PURE.
"DIEU DE NOS PERES ET LE NOTRE,
"COUVERT DE GLOIRE, TU ES BENI !

Il y a trois sortes d’instruments de musique : les uns sont appelés instruments à vent, comme la trompette, la flûte, le chalumeau, les autres à cordes, comme la cithare, la lyre, la harpe, d’autres à percussion, comme le tambourin, la cymbale, certains à marteaux, etc.

Connaissant ces instruments, le Mélode les mentionne dans le présent tropaire, leur donne un sens allégorique et les applique aux membres de l’homme, voulant que l’on célèbre avec eux, aujourd’hui, la Dormition de la Mère de Dieu, Ainsi, dit-il, nous les chrétiens, nous applaudissons et nous célébrons en CE JOUR ILLUSTRE ET SACRE, la montée au ciel de la Vierge, la pure Mère de Dieu, avec des cymbales d’ovation c’est-à-dire des lèvres pures de tout mensonge, de tout jugement, de toute médisance, insulte, blasphème.

Nous, nous fêtons la METASTASE, le transfert de la Mère de Dieu, avec la cithare qui est notre cœur serein, accordé par la grâce du Saint Esprit et qui module la mélodie divine de la prière du cœur. Nous, aujourd’hui, nous sommes en fête, avec la trompette retentissante, c’est-à-dire la pensée qui saisit les significations élevées, contemple les choses divines et spirituelles qui concernent la Vierge. Aujourd’hui, nous battons des mains, nous applaudissons.

-- Quelles mains ? Celles qui pratiquent les commandements spirituels et s’exercent aux vertus ; car la main exprime l’action et l’œuvre. Saint Jean Chrysostome disait : "Par mains et épaules, l’Ecriture entend les actions. Elle dit, en effet, de David : "II les a conduits avec des mains intelligentes". Et saint Cyrille d’Alexandrie disait, lui aussi : "La main n’est pas toujours celle du corps ; par main tu dois comprendre l’action pratique... " Pour être bref, je dirai que le Mélode, dans ce tropaire, nous apprend qu’avec les chants spirituels que nous modulons à la Vierge, nous devons avoir la conduite et les œuvres conformes à ces chants : l’aumône, le secours des pauvres, les bienfaits distribués à tous. Tout cela, c’est une hymne agréable à Dieu ; des offrandes faites à la Vierge, un encens agréé par la Majesté virginale de la Mère de Dieu.

Notez que notre Mélode appelle la fête de la METASTASE de la Mère de Dieu, MEMORABLE ET ILLUSTRE, pour nous montrer que cette fête est la plus grande, la plus glorieuse de toutes les fêtes de la Mère de Dieu, car c’est de ce nom que l’Ecriture désigne les grandes fêtes : "Sonnez en ce jour MEMORABLE de votre fête". Psaume 80, 3. Dieu a dit au sujet des trois grandes fêtes : Pâque, Pentecôte, Tabernacles : "Voici les solennités du Seigneur, ILLUSTRES et SACREES que vous publierez à leurs temps fixes". Lévitique 23, 4.

Tropaire

"LE PEUPLE SAGE ET DIVIN S’EST RASSEMBLE,
"CAR LA DEMEURE DE LA GLOIRE DE DIEU
"EST PORTEE DE SION DANS LA MAISON CELESTE,
"LA OU RETENTISSENT LES MELODIES PURES,
"LES VOIX JOYEUSES ET INEFFABLES
"DE CEUX QUI TE CELEBRENT ET CRIENT DANS L’ALLEGRESSE :
"DIEU DE NOS PERES ET LE NOTRE,
"COUVERT DE GLOIRE, TU ES BENI !

Le peuple, dit le Mélode, qui pense aux choses divines et célestes, s’est rassemblé aujourd’hui dans les saintes églises du Christ, pour y célébrer la fête. Et il donne la raison de cette solennité. C’est que la DEMEURE, le Tabernacle DE LA GLOIRE DE DIEU, notre Souveraine la Mère de Dieu, dont David a dit :
"Le Très-Haut a sanctifié son tabernacle" psaume 45, 4, et saint Jean Damascène qui le commente : "CE TABERNACLE, que le Seigneur a dressé et sanctifié, c’est la Vierge ; II a habité au milieu d’elle, l’a rendue inébranlable et n’a pas brisé les sceaux de la virginité".

