lundi 10 janvier 2011

La Nativité du Seigneur, par Zigabène.

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La Nativité du Seigneur

Par Euthyme Zigabène


I

Les évangélistesi ont donné à leurs récits le titre d’Evangile, ou Bonne Nouvelle. Luc en témoigne : « Plusieurs, dit-il, ayant entrepris de composer un récit des évènements qui se sont accomplis parmi nous, suivant ce que nous ont transmis ceux qui ont été les témoins oculaires dès le commencement… » Ils ont appelé ces récits EVANGILE, parce qu’ils ont apporté aux hommes un message d’espérance : l’Incarnation de Dieu, la déification de homme, la destruction des démons, la rémission des péchés, la régénération, l’adoption et l’héritage du royaume des cieux.

Evangélistes, ne sont pas seulement les quatre qui ont écrit, mais tous les apôtres ensemble, dont Isaïe a dit autrefois : « Qu’ils sont beaux sur les montagnes, les pieds de ceux qui annoncent la bonne nouvelle, qui publient la paix » (Isaïe 52, 7). Mais c’est pour avoir écrit l’histoire de tous les faits, que les quatre ont reçu dans un sens tout particulier le nom d’Evangélistes ; les autres ont fait la même chose, mais par la seule parole.

II

« LIVRE DE LA GENESE DE JESUS CHRIST » (Mattieu1, 1)

Par GENESEii, Jean Chrysostome entend la naissance du Christ. Le mot Genèse qui a plusieurs sens comporte également celui-là. Certains disent aussi que le Christ né surnaturellement de la Vierge a recréé la naissance naturelle, c’est pourquoi l’Evangile recrée le mot naissance et l’appelle Genèse.

Le nom de Jésus signifie en Hébreu "Sauveur". C’est lui, dit Matthieu, qui sauvera son peuple de ses péchés. En entendant le nom de Jésus seul, on risque de se tromper et de le confondre avec son homonyme Jésus le fils de Navé. C’est pourquoi l’évangéliste ne dit pas seulement Jésus, mais Jésus-Christ, distinguant ainsi l’un de l’autre. On peut se demander pourquoi ce « LIVRE » ne concerne pas seulement la naissance de Jésus-Christ, mais contient toute son "Economie" et toute sa vie. Nous répondrons que sa naissance est la racine, le principe de toute son économie, de sa vie, de notre salut. Et rien n’est plus redoutable, plus bouleversant que Dieu devenant Homme. Et c’est à partir de cette réalité que le reste découle logiquement.

C’est à partir de ce fondement essentiel que l’Evangéliste a appelé son récit « LIVRE DE LA GENESE ». Moyse a fait la même chose en intitulant son premier livre : LIVRE DE LA GENESE du ciel et de la terre, bien qu’il ne parle pas seulement du ciel et de la terre, mais aussi de tout ce qui se trouve entre eux.



III

Christ, étant né surnaturellement sans semence de la Vierge, et aussi selon la nature, comme enfant de la femme qui l’a allaité, l’Evangéliste a dit plus haut « LIVRE DE LA GENESE » sous-entendant ce qu’il y avait de surnaturel ; et plus bas, pour manifester ce qui était selon la nature, il a ajouté : « Or la naissance (genésis) de Jésus-Christ arriva ainsi… » (Mattieu 1, 18). D’autres encore, par le mot « GENESE » entendent comment s’est faite la venue du Christ sur la terre.

IV

« FILS DE DAVID, FILS D’ABRAHAM » (Matthieu 1,1).

Matthieu appelle le Christ, Fils de David, et David, fils d’Abraham. Il amène ainsi la pensée de ses auditeurs aux promesses. En effet dans le passé, Dieu avait promis à Abraham et à David, que le Christ sortirait de leur descendance. Ses auditeurs qui étaient des Juifs, comme on l’a dit, connaissaient bien ces promesses. Il parle d’abord de David, parce que tout le monde avait son nom à la bouche ; il avait été un grand prophète et un Roi très glorieux. Sa mort n’était pas si ancienne. Tandis qu’Abraham, bien qu’il fût un patriarche illustre, était mort depuis fort longtemps et n’était plus très présent à leur mémoire. Dieu avait bien fait des promesses aux deux, mais on passait sous silence le plus ancien et on ne parlait que du plus récent. Christ, disait-il, ne vient-il pas de la racine de David et de Bethléem où David a vécu ? Personne ne l’appelait fils d’Abraham mais tous fils de David. Voilà pourquoi l’Evangéliste commence par le plus célèbre et remonte au plus ancien.

