samedi 1 janvier 2011

La Lumière du Thabor n°3. Note de lecture. Les vains efforts du dialogue oecuméniste. Père Patric.

V

NOTES DE LECTURES


Les vains efforts du Dialogue

Le DIALOGUE THEOLOGIQUE entre les Eglises Orthodoxe et Catholique (papiste), a commencé voici déjà cinq ans, pour étudier, aplanir les divergences, en vue de l’union.

Œuvre, certes, agréable à Dieu, conforme à la prière du Christ notre Sauveur, à son Père Céleste : « qu’ils soient un » (Jean 16, 21), cinq fois répétée au cours de Sa prière sacerdotale, la nuit de la Cène Mystique. Pour cette union, tant désirée par tous, pour qu’elle soit réalisée, pour que la volonté de Notre Sauveur le Dieu-Homme, Chef et Tête de l’Eglise, soit faite, il faut de part et d’autre, la sincérité, l’identité de but, c’est à dire la gloire du Seigneur.

Du côté Orthodoxe, ces dispositions existent, car l’Orthodoxie prie toujours « pour l’union de tous », et saisit toutes les occasions, pour inviter à l’union, ceux qui sont séparés, et toujours pour la gloire du Christ. Du côté Catholique, les paroles de politesse mises à part, nous n’avons aucun signe de bonne volonté, ni des marques d’une disposition sincère à l’union, pour la gloire du Christ. Au contraire, d’après tout ce que le Catholicisme dit, l’union souhaitée se fait à la gloire du « Vicaire du Christ » et pour l’extension de son troupeau ; le Catholicisme demeure inébranlable dans ses doctrines, qui furent à l’origine de la séparation : La SUPREMATIE, l’INFAILLIBILITE, etc., qu’il considère comme des droits donnés par Dieu au Pape.

La demande adressée au Vatican, de mettre fin à l’Uniatisme, uniatisme qualifié par feu l’Archevêque d’Athènes Chrysostome, de « système rusé et perfide » non seulement n’a pas été enten­due, mais des uniates ont été faits membres de la Commission pour le DIALOGUE THEOLOGIQUE.

Le Concile de Vatican II a tenté, mais en vain, de limiter l’absolutisme papal, par l’inauguration du Collège des Evêques (système synodal). Le parti des Conservateurs ayant dominé, le concile a fini par la fortification de l’hégémonie papale sur l’église.

Feu le professeur Trembellas écrivait : « Le Pape tient fermement à ses prérogatives extraordinaires, que le 1er Concile du Vatican qui a proclamé l’infaillibilité, lui a reconnus. A plusieurs reprises, dans les actes comme dans les décrets votés par Vatican II, ces prérogatives, qui seraient de droit divin, ont été réitérées, consolidées et rendues inattaquables… »
Tout récemment encore, lors de sa visite en Suisse, le 14.6.1984, le Pape proclamait à nouveau son « DROIT DE GOUVERNER LES EGLISES ET LES COMMUNAUTES CHRETIENNES. » Puisque les prétentions papales, qui ont été à l’origine du schisme demeurent intactes, et dogme de foi, consolidées par des conciles « œcuméniques » de la papauté, comme Trente, Vatican I et Vatican II, comment alors la papauté pourra-t-elle s’unir à l’Eglise Orthodoxe qui est l’Eglise du Credo ?
La participation des latins au « DIALOGUE », n’est pas l’indice d’une bonne disposition pour une union vraie, sur la base de la doctrine de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique du Credo, mais celle d’une extension de sa puissance temporelle…

Pour éviter l’écueil de la suprématie papale et pour pouvoir poursuivre un dialogue qui sera sans fin, qui facilitera la propagande auprès des orthodoxes, surtout ceux de l’émigration, qui créera un climat de bienveillance, la Papauté a proposé, et nous avons malheureusement accepté, de commencer le DIALOGUE, par la discussion des sujets qui nous unissaient, et ensuite ceux qui nous séparaient. Ainsi se continue, sans perspective optimiste, le DIALOGUE THEOLOGI­QUE, comme une autre toile de Pénélope, appel à retourner au « Bercail de Pierre », pour la perte des âmes des chrétiens crédules et faibles dans la foi.

