dimanche 2 janvier 2011
La Lumière du Thabor n°6.Encyclique des Patriarches orientaux de 1895.
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Encyclique des Patriarches orientaux, de 1895
Traduction de l’anglais par Presbytéra Hélène.
Le 20 juin 1895, à l’occasion de son Jubilé Episcopal, le Pape Léon XIII publiait à l’adresse des Chefs d’Etats et des Peuples de l’univers, son Encyclique « Praeclara gratulationis… » L’Eglise Orthodoxe y était invitée à s’unir au Trône Papal et à reconnaître le Pape comme Chef Suprême de l’Eglise, dans le sens défini par le dogme du Concile du Vatican, les Orthodoxes gardant, bien entendu, leurs propres langues et leurs rites liturgiques, ainsi que leurs usages et leurs diverses traditions.
Parallèlement, l’Encyclique recommandait l’extension, en Orient Orthodoxe, de l’Uniatisme, l’envoi par Rome d’un grand nombre d’agents qui, sous le froc orthodoxe, convertiraient, par tous les moyens, les orthodoxes.
Devant cette menace, et pour prévenir et protéger les fidèles de la propagande latine, le Patriarcat de Constantinople publiait à son tour, l’Encyclique qui va suivre.
Dix questions y sont abordées :
1° Le Filioque.
2° La Primauté et l’Infaillibilité papales.
3° Le Baptême par aspersion.
4° Le pain azyme pour l’Eucharistie.
5° Le consécration des saints dons par les seules paroles du Seigneur et non par l’Epiclèse.
6° La communion des fidèles sans le Sang du Christ.
7° Le Purgatoire.
8° Les mérites surérogatoires des saints.
9° Les indulgences.
10° La rétribution et la béatitude des Justes et des Saints sitôt après la mort et avant la Résurrection universelle.
11° L’Immaculée Conception de la Mère de Dieu.
Cette lettre se termine par l’affirmation que l’Eglise Orthodoxe est l’Eglise des Sept Conciles Œcuméniques et des Neuf Premiers siècles du christianisme, qu’elle est l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique, la Colonne et le Fondement de la Vérité ; qu’elle désire ardemment l’unité de la foi dans la doctrine des Apôtres transmise par les pères et dont le Christ est la Pierre d’angle.
L’Eglise Romaine, dit encore le document patriarcal, est l’Eglise des innovations, des altérations des œuvres des pères de l’Eglise, de la fausse interprétation des Ecritures et des définitions des saints Conciles, l’Eglise qui depuis le IXème siècle, a introduit en elle, par le papisme, des doctrines hérétiques, et étrangères qui l’ont éloignée et séparée d l’Eglise du Christ.
TEXTE
A nos très saints et très aimés de Dieu, frères en Christ, les Métropolites et les Evêques, à leur clergé saint et vénérable, et à tous les laïcs pieux et orthodoxes du saint trône apostolique et patriarcat de Constantinople.
« Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont annoncé la parole de Dieu ; considérez quelle a été la fin de leur vie et imitez leur foi. Jésus Christ est le même hier, aujourd’hui et pour l’éternité (Hébreux 13, 7).
1 – Toute âme pieuse et orthodoxe, animée d’un zèle sincère pour la Gloire de Dieu, ressent une tristesse et une douleur profonde de voir que l’ennemi du Bien, celui qui a été meurtrier dès le commencement, par jalousie du salut de l’homme, ne cesse jamais de semer l’ivraie dans le champ du Seigneur pour y étouffer le bon grain. C’est lui qui fut, dès les premiers temps, l’auteur de ces hérésies, semblables à de l’ivraie, qui sont apparues dans l’Eglise du Christ et qui ont nui de mille manières, et nuisent toujours, au salut de l’humanité en Christ. C’est avec justice que ces hérésies, comme de mauvaises herbes ou des membres gangrenés, ont été ôtées et séparées du Corps sain qu’est l’Eglise Orthodoxe Universelle du Christ.
Ainsi, en ces derniers temps, le Malin a égaré, en Occident, loin de l’Eglise Orthodoxe du Christ, des nations entières, en inspirant aux évêques de Rome, des pensées d’une arrogance folle et des innovations contraires aux Canons de l’Eglise et à l’Evangile. Cela même n’a pas suffit ; mais il a fallu encore que les papes de Rome aient cherché, par des tentatives d’union, déterminées mais sans jugement, à plier à leur fantaisie et à soumettre à leurs erreurs, l’Eglise Catholique du Christ qui poursuit sa marche, inébranlable, dans l’orthodoxie de la foi transmise par les Pères Saints.
2 – Ainsi, Sa Sainteté, le Pape de Rome Léon XIII, pour son jubilé épiscopal, a publié au mois de juin de l’an de grâce 1895, une lettre encyclique adressée aux chefs d’Etats et aux nations du monde entier, où il invite en particulier notre Eglise Orthodoxe, Catholique et Apostolique à s’unir au trône papal, il y soutient que la seule voie pour atteindre à une telle union est que l’Eglise Orthodoxe le reconnaisse comme souverain pontife, comme la plus haute autorité en matière spirituelle et temporelle, comme unique représentant du Christ sur la terre et comme dispensateur de toute grâce.
3 – Sans aucun doute, le cœur de tout chrétien doit être rempli du désir de l’union des Eglises ; et le monde orthodoxe tout particulièrement, inspiré du véritable esprit de piété et considérant le dessein divin de l’établissement de l’Eglise par le Dieu-Homme, Notre Sauveur Jésus Christ, souhaite vivement l’unité des Eglises dans la foi une de la doctrine apostolique transmise par les Pères : « Jésus Christ lui-même étant la pierre d’angle ».
C’est pourquoi notre Eglise, dans ses offices, prie chaque jour le Seigneur de rassembler les dispersés et de réunir ceux qui sont égarés hors du chemin de la vérité, de la seule voie conduisant au salut de tous, le Fils Unique et Verbe de Dieu, Notre Seigneur Jésus Christ.
C’est dans cette espérance que notre Eglise orthodoxe du Christ est toujours prête à accueillir toute proposition d’union, à la condition expresse que l’Evêque de Rome abandonne définitivement et totalement toutes les nombreuses et diverses innovations contraires à l’Evangile, que de sa seule autorité il a imposé à son Eglise et qui ont provoqué la triste division des Eglises d’Orient et d’Occident ; ainsi, qu’il revienne à l’enseignement fondamental des Sept Saints Conciles Œcuméniques dont l’autorité est universelle et perpétuelle dans l’Eglise du Christ parce qu’ils y ont assemblés dans l’Esprit Saint, en présence des représentants de toutes les saintes Eglises de Dieu, pour affirmer la règle de la foi orthodoxe contre les hérétiques.
C’est ce que l’Eglise Orthodoxe, par ses actes et ses lettres encycliques, n’a cessé de demander à l’Eglise papale, lui donnant à entendre clairement et fermement que toute discussion sur l’union serait vaine et vide, tant que cette Eglise persévérerait dans ses innovations et aussi tant que l’Eglise orthodoxe serait fidèle aux traditions divines et apostoliques du Christianisme que l’Occident suivait lui aussi à l’époque où il était uni dans un même esprit avec les Eglises Orthodoxes d’Orient.
On voit donc pourquoi, jusqu’à maintenant, nous avons préféré le silence et le refus de prendre en considération l’encyclique papale, estimant inutile de parler à ceux qui n’ont pas les oreilles pour entendre. Mais puisque récemment, nous avons vu avec étonnement et inquiétude, la papauté abandonner la méthode de la discussion et de la persuasion pour prendre au piège les fidèles orthodoxes les plus simples et envoyer des ouvriers de mensonge déguisés en apôtres du Christ, revêtus des habits et ornements des prêtres orthodoxes, dans le but de faire, par toutes sortes de ruses, des prosélytes, nous avons cru de notre devoir sacré de publier cette lettre patriarcale et synodale pour la sauvegarde de la foi et de la piété orthodoxe, nous rappelant que « si l’observance des canons véridiques est un devoir pour tout homme de bien, elle l’est davantage encore pour ceux que la Providence a jugé dignes de gouverner les affaires des autres ». (Saint Photius, Epître 3).
4 – Comme nous l’avons déjà proclamé, l’Eglise Orthodoxe du Christ, Une, Sainte, Catholique et Apostolique, souhaite vivement la réunion sainte, dans une même foi, des Eglises qui se sont séparées d’elle ; mais sans cette unité dans la foi, l’union des Eglises est quelque chose d’impossible.
Puisqu’une telle unité, de l’aveu même du Pape, n’existe pas entre les orthodoxes et les catholiques, on ne comprend pas comment, Sa Sainteté Léon XIII peut affirmer que l’union véritable peut être réalisée et soutenir sans contradiction, comme il l’a fait dans son encyclique précédente du 30 novembre 1894, qu‘une fois l’union réalisée, chaque Eglise pourra conserver ses propres définitions dogmatiques et canoniques, même si elles différent de celles de l’Eglise de Rome. N’y a-t-il pas une contradiction manifeste, si dans une même Eglise, quand l’un confesse que le Saint Esprit procède du Père, l’autre croit qu’il procède du Père et du Fils ; quand l’un baptise par la triple immersion, l’autre asperge ; quand on utilise du pain levé pour la sainte Eucharistie, l’autre du pain sans levain ; quand l’un donne aux fidèles le calice et le pain, l’autre le pain seulement et ainsi de suite ?
Le sens même d’une telle contradiction nous est obscur ; le Pape agit-il par esprit de respect des traditions évangéliques et les reconnaît-il ainsi, fut-ce indirectement, par le biais d’une concession ? Ou agit-il pour d’autres motifs ?
5 - Quoi qu’il en soit, si l’on veut réaliser concrètement le pieux désir de l’union des Eglises, il faut poser un principe et un fondement commun qui ne saurait être plus solide que l’enseignement de l’Evangile et des Sept Conciles Œcuméniques. Revenant à l’enseignement qui était commun aux Eglises d’Orient et d’Occident jusqu’au schisme, il faut rechercher avec un désir sincère de vérité, quelle était la foi de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique, qui formait alors en Orient et en Occident un seul corps, afin de garder cette foi intacte et inaltérée.