V

Matthieu, qui s’adressait aux circoncis, ne fait pas remonter la généalogie au-delà d’Abraham. Il commence par lui, et arrive au Christ. Il démontre que le Christ a jailli du sperme d’Abraham et de David. En effet, rien ne satisfaisait autant les juifs qui venaient à la foi, que d’apprendre que le Christ était de la race d’Abraham et de David, car c’est d’eux qu’ils l’attendaient. Tandis que Luciii qui par Théophile s’adresse à tous les fidèles, établit une généalogie complète. Il commence par le Christ et arrive jusqu’à Adam, pour montrer combien de générations séparaient le nouveau et l’ancien Adam, et pendant combien de générations le péché avait régné.
La différence des faits à prouver, a imposé la différence des preuves. Matthieu, par nécessité et avec juste raison, mentionne Abraham, puis descend de lui jusqu’au Christ dont il établit la généalogie. Tandis que Luc, qui n’a pas eu besoin de recourir à Abraham, commence par le Christ et suit la voie opposée. La généalogie à rebours était également pratiquée chez les juifs.

VI

ABRAHAM ENGENDRA… JECHONIAS ET SES FRERES. (Mattieu 1, 11).

C’était la coutume, en ce temps-là, d’établir toute généalogie d’après les mâles. C’est l’homme qui ensemence. Il est le principe, la racine de l’enfant et la tête de la femme. La femme, elle, nourrit, réchauffe, développe le sperme. Ella a été donnée comme aide à l’homme.
Judas est pris parmi les fils de Jacob, bien qu’il ne soit pas le premier-né, parce que c’est de sa tribu que devait venir le Christ.

Dans les généalogies, on ne mentionne qu’un seul successeur, et là où il est question de plusieurs, il y a une raison. Immédiatement après, il fait mention des frères de Juda, parce que Israël ne forme qu’un seul peuple, divisé en douze racines, qui sont les douze fils de Jacob. D’ailleurs ils se considèrent tous comme ancêtres du Christ, étant chefs de tribus du peuple Israélite d’où le Christ est sorti.

VII

ABRAHAM signifie « père de peuples ».
ISAAC signifie « joie et rires ».
JUDA ENGENDRA DE THAMAR, PHARES ET ZARA. (Matthieu1, 3).

Zara signifie Orient. Pharès : séparation, morcellement. D’où le nom de pharisiens, pour indiquer ceux qui se séparaient et n’avaient aucun contact avec les autres. Juda était le quatrième fils de Jacob, qui avait donné Thamar comme femme à son premier fils Hir. Quand celui-ci mourût, sans laisser d’enfants, Juda la maria à son second fils, Aunan. Ce dernier mourût aussi sans postérité et Juda la promit à son troisième fils Sélom. Mais il renonça à ce mariage craignant qu’il ne mourût lui aussi aussitôt. La bru désirait beaucoup avoir un enfant de la race illustre et réputée d’Abraham. Quand elle vit les hésitations de Juda, elle décida de lui dresser un piège. Elle se déguisa en prostituée, s’enveloppa de son voile et alla s’asseoir aux portes de la ville.

Juda la vit, et sans la reconnaître, alla avec elle, et après avoir péché, la laissa enceinte de fils jumeaux. Le jour de l’accouchement arriva et elle mit au monde Pharès et Zara. Zara sortit sa main le premier. Pour reconnaître le premier-né, la sage-femme attacha à la main de l’enfant un fil rouge. L’enfant le retira, et à sa place sortit Pharès, et Zara le suivit. Telle est l’histoire. Il était normal de ne mentionner dans la généalogie que Pharès, parce que c’est par lui que la succession va jusqu’à David. Et si l’Evangéliste Matthieu ajoute Zara, c’est pour symboliser le peuple chrétien. Pharès était la figure du peuple juif. Zara sortit le premier la main, pour la retirer ensuite, afin de laisser passer Pharès qui s’était déjà glissé. De même en est-il dans l’Evangile : une partie s’est manifestée au temps d’Abraham, puis fit place à la Loi, et après, la Loi brilla de tout son éclat : l’Evangile. Tu vois que ce n’est pas en vain que Zara a été mentionné.