La Vierge, donc, la Demeure de la gloire de Dieu, dis-je, a ETE PORTEE DE SION DANS LA MAISON CELESTE de son Fils, où retentit le chant de ceux qui fêtent et où s’élève la voix de la joie indicible et de la jubilation, dont David a dit : "Je m’avancerai vers le lieu de la demeure merveilleuse, jusqu’à la maison de Dieu, au milieu des cris de joie et des actions de grâce de la multitude en fête" psaume 41,5.

"Je pense, dit Grégoire le Théologien, que les cris de ceux qui là-bas sont en fête, sont les voix qui chantent et glorifient Dieu, les voix de ceux qui ont été dignes d’habiter la cité... " Maxime le Confesseur voit dans le TABERNACLE, le symbole du progrès et par MAISON ou DEMEURE, il entend la perfection : "Le lieu du merveilleux tabernacle, dit-il, c’est l’état non passionné des vertus, où le Verbe de Dieu vient orner l’âme de la beauté variée des vertus, comme un tabernacle ; tandis que la Maison de Dieu, c’est la connaissance faite de nombreuses et diverses contemplations, dont Dieu qui habite l’âme remplit celle-ci, l’emplissant de sagesse comme une coupe.

Les cris d’allégresse sont les bonds de l’âme sous l’impulsion de la richesse des vertus. L’action de grâces, c’est celle qui est rendue à la gloire du festin mystique de la Sagesse. Les cris de ceux qui célèbrent, c’est à la fois l’allégresse et l’action de grâces devenues glorification perpétuelle". Et le Mélode termine son tropaire, en invitant le peuple des chrétiens assemblés, à crier au Christ d’un cœur joyeux : Dieu de nos Pères et le nôtre, couvert de gloire, tu es béni !

Unissant sa voix à celle de Cosma, André de Crète crie, de la part des Apôtres : "Va en paix, maintenant, ô Souveraine, pars en jubilant dans la joie indicible, va dans la splendeur éternelle, dans la vraie lumière, dans le royaume de la lumière, au lieu du torrent de la félicité éternelle, des prairies incorruptibles, des sources intarissables de la vie, des rayons de la lumière éclatante, des fleuves de l’illumination et de la vie sans fin ; au pays de tous les biens, fin ultime au-delà de laquelle il n’y a absolument rien, au pays où le Père est adoré, le Fils glorifié, l’Esprit Saint célébré, la nature une et unique de la Divinité aux Trois Personnes."

ODE VIII

Tropaire
"LA MULTITUDE DES THEOLOGIENS REUNIS A SION,
"RETENAIENT PAR CES PAROLES,
"L’ARCHE DIVINE DE LA SAINTETE :
"OU VAS-TU TE DRESSER MAINTENANT,
"Ô TABERNACLE DU DIEU VIVANT ?
"NE CESSE PAS DE VEILLER
"SUR CEUX QUI, DANS LA FOI,
"MODULENT CE CANTIQUE :
"NOUS, LES DELIVRES, CHANTONS LE SEUL CREATEUR,
"ET EXALTONS-LE DANS TOUS LES SIECLES !
Dans le tropaire ci-dessus, le Mélode rapporte les dernières paroles des Apôtres à la Mère de Dieu. Il appelle les Apôtres théologiens par excellence, parce que directement instruits par le Fils Unique de Dieu Lui-même, qui est dans le sein du Père, qui leur a révélé le mystère de la théologie, comme nous l’a dit Jean l’Evangéliste et Apôtre bien-aimé. Par ces paroles, disais-je, les Apôtres retenaient, tiraient à eux, l’Arche divine de la Sainteté, la Mère de Dieu notre Souveraine, de laquelle David a dit : "Lève-toi Seigneur, viens à ton lieu de repos, toi et l’Arche de ta sainteté" psaume 131, 8. "C’est en toute justice, écrit saint Grégoire Palamas, que le Corps qui avait enfanté Dieu fut glorifié d’une gloire digne de Dieu, avec Celui qui avait été enfanté, selon le cantique prophétique, et que fut ressuscitée l’Arche de sa sanctification avec le Christ déjà ressuscité". Homélie sur la Dormition.