Celui qui préfère la gloire de Dieu à sa propre gloire n’a-t-il pas le devoir absolu et sacré de corriger avec piété ce qui a pu être ajouté et retranché à la foi, et ne doit-il pas songer qu’il devra répondre devant le juste tribunal du Christ d’avoir, avec arrogance, perpétué la déformation de la vérité ? Nous ne parlons absolument pas ici des différences d’usage dans les saints offices ou dans la musique religieuse, ou dans les vêtements liturgiques, toutes choses qui ont toujours existé et qui ne portent pas atteinte à la substance et à l’unité de la foi ; mais il s’agit ici des divergences fondamentales qui engagent le divin dépôt de la foi et les canons transmis par Dieu pour le gouvernement des Eglises. En effet, saint Photios nous dit que « lorsque les divergences ne sont pas de foi et ne contredisent pas des règles universellement admises dans l’Eglise, les rites et les usages peuvent varier parmi les peuples et sont laissés au jugement de ceux qui ont le discernement pour apprécier leur justesse et leur conformité aux canons ».
6 – Dans cette perspective, pour la cause sainte de l’union, l’Eglise Orthodoxe et universelle du Christ, en Orient, est prête à accepter de tout cœur tout ce que les Eglises d’Orient et d’Occident confessaient unanimement avant le neuvième siècle, si tant est qu’elle ait modifié ou abandonné quoi que ce soit par la suite. Si les Occidentaux parviennent à prouver, en se fondant sur l’enseignement des Pères saints et des Conciles divinement rassemblés avant le neuvième siècle, que l’Eglise de Rome, alors orthodoxe, qui avait juridiction sur l’Occident, lisait avant cette date, le Credo avec l’addition du FILIOQUE, utilisait du pain azyme, acceptait la doctrine du feu purgatoire, aspergeait au lieu de baptiser, croyait à l’immaculée conception de la Toujours-Vierge Marie, au pouvoir temporel, à l’infaillibilité et à l’absolutisme de l’évêque de Rome – nous n’avons plus rien à répondre.
Mais si, au contraire il est prouvé, comme le reconnaissent certains Latins qui ont l’amour de la vérité, que l’Eglise Orthodoxe et universelle du Christ garde les doctrines transmises et confessées depuis l’origine, que l’Orient et l’Occident professaient ensemble, jusqu’à ce que l’Eglise d’Occident les pervertisse par ses innovations diverses, il est clair, même pour un enfant, que le moyen le plus simple pour réaliser l’union est le retour de l’Eglise occidentale à son ancienne situation doctrinale et canonique, - car la foi ne saurait changer selon le temps et les circonstances, elle demeure la même, toujours et partout, comme l’écrit l’Apôtre : « Il y a un seul corps et un seul esprit, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, et parmi tous et en tous ». (Ephésiens 4, 5-6).
7 – Ainsi, l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des Sept Conciles Œcuméniques confesse et enseigne, fidèlement à l’Evangile, que le Saint Esprit procède du Père, mais en Occident, à partir du IXe siècle, on falsifia le saint Credo rédigé et consacré par les Conciles Œcuméniques et on répandit arbitrairement l’idée que le Saint Esprit procédait aussi du Fils (FILIOQUE).
Et certainement, le Pape Léon XIII, n’est pas sans savoir que son prédécesseur et homonyme, le Pape orthodoxe Léon III, le confesseur de l’orthodoxie, fit condamner synodalement, en 809, l’addition du FILIOQUE comme contraire à l’Evangile et parfaitement illégitime ; et qu’ensuite, il fit graver sur deux plaques d’argent, en grec et en latin, le saint Credo de Nicée-Constantinople dans son intégralité et sans altération, ajoutant seulement cette inscription : « Moi Léon, j’ai posé ces plaques par amour et pour la sauvegarde de la foi orthodoxe ».
Le pape ne peut pas ignorer non plus qu’au cours du Xème siècle ou au début du XIème, cette addition illégitime et contraire à l’Evangile fut insérée dans le Credo à Rome et que, l’Eglise Romaine, en persistant dans les innovations, et en refusant de revenir au dogme des Conciles Œcuméniques, est nécessairement la seule responsable du schisme aux yeux de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique du Christ, qui garde ce qu’elle a reçu des Pères et conserve en toutes choses le dépôt de la foi dans son intégralité selon l’injonction de l’Apôtre : « Garde le bon dépôt, par le Saint Esprit qui habite en nous », « évite les discours vides et profanes et les disputes de la fausse science dont font profession quelques uns qui se sont ainsi détournés de la foi ». (2 Timothée 1, 14 : 1 Timothée 6, 20).
8 – L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept premiers Conciles Œcuméniques baptisait par triple immersion, et le pape Pelage dit que la triple immersion est un « commandement du Seigneur ». Au XIIIème siècle, le baptême par immersion prévalait encore en Occident et les saints fonts baptismaux qui ont été conservés dans les églises les plus anciennes d’Italie, l’attestent de manière éloquente. Mais plus tard, la papauté admit de son propre chef, l’aspersion et voulut s’y tenir, ce qui élargit encore le fossé qu’elle avait creusé. Mais nous, orthodoxes, fidèles à la Tradition apostolique et à la pratique de l’Eglise des sept Conciles Oecuméniques, « nous tenons bon », selon le mot de saint Basile, « et nous luttons pour la confession commune, en gardant précieusement le trésor de la foi droite légué par nos Pères ».
9 – L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des Sept Conciles Œcuméniques, suivant l’exemple même de Notre Sauveur, a célébré la sainte et divine eucharistie pendant près de mille ans en Occident comme en Orient avec du pain levé, comme l’attestent eux-mêmes les théologiens occidentaux aimant la vérité. Mais la papauté, à partir du XIème siècle, a fait aussi une innovation au sacrement saint et divin de l’Eucharistie en y introduisant du pain sans levain.
10 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept saints Conciles Œcuméniques a toujours affirmé que les saints dons sont consacrés après la prière d’invocation au Saint Esprit par la bénédiction du prêtre, comme les anciens rituels de Rome et des Gaules peuvent en témoigner. Néanmoins, la papauté a, là encore, innové en affirmant d’une façon arbitraire que la consécration des dons précieux se produisait lorsque l’on prononçait les paroles du Seigneur : « Prenez et mangez, ceci est mon corps » et « Buvez en tous, ceci est mon sang ».
11 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept Conciles Œcuméniques, fidèle au commandement du Seigneur « Buvez en tous » fait communier également les fidèles au saint calice, alors que la papauté, depuis le XIème siècle, a innové en privant les laïcs du saint calice ;
Elle a ainsi transgressé le commandement même du Seigneur et contrevenu à la pratique universelle de l’Eglise et aux nombreuses interdictions formelles des évêques anciens de Rome.
12 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept Conciles Œcuméniques, marchant sur les traces des Apôtres, de la Tradition et de la Sainte Ecriture, prie et invoque la miséricorde de Dieu pour le pardon et le repos de ceux qui se sont endormis dans le Seigneur. Mais la papauté, à partir du XIIème siècle, a inventé et donné comme privilège particulier au pape, une multitude d’innovations, le feu purgatoire, la surabondance des vertus des saints et leur distribution à ceux qui en ont besoin, etc. soutenant encore qu’il existe une pleine récompense pour les Justes, avant la Résurrection universelle et le Jugement dernier.
13 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept Conciles Œcuméniques enseigne que l’incarnation surnaturelle du Fils et Verbe de Dieu, Son Incarnation du Saint Esprit et de Marie la Vierge est SEULE pure et immaculée. Mais la papauté – il y a à peine quarante ans – a introduit une autre innovation et produit un nouveau dogme, celui de l’immaculée conception de la Mère de Dieu et Toujours Vierge Marie, inconnu dans l’Eglise ancienne et combattu même par la suite, par de nombreux théologiens de la papauté.
14 – Le pape a passé sous silence, dans son encyclique, ces différences considérables et fondamentales en matière de foi, qui séparent les deux Eglises, et dont l’Occident fut pourtant l’inventeur ; et il nous présente la question de la primauté du Souverain Pontife pour la principale et même pour la seule cause de la division ; il nous renvoie aux sources afin que nous nous livrions à une recherche diligente et que nous déterminions ce que nos pères confessaient et ce que les premiers temps du christianisme nous ont légué.
Or, si nous consultons les Pères et les Conciles Oecuméniques de l’Eglise durant les neuf premiers siècles, nous sommes certains que l’évêque de Rome n’a jamais été considéré comme l’autorité suprême et le chef infaillible de l’Eglise, mais que chaque évêque était, à la tête de sa propre Eglise, soumis seulement aux ordonnances synodales et aux décisions de l’Eglise universelle, qui, elle seule, est infaillible. L’évêque de Rome ne faisait en aucune manière exception à cette règle, comme le montre l’histoire de l’Eglise. Seul, Notre Seigneur Jésus Christ est le maître éternel et le Prince immortel de l’Eglise, car « Il est la tête du corps de l’Eglise » (Colossiens 1, 18), et qu’Il a dit à Ses divins disciples et apôtres lors de Son Ascension dans les cieux : « Voici, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ».
Dans la Sainte Ecriture, l’Apôtre Pierre – dont les papistes font le fondateur de l’Eglise de Rome en se fondant sur les Pseudo-Clémentines, lettres apocryphes du deuxième siècle – lors du Concile Apostolique de Jérusalem, parle en égal avec les autres Apôtres ; ailleurs, il est sévèrement réprimandé par l’Apôtre Paul, comme en témoigne l’Epître aux Galates, en 2, 11.
En outre, les papistes savent très bien eux-mêmes que durant les premiers siècles, le passage de l’Evangile auquel se réfère le Pape : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise », est interprété d’une façon tout autre par la Tradition et par l’unanimité des Pères saints. La pierre d’angle sur laquelle le Seigneur a bâti son Eglise et contre laquelle les portes de l’enfer ne prévaudront pas, c’est métaphoriquement la véritable confession de Pierre, selon laquelle le Seigneur « est le Christ, le Fils du Dieu Vivant ».
Sur cette confession et sur cette foi repose, inébranlable, l’enseignement salutaire de la prédication évangélique transmise par les Apôtre à leurs successeurs. C’est manifestement ce passage interprété que l’Apôtre Paul, ravi aux Cieux, avait en vue lorsqu’il déclara sous l’inspiration divine : « Selon la grâce que Dieu m’a donnée, j’ai posé le fondement comme un habile architecte, mais un autre bâtit dessus. Car personne ne peut poser un autre fondement que celui qui est en place, à savoir, Jésus Christ ».