Un terme doit donc être mis aux efforts du DIALOGUE, cheval de Troie de la Papauté. Qu’il soit clairement et catégoriquement dit aux Latins du Dialogue, que tant que les prérogati­ves et la suprématie du Pape, inconnus de l’Eglise, seront en vigueur, l’union sera IMPOSSIBLE, toute discussion superflue, peine perdue et négation de la charité et du commandement divin : QU’ILS SOIENT UN. Saint Jean Chrysostome disait : « La concorde n’est pas toujours chose bonne… Il y a une mauvaise concorde et une bonne dissension… mieux vaut se séparer que d’être mal unis… »

Nous ne cesserons pas de prier le Seigneur d’éclai­rer les Catholiques qui sont éloignés de l’Eglise, de prendre conscience de leurs erreurs, d’y renon­cer et de retourner à l’Eglise où ils se trouvaient autrefois. Sera grande alors, la joie dans le ciel et sur la terre (Luc XV, 10) ; ce sera un événement cosmo-historique, qui leur assurera la première place dans la charité et l’honneur, comme Paul la Bouche du Christ, le héraut de la charité le recommande : « Rendez-vous, par la charité, serviteurs les uns des autres » (Galates V, 14).

Orthodox Typos. N° 613 du 29.6.84.

LES PROJETS DE LA FAUSSE UNION ONT FAIT NAUFRAGE.

Le Patriarcat de Jérusalem s’élève contre la propagande latine.

La troisième phase de ce qu’on appelle le « DIALO­GUE THEOLOGIQUE », entre l’église des Orthodo­xes et celle des Latins, qui a eu lieu en Crète du 30 Mai au 8 Juin, a été un échec pour les « oecuménistes », qui espéraient faire un pas de plus vers la « fausse-union » genre uniate. Leur échec est dû à la courageuse opposition de la plupart des délégués hellènes, en particulier de l’Eglise de Jérusalem et de l’Hellade. Ainsi le « texte commun », élaboré par une sous-commis­sion d’orthodoxes et de latins, l’an dernier à Leucosie de Chypre, qui était absolument irreceva­ble, n’a pas été approuvé.

Malheureusement, les prières en commun, entre orthodoxes et latins, dans les églises orthodoxes et franques, n’ont pu être évitées à Hania de Crète.


Le sujet du Dialogue théologique

Le sujet qui a été discuté par les deux délégations, lors de la troisième phase des travaux, de ce qu’on appelle DIALOGUE THEOLOGIQUE, était le suivant : « Foi, Sacrements et Unité de l’Eglise ».

Les discussions se sont déroulées sur la base d’un texte rédigé l’an dernier à Leucosie, par les délégués orthodoxes et latins. Du point de vue orthodoxe, ce texte était totalement irrecevable, parce qu’il reconnaissait la validité des sacrements des hétérodoxes latins ! Il est clair, que les architectes de la Fausse-Union, cherchent à obtenir la reconnaissance de leurs sacrements, par toute l’Orthodoxie. Déjà les délégués de Constantinople et de Moscou, des évêques oecuménistes isolés, de même que des théologiens, s’étaient prononcés en faveur de la validité des sacrements des latins, qui transmet­traient la grâce divine et salvatrice ! Mais ceci ne suffit pas pour une Fausse-Union.

Si cette conception cacodoxe, devenait la vie de tous les orthodoxes, la Fausse-Union, genre uniate, serait alors faite « de facto »… C’eût été, pour les « oecuménistes » et les architectes de la Fausse-Union, un grand succès, que la reconnaissance, par tous les orthodoxes, de la validité des sacrements des latins. Grâce à l’attitu­de inflexible de certains délégués des églises orthodoxes, ce résultat n’a pas été obtenu.

