lundi 3 janvier 2011

La Lumière du Thabor n°8. Mon Paradis et mon Enfer.

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Mon Paradis et mon Enfer

Le Sens de la Vie et du Monde

Le jour de la Nativité (du Christ), le Verbe s’est fait chair (Jean 1,14). C’est le premier, le plus grand message de joie, le plus  ''grand évangile'' que Dieu pouvait apporter à l’homme, au ciel, à la terre. Tout l’Evangile du ciel et de la terre, consiste en ces cinq mots : ''Le Verbe s’est fait chair". Hors de cet Evangile et sans lui, il n’y a pas d’autre ''bonne nouvelle'' donnée à l’homme, ni en ce monde ni dans l’autre. En elle se trouve ce qui était éternellement nécessaire à l’être humain dans tous les mondes.

Unique message de joie pour la matière sous tous ses aspects, depuis le plus dur, le plus dense comme celui du diamant, au plus subtil et invisible comme celui de l’électron, du photon.

"LE VERBE S’EST FAIT CHAIR". Cela signifie que le Verbe s’est fait Dieu-Chair, de manière telle, que Dieu demeure Dieu et la chair reste chair, et que la chair, dans son union mystique mais réelle avec Dieu, vit et rayonne toutes les perfections divines.

''LE VERBE S’EST FAIT CHAIR", signifie : le Verbe s’est fait âme, Dieu-ÂME ; Dieu demeurant Dieu et l’âme demeurant âme, mais l’âme marchant dans les voies des mystères de Dieu, éternels et pleins d’allégresse, dans tous les mondes visibles et invisibles.

''LE VERBE S’EST FAIT CHAIR", signifie : Le Verbe s’est fait sensation, Dieu-Sensation. Ici encore, Dieu ne cesse pas d’être Dieu, bien qu’il soit devenu sensation humaine ; la sensation demeure sensation humaine, mais vivant désormais tout l’infini divin comme sien.

''LE VERBE S’EST FAIT CHAIR", signifie encore ceci : Le Verbe s’est fait créature. Mais la nature de Dieu ne perd aucune de ses propriétés divines, pas plus que la nature de la créature ne perd ses propriétés créées. La créature passe à travers de merveilleuses métamorphoses qui la font monter de gloire en gloire.

''LE VERBE S’EST FAIT CHAIR", signifie enfin : Le Verbe s’est fait homme, homme parfait, Dieu-Homme. Dieu demeure dans ses limites et l’homme dans les siennes, bien que liés l’un à l’autre, étroitement, indissolublement, inséparablement. L’homme a fait siennes toutes les perfections indicibles de Dieu, il a acquis l’éternité divine, la gloire divine, devenant  ''semblable à Dieu'' (homothéos) selon l’expression des saints Pères.

Dieu le Verbe s’est fait homme, pour ramener l’homme à son Archétype, à son Démiurge, car l’homme a été créé au commencement, par le Verbe Dieu, porteur de l’empreinte du Verbe divin : la logosnost (1).

Le Verbe de Dieu s’est fait chair pour ramener la chair à sa  ''logosnost'' originelle, car tout ce qui a été fait a été fait par le Verbe. (Jean I, 3–Colossiens 2,I 6). Dieu le Verbe étant le Démiurge de toute la création, il est, en conséquence, le fondement de tout l’édifice cosmique. Le péché et le mal, sont la tentative tragique et insensée de l’homme, pour éloigner Dieu, le Verbe, des fondements mêmes de l’univers.

Dieu le Verbe s’est incarné pour ramener la création au Créateur qui est le fondement, la base. Et c’est très justement que le divin apôtre Paul proclame que le Christ Dieu-Homme est le fondement unique, inébranlable, éternel et que ''personne ne peut poser un autre fondement que celui qui est déjà posé", (I Corinthiens 3, 11). Celui qui construit, qui édifie sur le ROC solide et inébranlable de l’univers est un ''homme sage'' dont la personne a été logifiée, ologosena, c’est-à-dire qu’il s’est uni à toutes les qualités éternelles du Verbe Dieu ; aussi cet homme reste-t-il debout dans les tempê­tes et les ouragans des séismes humains et du chaos. (Matthieu 7, 24-Rom. 8, 35).