Dans un autre sens, l’Apôtre Paul dit, dans l’Epître aux Ephésiens, que les Prophètes et les Apôtres sont, ensemble, le fondement de l’édification des fidèles dans le Christ, c’est-à-dire les membres du corps du Christ qu’est l’Eglise : « Ainsi donc, vous n’êtes plus des étrangers, ni des gens du dehors, mais vous êtes des concitoyens, des saints et membres de la famille de Dieu. Vous êtes établis sur le fondement des Apôtres et des Prophètes, Jésus Christ étant la pierre d’angle ». (Ephésiens 2, 19).
Tel étant donc l’enseignement divinement inspiré des Apôtres en ce qui concerne le fondement et le chef de l’Eglise de Dieu, les saints Pères qui s’en tenaient fermement aux traditions apostoliques, ne pouvaient imaginer une primauté absolue de l’Apôtre Pierre et des Evêques de Rome ; ils ne pouvaient pas donner de ce texte évangélique une autre interprétation, inconnue de l’Eglise, différente de celle qui est véridique et juste. Ils ne pouvaient pas non plus inventer de leur propre autorité, une doctrine nouvelle accordant des privilèges excessifs à l’évêque de Rome, comme successeur prétendu de saint Pierre ; surtout si l’on sait que l’Eglise de Rome, a été fondée, non par Pierre – dont le ministère apostolique à Rome est inconnu – mais par Paul, l’Apôtre des Gentils ravi aux cieux, dont l’apostolat à Rome nous est parfaitement connu par ses disciples.
15 – Les divins Pères, honorant l’évêque de Rome au seul titre d’évêque de la capitale de l’Empire, lui ont donné une primauté d’honneur, le considérant le premier parmi les égaux. Ils ont aussi attribué cette primauté à l’évêque de Constantinople, quand cette ville devint capitale de l’Empire romain, comme en témoigne le vingt-huitième canon du Concile Œcuménique de Chalcédoine, qui dit entre autres : « Nous décidons et décrétons les mêmes choses en ce qui concerne les prérogatives de la très sainte Eglise de Constantinople, la Nouvelle Rome. Les Pères ont à juste titre accordé cette prérogative au trône de l’ancienne Rome, parce qu’elle était la capitale impériale. De même, mus par la même considération, les cent cinquante évêques très pieux ont conféré une prérogative égale, au trône de la Nouvelle Rome ».
Ce canon démontre donc que l’évêque de Rome est égal à l’évêque de Constantinople et à ceux des autres Eglises : aucun canon, aucun écrit des Pères de l’Eglise ne contient la moindre allusion à une éventuelle primauté de l’Evêque de Rome sur l’Eglise universelle, à une juridiction infaillible sur les évêques des autres Eglises indépendantes et autonomes, ou encore, à une succession particulière de l’Apôtre Pierre comme vicaire de Jésus Christ sur la terre.
16 – À l’époque des Sept Conciles Oecuméniques, chaque Eglise autocéphale d’Orient et d’Occident, était totalement indépendante et s’administrait elle-même. Comme les évêques des Eglises autocéphales d’Orient, les Eglises d’Afrique, d’Espagne, des Gaules, de Germanie et de Grande-Bretagne dirigeaient elles-mêmes, en des conciles locaux, leurs propres affaires ;
L’évêque de Rome n’avait aucun droit d’intervenir, et lui-même, comme les autres, était soumis avec obéissance aux décisions des synodes. Mais, pour des questions importantes nécessitant la sanction de l’Eglise universelle, on réunissait un Concile Œcuménique qui seul était et demeure l’instance suprême dans l’Eglise universelle. Les évêques étaient indépendants les uns des autres et chacun, à l’intérieur de sa juridiction, mais ils devaient se conformer aux décrets des synodes où, tous, ils étaient égaux.
De plus, aucun d’eux n’a jamais prétendu à un pouvoir monarchique sur l’Eglise entière ; si parfois certains évêques de Rome, ambitieux, ont exprimé des revendications excessives et ont aspiré à un absolutisme inconnu de l’Eglise, ils ont été blâmés par tous. L’affirmation de Léon XIII, selon laquelle, avant Photius le Grand, le nom du trône de Rome était saint pour tous les peuples du monde chrétien, que l’Orient et l’Occident étaient absolument soumis à l’évêque de Rome comme successeur légitime de saint Pierre et comme vicaire de Jésus Christ sur la terre, cette affirmation est donc une erreur manifeste.
17 – Pendant les neuf siècles des Conciles Oecuméniques, l’Eglise Orthodoxe d’Orient n’a jamais reconnu certaines prétentions excessives à la primauté, avancées par les évêques de Rome, ni ne s’est jamais soumise à ces derniers, comme l’histoire de l’Eglise en apporte le témoignage évident. L’indépendance de l’Orient à l’égard de l’Occident est clairement montrée par la lettre très significative de Basile le Grand à Eusèbe, le saint évêque de Samosate : « lorsqu’on fait appel à des gens à l’esprit hautain, ils n’en deviennent que plus méprisants. Si le Seigneur a pitié de nous, de quelle autre aide avons-nous besoin ? Mais si la colère de Dieu est sur nous, quelle aide, les occidentaux arrogants pourront-ils nous apporter ? Les hommes qui ne connaissent pas la Vérité, ne peuvent supporter de l’apprendre ; leurs fausses suspicions les remplissent de préjugés et ils se conduisent aujourd’hui de la même façon que jadis pour Marcellus ».
Le vénéré Photios, le saint hiérarque et luminaire de Constantinople, défendit cette indépendance dans la seconde moitié du IXème siècle, et pressentant que bientôt l’Occident ne respecterait plus les constitutions apostoliques et se séparerait de l’Orient Orthodoxe, il s’efforça d’abord d’éviter pacifiquement ce danger. Alors, l’évêque de Rome, Nicolas 1er, se mêla, au mépris des canons, des affaires de l’Orient et sortant des limites de son autorité, voulut soumettre l’Eglise de Constantinople. C’est ainsi qu’il amena les Eglises au bord du schisme douloureux.
Voilà comment les germes de l’absolutisme papal, semés grâce aux Pseudo-Clémentines, furent cultivés, à l’époque précisément de Nicolas 1er, grâce aux pseudos-décrets isidoriens, mélange de fausses décisions impériales et de lettres controuvées des anciens évêques de Rome, qui visent à faire croire, au mépris de la vérité historique et de la constitution de l’Eglise, que dans les premiers temps du christianisme, on accordait aux évêques de Rome une autorité sans limites sur l’Eglise universelle.
18 – Nous rappelons ces faits avec une tristesse dans notre cœur d’autant plus grande que la Papauté d’aujourd’hui, tout en reconnaissant que ces décrets outranciers étaient des faux, rédigés de propos délibérés, refuse pourtant de revenir aux canons et aux règles des Conciles Œcuméniques.
Elle a même, à la fin du XIXème siècle, accru encore le fossé qui sépare la papauté de l’Eglise orthodoxe, en proclamant que l’évêque de Rome est infaillible.
L’Eglise du Christ, en Orient, orthodoxe et catholique, ne reconnaît personne infaillible sur cette terre, à l’exception du Fils et Verbe de Dieu qui s’est incarné d’une façon ineffable. L’Apôtre Pierre lui-même, dont le Pape se prétend successeur, a renié trois fois le Christ et a été deux fois vivement réprimandé par l’Apôtre Paul, pour ne pas avoir suivi correctement la voie de la vérité évangélique. (Galates 2, 11).
Au IVème siècle, le Pape Libère souscrivit une confession arienne et au Vème siècle, le Pape Zosime approuva une confession hérétique niant les suites du premier péché. Au VIème siècle, le Pape Vigile, fut condamné par le Cinquième Concile Œcuménique pour ses fausses opinions. Quant au Pape Honorius, au VIIème siècle, tombé dans l’hérésie monothélite, il fut condamné comme hérétique par le Sixième Concile Œcuménique et les Papes qui lui ont succédé ont reconnu et accepté cette condamnation.
19 – Tous ces faits furent reconnus des peuples d’Occident, au fur et à mesure que la culture se répandait, et ils commencèrent à protester contre ces innovations et à exiger – comme ce fut le cas au XVème siècle, au Concile de Bâle et celui de Constance – le retour à la constitution ecclésiastique des premiers siècles à laquelle, par la grâce de Dieu, les Eglises d’Orient et du Nord, qui seules, forment à présent l’Eglise Une, Sainte, Catholique, et Apostolique du Christ, la colonne et le fondement de la vérité, sont et resteront fidèles.
La même protestation contre la papauté fut élevée au XVIIème siècle par les savants théologiens gallicans et au XVIIIème siècle par les évêques allemands. En notre siècle de science et de critique, la conscience chrétienne s’est dressée contre le nouveau dogme de l’infaillibilité pontificale et ce sont encore les théologiens allemands qui ont protesté en 1870. Il en a résulté la formation de la communauté religieuse indépendante des Vieux Catholiques qui ont désavoué la papauté et en demeurent séparés.
20 – C’est donc en vain que l’évêque de Rome nous renvoie aux sources pour que nous y cherchions attentivement ce que croyaient nos Pères d’autrefois et ce qu’est l’héritage des origines du Christianisme. C’est précisément dans ces sources que nous, les orthodoxes, nous puisons les doctrines anciennes et divinement transmises que nous gardons précieusement jusqu’à aujourd’hui ; nous n’y voyons nulle part les innovations que l’Occident a introduites tardivement, en des temps d’indigence spirituelle, et que la papauté a adoptées et conserve jusqu’à présent.
Ainsi, l’Eglise orthodoxe d’Orient se glorifie justement dans le Christ d’être l’Eglise des sept Conciles Œcuméniques et des neuf premiers siècles du Christianisme et donc d’être l’Eglise du Christ, Une, Sainte, Catholique et Apostolique, « la colonne et le fondement de la vérité ». Quant à l’Eglise Romaine moderne, elle est l’Eglise des innovations, de la falsification des écrits des Pères de l’Eglise, de l’interprétation erronée de la Sainte Ecriture et des décisions des saints Conciles. Ce pourquoi elle a été condamnée et le demeure tant qu’elle persiste dans son erreur, car, comme le disait saint Grégoire le Théologien, « une guerre louable vaut mieux qu’une paix qui sépare de Dieu ».