Les Délégués Orthodoxes.

Les orthodoxes qui ont rejeté les desseins des « oecuménistes » étaient les suivants :
- Les deux délégués du Patriarcat de Jérusalem : le Métropolite de Pétra Germanos et le Professeur Georges Galitis.
- Le délégué laïc du Patriarcat d’Alexandrie : le Professeur Stylianos Papadhópoulos.
- Le délégué laïc de l’Eglise de Chypre, M. Papachristophore.
- Le délégué laïc de l’Eglise d’Hellade : le Profes­seur Théodore Zisis, très remarqué lors des discussions.

- L’Eglise Serbe a suivi la ligne traditionnelle.
- Les délégués de l’Eglise de Bulgarie, ont tout fait pour passer inaperçus.

Les délégués les plus oecuménistes ont été : celui du Patriarcat d’Alexandrie, l’Evêque Parthénios de Carthage ; celui du Patriarcat d’Antioche, l’Evêque Hodre Georges du Mont-Liban ; et plus que tous les autres, le Métropolite Cyrille du Patriarcat de Moscou. Avec lui, ont fait chorus les délégués des Eglises qui se trouvent sous régime communiste. Les efforts de l’Evêque Russe Cyrille, visaient à aplanir toutes les diver­gences entre orthodoxes et franks, tout en laissant entendre que si le clergé et le peuple russe s’en apercevaient, ils opposeraient une grande résistance.

La retenue du Président de la délégation orthodo­xe, l’archevêque Stylianos d’Australie, a fait impression. Cette fois, il a pris position contre la reconnaissance de la validité des sacrements des latins, tout en soulignant cependant, qu’en vue de l’union, on pouvait les reconnaître par économie !!!
Les orthodoxes se sont ainsi montrés divisés, les uns soutenant des positions orthodoxes, les autres s’alliant aux « oecuménistes ». Le tableau le plus affligeant, fut celui qu’ont donné certaines églises, comme le Patriarcat d’Alexandrie, de l’Hellade, etc., dont les clercs soutenaient l’OE­CUMENISME et les laïcs la Tradition Orthodoxe. Par contre, les latins bien préparés, ont donné une image parfaite, où chaque membre connaissait bien son rôle, qu’il jouait sous l’œil vigilant du célèbre père Debray.

La nécessité d’un secrétariat pour la délégation orthodoxe, qui donnerait non seulement des directives et des informations indispensables, mais fournirait aussi les textes du DIALOGUE à ses membres se fait sentir.

Détails sur les discussions

Le Professeur Théodore Zisis, qui a remplacé le Professeur Méga Pharanton, de la délégation de l’Eglise d’Hellade, a gardé, il faut le dire, une attitude orthodoxe. Il a souligné avec vigueur, lors des discussions, que les « frères » latins, repré­sentaient dans le DIALOGUE, le monde occidental. « Nous avons, nous aussi, l’ambition, a-t-il ajouté, d’exprimer, dans la rédaction des textes, le monde de l’Orient, qui est l’Orthodoxie ! L’Eglise d’Hellade, a de solides positions théologiques, qui doivent, à tout prix, figurer dans le TEXTE COMMUN, afin que l’Orthodoxie soit ainsi expri­mée ». Et il a remis deux pages d’observations.

Ensuite, le théologien M. Papachristou, délégué de l’Eglise de Chypre, a souligné que l’Assemblée n’était pas disposée à signer un texte où l’Orthodoxie n’était pas exprimée.

Puis le Métropolite Germanos de Pétra, du Patriar­cat de Jérusalem, a souligné, à son tour, qu’on devait permettre à l’Eglise d’Hellade d’exposer ses points de vue.