VIII

Ce n’est pas aussi sans intention que l’Evangéliste a parlé de Thamar et des trois autres femmes. Thamar qui "connut" son beau-père, était une incestueuse ; Rahab une prostituée, Ruth une étrangère, et la femme d’Urie, Bersabée une adultère, comme l’histoire le rapporte. Matthieu a parlé d’elles, pour monter que le Christ n’a pas eu honte de descendre d’une telle lignée d’ancêtres. L’un était le fruit d’une union illicite, l’autre d’une impudique, le troisième d’une étrangère et le dernier d’une adultère. Les iniquités des ancêtres ne peuvent nuire à l’homme vertueux. Chacun sera jugé digne ou indigne par ses propres œuvres et non par celles des autres.
Le Christ est venu non pour cacher notre honte mais pour la mettre à nu et la vaincre par ses vertus. Il est venu comme médecin et non comme juge. C’est la première raison.

La seconde, c’est que les juifs négligeant les vertus de l’âme, se vantaient de leurs ancêtres, faisant partout étalage de leur supériorité. L’Evangéliste rabat leur orgueil en leur rappelant qu’eux aussi étaient issus d’unions illégitimes. Car c’est dès le commencement que leur patriarche Juda, de qui ils tiennent leur nom, leur a rapporté Pharès et Zara leurs ancêtres, nés d’une union incestueuse. Et l’illustre David a engendré Salomon avec une femme adultère. C’est donc en vain que les juifs se glorifient de leurs ancêtres. Et c’est pour la même raison – je pense – que les frères de Juda ont été mentionnés. Quatre d’entre eux sont nés de Jacob, de femmes serves ; cette différence ne leur a nui en rien. Tous sont devenus patriarches et chefs de tribus.

La troisième raison, c’est que ces femmes symbolisaient l’Eglise des Nations. Bien qu’asservies par leurs péchés, les hommes dont je viens de parler, les ont épousées. Le Christ a fait de même, quand il a uni à sa personne divine, la nature humaine tombée esclave de toutes sortes de péchés. Comme il n’a pas méprisé les origines de ces femmes, de même il n’a pas dédaigné de s’unir à l’Eglise.

Tout ceci nous apprend également à n’avoir pas honte des péchés de nos ancêtres, mais bien des nôtres ; à ne pas nous vanter de nos ancêtres, mais à nous occuper d’acquérir les vertus ; à ne pas humilier les hommes vertueux qui sont nés d’unions illégitimes ; à ne pas nous détourner de ceux qui viennent à la Foi après de nombreux égarements.

IX

PHARES ENGENDRA HESROM...
AU TEMPS DE LA DEPORTATION A BABYLONE… (Matthieu 1, 4-11).

Le IVème Livre des Rois et le IIème des Paralipomènesiv parlent des trois fils de Josias : Joachaz, Joachim appelé aussi Eliakim et Sédécias surnommé Matthanias. Il est dit que c’est de l’un d’eux que naquit Jéchoniasv.

Mais le livre d’Esdras parle de Jéchonias comme étant le fils de Josias, comme le fait Matthieu. Comment trancher ici ? Celui que les deux livres appellent Joachaz, Esdras l’appelle Jéchonias. Il porte lui aussi deux noms, comme ses frères. Parce que tout ce que chaque livre mentionné ci-dessus dit de Joachaz, le livre d’Esdras le dit de Jéchonias, à savoir qu’il a une mère nommée Amitad, fille de Jérémie, qu’il fut roi à vingt trois ans, qu’il régna trois mois, après quoi Pharaon le roi d’Egypte le détrôna et l’emmena en Egypte.