21 – Telles sont, en résumé, les graves et arbitraires innovations sur la foi et la constitution canonique de l’Eglise, que la papauté a introduites et que l’Encyclique de Léon XIII passe volontairement sous silence. Ces innovations qui touchent à des points fondamentaux de la foi et de l’administration de l’Eglise et qui sont manifestement contraire à la situation ecclésiale des neuf premiers siècles, rendent impossible l’union tant désirée des Eglises.
Toute âme pieuse et orthodoxe est remplie d’une douleur inexprimable en voyant la papauté persister avec orgueil dans ses erreurs, alors qu’en revenant à sa situation antérieure, celle de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique du Christ, elle contribuerait à la réalisation de l’union.
22 – Qu’allons-nous répondre à ce que le pontife romain écrit aux glorieux peuples des Slaves ? Personne n’a jamais nié que c’est par la vertu et l’œuvre apostolique de saint Cyrille et de saint Méthode, que la grâce du salut est venue à plusieurs peuples slaves : l’histoire témoigne qu’au temps de Photios le Grand, ces apôtres grecs des Slaves, ces amis intimes de ce divin Père, partis de Thessalonique pour convertir les Slaves, étaient envoyés, non par Rome mais par Constantinople, ville où ils s’étaient formés et avaient été moines, au Monastère de saint Polychrone.
Ces faits contredisent absolument l’affirmation contenue dans l’Encyclique du Pontife Romain au sujet des relations amicales et de la profonde sympathie qui auraient existé entre les tribus slaves et les évêques de Rome.
Même si Sa Sainteté le Pape Léon XIII l’ignore, l’histoire nous apprend avec certitude que les saints Apôtres des Slaves ont rencontré une vive opposition dans leur œuvre et même des excommunications venant des Papes et qu’ils furent plus cruellement persécutés par les évêques franks partisans du Pape que par les païens de ces régions.
Sa Sainteté le Pape sait très certainement qu’après la mort de saint Méthode, deux cents de ses plus remarquables disciples, à la suite de nombreuses luttes suscitées par l’opposition papale, furent chassés de Moravie et conduits par la force des armes hors de ce pays, pour se disperser en Bulgarie et ailleurs. Il sait sans doute aussi qu’après l’expulsion du clergé slave le plus savant, le rite oriental et l’emploi de la langue slave, alors en usage dans la liturgie, furent supprimés et que peu à peu tout vestige d’orthodoxie disparut de ces provinces, tout cela avec la bénédiction et la coopération honteuse des évêques de Rome, peu soucieux de la sainteté et de la dignité épiscopale.
Pourtant, malgré ces traitements arrogants, les Eglises Orthodoxes Slaves, les filles bien-aimées de l’Orient orthodoxe, et en particulier la grande et glorieuse Eglise de Russie, ont été protégées et sauvegardées par la grâce de Dieu ; elles ont gardé et garderont jusqu’à la fin des temps la foi orthodoxe et la liberté qui se trouve dans le Christ.
C’est donc en vain que l’Encyclique papale promet aux Eglises slaves, prospérité et grandeur, puisque, par la volonté de Dieu, elles jouissent déjà de ces bénédictions et se glorifient dans le Christ de leur fidélité à l’orthodoxie de leurs Pères.
23 – Tels sont les faits, ils sont prouvés indubitablement par l’histoire de l’Eglise ; et c’est, dans le souci d’accomplir tout notre devoir, que nous nous adressons maintenant aux peuples d’Occident qui avec crédulité, par ignorance de la véritable et impartiale histoire de l’Eglise, se sont laissés entraîner loin de nous et ont adhéré aux innovations anti-évangéliques et illégitimes de la Papauté schismatique et délaissé l’Eglise Orthodoxe du Christ, Une, Sainte, Catholique et Apostolique, qui est « l’Eglise du Dieu Vivant, la colonne et le fondement de la vérité », dans laquelle leurs glorieux ancêtres ont brillé par leur piété et l’orthodoxie de leur foi et dont ils ont été les membres fidèles et précieux pendant neuf siècles, suivant avec obéissance ses décisions et marchant sur les traces des Pères et des Conciles Œcuméniques.
24 – Peuples amis du Christ, des glorieux pays d’Occident : d’une part nous nous réjouissons de voir que vous avez un zèle réel pour le Christ et que vous êtes guidés par cette juste conviction que « sans la foi du Christ, on ne peut plaire à Dieu » (Hébreux 11, 6) ; mais d’autre part, il est évident pour tout homme de bon sens que la foi salutaire dans le Christ, doit être en tout point conforme à l’Ecriture Sainte et aux Traditions Apostoliques, sur lesquelles reposent l’enseignement des Pères divins et celui des sept Conciles Œcuméniques divinement assemblés.
Il est tout aussi manifeste que l’Eglise universelle qui seule garde en son sein, intégralement et sans changement, la foi une, le divin dépôt prêché et transmis par les Pères théophores guidés par le Saint Esprit, est "une et identique" pour l’éternité et non "multiple et changeante" au gré des temps. Car les vérités évangéliques ne sont pas susceptibles de modification ou de progrès selon les époques, comme le sont les divers systèmes philosophiques : « Jésus est le même hier, aujourd’hui et pour l’éternité » (Hébreux 13, 8).
C’est ce qu’affirmait au Vème siècle le très saint Vincent, nourri du lait de la piété reçue des Pères, au monastère de Lérins en Gaule, lorsqu’il définissait, avec grande sagesse et orthodoxie, le véritable caractère de la foi et de l’Eglise : « Dans l’Eglise Catholique, nous devons surtout nous soucier de conserver ce qui a été cru partout, en tout temps et par tous. Car cela seul peut être dit vraiment et justement catholique, dans toute la force et la signification du mot, qui veut dire « qui comprend tout universellement ». Et il en sera ainsi, si nous suivons l’universalité, l’antiquité et le consentement de tous ».
Mais, comme nous l’avons dit, l’Eglise Occidentale, depuis le Xème siècle et jusqu’à nos jours, a introduit, du fait de la Papauté, des doctrines nouvelles, étrangères et hérétiques et s’est ainsi trouvée séparée et éloignée de la véritable et orthodoxe Eglise du Christ.
Combien donc, il vous est nécessaire de revenir et de retourner aux doctrines anciennes et inaltérées de l’Eglise afin d’obtenir le salut en Christ que vous désirez tant, vous le comprenez facilement en lisant avec attention, le commandement donné par l’Apôtre Paul qui fut ravi aux cieux, écrivant aux Thessaloniciens : « Frères, demeurez fermes et retenez les instructions que vous avez reçues, soit par notre parole, soit par notre lettre » (2 Thessaloniciens 2, 15).
Le même Apôtre saint dit aussi aux Galates : « Je m’étonne que vous vous détourniez si promptement de Celui qui vous a appelés par la Grâce du Christ, pour passer à un autre évangile. Non pas qu’il y ait un autre Evangile, mais il y a des gens qui vous troublent et qui veulent renverser l’Evangile du Christ » (Galates 1, 6-7).
Evitez cependant ces pervertisseurs de la vérité évangélique : « Eloignez-vous d’eux, car de tels hommes ne servent point le Christ Notre Seigneur, mais leur propre ventre ; et, par des paroles douces et flatteuses, ils séduisent les cœurs des simples » (Romains 16, 18).
Revenez maintenant dans le sein de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique de Dieu, qui comprend toutes les Eglises plantées par Dieu comme de riches vignes dans l’ensemble du monde orthodoxe et qui sont inséparablement unies les unes aux autres par la même foi salvatrice en Christ, dans la paix et dans l’Esprit Saint, afin que le Nom tout honorable et magnifique de notre Dieu et Sauveur Jésus Christ, qui a souffert pour le salut du monde, soit aussi glorifié parmi vous.
25 – Quant à nous qui, par la grâce et la volonté miséricordieuse de Dieu, sommes les membres précieux du Corps du Christ, c’est-à-dire de Son Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique, gardons fermement la piété de nos Pères telle qu’elle nous a été transmise depuis les temps apostoliques.
Méfions-nous des faux-apôtres déguisés en brebis, qui tentent de séduire les plus simples d’entre les nôtres par de fausses promesses, autorisant tout pour obtenir l’union à la seule condition toutefois, qu’ils reconnaissent le pape de Rome comme chef suprême et infaillible et souverain absolu de l’Eglise universelle, comme seul représentant du Christ sur la terre et source de toute grâce.
Nous, au contraire, qui avons été par la grâce et la bonté de Dieu, établis évêques, pasteurs et docteurs des Saintes Eglises de Dieu, « veillons sur nous-mêmes et sur tout le troupeau dont l’Esprit Saint nous a institués les surveillants pour paître l’Eglise de Dieu qu’Il s’est acquise par son propre Sang » (Actes 20, 28) et, conscients que nous devrons en rendre compte, « exhortons-nous réciproquement les uns les autres » (1 Thessaloniciens 5, 11). « Et que le Dieu de toute grâce, qui nous a appelés dans le Christ Jésus à Sa gloire éternelle, nous rende parfaits, forts et inébranlables » (1 Pierre 5, 10) et qu’Il fasse que tous ceux qui errent loin du troupeau un, saint, catholique et orthodoxe de ses brebis raisonnables, soient illuminés de la Lumière de Sa grâce et de la connaissance de la Vérité.
A Lui la gloire et le règne aux siècles des siècles. Amen !
Fait dans le Palais Patriarcal de Constantinople, au Mois d’Août de l’an de grâce 1895.
+ ANTHIME, de Constantinople, frère bien-aimé et intercesseur dans le Christ Notre Dieu,
+ NICODEME, de Cyzique, frère bien- aimé…
+ PHILOTHEE, de Nicomédie…
+ JEROME, de Nicée…
+ NATHANAEL, de Pruse…
+ BASILE, de Smyrne…
+ STEPHANE, de Philadelphie…
+ ATHANASE, de Lemnos…
+ BESSARION, de Durazzo…
+ DOROTHEE, de Belgrade…
+ NICODEME, d’Elasson…
+ SOPHRONIOS, de Carpathe et Cassus…
+ DENIS, d’Eleuthéropolis…
Encyclique des Patriarches orientaux, de 1895
Traduction de l’anglais par Presbytéra Hélène.