Ô Tabernacle Vivant du Dieu Vivant ! disaient les Apôtres, où vas-tu maintenant ? C’est très judicieusement que le Mélode emploie le terme de TABERNACLE, car comme l’antique tabernacle du témoignage était levé comme une tente et transporté d’un lieu à un autre, de même la Mère de Dieu, le Tabernacle vivant a été enlevé aujourd’hui et transporté de la terre au ciel. Ensuite le mélode rapporte la prière des Apôtres à la Mère de Dieu : "Ne cesse pas de veiller, ô Vierge, du haut du ciel, sur nous et sur tous ceux qui chantent avec foi à ton Fils : Nous les délivrés de la tyrannie du diable et de l’égarement de l’idolâtrie et du péché, nous chantons ton Fils, le seul créateur de l’univers et nous l’exaltons dans tous les siècles !"

En accord avec le divin Cosma, saint Jean Damascène nous transmet les mêmes paroles des Apôtres à la Mère de Dieu :

"Reste avec nous, ô notre consolation, notre unique courage sur la terre ; ne nous laisse pas orphelins ô Mère, nous qui sommes en péril pour l’amour de ton Fils. Sois notre soulagement dans les peines et notre fraîcheur dans les sueurs. Si tu veux rester avec nous tu le peux, si tu veux t’en aller, tu n’auras pas d’obstacle. Si tu pars, ô Tabernacle de Dieu, puissions-nous partir avec toi, nous le peuple de ton Fils. Il ne nous reste que toi pour nous consoler sur la terre. Heureux si tu vis et que nous vivions avec toi, et si tu meurs, que nous mourrions avec toi. Et que signifie pour toi mourir, puisque la mort est vie pour toi ?..."

Tropaire

"LA TOUTE-PURE, EN S’EN ALLANT, ELEVAIT LES MAINS,
"LES MAINS QUI AVAIENT VRAIMENT PORTE DIEU INCARNE,
"ET DANS SA LIBERTE MATERNELLE,
"DISAIT A SON FILS :
"GARDE DANS LES SIECLES CEUX QUE TU M’AS DONNES
"ET QUI TE CRIENT :
"NOUS LES DELIVRES, CHANTONS LE SEUL CREATEUR
"ET EXALTONS-LE DANS TOUS LES SIECLES !

Le Mélode nous donne ici un détail très touchant sur la mort de la Mère de Dieu. Il nous apprend que la Toute-Sainte, dont Salomon a dit : "Tu es toute-belle, Ô mon amie, et il n’y a point de défaut en toi" Cantique des Cantiques 4, 7, a élevé les mains au moment de quitter ce monde, les mains saintes qui avaient vraiment tenu Dieu corporellement !
La répétition du mot "main" révèle la passion d’une âme amoureuse de la virginité, un amour ardent et enflammé pour la Mère de Dieu. "En s’en allant, dit-il, la Toute- Pure, élevait ses mains bénies", pour montrer que l’élévation des mains de la Mère de Dieu vers le Seigneur était digne d’admiration, d’une admiration sans mesure.

-- Quelle prière la Mère de Dieu a-t-elle adressée à son Fils en élevant ses mains ?

-- Elle est aussi brève qu’intense : "Ô mon Fils et mon Dieu, garde tous les chrétiens de tout mal de l’âme et du corps, les chrétiens que tu as acquis par ton Sang précieux, comme part de ton héritage, pour la joie de ta Mère, afin qu’ils soient mes laudateurs ; garde-les, afin qu’ils chantent pour l’éternité, en actions de grâces, pour tes bienfaits et ta Grâce, l’hymne des trois adolescents : Chantons le seul Créateur et exaltons-Le dans tous les siècles !

Saint Jean Damascène rapporte aussi, en d’autres termes, la prière de la Mère de Dieu, adressée à son Fils : Toi mon Fils et mon Dieu, sois après mon départ la consolation des enfants chéris, que tu as bien voulu appeler tes frères. Ajoute-leur bénédic­tion sur bénédiction, par l’imposition de mes mains. Puis élevant les mains, elle bénit ceux qui l’entouraient... " Deuxième Homélie.