X

Ainsi donc, le Jéchonias, fils de Joachim était un autre, et aucun livre n’a retenu ses frères. Et cela est logique, car après avoir vaincu les Egyptiens, Nabuchodonosor roi de Babylone emmena avec lui Jéchonias.
Là-bas, Jéchonias engendra Salathiel. Josias, dit l’Evangile, a engendré Jéchonias et ses frères, au temps de la déportation à Babylone, c’est-à-dire avant la déportation des Juifs. En conséquence, l’expression « au temps de » la déportation (en grec épi) signifie « aux environs du temps de la déportation ». Il a noté « ses frères », parce que ceux-ci régnèrent à leur tour, puis furent emmenés captifs à Babylone par Nabuchodonosor.

XI

Pour quelle raison, maintenant, dans cette période intermédiaire, l’Evangéliste omet-il trois rois : Ochozias fils de Joram, Joas fils d’Ochozias et Amésias fils de Joas ?

Car Amésias a bien engendré, selon le IVème Livre des Rois, Azarias, que le IIème livre des Paralipomènes appelle Osias. Lui aussi possède deux noms. Que Joram ait engendré Osias, son descendant, c’est une évidence. Quant à savoir pourquoi les trois rois en question sont passés sous silence, nul n’a pu le dire jusqu’à ce jour. Le problème est difficile pour les hommes de notre temps, et aucun de nos prédécesseurs n’a pu le résoudrevi.

XII

Enfin « JESUS QU’ON APPELLE CHRIST… » (Matthieu 1, 16).

Arrivé à Joseph, l’Evangéliste n’arrête pas son discours, mais il ajoute un trait caractéristique : « l’époux de Marie », expliquant ainsi que c’est pour elle qu’il prend place dans la Généalogie. Comme il n’était pas d’usage de compter les femmes dans les généalogies, il a pris soin, tout en observant la coutume, de montrer d’une autre manière que le Christ descendait bien de la race d’Abraham et de David. En incluant dans sa généalogie l’époux de la Mère de Dieu, il a prouvé ce qu’il voulait : Joseph descendant de leur race, la Mère de Dieu en descendait, puisqu’il n’était pas permis de prendre épouse en dehors de la tribu de sa parenté. Joseph étant son fiancé, l’Evangéliste l’appelle son époux.

Et il appelle la Vierge, sa femme, parce qu’elle était sa fiancée. Telle était la coutume avant le mariagevii.

XIII

« IL Y A DONC EN TOUT QUATORZE GENERATIONS… » (Matthieu 1, 17).

C’est avec juste raison que l’Evangéliste a divisé les générations en trois périodes ; les Hébreux avaient changé par trois fois de régime. D’Abraham à David en passant par Jésus de Navé, ce fut l’hégémonie des Juges. De David à la déportation de Babylone, les rois tinrent les rênes. De la déportation de Babylone au Christ, les grands-prêtres gouvernèrent.

Quand vint le Christ, véritable Juge, Roi et Grand-Prêtre, ces régimes furent abolis. Mais, dira-t-on, comment se fait-il que pour la troisième période, alors qu’il dispose de douze noms, il parle néanmoins de quatorze générations ?
C’est sans doute, comme le pense saint Jean Chrysostome, qu’il compte comme une génération, le temps de la déportation et comme une autre, le Christ Lui-mêmeviii.

XIV

« VOICI DE QUELLE MANIERE ARRIVA LA NAISSANCE DE JESUS… » (Matthieu1, 18).

C’est à dire, comme il va le raconter plus bas. « …Sa mère ayant été fiancée à Joseph, se trouva enceinte par le Saint Esprit », sans qu’ils n’aient eu de rapports sexuels. Il ne dit pas avant qu’elle ne fût chez lui, parce qu’elle y était. Beaucoup avaient pour coutume de prendre leur fiancée chez eux, pour plus de sécurité. « Elle se trouva… » Il aurait pu dire « elle apparut », mais c’est « elle se trouva » qu’il dit, pour bien marquer la surprise, l’inattendu. Après l’avoir trouvée enceinte et pour que personne ne fût scandalisé en entendant cela, il a ajouté « du Saint Esprit ».