Le 20 juin 1895, à l’occasion de son Jubilé Episcopal, le Pape Léon XIII publiait à l’adresse des Chefs d’Etats et des Peuples de l’univers, son Encyclique « Praeclara gratulationis… » L’Eglise Orthodoxe y était invitée à s’unir au Trône Papal et à reconnaître le Pape comme Chef Suprême de l’Eglise, dans le sens défini par le dogme du Concile du Vatican, les Orthodoxes gardant, bien entendu, leurs propres langues et leurs rites liturgiques, ainsi que leurs usages et leurs diverses traditions.
Parallèlement, l’Encyclique recommandait l’extension, en Orient Orthodoxe, de l’Uniatisme, l’envoi par Rome d’un grand nombre d’agents qui, sous le froc orthodoxe, convertiraient, par tous les moyens, les orthodoxes.
Devant cette menace, et pour prévenir et protéger les fidèles de la propagande latine, le Patriarcat de Constantinople publiait à son tour, l’Encyclique qui va suivre.
Dix questions y sont abordées :
1° Le Filioque.
2° La Primauté et l’Infaillibilité papales.
3° Le Baptême par aspersion.
4° Le pain azyme pour l’Eucharistie.
5° Le consécration des saints dons par les seules paroles du Seigneur et non par l’Epiclèse.
6° La communion des fidèles sans le Sang du Christ.
7° Le Purgatoire.
8° Les mérites surérogatoires des saints.
9° Les indulgences.
10° La rétribution et la béatitude des Justes et des Saints sitôt après la mort et avant la Résurrection universelle.
11° L’Immaculée Conception de la Mère de Dieu.
Cette lettre se termine par l’affirmation que l’Eglise Orthodoxe est l’Eglise des Sept Conciles Œcuméniques et des Neuf Premiers siècles du christianisme, qu’elle est l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique, la Colonne et le Fondement de la Vérité ; qu’elle désire ardemment l’unité de la foi dans la doctrine des Apôtres transmise par les pères et dont le Christ est la Pierre d’angle.
L’Eglise Romaine, dit encore le document patriarcal, est l’Eglise des innovations, des altérations des œuvres des pères de l’Eglise, de la fausse interprétation des Ecritures et des définitions des saints Conciles, l’Eglise qui depuis le IXème siècle, a introduit en elle, par le papisme, des doctrines hérétiques, et étrangères qui l’ont éloignée et séparée d l’Eglise du Christ.
TEXTE
A nos très saints et très aimés de Dieu, frères en Christ, les Métropolites et les Evêques, à leur clergé saint et vénérable, et à tous les laïcs pieux et orthodoxes du saint trône apostolique et patriarcat de Constantinople.
« Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont annoncé la parole de Dieu ; considérez quelle a été la fin de leur vie et imitez leur foi. Jésus Christ est le même hier, aujourd’hui et pour l’éternité (Hébreux 13, 7).
1 – Toute âme pieuse et orthodoxe, animée d’un zèle sincère pour la Gloire de Dieu, ressent une tristesse et une douleur profonde de voir que l’ennemi du Bien, celui qui a été meurtrier dès le commencement, par jalousie du salut de l’homme, ne cesse jamais de semer l’ivraie dans le champ du Seigneur pour y étouffer le bon grain. C’est lui qui fut, dès les premiers temps, l’auteur de ces hérésies, semblables à de l’ivraie, qui sont apparues dans l’Eglise du Christ et qui ont nui de mille manières, et nuisent toujours, au salut de l’humanité en Christ. C’est avec justice que ces hérésies, comme de mauvaises herbes ou des membres gangrenés, ont été ôtées et séparées du Corps sain qu’est l’Eglise Orthodoxe Universelle du Christ.
Ainsi, en ces derniers temps, le Malin a égaré, en Occident, loin de l’Eglise Orthodoxe du Christ, des nations entières, en inspirant aux évêques de Rome, des pensées d’une arrogance folle et des innovations contraires aux Canons de l’Eglise et à l’Evangile. Cela même n’a pas suffit ; mais il a fallu encore que les papes de Rome aient cherché, par des tentatives d’union, déterminées mais sans jugement, à plier à leur fantaisie et à soumettre à leurs erreurs, l’Eglise Catholique du Christ qui poursuit sa marche, inébranlable, dans l’orthodoxie de la foi transmise par les Pères Saints.
2 – Ainsi, Sa Sainteté, le Pape de Rome Léon XIII, pour son jubilé épiscopal, a publié au mois de juin de l’an de grâce 1895, une lettre encyclique adressée aux chefs d’Etats et aux nations du monde entier, où il invite en particulier notre Eglise Orthodoxe, Catholique et Apostolique à s’unir au trône papal, il y soutient que la seule voie pour atteindre à une telle union est que l’Eglise Orthodoxe le reconnaisse comme souverain pontife, comme la plus haute autorité en matière spirituelle et temporelle, comme unique représentant du Christ sur la terre et comme dispensateur de toute grâce.
3 – Sans aucun doute, le cœur de tout chrétien doit être rempli du désir de l’union des Eglises ; et le monde orthodoxe tout particulièrement, inspiré du véritable esprit de piété et considérant le dessein divin de l’établissement de l’Eglise par le Dieu-Homme, Notre Sauveur Jésus Christ, souhaite vivement l’unité des Eglises dans la foi une de la doctrine apostolique transmise par les Pères : « Jésus Christ lui-même étant la pierre d’angle ».
C’est pourquoi notre Eglise, dans ses offices, prie chaque jour le Seigneur de rassembler les dispersés et de réunir ceux qui sont égarés hors du chemin de la vérité, de la seule voie conduisant au salut de tous, le Fils Unique et Verbe de Dieu, Notre Seigneur Jésus Christ.
C’est dans cette espérance que notre Eglise orthodoxe du Christ est toujours prête à accueillir toute proposition d’union, à la condition expresse que l’Evêque de Rome abandonne définitivement et totalement toutes les nombreuses et diverses innovations contraires à l’Evangile, que de sa seule autorité il a imposé à son Eglise et qui ont provoqué la triste division des Eglises d’Orient et d’Occident ; ainsi, qu’il revienne à l’enseignement fondamental des Sept Saints Conciles Œcuméniques dont l’autorité est universelle et perpétuelle dans l’Eglise du Christ parce qu’ils y ont assemblés dans l’Esprit Saint, en présence des représentants de toutes les saintes Eglises de Dieu, pour affirmer la règle de la foi orthodoxe contre les hérétiques.
C’est ce que l’Eglise Orthodoxe, par ses actes et ses lettres encycliques, n’a cessé de demander à l’Eglise papale, lui donnant à entendre clairement et fermement que toute discussion sur l’union serait vaine et vide, tant que cette Eglise persévérerait dans ses innovations et aussi tant que l’Eglise orthodoxe serait fidèle aux traditions divines et apostoliques du Christianisme que l’Occident suivait lui aussi à l’époque où il était uni dans un même esprit avec les Eglises Orthodoxes d’Orient.
On voit donc pourquoi, jusqu’à maintenant, nous avons préféré le silence et le refus de prendre en considération l’encyclique papale, estimant inutile de parler à ceux qui n’ont pas les oreilles pour entendre. Mais puisque récemment, nous avons vu avec étonnement et inquiétude, la papauté abandonner la méthode de la discussion et de la persuasion pour prendre au piège les fidèles orthodoxes les plus simples et envoyer des ouvriers de mensonge déguisés en apôtres du Christ, revêtus des habits et ornements des prêtres orthodoxes, dans le but de faire, par toutes sortes de ruses, des prosélytes, nous avons cru de notre devoir sacré de publier cette lettre patriarcale et synodale pour la sauvegarde de la foi et de la piété orthodoxe, nous rappelant que « si l’observance des canons véridiques est un devoir pour tout homme de bien, elle l’est davantage encore pour ceux que la Providence a jugé dignes de gouverner les affaires des autres ». (Saint Photius, Epître 3).
4 – Comme nous l’avons déjà proclamé, l’Eglise Orthodoxe du Christ, Une, Sainte, Catholique et Apostolique, souhaite vivement la réunion sainte, dans une même foi, des Eglises qui se sont séparées d’elle ; mais sans cette unité dans la foi, l’union des Eglises est quelque chose d’impossible.
Puisqu’une telle unité, de l’aveu même du Pape, n’existe pas entre les orthodoxes et les catholiques, on ne comprend pas comment, Sa Sainteté Léon XIII peut affirmer que l’union véritable peut être réalisée et soutenir sans contradiction, comme il l’a fait dans son encyclique précédente du 30 novembre 1894, qu‘une fois l’union réalisée, chaque Eglise pourra conserver ses propres définitions dogmatiques et canoniques, même si elles différent de celles de l’Eglise de Rome. N’y a-t-il pas une contradiction manifeste, si dans une même Eglise, quand l’un confesse que le Saint Esprit procède du Père, l’autre croit qu’il procède du Père et du Fils ; quand l’un baptise par la triple immersion, l’autre asperge ; quand on utilise du pain levé pour la sainte Eucharistie, l’autre du pain sans levain ; quand l’un donne aux fidèles le calice et le pain, l’autre le pain seulement et ainsi de suite ?
Le sens même d’une telle contradiction nous est obscur ; le Pape agit-il par esprit de respect des traditions évangéliques et les reconnaît-il ainsi, fut-ce indirectement, par le biais d’une concession ? Ou agit-il pour d’autres motifs ?
5 - Quoi qu’il en soit, si l’on veut réaliser concrètement le pieux désir de l’union des Eglises, il faut poser un principe et un fondement commun qui ne saurait être plus solide que l’enseignement de l’Evangile et des Sept Conciles Œcuméniques. Revenant à l’enseignement qui était commun aux Eglises d’Orient et d’Occident jusqu’au schisme, il faut rechercher avec un désir sincère de vérité, quelle était la foi de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique, qui formait alors en Orient et en Occident un seul corps, afin de garder cette foi intacte et inaltérée.