Par son incarnation, Dieu le Verbe a montré que la logosnost-logification, était l’essence même de notre nature, le fondement de notre être humain, le fondement de notre vie, de notre existence humaine. Notre origine est de Dieu, aussi notre être, notre vie, notre existence, dépendent-ils entièrement de Lui. (Actes I7, 28-Col.3, I). En effet, toute la création, dans son archétype, dans son essence la plus profonde est du Verbe. (Col.1, 16). De Lui, par Lui, en Lui sont ramenées toutes choses, comme à leur origine, à leur existence logifiée, à leur sainteté originelle, à leur beauté, à leur puissance, à ce FIAT et cela FUT, à leur paradis. C’est dans le Verbe que se trouve le paradis ; hors de la logification-vanlogosnosti, c’est l’enfer.

LA SENSATION !... Qui pourra m’expliquer ce mystère qui est en moi, la sensation ? Qui sait quelles énigmes, quels mystères, Dieu a unis, a associés dans ce que nous appelons la sensation... ! La sensation ! Don merveilleux et redoutable. Par elle le paradis apparaît paradis, et l’enfer enfer. Par elle, la douleur est douleur, et la béatitude béatitude, la tristesse est vécue comme tristesse et la joie comme joie, le désespoir comme désespoir, l’élévation comme élévation.

La logification-logosnost est la qualité première de la sensation. Si vous ôtez de la sensation la logification, vous la transformez aussitôt en enfer. Au fond qu’est-ce que l’enfer ? - C’est une sensation, privée de Dieu le Verbe, une sensation d’où Dieu a été exclu. Qu’est-ce que le paradis ? - La sensation, unie à Dieu et remplie par Dieu le Verbe. En effet, l’enfer, c’est la  "sensation pure", privée de Dieu, a-thée, tandis que le paradis, c’est la sensation logifiée, divino-humanisée.

Dieu le Verbe s’est fait Homme, pour ramener la sensation humaine à sa logification-logosnost originelle, opprimée par le péché. Dans le Dieu Verbe incarné, notre sensation retourne à son logos, à sa raison d’être, à sa signification, à sa toute-signification. Elle revient à sa forme divine, christique et pneumatique. Par son mystère intérieur, la sensation humaine plonge dans les profondeurs sans fond du Dieu Triple-Soleil, notre Seigneur. Ceci signifie que la sensation n’est pleine et parfaite, que transfigurée en Dieu. Sentir en Christ-sensation, en Esprit-sensation (2). Dieu le Verbe s’est justement fait homme pour logifier la sensation humaine. La sensation humaine logifiée, se libère du péché, de l’absurde, de l’insensé, de la mort.
Elle revient, de cette manière, en elle-même, à son essence originelle. Elle atteint sa plénitude dans la théo-sensation, sentant désormais en Dieu, en Christ. (3)

La sensation humaine n’est vraie et pure qu’en Dieu, qu’en Christ, par la théo-sensation, la christo-sensation. Sans le Verbe Dieu, elle devient folle, elle se débat et finit par mourir dans les passions, le péché, dans l’absurdité, la stupidité, la fureur, le désespoir, l’individualisme, dans le devenir perpétuel, mais pas dans le FIAT et cela FUT. Toujours en perpétuel devenir, elle n’existe jamais réellement et intégralement. Non déifiée, non christifiée, la sensation humaine meurt sans cesse, sans jamais pouvoir mourir. Voilà le ver dont parle l’Evangile  "qui ne meurt point " c’est-à-dire l’enfer. (Marc 9, 48).

LA PENSEE !...Quel mystère incompréhensible se cache dans la nature de la pensée humaine ! Nous, nous ne savons qu’une chose : que la pensée est si incompréhensible, que dès qu’on commence à réfléchir sur elle, on a le vertige. Celui qui veut scruter les origines et la nature de la pensée hu­maine, risque de devenir fou s’il ne se réfugie pas dans le Dieu Verbe, dans le Christ Dieu-Homme ; en Lui seul, le mystère de la pensée trouve sa dou­ceur. Séparée de Dieu le Verbe, la pensée humaine perd sa signification, sa raison, parce que dans son essence originelle, elle avait un caractère logifié-logosni.

Pour moi, la pensée, chaque pensée, est le plus grand tourment qui soit sous le ciel, jusqu’à ce qu’elle soit transfigurée en théo-pensée, en christo-pensée, jusqu’à ce qu’elle soit logifiée, qu’el­le ait acquis un sens. En vérité, la pensée est un enfer, si elle ne devient pas christo-pensée. Sans le Verbe, la pensée humaine se trouve sans cesse dans une démence absurde, (alogosnom = privée de raison) dans le délire, dans une auto-affirmation satanique et insensée, comme cette formule diabolique : "La pensée pour la pensée" qui n’est pas sans rapport avec celle-ci : "L’art pour l’art."