A la suite des réactions des divers délégués des Eglises Orthodoxes, aucun TEXTE COMMUN n’a été signé. Une nouvelle réunion de la Commis­sion de Coordination, examinera le TEXTE DE LEUCOSIE et un autre TEXTE sera proposé à l’Assemblée Générale, qui se tiendra à Bari en d’Italie en 1986, dont le sujet sera : LE SACRE­MENT DU SACERDOCE DANS L’EDIFICE DE L’EGLISE. L’IMPORTANCE DE LA SUCCESSION APOSTOLIQUE POUR LA SANCTIFICATION ET L’UNITE DU PEUPLE DE DIEU.

Protestation du Patriarcat de Jérusalem

Le délégué du Patriarcat de Jérusalem, le Métro­polite Germanos de Pétra, a déposé, sur l’ordre du Patriarche de Jérusalem, S.B. Diodore, une vigoureuse protestation contre les latins, qui exploitent le DIALOGUE THEOLOGIQUE, affir­mant que l’UNION est déjà faite et persuadent les enfants des Orthodoxes du Moyen-Orient, d’aller communier chez eux et même d’y être chrismés !
Le Cardinal Willebrandt, a reconnu que cela suscitait des difficultés au DIALOGUE et qu’il allait en discuter avec les autorités du Vatican. A leur tour, les latins ont laissé entendre, au cours de discussions privées, que les orthodoxes rece­vaient des prosélytes venus du catholicisme. Ce sujet, en effet, inquiète beaucoup le Vatican, car un grand nombre de latins désirent embrasser l’Orthodoxie.
Le Vatican, avec son DIALOGUE THEOLOGIQUE cherche à donner, à ses fidèles déçus, l’impression qu’il n’y a aucune raison de devenir orthodoxe, puisque… L’UNION est imminente. Pour la même raison, certains clercs orthodoxes, surtout du Patriarcat Œcuménique, empêchent les hétérodoxes de confesser l’Orthodoxie, disant à tous « nous sommes la même chose ! »

Il est un fait, le DIALOGUE THEOLOGIQUE, cette fois, n’a pas avancé, comme les OECUMENISTES l’espéraient qui tentaient de faire croire que les divergences entre Orthodoxes et Latins étaient « insignifiantes », selon l’expression du Métropolite oecuméniste Parthène de Carthage…

Orthodox Typos N° 612 du 22.6.1984.

LA VISITE DU PAPE A CHAMBEZY

Le 12 Juin dernier, le Pape a, officiellement, visité le Centre Orthodoxe du Patriarcat Oecumé­nique de Chambézy, près de Genève. Ce fut un délire oecuméniste. Le Pape a été reçu au son des cloches, et les « orthodoxes » l’ont encensé comme un Patriarche. Dans l’église, les papistes prirent place, dans le chœur de gauche et les « orthodoxes » dans celui de droite. Puis tous ensemble ont récité la prière dominicale et chanté des hymnes ecclésiastiques. Il y a donc eu « prière en commun » et le « Centre Orthodoxe » a proclamé l’hérésie de l’oecuménisme « en public », « tête nue » et dans « l’église », comme le dit le XVe canon du Concile Premier-Second, à propos de ceux qui tombent dans l’hérésie. Dans son allocution, le Pape a qualifié de parfaite sa communion avec les « orthodoxes » oecuménistes, puis il a exprimé le vœu, de voir accélérée la marche vers le calice commun et, sans ambages, a déclaré qu’il était le « pôle de l’Unité et sa réalisation » ! On dit que cette manifestation oecuméniste, eut été plus audacieuse encore, si le « texte oecuméniste » de Crète n’avait pas été rejeté. On prépare, dans le secret, la visite du Pape en Hellade.