XV

Et pourquoi n’a-t-elle pas été enceinte avant d’être fiancée ? - Pour ne pas être lapidée comme coupable de péché. Qui aurait cru qu’elle n’avait pas eu de relations avec un homme ?ix

C’est la raison pour laquelle elle conçoit, après ses fiançailles, et sous le toit de Joseph, afin que celui-ci passe pour le père de l’enfant et l’écarte ainsi de tout danger. En Joseph, l’enfant allait trouver un protecteur, un chef, surtout pendant la fuite en Egypte.

XVI

Nous n’allons pas examiner maintenant comment s’est faite la conception ni chercher à savoir comment s’est formé le fœtus. Ni l’Evangéliste, ni l’Ange qui annonça à la Mère de Dieu la conception du Christ ne l’ont révélé. Ils se sont tu, car le mystère est insaisissable et n’est connu que de la Bienheureuse Trinité. Il en a limité la connaissance en ceci : que le Fils de Dieu a pris chair par la volonté du Père et le concours du Saint Esprit.

XVII

« JOSEPH, SON EPOUX, QUI ETAIT UN JUSTE
ET QUI NE VOULAIT PAS LA DIFFAMER,
SE PROPOSA DE LA RENVOYER EN SECRET… » (Matthieu 1, 20).

On appelle juste celui qui n’est pas cupide. Et, en général, celui qui est vertueux. Joseph jouissait du bon témoignage, à cause de ses vertus, de sa douceur, de sa bonté. La « diffamation » consistait à amener au Sanhédrin la femme soupçonnée d’adultère. Là, elle était accusée et officiellement chassée.

Pour ne pas agir ainsi, Joseph veut l’éloigner en secret. Ainsi, il ne sera pas coupable devant la Loi, qui ordonne de chasser la femme adultère, et préservera des malheurs la Vierge en ne publiant pas les faits.
XVIII

« COMME IL Y PENSAIT,
VOICI, UN ANGE DU SEIGNEUR LUI APPARUT EN SONGE… » (Matthieu1, 20).

Considère son extraordinaire douceur. Il ne parle à personne de sa décision, pas même à celle qu’il soupçonne. Seul, il décide de la répudier en secret. Et pourquoi l’ange n’a-t-il rien dit à Joseph sur la conception miraculeuse avant que n’apparût la grossesse ? Simplement parce qu’il ne l’aurait pas cru à cause de l’étrangeté de la nouvelle. Il lui parle donc quand la grossesse est évidente et le convainc ainsi plus facilement. Et pourquoi la vierge ne l’a-t-elle pas révélé avant l’intervention de Gabriel ? - Parce qu’elle savait qu’elle n’aurait pas été crue et qu’elle l’aurait irrité davantage, en tâchant de se disculper.

Et pourquoi l’Ange n’a-t-il pas annoncé à la Vierge sa conception par le Saint Esprit, après la grossesse ? - Parce que si elle ne l’avait pas appris auparavant, elle aurait été troublée, et pleine de crainte, elle se serait suicidée, sachant bien qu’elle n’aurait persuadé personne de son innocence, en disant qu’elle n’avait pas eu de relations avec un homme. C’est pourquoi l’Ange a parlé à la Vierge avant qu’elle ne conçût, et à Joseph à l’approche des douleurs de l’accouchement.

XIX

Matthieu parle de l’Ange apparu à Joseph, et Luc de celui qui annonça à la Vierge la conception immaculée. Les deux récits sont exacts. Pour quelle raison l’Ange est-il apparu en songe à Joseph, et non pas à l’état de veille comme à Marie ? - Parce que la Vierge avait besoin d’un face à face, à cause de l’étrangeté du message. Tandis, que Joseph, qui voyait la grossesse et connaissait la vie innocente de la Vierge allait croire plus facilement. D’autre part, il possédait le discernement des rêves et c’est pourquoi l’Ange lui apparut en songe.

XX

« DISANT : JOSEPH FILS DE DAVID ?
NE CRAINS POINT DE PRENDRE AVEC TOI
MARIE TON EPOUSE. » (Matthieu1, 20).