La pensée humaine comme la sensation, sont folles, à cause du péché. L’unique médecin, l’unique remède pour guérir cette folie c’est le Dieu-Homme, c’est le Verbe-Dieu devenu Homme. En Lui et par Lui, a été donnée et assurée à la pensée humaine, la possibilité de l’infinie perfection divine. Il est justement devenu Homme, pour que cette planète gouvernée par la raison humaine  " pure" et nue, ne soit pas réduite, définitivement et sans retour, en un asile de fous. N’avez-vous pas remarqué que quand le continent européen s’éloigne du Dieu Verbe incarné, il se plonge dans l’in-humain avec ses guerres désastreuses ? Un homme dévore un autre homme, une nation dévore une autre nation, une race dévore une autre race.

L’AME DE L’HOMME !...Mystère des mystères ! Merveille des merveilles ! Les coeurs de tous les pèlerins de l’éternité se sont brisés devant l’âme de l’homme. Les hommes vivent avec l’âme et ignorent ce qu’elle est ! N’est-ce pas un tourment pour l’esprit ? Un tourment certes, mais jusqu’au jour où Dieu le Verbe se fit Homme et en même temps, âme. Alors nous a été révélé le mystère de l’âme : le Verbe. De Lui viennent son origine, son être, son prototype ; en Lui se trouvent sa raison, son sens, sa béatitude, son éternité, son paradis. C’est pour cela que l’âme dans ses profondeurs, a la nostalgie du Christ, la nostalgie de Dieu.

Dans le Dieu Verbe incarné, l’âme a trouvé, et son créateur et elle-même ; c’est pourquoi le mer­veilleux Dieu-Homme a proclamé ce message plein de joie : "Celui qui perdra son âme à cause de moi, la trouvera" (Mat.16, 25). C’est-à-dire qu’il trouvera l’essence de son âme, sa raison, son sens, sa dignité. Tant que l’âme n’est pas unie à Dieu le Verbe, elle est hors d’elle-même, dans la démence éternelle, dans l’égarement insensé ; elle va de péché en péché, de passion en passion, de misère en misère. Et ceci c’est l’enfer avec toutes ses horreurs.

LE CORPS HUMAIN !...Quel merveilleux labo­ratoire. Il transforme l’eau en sang, l’air en os, le pain en chair, les plantes en métaux, les métaux en humeurs ! Laboratoire inouï de miracles. De miracles naturels direz-vous. Mais qu’est-ce qui n’est pas miracle dans la nature ? Un certain ingénieur invisible, un certain artiste merveil­leux dirige cet extraordinaire laboratoire que nous appelons le CORPS ; il se trouve dans le corps et nous ne le voyons pas. Nous voyons ses oeuvres mais pas lui, comme s’il voulait se cacher toujours et davantage derrière ses oeuvres !

LE CORPS !... En le créant tel qu’il est, Dieu y a disposé une foule d’énigmes. Il a enrobé de boue son or divin et l’a laissé ici-bas sur notre loin­taine planète. Et au miracle il a ajouté le mira­cle : Le Verbe s’est fait chair ! Ce faisant, il a exalté le corps au-dessus des anges et des archan­ges. Il l’a glorifié, l’a expliqué en déclarant : "Le corps est pour le Seigneur". (I Cor.6, 13). La preuve en est l’ASCENSION au ciel du Seigneur, avec son corps dans lequel il demeurera à jamais ; le gage en est la Résurrection du Christ et la résur­rection de nos corps au jour du jugement. La toute-valeur, la logification-logosnost du corps, consis­tent justement en ceci : le Verbe s’est fait chair et il demeurera, éternellement, dans la chair.

L’HOMME !... Toutes les créatures se tiennent en silence devant le plus extraordinaire des mira­cles dans tous les mondes, comme si Dieu y avait rassemblé tous les miracles de tous les mondes et les avait résumés en un seul : l’HOMME. Par l’âme, il l’a relié au monde spirituel et, par le corps, au monde sensible, et l’a ainsi laissé au milieu de cette vie. Voilà pourquoi l’homme est attiré par les mystères du monde spirituel autant que par la séduction du monde matériel. L’homme, dans tout son être, est tendu comme un fil, entre ces deux mondes. C’est pourquoi le mystère de l’existence humaine a transformé la pensée humaine sur l’homme en cri, en convulsion, en lamentation, en deuil pour l’homme ; et cela jusqu’au jour où le Verbe se fit homme. Car Dieu le Verbe devenu homme a expli­qué l’homme aux hommes, il l’a logifié (christifié) et donné un sens à sa vie et en ce monde et dans l’autre.