Les grandes transgressions

Ces faits œcuménistes, sont des fautes graves, une impiété. La Loi Divine, par le 33ème Canon du Concile de Laodicée, dit « qu’on ne doit pas prier avec les hétérodoxes et les schismatiques ». Les oecuménistes, cependant, prient et concélè­brent avec ces derniers. Sans gêne, ils proclament par la presse, la radio et la télévision, leur péché comme si c’était un exploit ! et confessent, impénitents, leur hérésie. La Loi divine ordonne de « rompre avec l’hérétique après un premier et un second avertissement ». (Tite 3, 10). Après l’échec de la troisième assemblée de Crète, au lieu d’arrêter le dialogue, ils fixent au contrai­re une quatrième assemblée, comme si leurs désaccords étaient une parfaite harmonie. Cela signifie, que par le dialogue théologique, les oecuménistes ne cherchent pas la Vérité, mais marchandent, afin de signer en commun le texte de leur égarement, qui leur permettra de publier, officiellement, leur union anti-ecclésiastique, union inique qui existe déjà entre eux depuis longtemps, vécue dans leurs prières en commun et leurs concélébrations, et préparant le peuple à accepter, sans réactions graves, l’Union dans l’hérésie œcuméniste.

Pour parvenir à leurs fins, ils comptent surtout sur l’aide de l’œcuménisme politique.
Le 10 Juin 1984, les U.S.A. et le Vatican, ont décidé de rétablir leurs relations diplomatiques au niveau des ambassades et des nonciatures. En Juin dernier, le Pape a reçu l’ex-ministre des affaires étrangères des U.S.A. Henri Kissinger. On dit qu’il a été question de l’accélération de l’Union Oecuméniste. Puisque par la visite du Pape à Chambézy, l’union n’a pu se faire au niveau espéré, il a été décidé d’user des puissants moyens politiques, sans soulever de sérieuses réactions. Le journaliste oecuméniste S. Aléxiou, révèle dans « Kathimérini » d’Athènes du 5 Juillet 1984, que l’Union Oecumé­niste « va venir de haut »…
La Voix des Pères, Juillet 1984.

Les textes de la réception du Pape à Chambézy, sont publiés dans le numéro 14 du 15 Juillet 1984, de la Documentation Catholique. Textes creux, vides, absence de sincérité. Les orthodoxes refusent, en Crète, de reconnaître la validité des sacrements du Pape, et le Directeur du Centre de Chambézy, reçoit avec l’encens le Pape. On parle avec un cœur double et on prend le Nom du Seigneur pour mentir, dit le psalmiste. Note de la Rédaction.

LA REVOLUTION YOUGOSLAVE

Branko Miljus

Editions l’Âge d’Homme,

Les Journaux ont beaucoup parlé cette année des programmes d’histoire et de la nécessité de réadapter la méthode ou même le contenu de l’enseignement, aux réalités historiques modernes.

Certes, nous sommes bien d’accord, mais il est curieux de constater que la meilleure connais­sance des faits, ne fait que mettre en valeur, certaines mentalités indéracinables, même chez les historiens. Par exemple l’imaginaire enfantin est toujours peuplé des actions des chevaliers ou des croisés, rendus nobles et magnanimes, par la vertu de nos manuels scolaires ; ainsi les croisades, le plus généralement, sont présentées avantageusement tantôt comme un moyen de progrès économique, tantôt comme un idéal généreux. Nul pourtant n’est en droit d’ignorer la vérité historique et le titre d’un chapitre sur les croisades, devrait être « Assassins au Nom de Dieu », puisque les croisés ont pillé et massacré, n’épargnant ni les chrétiens ni les musulmans. Sur le plan religieux, leur finalité devrait être mise en rapport avec la politique franque d’usurpation des sièges orthodoxes de l’Orient après celle du siège orthodoxe de Rome, au début du Xle siècle.