Celui qui préfère la gloire de Dieu à sa propre gloire n’a-t-il pas le devoir absolu et sacré de corriger avec piété ce qui a pu être ajouté et retranché à la foi, et ne doit-il pas songer qu’il devra répondre devant le juste tribunal du Christ d’avoir, avec arrogance, perpétué la déformation de la vérité ? Nous ne parlons absolument pas ici des différences d’usage dans les saints offices ou dans la musique religieuse, ou dans les vêtements liturgiques, toutes choses qui ont toujours existé et qui ne portent pas atteinte à la substance et à l’unité de la foi ; mais il s’agit ici des divergences fondamentales qui engagent le divin dépôt de la foi et les canons transmis par Dieu pour le gouvernement des Eglises. En effet, saint Photios nous dit que « lorsque les divergences ne sont pas de foi et ne contredisent pas des règles universellement admises dans l’Eglise, les rites et les usages peuvent varier parmi les peuples et sont laissés au jugement de ceux qui ont le discernement pour apprécier leur justesse et leur conformité aux canons ».
6 – Dans cette perspective, pour la cause sainte de l’union, l’Eglise Orthodoxe et universelle du Christ, en Orient, est prête à accepter de tout cœur tout ce que les Eglises d’Orient et d’Occident confessaient unanimement avant le neuvième siècle, si tant est qu’elle ait modifié ou abandonné quoi que ce soit par la suite. Si les Occidentaux parviennent à prouver, en se fondant sur l’enseignement des Pères saints et des Conciles divinement rassemblés avant le neuvième siècle, que l’Eglise de Rome, alors orthodoxe, qui avait juridiction sur l’Occident, lisait avant cette date, le Credo avec l’addition du FILIOQUE, utilisait du pain azyme, acceptait la doctrine du feu purgatoire, aspergeait au lieu de baptiser, croyait à l’immaculée conception de la Toujours-Vierge Marie, au pouvoir temporel, à l’infaillibilité et à l’absolutisme de l’évêque de Rome – nous n’avons plus rien à répondre.
Mais si, au contraire il est prouvé, comme le reconnaissent certains Latins qui ont l’amour de la vérité, que l’Eglise Orthodoxe et universelle du Christ garde les doctrines transmises et confessées depuis l’origine, que l’Orient et l’Occident professaient ensemble, jusqu’à ce que l’Eglise d’Occident les pervertisse par ses innovations diverses, il est clair, même pour un enfant, que le moyen le plus simple pour réaliser l’union est le retour de l’Eglise occidentale à son ancienne situation doctrinale et canonique, - car la foi ne saurait changer selon le temps et les circonstances, elle demeure la même, toujours et partout, comme l’écrit l’Apôtre : « Il y a un seul corps et un seul esprit, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, et parmi tous et en tous ». (Ephésiens 4, 5-6).
7 – Ainsi, l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des Sept Conciles Œcuméniques confesse et enseigne, fidèlement à l’Evangile, que le Saint Esprit procède du Père, mais en Occident, à partir du IXe siècle, on falsifia le saint Credo rédigé et consacré par les Conciles Œcuméniques et on répandit arbitrairement l’idée que le Saint Esprit procédait aussi du Fils (FILIOQUE).
Et certainement, le Pape Léon XIII, n’est pas sans savoir que son prédécesseur et homonyme, le Pape orthodoxe Léon III, le confesseur de l’orthodoxie, fit condamner synodalement, en 809, l’addition du FILIOQUE comme contraire à l’Evangile et parfaitement illégitime ; et qu’ensuite, il fit graver sur deux plaques d’argent, en grec et en latin, le saint Credo de Nicée-Constantinople dans son intégralité et sans altération, ajoutant seulement cette inscription : « Moi Léon, j’ai posé ces plaques par amour et pour la sauvegarde de la foi orthodoxe ».
Le pape ne peut pas ignorer non plus qu’au cours du Xème siècle ou au début du XIème, cette addition illégitime et contraire à l’Evangile fut insérée dans le Credo à Rome et que, l’Eglise Romaine, en persistant dans les innovations, et en refusant de revenir au dogme des Conciles Œcuméniques, est nécessairement la seule responsable du schisme aux yeux de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique du Christ, qui garde ce qu’elle a reçu des Pères et conserve en toutes choses le dépôt de la foi dans son intégralité selon l’injonction de l’Apôtre : « Garde le bon dépôt, par le Saint Esprit qui habite en nous », « évite les discours vides et profanes et les disputes de la fausse science dont font profession quelques uns qui se sont ainsi détournés de la foi ». (2 Timothée 1, 14 : 1 Timothée 6, 20).
8 – L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept premiers Conciles Œcuméniques baptisait par triple immersion, et le pape Pelage dit que la triple immersion est un « commandement du Seigneur ». Au XIIIème siècle, le baptême par immersion prévalait encore en Occident et les saints fonts baptismaux qui ont été conservés dans les églises les plus anciennes d’Italie, l’attestent de manière éloquente. Mais plus tard, la papauté admit de son propre chef, l’aspersion et voulut s’y tenir, ce qui élargit encore le fossé qu’elle avait creusé. Mais nous, orthodoxes, fidèles à la Tradition apostolique et à la pratique de l’Eglise des sept Conciles Oecuméniques, « nous tenons bon », selon le mot de saint Basile, « et nous luttons pour la confession commune, en gardant précieusement le trésor de la foi droite légué par nos Pères ».
9 – L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des Sept Conciles Œcuméniques, suivant l’exemple même de Notre Sauveur, a célébré la sainte et divine eucharistie pendant près de mille ans en Occident comme en Orient avec du pain levé, comme l’attestent eux-mêmes les théologiens occidentaux aimant la vérité. Mais la papauté, à partir du XIème siècle, a fait aussi une innovation au sacrement saint et divin de l’Eucharistie en y introduisant du pain sans levain.
10 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept saints Conciles Œcuméniques a toujours affirmé que les saints dons sont consacrés après la prière d’invocation au Saint Esprit par la bénédiction du prêtre, comme les anciens rituels de Rome et des Gaules peuvent en témoigner. Néanmoins, la papauté a, là encore, innové en affirmant d’une façon arbitraire que la consécration des dons précieux se produisait lorsque l’on prononçait les paroles du Seigneur : « Prenez et mangez, ceci est mon corps » et « Buvez en tous, ceci est mon sang ».
11 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept Conciles Œcuméniques, fidèle au commandement du Seigneur « Buvez en tous » fait communier également les fidèles au saint calice, alors que la papauté, depuis le XIème siècle, a innové en privant les laïcs du saint calice ;
Elle a ainsi transgressé le commandement même du Seigneur et contrevenu à la pratique universelle de l’Eglise et aux nombreuses interdictions formelles des évêques anciens de Rome.
12 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept Conciles Œcuméniques, marchant sur les traces des Apôtres, de la Tradition et de la Sainte Ecriture, prie et invoque la miséricorde de Dieu pour le pardon et le repos de ceux qui se sont endormis dans le Seigneur. Mais la papauté, à partir du XIIème siècle, a inventé et donné comme privilège particulier au pape, une multitude d’innovations, le feu purgatoire, la surabondance des vertus des saints et leur distribution à ceux qui en ont besoin, etc. soutenant encore qu’il existe une pleine récompense pour les Justes, avant la Résurrection universelle et le Jugement dernier.
13 - L’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique des sept Conciles Œcuméniques enseigne que l’incarnation surnaturelle du Fils et Verbe de Dieu, Son Incarnation du Saint Esprit et de Marie la Vierge est SEULE pure et immaculée. Mais la papauté – il y a à peine quarante ans – a introduit une autre innovation et produit un nouveau dogme, celui de l’immaculée conception de la Mère de Dieu et Toujours Vierge Marie, inconnu dans l’Eglise ancienne et combattu même par la suite, par de nombreux théologiens de la papauté.
14 – Le pape a passé sous silence, dans son encyclique, ces différences considérables et fondamentales en matière de foi, qui séparent les deux Eglises, et dont l’Occident fut pourtant l’inventeur ; et il nous présente la question de la primauté du Souverain Pontife pour la principale et même pour la seule cause de la division ; il nous renvoie aux sources afin que nous nous livrions à une recherche diligente et que nous déterminions ce que nos pères confessaient et ce que les premiers temps du christianisme nous ont légué.
Or, si nous consultons les Pères et les Conciles Oecuméniques de l’Eglise durant les neuf premiers siècles, nous sommes certains que l’évêque de Rome n’a jamais été considéré comme l’autorité suprême et le chef infaillible de l’Eglise, mais que chaque évêque était, à la tête de sa propre Eglise, soumis seulement aux ordonnances synodales et aux décisions de l’Eglise universelle, qui, elle seule, est infaillible. L’évêque de Rome ne faisait en aucune manière exception à cette règle, comme le montre l’histoire de l’Eglise. Seul, Notre Seigneur Jésus Christ est le maître éternel et le Prince immortel de l’Eglise, car « Il est la tête du corps de l’Eglise » (Colossiens 1, 18), et qu’Il a dit à Ses divins disciples et apôtres lors de Son Ascension dans les cieux : « Voici, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ».
Dans la Sainte Ecriture, l’Apôtre Pierre – dont les papistes font le fondateur de l’Eglise de Rome en se fondant sur les Pseudo-Clémentines, lettres apocryphes du deuxième siècle – lors du Concile Apostolique de Jérusalem, parle en égal avec les autres Apôtres ; ailleurs, il est sévèrement réprimandé par l’Apôtre Paul, comme en témoigne l’Epître aux Galates, en 2, 11.
En outre, les papistes savent très bien eux-mêmes que durant les premiers siècles, le passage de l’Evangile auquel se réfère le Pape : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise », est interprété d’une façon tout autre par la Tradition et par l’unanimité des Pères saints. La pierre d’angle sur laquelle le Seigneur a bâti son Eglise et contre laquelle les portes de l’enfer ne prévaudront pas, c’est métaphoriquement la véritable confession de Pierre, selon laquelle le Seigneur « est le Christ, le Fils du Dieu Vivant ».
Sur cette confession et sur cette foi repose, inébranlable, l’enseignement salutaire de la prédication évangélique transmise par les Apôtre à leurs successeurs. C’est manifestement ce passage interprété que l’Apôtre Paul, ravi aux Cieux, avait en vue lorsqu’il déclara sous l’inspiration divine : « Selon la grâce que Dieu m’a donnée, j’ai posé le fondement comme un habile architecte, mais un autre bâtit dessus. Car personne ne peut poser un autre fondement que celui qui est en place, à savoir, Jésus Christ ».