Il l’appelle fils de David, pour amener la pensée de Joseph sur David, duquel les Juifs attendaient le Christ. En disant « ne crains pas », il lui a révélé le secret de son cœur. Joseph craignait, en effet, en gardant chez lui la Mère de Dieu, de transgresser la Loi de Dieu. « Prendre avec toi » : l’avoir près de toi, la reprendre ; car en effet, en son âme il l’avait déjà répudiée. La prendre non pour la "connaître", mais pour la protéger. « Ta femme » a dit l’Ange, révélant par ces mots qu’elle n’avait eu de relations avec aucun homme.

XXI

« CE QUI EST ENGENDRE EN ELLE EST DU SAINT ESPRIT… » (Matthieu 1, 21).

Ce qui est formé en elle. Il a dit engendré pour nous apprendre qu’il ne s’est pas formé peu à peu, selon la loi biologique, mais qu’il a été achevé dès les premiers instants. Admire comment tout d’abord il lui rappelle l’attente de David, puis lui révèle la crainte de son cœur, son dessein, pour lui dire enfin qu’elle est vraiment son épouse ; il passe ensuite à l’essentiel en lui révélant que cela vient du Saint Esprit, afin que tout soit admis.

XXII

« ELLE ENFANTERA UN FILS, ET TU LUI DONNERAS LE NOM DE JESUS ; C’EST LUI QUI SAUVERA SON PEUPLE DE SES PECHES ». (Matthieu 1, 21).

Tu l’appelleras Jésus, en tant que père selon la Loi et non selon la nature. Tu seras pour lui un père, bien qu’il ne soit pas ton fils. Son nom, je te l’ai apporté du ciel. Tu le lui imposeras. Le nom de Jésus signifie Sauveurx. C’est très justement qu’il le portera.

C’est lui qui sauvera son peuple de ses ennemis visibles et, ce qui est plus grandiose, de ses péchés, chose qu’aucun homme n’a pu faire. Que l’on sache que par ce signe encore, Celui qui naît, est Dieu. « Son peuple » dit encore l’Ange. A première vue, il voit le peuple juif, dans lequel il naît, puis tous ceux qui croiront en Lui et le recevrons comme leur roi.

XXIII

« TOUT CELA ARRIVA AFIN QUE S’ACCOMPLIT CE QUE LE SEIGNEUR
AVAIT ANNONCE PAR LE PROPHETE… » (Matthieu 1, 22).

Et c’est encore l’Ange qui dit cela. Et cette chose si grande, c’est la Vierge ensemencée par le Saint Esprit. Puis il ajoute le témoignage du prophète Isaïe, qui au fond n’est pas de lui mais de Dieu : ce que le Seigneur avait annoncé par le prophète :

XXIV

« LA VIERGE CONCEVRA… » (Isaïe 7, 14).

Ici, les Juifs agissent bien mal quand ils soutiennent quelques exégètes qui écrivent : « Voici la jeune fille… » Nous leur répondons que par dessus tout, seuls les "Septante" sont dignes de foixi, non seulement par leur nombre, par leur accord, mais aussi pour l’époque. Les Septante ont traduit plus de deux cents ans avant la venue du Christ. Ils sont donc hors de tout soupçon. Tandis que ceux qui ont traduit la prophétie après la venue du Christ, dans leur haine du Seigneur, ont obscurci la vérité. D’autres encore ont traduit par le nom de « Jeune Fille ». L’Ecriture donne souvent cette appellation à la virginité. Quand elle parle de la jeune fille outragée, elle dit : « Si la jeune fiancée a crié… » : elle entend la vierge (Deutéronome 22, 27). Mais si, comme ils le veulent, la « jeune fille » est une jeune femme mariée, quoi de paradoxal que la jeune femme mariée se trouve enceinte et mette au monde un enfant ?
Le prophète a dit tout d’abord : « C’est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe, (Isaïe 7, 14) : VOICI QUE LA VIERGE A CONÇU… » Un signe est une chose surnaturelle et non ordinaire.

XXV

« ELLE ENFANTERA UN FILS ; ET ON LUI DONNERA LE NOM D’EMMANUEL.
Ce qui signifie DIEU AVEC NOUS… » (Isaïe 1, 23).