ODE IX

Hirmos

"EN TOI, VIERGE TOUTE-PURE,
"LES LOIS DE LA NATURE SONT DEPASSEES.
"TA MATERNITE DEMEURE VIRGINALE
"ET TA MORT ANNONCE LA VIE.
"VIERGE APRES L’ENFANTEMENT, VIVANTE APRES LA MORT,
"MERE DE DIEU, SAUVE POUR TOUJOURS
"TON HERITAGE !

Considérant qu’en la Personne de la Vierge Marie bon nombre de lois de la nature ont été vaincues, le Mélode a quelque peu le vertige, et ne pouvant comprendre, il s’émerveille et s’écrie : Ô Vierge très pure et sans tache ! En toi, les lois de la nature ont été dépassées.

La loi veut que la femme qui a enfanté ne soit plus vierge. Toi, tu as conçu sans semence étant Vierge, tu as enfanté et demeures Vierge. MAXIME le théophore et confesseur disait : "En enfantant surnaturellement, la Vierge n’a pas altéré la moindre partie de sa virginité. Comme le Verbe s’est fait homme, sans altérer sa nature ni céder sa puissance, de même a-t-il fait avec sa Mère gui l’a enfanté, en la gardant vierge... " Chapitre IX, 3ème Centurie Gnostique.

La loi de la nature veut que dans la mort l’âme se sépare du corps, que le corps mis au tombeau se décompose ; mais dans la mort, ô Mère de Dieu, ton corps n’a pas connu la décomposition, mais la vie et l’incorruptibilité, car après trois jours, de­vaient s’unir à nouveau ton âme et ton corps gui porta Dieu, gui ressuscita du tombeau et s’éleva au ciel. Voilà les lois de la nature qui furent vaincues en la Mère de Dieu.
Et si on veut aller plus loin, si on veut approfondir, on trouvera d’autres lois de la nature dépassées et vaincues par la Vierge Sainte.

Une autre loi de la nature veut que l’enfant qui est semé, soit façonné et formé peu à peu dans le ventre de sa mère, mais en toi, ô Vierge, cette loi a été également vaincue, parce que l’enfant de l’hypostase divine a reçu, dès sa conception, sa forme complète et non pas peu à peu.

Saint Basile le Grand disait que la nature voulait que l’enfant fût pesant dans le sein de la mère, mais le Seigneur Jésus Christ dans le ventre de sa Mère, ne pesa nullement, et fut porté sans peine et sans fatigue au cours des neuf mois de la gestation.

Bien d’autres lois de la nature, plus subtiles encore, nous l’avons déjà dit, furent vaincues en la Vierge ; nous les laissons de côté car elles sont au-delà de la raison et de l’intelligence ; en la Mère de Dieu "les lois sont bouleversées" disait saint Grégoire le Théologien, et Maxime le Grand :

"Méditons avec foi le mystère de l’incarnation divine et glorifions, avec simplicité, Celui qui pour nous l’a voulu ainsi. Qui pourra, en se fiant à la force de la démonstration rationnelle, expli­quer comment s’est faite la gestation du Verbe ? Comment la chair est née sans semence ? Comment la naissance s’est faite sans corruption ? Comment la Mère est restée Vierge après l’enfantement ? Comment Celui qui est parfait a-t-il connu la progression selon l’âge ? Comment Dieu s’est fait homme ? Et ce qui est plus mystérieux encore, comment le Verbe s’est essentiellement incarné selon l’hypostase, alors qu’en son essence il est hypostatiquement dans le Père ? Comment le Même qui est totalement Dieu par nature, s’est-Il fait Homme total selon la nature humaine, sans altérer aucune de ses natures, la divine selon laquelle II est Dieu et la nôtre selon laquelle II s’est fait Homme ? Seule la foi peut pénétrer les mystères" Chapitre XIII, 3ème Centurie Gnostique.