Dans un autre sens, l’Apôtre Paul dit, dans l’Epître aux Ephésiens, que les Prophètes et les Apôtres sont, ensemble, le fondement de l’édification des fidèles dans le Christ, c’est-à-dire les membres du corps du Christ qu’est l’Eglise : « Ainsi donc, vous n’êtes plus des étrangers, ni des gens du dehors, mais vous êtes des concitoyens, des saints et membres de la famille de Dieu. Vous êtes établis sur le fondement des Apôtres et des Prophètes, Jésus Christ étant la pierre d’angle ». (Ephésiens 2, 19).
Tel étant donc l’enseignement divinement inspiré des Apôtres en ce qui concerne le fondement et le chef de l’Eglise de Dieu, les saints Pères qui s’en tenaient fermement aux traditions apostoliques, ne pouvaient imaginer une primauté absolue de l’Apôtre Pierre et des Evêques de Rome ; ils ne pouvaient pas donner de ce texte évangélique une autre interprétation, inconnue de l’Eglise, différente de celle qui est véridique et juste. Ils ne pouvaient pas non plus inventer de leur propre autorité, une doctrine nouvelle accordant des privilèges excessifs à l’évêque de Rome, comme successeur prétendu de saint Pierre ; surtout si l’on sait que l’Eglise de Rome, a été fondée, non par Pierre – dont le ministère apostolique à Rome est inconnu – mais par Paul, l’Apôtre des Gentils ravi aux cieux, dont l’apostolat à Rome nous est parfaitement connu par ses disciples.
15 – Les divins Pères, honorant l’évêque de Rome au seul titre d’évêque de la capitale de l’Empire, lui ont donné une primauté d’honneur, le considérant le premier parmi les égaux. Ils ont aussi attribué cette primauté à l’évêque de Constantinople, quand cette ville devint capitale de l’Empire romain, comme en témoigne le vingt-huitième canon du Concile Œcuménique de Chalcédoine, qui dit entre autres : « Nous décidons et décrétons les mêmes choses en ce qui concerne les prérogatives de la très sainte Eglise de Constantinople, la Nouvelle Rome. Les Pères ont à juste titre accordé cette prérogative au trône de l’ancienne Rome, parce qu’elle était la capitale impériale. De même, mus par la même considération, les cent cinquante évêques très pieux ont conféré une prérogative égale, au trône de la Nouvelle Rome ».
Ce canon démontre donc que l’évêque de Rome est égal à l’évêque de Constantinople et à ceux des autres Eglises : aucun canon, aucun écrit des Pères de l’Eglise ne contient la moindre allusion à une éventuelle primauté de l’Evêque de Rome sur l’Eglise universelle, à une juridiction infaillible sur les évêques des autres Eglises indépendantes et autonomes, ou encore, à une succession particulière de l’Apôtre Pierre comme vicaire de Jésus Christ sur la terre.
16 – À l’époque des Sept Conciles Oecuméniques, chaque Eglise autocéphale d’Orient et d’Occident, était totalement indépendante et s’administrait elle-même. Comme les évêques des Eglises autocéphales d’Orient, les Eglises d’Afrique, d’Espagne, des Gaules, de Germanie et de Grande-Bretagne dirigeaient elles-mêmes, en des conciles locaux, leurs propres affaires ;
L’évêque de Rome n’avait aucun droit d’intervenir, et lui-même, comme les autres, était soumis avec obéissance aux décisions des synodes. Mais, pour des questions importantes nécessitant la sanction de l’Eglise universelle, on réunissait un Concile Œcuménique qui seul était et demeure l’instance suprême dans l’Eglise universelle. Les évêques étaient indépendants les uns des autres et chacun, à l’intérieur de sa juridiction, mais ils devaient se conformer aux décrets des synodes où, tous, ils étaient égaux.
De plus, aucun d’eux n’a jamais prétendu à un pouvoir monarchique sur l’Eglise entière ; si parfois certains évêques de Rome, ambitieux, ont exprimé des revendications excessives et ont aspiré à un absolutisme inconnu de l’Eglise, ils ont été blâmés par tous. L’affirmation de Léon XIII, selon laquelle, avant Photius le Grand, le nom du trône de Rome était saint pour tous les peuples du monde chrétien, que l’Orient et l’Occident étaient absolument soumis à l’évêque de Rome comme successeur légitime de saint Pierre et comme vicaire de Jésus Christ sur la terre, cette affirmation est donc une erreur manifeste.
17 – Pendant les neuf siècles des Conciles Oecuméniques, l’Eglise Orthodoxe d’Orient n’a jamais reconnu certaines prétentions excessives à la primauté, avancées par les évêques de Rome, ni ne s’est jamais soumise à ces derniers, comme l’histoire de l’Eglise en apporte le témoignage évident. L’indépendance de l’Orient à l’égard de l’Occident est clairement montrée par la lettre très significative de Basile le Grand à Eusèbe, le saint évêque de Samosate : « lorsqu’on fait appel à des gens à l’esprit hautain, ils n’en deviennent que plus méprisants. Si le Seigneur a pitié de nous, de quelle autre aide avons-nous besoin ? Mais si la colère de Dieu est sur nous, quelle aide, les occidentaux arrogants pourront-ils nous apporter ? Les hommes qui ne connaissent pas la Vérité, ne peuvent supporter de l’apprendre ; leurs fausses suspicions les remplissent de préjugés et ils se conduisent aujourd’hui de la même façon que jadis pour Marcellus ».
Le vénéré Photios, le saint hiérarque et luminaire de Constantinople, défendit cette indépendance dans la seconde moitié du IXème siècle, et pressentant que bientôt l’Occident ne respecterait plus les constitutions apostoliques et se séparerait de l’Orient Orthodoxe, il s’efforça d’abord d’éviter pacifiquement ce danger. Alors, l’évêque de Rome, Nicolas 1er, se mêla, au mépris des canons, des affaires de l’Orient et sortant des limites de son autorité, voulut soumettre l’Eglise de Constantinople. C’est ainsi qu’il amena les Eglises au bord du schisme douloureux.
Voilà comment les germes de l’absolutisme papal, semés grâce aux Pseudo-Clémentines, furent cultivés, à l’époque précisément de Nicolas 1er, grâce aux pseudos-décrets isidoriens, mélange de fausses décisions impériales et de lettres controuvées des anciens évêques de Rome, qui visent à faire croire, au mépris de la vérité historique et de la constitution de l’Eglise, que dans les premiers temps du christianisme, on accordait aux évêques de Rome une autorité sans limites sur l’Eglise universelle.
18 – Nous rappelons ces faits avec une tristesse dans notre cœur d’autant plus grande que la Papauté d’aujourd’hui, tout en reconnaissant que ces décrets outranciers étaient des faux, rédigés de propos délibérés, refuse pourtant de revenir aux canons et aux règles des Conciles Œcuméniques.
Elle a même, à la fin du XIXème siècle, accru encore le fossé qui sépare la papauté de l’Eglise orthodoxe, en proclamant que l’évêque de Rome est infaillible.
L’Eglise du Christ, en Orient, orthodoxe et catholique, ne reconnaît personne infaillible sur cette terre, à l’exception du Fils et Verbe de Dieu qui s’est incarné d’une façon ineffable. L’Apôtre Pierre lui-même, dont le Pape se prétend successeur, a renié trois fois le Christ et a été deux fois vivement réprimandé par l’Apôtre Paul, pour ne pas avoir suivi correctement la voie de la vérité évangélique. (Galates 2, 11).
Au IVème siècle, le Pape Libère souscrivit une confession arienne et au Vème siècle, le Pape Zosime approuva une confession hérétique niant les suites du premier péché. Au VIème siècle, le Pape Vigile, fut condamné par le Cinquième Concile Œcuménique pour ses fausses opinions. Quant au Pape Honorius, au VIIème siècle, tombé dans l’hérésie monothélite, il fut condamné comme hérétique par le Sixième Concile Œcuménique et les Papes qui lui ont succédé ont reconnu et accepté cette condamnation.
19 – Tous ces faits furent reconnus des peuples d’Occident, au fur et à mesure que la culture se répandait, et ils commencèrent à protester contre ces innovations et à exiger – comme ce fut le cas au XVème siècle, au Concile de Bâle et celui de Constance – le retour à la constitution ecclésiastique des premiers siècles à laquelle, par la grâce de Dieu, les Eglises d’Orient et du Nord, qui seules, forment à présent l’Eglise Une, Sainte, Catholique, et Apostolique du Christ, la colonne et le fondement de la vérité, sont et resteront fidèles.
La même protestation contre la papauté fut élevée au XVIIème siècle par les savants théologiens gallicans et au XVIIIème siècle par les évêques allemands. En notre siècle de science et de critique, la conscience chrétienne s’est dressée contre le nouveau dogme de l’infaillibilité pontificale et ce sont encore les théologiens allemands qui ont protesté en 1870. Il en a résulté la formation de la communauté religieuse indépendante des Vieux Catholiques qui ont désavoué la papauté et en demeurent séparés.
20 – C’est donc en vain que l’évêque de Rome nous renvoie aux sources pour que nous y cherchions attentivement ce que croyaient nos Pères d’autrefois et ce qu’est l’héritage des origines du Christianisme. C’est précisément dans ces sources que nous, les orthodoxes, nous puisons les doctrines anciennes et divinement transmises que nous gardons précieusement jusqu’à aujourd’hui ; nous n’y voyons nulle part les innovations que l’Occident a introduites tardivement, en des temps d’indigence spirituelle, et que la papauté a adoptées et conserve jusqu’à présent.
Ainsi, l’Eglise orthodoxe d’Orient se glorifie justement dans le Christ d’être l’Eglise des sept Conciles Œcuméniques et des neuf premiers siècles du Christianisme et donc d’être l’Eglise du Christ, Une, Sainte, Catholique et Apostolique, « la colonne et le fondement de la vérité ». Quant à l’Eglise Romaine moderne, elle est l’Eglise des innovations, de la falsification des écrits des Pères de l’Eglise, de l’interprétation erronée de la Sainte Ecriture et des décisions des saints Conciles. Ce pourquoi elle a été condamnée et le demeure tant qu’elle persiste dans son erreur, car, comme le disait saint Grégoire le Théologien, « une guerre louable vaut mieux qu’une paix qui sépare de Dieu ».