Quels sont ceux qui lui donneront ce nom ? Tous ceux qui croiront en Lui. Mais personne ne l’a appelé Emmanuel. Personne, il est vrai, et tous, en réalité. Tous ceux qui croient que Celui qui leur a parlé est Dieu, confessent ensemble que « Dieu est avec nous » c’est-à-dire parmi nous comme Homme. Tel est le sens d’Emmanuel…

XXVI

« JOSEPH S’ETANT REVEILLE FIT…
ET PRIT SA FEMME AVEC LUI » (Isaïe 1, 24).

Pourquoi a-t-il facilement cru à un songe dans une affaire si importante ? - C’est parce que l’Ange lui a révélé sa pensée secrète. Il a compris que l’ange était envoyé par Dieu, car Dieu seul connaît nos pensées secrètes. Après avoir entendu la prophétie d’Isaïe, sa foi ne fut que plus ferme.

XXVII

MAIS IL NE LA CONNUT POINT
JUSQU’A CE QU’ELLE EUT ENFANTE SON FILS PREMIER-NE. (Matthieu 1, 25).

Ici l’Evangéliste a utilisé le mot « JUSQU'A », non pour que l’on sous-entende qu’après tout cela, Joseph aurait eu des rapports sexuels avec la Vierge, mais parce que les Juifs racontaient que le Christ était né d’une union illicite.

Pour réfuter cette accusation blasphématoire, l’Evangéliste nous informe de l’espace de temps qui va jusqu’à la naissance et laisse penser le reste, c’est-à-dire, comment Joseph aurait pu désirer celle qui avait conçu du Saint Esprit, qui était devenue un vase de grand prix ?

Pour parler des rapports charnels, il se sert de l’euphémisme « connaître ». Il est, propre à l’Ecriture de ne pas utiliser le mot « Jusqu’à » pour exprimer un temps déterminé. Dans l’histoire de l’Arche de Noé, par exemple, le corbeau ne revint « JUSQU’A » ce que la terre fût sèche, et on sait qu’il ne revint jamais. Ailleurs, la même Ecriture : « Assieds-toi à ma droite, JUSQU’A ce que je fasse de tes ennemis ton marchepied ».

Il est certain qu’après la défaite de ses ennemis, le Christ demeure et demeurera à la droite de Dieu. On trouve beaucoup de ces expressions-là dans de nombreux endroits de l’Ecriture.
L’Evangéliste appelle premier-né, non seulement l’aîné des frères, mais le premier, l’unique. Le mot « premier », l’Ecriture l’emploie dans le sens de UNIQUE : « Moi je suis Dieu premier, et après moi il n’y en a pas d’autre ».

XXVIII

Dans la Sainte Ecriture, le mot premier-né possède quatre sens. Tout d’abord, il signifie celui qui est né le premier de ses frères, comme Ruben est appelé premier-né des fils de Jacob. Puis, il signifie, le premier, l’unique comme c’est le cas ici. Il a aussi le sens d’exceptionnel, de précieux, comme dans la phrase « l’Eglise des premiers-nés inscrits dans les cieux » (Hébreux 12, 23). Enfin, il signifie Celui qui pré-existe à tout, comme dans la phrase : « Premier-né de toute la création », c’est-à-dire qui est avant toutes les créatures (Colossiens 1, 15).

OOO

ET IL LUI DONNA LE NOM DE JESUS, Joseph l’appela ainsi, suivant les instructions de l’Ange.

"Venez fidèles, allons voir où naît le Christ,
Suivons l’Etoile qui conduit les Mages,
Les Rois de l’Orient,
Là où les pasteurs qui veillent dans les champs
Font retentir ce cantique :
Gloire dans les hauteurs,
A Celui qui naît de la Vierge Mère de Dieu,
Dans la grotte à Bethléem de Judée".

Ier Cathisme des Matines de Noël.

"Je contemple un mystère étrange et paradoxal.
La caverne est devenue un ciel,
la Vierge un trône chérubique,
la crèche un lieu où est couché l’Incontenable,
le Christ notre Dieu, Chantons-Le et magnifions-Le.

Hirmos de l’Ode IX du Canon des Matines de Noël.

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