Ce titre « Assassins au Nom de Dieu », nous le reprenons volontairement d’un livre, paru il y a quelques années, consacré à un génocide, durant la seconde guerre mondiale, de prés d’un million de Serbes Orthodoxes, massacrés par les Croates Catholiques, avec la bénédiction plus ou moins tacite de Rome. L’idéal des croisades fut tangible et il est à la portée de nos contemporains de le connaître. La Yougoslavie vécut, en effet, sous un régime concentrationnaire qui a donné plus de néo-martyrs serbes en quelques années, que la sauvagerie des Turcs en plusieurs siècles.

De ce génocide, nous le reconnaissons avec une grande tristesse, nous n’avons entendu véritablement parler ni au lycée, ni à l’université et si, très rarement, il y était fait allusion, c’était pour le minimiser et dégager le Vatican d’une responsabilité qu’il ne serait pas bon de revendiquer au temps des droits de l’homme. Pourtant les faits historiques sont là, et l’on peut lire le livre de B. Miljus : la Révolution Yougoslave, raconte précisément un épisode de la guerre qui n’est pas à la gloire d’un Occident indifférent et hostile à la résistance des Serbes. Les manuels scolaires, devraient cependant, narrer ces faits, qui nous donnent un témoignage contemporain de la mentalité des croisades autant que de l’indifférence occidentale à la liberté des autres.

Les voici donc : en Août 1941, l’Allemagne victorieuse de la Yougoslavie, établit un état indépendant de Croatie, dirigé par Ante Pavelic, extrémiste croate du parti Oustachi, et très probablement impliqué, avant la guerre, dans le meurtre du roi Alexandre 1er de Yougosla­vie. B. Miljus décrit les débuts de cet état indépendant : « une des premières mesures de ce gouvernement catholique, fasciste et raciste, fut la publication du décret du 25 Avril, portant interdiction de l’Alphabet Cyrillique, qui était celui des Serbes, dans leur vie publique et privée, ainsi que la fermeture de toutes les écoles primaires et maternelles, appartenant aux institutions confessionnelles serbes. Les Serbes furent ensuite contraints de porter, autour du bras un ruban bleu, signe médiéval des ghettos, orné de la lettre P, la première du mot Pravoslavas, qui signifie « orthodoxe » en, serbe. Les magasins, les restaurants, les cafés, les administrations, les transports en commun, leur furent interdits. « Cette politique de ségrégation raciale, qui fut ap­pliquée aussi aux juifs et aux tsiganes, eut l’appui officiel du clergé catholique (papiste) qui entreprit une campagne de conversion forcée, baptisant les orthodoxes, et proclamant une véritable croisade, destinée à faire disparaître les églises orthodoxes, le clergé et le peuple chrétien.

L’Archevêque catholique de Sarajevo, Mgr. Saric, membre du parti Oustachi, était favorable aux mesures violentes. « Il est sot, écrivait-il, et indigne de penser que la lutte des disciples du Christ contre le mal, pourra être menée avec des gants ». Mgr Stépinac, Archevêque de Zagreb, membre du Parlement fantoche de Pavelic, aumônier de l’armée croate, présidait volontiers aux cérémonies de conversions forcées et en transmettait officiellement la nouvelle à Rome. En 1955, le Pape Pie XII le fera Cardinal pour ses « nombreux mérites ». Il n’imaginait pas, loin de là, les conséquences de la politique de Pavelic à l’égard des orthodoxes : en Croatie, 3 évêques, 538 prêtres et moines furent massacrés, 27 églises ou monastères furent livrés aux flammes, avec bien souvent, les orthodoxes serbes enfermés dans la nef.