Puis le Mélode adresse une prière à la Mère de Dieu et lui dit : "Toi qui es restée Vierge après comme avant l’enfantement. Toi qui es vivante après la mort, toi qui es toujours vierge, sauve pour toujours, de toute attaque des ennemis visibles et invisibles, nous les chrétiens, l’héritage de ton Fils, reçu en partage de la part du Père, selon le psalmiste : "Je te donnerai les nations pour héritage" psaume 2, 8. Il va de soi que l’héritage du Fils est aussi celui de la Mère.

Tropaire

"LES PUISSANCES ANGELIQUES EMERVEILLEES
"VOIENT LEUR MAITRE DANS SION :
"IL PRESSE DANS SES BRAS UNE AME DE FEMME
"ET DIT FILIALEMENT A CELLE QUI L’ENFANTA,
"ETANT VIERGE :
"VIENS, TOUTE VENERABLE
"ET SOIS GLORIFIEE
"AVEC TON FILS ET DIEU !

Quand la Mère de Dieu devait quitter ce monde, par sa Dormition porteuse de vie, son Fils et Dieu, pour honorer sa Mère, vint d’une manière ineffable et insaisissable au Mont Sion, où se trouvait éten­du sur sa couche le Corps de la Vierge qui porta Dieu, pour recevoir l’âme pure de sa Mère Toute-Sainte. Jean Damascène dit : "Le Roi vint vers celle qui l’avait mis au monde, pour recevoir, entre ses mains divines et sans tache, son âme sacrée, pure et sans souillure. Elle lui parla et lui dit : "Entre tes mains je remets mon esprit". Deuxième Homélie.

Informé de cela, Cosma dit en somme : Les puissances angéliques étaient émerveillées de voir venir invisiblement dans la sainte Sion où la Mère de Dieu se trouvait, leur Maître et Seigneur Jésus-Christ, et serrer dans ses bras, finalement, avec douceur, l’âme toute lumineuse d’une femme selon la nature et surnaturellement sa Mère plus que sainte Le Mélode reprend les paroles du Fils bien-aimé à sa Mère bien-aimée : "Viens au ciel, ô ma très douce Mère, pour être glorifiée et régner éternel­lement avec moi ton Fils et ton Dieu".

Avec Cosma, Jean Damascène a noté le dialogue entre le Fils et la Mère, quand celui-ci reçut entre ses mains son esprit très sacré : "Et toi Seigneur, descends, descends, pour rendre à ta Mère, dont tu es le débiteur, tout ce que tu lui dois pour les soins maternels qu’elle t’a prodigués. Ouvre tes bras et accueille l’âme de la Mère, toi qui sur la Croix remis ton esprit entre les mains du Père, et dis-lui, dans un doux murmure : lève-toi mon amie, ma belle et viens, toi gui dans la beauté de ta virginité rayonne au-dessus du soleil. Tu m’as donné ce gui était à toi, viens maintenant jouir de ce qui est à moi ! Mère, viens chez ton Fils ! Viens régner avec moi qui suis humblement sorti de toi et ai vécu humblement avec toi". Troisième Homélie.

Et Grégoire Palamas le divin : "Le Seigneur Sabaoth Lui-même, le Fils de la toujours Vierge, est invisiblement présent. Il rend à la Mère l’honneur de l’exode et elle remet, entre ses mains, son esprit... " Homélie sur la Dormition.

Tropaire

"LE CHOEUR DES APOTRES ENSEVELIT TON CORPS
"QUI PORTA DIEU.
"IL LE CONTEMPLE ET CHANTE,
"D’UNE VOIX MELODIEUSE ET PLEINE DE CRAINTE
"MERE DE DIEU,
"QUI PARS VERS TON FILS
"POUR LES DEMEURES CELESTES,
"SAUVE POUR TOUJOURS TON HERITAGE.

Ce tropaire est le dernier du canon et le Mélode sacré y parle de la dernière œuvre des Apôtres qui est l’ensevelissement du Corps de la Mère de Dieu et pour lequel ils sont venus des confins de la terre. S’adressant à la Mère de Dieu, il dit "Marie, morte mais vivante ! Le chœur des saints Apôtres enveloppa de linceuls et ensevelit à Gethsémani ton Corps très pur qui reçut Dieu le Verbe, à qui tu as prêté une chair vivante et une âme douée de raison, d’esprit, de volonté.