21 – Telles sont, en résumé, les graves et arbitraires innovations sur la foi et la constitution canonique de l’Eglise, que la papauté a introduites et que l’Encyclique de Léon XIII passe volontairement sous silence. Ces innovations qui touchent à des points fondamentaux de la foi et de l’administration de l’Eglise et qui sont manifestement contraire à la situation ecclésiale des neuf premiers siècles, rendent impossible l’union tant désirée des Eglises.
Toute âme pieuse et orthodoxe est remplie d’une douleur inexprimable en voyant la papauté persister avec orgueil dans ses erreurs, alors qu’en revenant à sa situation antérieure, celle de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique du Christ, elle contribuerait à la réalisation de l’union.
22 – Qu’allons-nous répondre à ce que le pontife romain écrit aux glorieux peuples des Slaves ? Personne n’a jamais nié que c’est par la vertu et l’œuvre apostolique de saint Cyrille et de saint Méthode, que la grâce du salut est venue à plusieurs peuples slaves : l’histoire témoigne qu’au temps de Photios le Grand, ces apôtres grecs des Slaves, ces amis intimes de ce divin Père, partis de Thessalonique pour convertir les Slaves, étaient envoyés, non par Rome mais par Constantinople, ville où ils s’étaient formés et avaient été moines, au Monastère de saint Polychrone.
Ces faits contredisent absolument l’affirmation contenue dans l’Encyclique du Pontife Romain au sujet des relations amicales et de la profonde sympathie qui auraient existé entre les tribus slaves et les évêques de Rome.
Même si Sa Sainteté le Pape Léon XIII l’ignore, l’histoire nous apprend avec certitude que les saints Apôtres des Slaves ont rencontré une vive opposition dans leur œuvre et même des excommunications venant des Papes et qu’ils furent plus cruellement persécutés par les évêques franks partisans du Pape que par les païens de ces régions.
Sa Sainteté le Pape sait très certainement qu’après la mort de saint Méthode, deux cents de ses plus remarquables disciples, à la suite de nombreuses luttes suscitées par l’opposition papale, furent chassés de Moravie et conduits par la force des armes hors de ce pays, pour se disperser en Bulgarie et ailleurs. Il sait sans doute aussi qu’après l’expulsion du clergé slave le plus savant, le rite oriental et l’emploi de la langue slave, alors en usage dans la liturgie, furent supprimés et que peu à peu tout vestige d’orthodoxie disparut de ces provinces, tout cela avec la bénédiction et la coopération honteuse des évêques de Rome, peu soucieux de la sainteté et de la dignité épiscopale.
Pourtant, malgré ces traitements arrogants, les Eglises Orthodoxes Slaves, les filles bien-aimées de l’Orient orthodoxe, et en particulier la grande et glorieuse Eglise de Russie, ont été protégées et sauvegardées par la grâce de Dieu ; elles ont gardé et garderont jusqu’à la fin des temps la foi orthodoxe et la liberté qui se trouve dans le Christ.
C’est donc en vain que l’Encyclique papale promet aux Eglises slaves, prospérité et grandeur, puisque, par la volonté de Dieu, elles jouissent déjà de ces bénédictions et se glorifient dans le Christ de leur fidélité à l’orthodoxie de leurs Pères.
23 – Tels sont les faits, ils sont prouvés indubitablement par l’histoire de l’Eglise ; et c’est, dans le souci d’accomplir tout notre devoir, que nous nous adressons maintenant aux peuples d’Occident qui avec crédulité, par ignorance de la véritable et impartiale histoire de l’Eglise, se sont laissés entraîner loin de nous et ont adhéré aux innovations anti-évangéliques et illégitimes de la Papauté schismatique et délaissé l’Eglise Orthodoxe du Christ, Une, Sainte, Catholique et Apostolique, qui est « l’Eglise du Dieu Vivant, la colonne et le fondement de la vérité », dans laquelle leurs glorieux ancêtres ont brillé par leur piété et l’orthodoxie de leur foi et dont ils ont été les membres fidèles et précieux pendant neuf siècles, suivant avec obéissance ses décisions et marchant sur les traces des Pères et des Conciles Œcuméniques.
24 – Peuples amis du Christ, des glorieux pays d’Occident : d’une part nous nous réjouissons de voir que vous avez un zèle réel pour le Christ et que vous êtes guidés par cette juste conviction que « sans la foi du Christ, on ne peut plaire à Dieu » (Hébreux 11, 6) ; mais d’autre part, il est évident pour tout homme de bon sens que la foi salutaire dans le Christ, doit être en tout point conforme à l’Ecriture Sainte et aux Traditions Apostoliques, sur lesquelles reposent l’enseignement des Pères divins et celui des sept Conciles Œcuméniques divinement assemblés.
Il est tout aussi manifeste que l’Eglise universelle qui seule garde en son sein, intégralement et sans changement, la foi une, le divin dépôt prêché et transmis par les Pères théophores guidés par le Saint Esprit, est "une et identique" pour l’éternité et non "multiple et changeante" au gré des temps. Car les vérités évangéliques ne sont pas susceptibles de modification ou de progrès selon les époques, comme le sont les divers systèmes philosophiques : « Jésus est le même hier, aujourd’hui et pour l’éternité » (Hébreux 13, 8).
C’est ce qu’affirmait au Vème siècle le très saint Vincent, nourri du lait de la piété reçue des Pères, au monastère de Lérins en Gaule, lorsqu’il définissait, avec grande sagesse et orthodoxie, le véritable caractère de la foi et de l’Eglise : « Dans l’Eglise Catholique, nous devons surtout nous soucier de conserver ce qui a été cru partout, en tout temps et par tous. Car cela seul peut être dit vraiment et justement catholique, dans toute la force et la signification du mot, qui veut dire « qui comprend tout universellement ». Et il en sera ainsi, si nous suivons l’universalité, l’antiquité et le consentement de tous ».
Mais, comme nous l’avons dit, l’Eglise Occidentale, depuis le Xème siècle et jusqu’à nos jours, a introduit, du fait de la Papauté, des doctrines nouvelles, étrangères et hérétiques et s’est ainsi trouvée séparée et éloignée de la véritable et orthodoxe Eglise du Christ.
Combien donc, il vous est nécessaire de revenir et de retourner aux doctrines anciennes et inaltérées de l’Eglise afin d’obtenir le salut en Christ que vous désirez tant, vous le comprenez facilement en lisant avec attention, le commandement donné par l’Apôtre Paul qui fut ravi aux cieux, écrivant aux Thessaloniciens : « Frères, demeurez fermes et retenez les instructions que vous avez reçues, soit par notre parole, soit par notre lettre » (2 Thessaloniciens 2, 15).
Le même Apôtre saint dit aussi aux Galates : « Je m’étonne que vous vous détourniez si promptement de Celui qui vous a appelés par la Grâce du Christ, pour passer à un autre évangile. Non pas qu’il y ait un autre Evangile, mais il y a des gens qui vous troublent et qui veulent renverser l’Evangile du Christ » (Galates 1, 6-7).
Evitez cependant ces pervertisseurs de la vérité évangélique : « Eloignez-vous d’eux, car de tels hommes ne servent point le Christ Notre Seigneur, mais leur propre ventre ; et, par des paroles douces et flatteuses, ils séduisent les cœurs des simples » (Romains 16, 18).
Revenez maintenant dans le sein de l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique de Dieu, qui comprend toutes les Eglises plantées par Dieu comme de riches vignes dans l’ensemble du monde orthodoxe et qui sont inséparablement unies les unes aux autres par la même foi salvatrice en Christ, dans la paix et dans l’Esprit Saint, afin que le Nom tout honorable et magnifique de notre Dieu et Sauveur Jésus Christ, qui a souffert pour le salut du monde, soit aussi glorifié parmi vous.
25 – Quant à nous qui, par la grâce et la volonté miséricordieuse de Dieu, sommes les membres précieux du Corps du Christ, c’est-à-dire de Son Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique, gardons fermement la piété de nos Pères telle qu’elle nous a été transmise depuis les temps apostoliques.
Méfions-nous des faux-apôtres déguisés en brebis, qui tentent de séduire les plus simples d’entre les nôtres par de fausses promesses, autorisant tout pour obtenir l’union à la seule condition toutefois, qu’ils reconnaissent le pape de Rome comme chef suprême et infaillible et souverain absolu de l’Eglise universelle, comme seul représentant du Christ sur la terre et source de toute grâce.
Nous, au contraire, qui avons été par la grâce et la bonté de Dieu, établis évêques, pasteurs et docteurs des Saintes Eglises de Dieu, « veillons sur nous-mêmes et sur tout le troupeau dont l’Esprit Saint nous a institués les surveillants pour paître l’Eglise de Dieu qu’Il s’est acquise par son propre Sang » (Actes 20, 28) et, conscients que nous devrons en rendre compte, « exhortons-nous réciproquement les uns les autres » (1 Thessaloniciens 5, 11). « Et que le Dieu de toute grâce, qui nous a appelés dans le Christ Jésus à Sa gloire éternelle, nous rende parfaits, forts et inébranlables » (1 Pierre 5, 10) et qu’Il fasse que tous ceux qui errent loin du troupeau un, saint, catholique et orthodoxe de ses brebis raisonnables, soient illuminés de la Lumière de Sa grâce et de la connaissance de la Vérité.
A Lui la gloire et le règne aux siècles des siècles. Amen !
Fait dans le Palais Patriarcal de Constantinople, au Mois d’Août de l’an de grâce 1895.
+ ANTHIME, de Constantinople, frère bien-aimé et intercesseur dans le Christ Notre Dieu,
+ NICODEME, de Cyzique, frère bien- aimé…
+ PHILOTHEE, de Nicomédie…
+ JEROME, de Nicée…
+ NATHANAEL, de Pruse…
+ BASILE, de Smyrne…
+ STEPHANE, de Philadelphie…
+ ATHANASE, de Lemnos…
+ BESSARION, de Durazzo…
+ DOROTHEE, de Belgrade…
+ NICODEME, d’Elasson…
+ SOPHRONIOS, de Carpathe et Cassus…
+ DENIS, d’Eleuthéropolis…
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