Dans la Cathédrale de Glina en particulier, le 14 Mai 1941, des centaines de serbes furent amenés, et ceux qui n’avaient pas de certificat de conversion, furent tués ou brûlés. Cette sauvagerie fut commandée par le Supérieur du monastère catholique de Suntic et par le Ministre des Cultes du gouverne­ment Oustachi. 26 camps de concentration furent construits et le plus atroce fut celui de Jasenovac, « l’Auschwitz croate », commandé par un Franciscain que les déportés nommaient Frère Satan, dont le nom était Filipovic Magstorovic. Ce camp de Jasenovac fait de baraquements sur pilotis, était insalubre, les conditions de vie étaient atroces, et les méthodes employées y étaient les mêmes que celles des camps alle­mands. Aujourd’hui encore, on découvre autour de ces camps, et d’une façon générale, dans tout le pays, des fosses d’ossements humains qui rappellent ces massacres.
Personne, durant la guerre, ni bien sûr à la tête de l’épiscopat catholique croate, ni à Rome, ne s’est élevé, pour dénoncer ce génocide, qui n’a toujours pas de place dans nos livres d’histoire, à côté de celui des juifs ou des arméniens. Souhaitons qu’un jour, l’Eglise Serbe puisse canoni­ser ses Nouveaux Martyrs, comme l’Eglise Russe à l’Etranger a pu le faire pour les siens. Nous doutons, en tout cas, qu’un Pape aille un jour, s’incliner à Jasenovac.

LE PECHE ET LA PEUR
Jean Delumeau
Ed. Fayard.

Autour du VIIIe - IXe siècle, les francs et les germains conquérants de l’Occident, ont réussi à systématiser et à rationaliser la règle barbare du droit de vengeance, propre aux tribus allemandes, jusqu’à en faire une théorie théologique, philosophique et politique cohérente, qui a été l’armature de la féodalité.

Dans cette vision du monde, Dieu n’a d’autre rapport avec l’humanité que les vainqueurs francs avaient entre eux et à l’égard des populations asservies, romains orthodoxes des Gaules et de l’Italie. Les uns, les francs, sont prédestinés et ont la mission divine de la prédication de l’Evangile, depuis la chute de l’Empire Occidental, les autres sont dominés justement et doivent accepter, sans contester, cette « servitude volontaire ».

Augustin d’Hippone, fut le théologien par excellen­ce d’une telle synthèse, parce que les Carolingiens purent trouver dans son système la culpabilité du péché frappant la plus grande partie de l’huma­nité et l’idée que Dieu se réserve de sauver les uns et de damner les autres, indépendamment des mérites personnels.

Aussi, à travers tout le Moyen-âge, d’Anselme de Canterbury à Luther, la théologie augustinienne a fourni les principes de la scolastique autant que du « sens commun » médiéval, et a permis aux francs de faire régner une véritable terreur sur les âmes, au moyen de la prédication, de la confession et de la mise en scène spectaculaire, de tout ce qui touchait à la mort et à la souffrance.

Le livre de J. Delumeau, le Péché et la Peur est la première enquête méthodique d’un grand historien, sur cette pratique de la peur et de la terreur, qui a épuisé la force de l’Occident, au point que l’auteur se demande, s’il n’y a pas eu une « faillite de la rédemption » dans cette surculpabilisation généralisée.

Nous ne pouvons pas résumer ici ce livre immense ; notons seulement que cette faillite est celle de l’augustinisme, comme le voit J. Delumeau, qui tente – désespérément faudrait-il dire – de ne pas identifier Augustinisme et Catholicisme ; sa tâche n’est pas facilitée, par le fait qu’il identifie, par un retour surprenant de l’Augustinis­me médiéval, l’œuvre de l’évêque d’Hippone, avec celle des Pères. S’il avait mis en valeur, l’opposition fondamentale des thèses d’Augustin avec celles des Pères et de l’Eglise, il aurait sans doute eu le levier décisif, pour mieux bâtir la partie positive de son travail. Cependant il est certain, que le livre de Delumeau, devrait être une leçon intéressante, donnée par un catholi­que, à certains oecuménistes : Clément, Bobrinsky, Congar, qui, reprenant une vieille méthode de l’uniatisme, encensent Augustin, pour faciliter le dialogue avec Rome. P.P.

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