Les mains des saints Apôtres du Christ devaient ensevelir ce Corps de la Mère du Christ, comme proches leur proche, comme disciples la Mère du Maître ; l’ensevelissement de celle-ci revenait aux dignes, aux théophores, à ceux qui étaient mus par l’Esprit, aux saints Apôtres. Aussi regardaient-ils ton Corps très pur avec crainte et piété, à cause de la gloire de la divinité qui l’enveloppait, et de la lumière qui jaillissait de toute part. Ils ne le regardaient pas avec crainte seulement, mais ils disaient aussi, d’une voix claire et douce : "Ô Mère de Dieu ! Aujourd’hui tu pars vers ton Fils, tu entres dans les demeures célestes, telle une Epouse inépousée, et toute belle. Nous te demandons de protéger contre les ennemis visibles et invisibles tous les chrétiens orthodoxes, que tu as reçus en héritage de la part de ton Fils", comme on l’a dit plus haut.

Et Jean Damascène la célèbre en disant : "Toi la vraie Arche du Seigneur-Dieu, le choeur des Apôtres te porta sur ses épaules, comme jadis les prêtres portèrent l’Arche qui t’a symbolisée, te déposa dans le tombeau et te fit passer comme par un autre Jourdain, sur la vraie terre de la Promesse, la Jérusalem céleste, la Mère de tous les fidèles dont "Dieu est l’architecte et le constructeur". Première Homélie.

Et Grégoire Palamas la célèbre de même, dans son Homélie sur la Dormition : « Maintenant, par la mort tu passes d’ici-bas à l’immortalité et, en toute justice, tu montes de la terre au ciel, pour habiter à jamais avec Lui (ton Fils) les tabernacles supra-célestes ; et de là, protéger ton héritage et prier sans cesse pour le rendre propice à tous".

Et nous qui chantons, qui lisons, qui écoutons leprésent canon, acclamons la Mère de Dieu, notre Mère à tous par la grâce, avec des chants sacrés et divins. Honorons avec pureté d’âme et de corps, celle qui est vraiment plus que pure et plus qu’innocente. Il est tout naturel que le semblable se réjouisse et soit dans l’allégresse en son semblable dit encore saint Jean Damascène. Servons donc notre Mère selon la grâce, par des aumônes aux pauvres, par la compassion envers les nécessiteux, car Dieu est surtout servi par l’aumône plus que par aucune autre vertu. Et qui doutera que la Mère de Dieu se réjouit de l’aumône faite aux pauvres ?

Faisons de notre mémoire et de notre cœur des cassettes et des demeures des vertus de la Mère de Dieu.
-- Comment ?
– La Mère de Dieu est Vierge, aime la virginité pure et le bien ?

Ayons donc, nous aussi, non seulement un corps pur de tout péché charnel, mais aussi notre imagination pure de tout pensée impure et souillée et nous obtiendrons la grâce de la Vierge innocente. Elle fuit toute passion honteuse, se détourne des pensées souillées, a horreur de la gloutonnerie, combat l’impudicité, déteste la colère, n’accueille pas la jalousie et les disputes. Haïssons, nous aussi toutes ces passions, si nous voulons être les amis et les imitateurs de la Vierge. Par contre, la Vierge se plaît au jeûne et à la continence, chérit la charité et l’humilité, aimons, nous aussi, ces vertus, si nous voulons suivre et imiter la Vierge.



Pour être bref, comme la Vierge hait tout mal et aime toute vertu, de même devons-nous faire, afin que la Vierge nous voyant ornés de ces vertus, désire la beauté de nos âmes et vienne, spirituellement, à nous, apportant avec elle toute une suite de grâces et de biens spirituels. Que dis-je ? Non pas elle seule viendra à nous pour nous enrichir de tout bien céleste, mais aussi par ses prières, elle convaincra son Fils Unique d’habiter, par la grâce, nos cœurs, avec le Père et le Saint-Esprit, la Sainte Trinité, que nous glorifions dès cette vie et pour les siècles des siècles. Amen ! 

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