Par le Dieu-Homme seul, l’homme est revenu à lui-même, étant au fond de son être complexe logifié-logosan. Il n’est pas d’homme que le Verbe n’éclaire dès son entrée dans ce monde et dans cette vie. (Jean .I, 9).

Tant que tout ce qui est humain ne retourne pas au Dieu-Homme, n’est pas logifié et divino-humanisé, il demeure para-logique, privé de signification, et en son fond, inhumain. L’homme n’est vraiment homme que par le Dieu-Homme et dans le Dieu-Homme. L’objectif final du Verbe fait Homme, c’est justement de logifier (christifier), déifier l’homme dans tout son être. Dieu le Verbe s’est fait Homme pour logifier et déifier l’homme : son âme, son corps, sa pensée, sa sensation, en un mot tout ce qui fait que l’homme est homme.
Sans cette logification, sans cette déification en Dieu le Verbe, notre âme, notre corps, notre pensée, nos sens, sont des monstres, des phantasmes, une horreur ; car au fond, à quoi ces choses nous ser­vent-elles ? Pour disparaître, effrayés et trem­blants à la vue de la mort et de tout le chaos de la vie ?...

Voilà pourquoi, le jour de la Nativité de Dieu le Verbe dans la chair, est une fête merveilleuse, par sa splendeur, son mystère, sa dignité. En célébrant la naissance du Christ, nous confessons essentiellement et nous glorifions le véritable et unique sens et la raison de l’existence humaine, de l’esprit humain, de la pensée humaine, de la sensa­tion humaine, de la vie humaine. En ce jour de la Nativité du Seigneur,  "a lui dans le monde la lu­mière de l’intelligence" qui a rempli de sens di­vin le monde entier et nous a révélé le sens éter­nel et la raison de ce monde et de l’homme qui s’y trouve.

Dans la Nativité du Christ, nous ont été donnés et la révélation et le sens, tant du mystère de l’homme que du mystère du ciel et de la terre. Et si l’homme nous est cher, c’est parce qu’il appar­tient à Dieu le Verbe, qu’il est à cause de Lui logique-logosna. L’âme de l’homme nous est également chère, car elle aussi appartient au Verbe et est logique ; la pensée de l’homme nous est chère, car elle est au Verbe et par cela même logique-logosna ; la sensation de l’homme, pour appartenir au Verbe, est aussi logique-logosna, de même que la vie de l’homme est au Verbe et donc logique-logosna. Le monde nous est également cher, car il est de Dieu le Verbe, donc logifié-logosan ; de même le ciel est logifié, car il est au Verbe.

Par la naissance de Dieu dans un corps, Dieu tout entier est né dans le monde, toute la Vérité de Dieu, toute la Justice de Dieu, tout l’Amour de Dieu, toute la Bonté de Dieu, toute la Miséricorde de Dieu. C’est pour cela que tous les affamés, que tous les assoiffés de Dieu et de sa Justice, pleins d’allégresse spirituelle et de joie infinie, saluent tous les êtres et toute la création par la salutation de la Nativité du Christ :

CHRIST EST NE !

Et des profondeurs christo-nostalgiques de tous les êtres de la création, retentit la réponse :

EN VERITE IL EST NE !

1. Cette  "logosnost" que le Père Justin introduit dans le vocabulaire théologique, aux sens riches et variés, est difficile à traduire en français. Lui-même, ici, l’explique : c’est l’empreinte du Verbe sur ses créatures. Faute de mieux, nous la traduisons par  "logification" logopoesis en grec. Dans une note d’un autre article du Père Justin, son traducteur grec dit que "logosnost", c’est l’action de l’énergie substantifiante et déifiante de la lumière divine du Verbe qui éclaire tout homme venant en ce monde. Cf. Genèse l, 26/27 , Jn. 1,9. - Col. 3,10.
2. Autrement dit : sentir en Dieu, sentir en Christ, sentir en l’Esprit -Saint.
3. Dans le texte : la sensation atteint sa plénitude dans la théosensation, dans la christo-sensation.

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